En 1977, il ordonne une invasion de l'Éthiopie dans le but d'annexer la région de l'Ogaden comme partie d'un projet depansomalisme. Sa relation avec l'URSS se détériore en raison du soutien de Moscou à l'Éthiopie au cours de la guerre, et il s'allie alors avec lesÉtats-Unis. La défaite de la Somalie dans laguerre de l'Ogaden en 1978 provoque une série de rébellions dont laguerre d'indépendance du Somaliland(en) en 1981. Au cours des années 1980, son régime connaît un déclin économique qui contribue à une montée en puissance de l'opposition et de la tribalisation du pays. Simultanément, son régime devient de plus en plus dictatorial, adoptant des mesures répressives en réponse aux rébellions notamment legénocide des Isaaq. Il est renversé par larévolution somalienne en 1991 et s'enfuit en exil auKenya puis auNigeria, où il meurt quatre ans plus tard.
Siyaad Barre est issu d'un clan de pasteursDarod de la tribu Marehan[1], qui vivent près de la frontière de l'Ogaden. C'est un berger orphelin et sans parcours scolaire lorsqu'il devient auxiliaire des forces de la police coloniale italienne dans lesannées 1930. Devenu sous-officier, il étudie à l'Académie militaire italienne. Sa participation aux combats durant laSeconde Guerre mondiale, aux côtés des forces italiennes, est probable. En 1941, il rejoint le corps de gendarmerie mis en place par les Britanniques, qui ont pris le territoire. Il est le premier Somalien nommé à la tête d'une brigade de gendarmerie, et devient de ce fait un notable important[2],[3]. En 1950, Siyad Barre est inspecteur-chef dans la police. En 1949, l'Organisation des Nations unies confie à l’Italie un mandat de dix ans sur le pays pour préparer l'indépendance. Siyaad Barre fait partie des premiers Somaliens envoyés en formation en 1954-55 à l'Académie des carabiniers àFlorence[3]. À l'indépendance, en 1960, il est nommé vice-commandant de l'armée.
En1969, l'assassinat du présidentAbdirashid Ali Shermarke déstabilise la Somalie qui se retrouve au bord de la guerre civile. Mais lecoup d'État mené par Siad Barre en compagnie de jeunes officiers évite au pays de plonger dans le chaos. Sous sa direction, la junte militaire promulgue le « socialisme scientifique » comme objectif à la Somalie[4]. Il instaure la Deuxième République, décrète l'égalité des citoyens devant la loi en imposant notamment à une société traditionnelle l'égalité des sexes. Il instaure la gratuité des soins et de l'éducation, ce qui encourage plusieurs centaines de milliers de nomades à s'installer dans les villes et notamment à Mogadiscio.Nationaliste, il développe unculte de la personnalité et appuie les minorités nationales de l'extérieur (Kenya,Ogaden,Djibouti)[4],[5],[6].
Le général Maxamed Siyaad Barre le 5 septembre 1978.
Durant laguerre froide, l'URSS et lesÉtats-Unis s'intéressent à la Somalie pour son positionnement géographique stratégique, à l'entrée de lamer Rouge. Le gouvernement de Siad Barre reçoit tout d'abord le soutien de l'URSS, qui livre d'importantes quantités d'armes à la Somalie depuis le début des années 1960, et qui peut en échange obtenir des bases militaires, même si l'alliance entre les deux pays s'avère difficile. En effet, Siad Barre, en dépit de sa réelle admiration pour le système soviétique, souhaite garder son indépendance vis-à-vis de l'URSS. Conscient de l'importance de son pays pour le dispositif soviétique en mer Rouge, il demande toujours plus d'aide au gouvernement soviétique, et garde en parallèle des relations cordiales avec l'Arabie saoudite et la Chine. Par ailleurs, l'irrédentisme somali radical de Siad Barre qui revendique la région éthiopienne de l'Ogaden peuplée majoritairement par des Somalis, indispose les Soviétiques, qui craignent de s'attirer les foudres des autres pays de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), qui ont fixé le principe d'intangibilité des frontières[7].
Larévolution éthiopienne de 1974, qui voit l'avènement d'un gouvernement plus favorable à l'URSS, rebat les cartes. Il perd définitivement le soutien soviétique en 1977, à la suite destentatives somaliennes d'annexion de l'Ogaden, une région de l'Éthiopie peuplée par des Somalis qui est également soutenue par les Soviétiques. Siad Barre renvoie alors les conseillers soviétiques, rompt le traité d'amitié avec l'URSS, et se tourne vers l'Ouest. Les États-Unis entrent alors en scène et deviennent, jusqu'en1989, un soutien de poids au régime, en versant environ 100 millions deUSD par an en aide économique et militaire.
À la fin desannées 1980, dans le Nord du pays, leSomali National Movement (SNM) du clanIsaaq, armé et entraîné par l'Éthiopie, s'oppose à Siad Barre et gagne rapidement du terrain. Une répression est menée par l'armée régulière sur les civils, faisant cinquante à soixante mille tués entre 1988 et 1990[8], ce qui en fait un des conflits les plus meurtriers sur le continent. Siad Barre est finalement destitué le. LeSAIMR, une organisation parapublique de mercenairesanti-communistes et desuprématistes blancs, développée enAfrique du Sud durant l'apartheid, a orchestré le renversement du président Siad Barre[9], pourtant censé être protégé par les mercenaires sud-africains[10]. Depuis, le SAIMR s’est taillé un fief en Somalie[9]. Le régime de l'apartheid souhaitait utiliser la Somalie comme une plaque tournante pour letrafic d'armes auMoyen-Orient[11].
Ali Mahdi Muhammad succède à Siad Barre jusqu'en, sans jamais réussir à s'imposer politiquement et militairement sur l'ensemble du territoire. Après avoir quitté Mogadiscio enjanvier 1991, Siad Barre reste dans le sud-ouest du pays, région contrôlée par son gendreMohamed Said Hersi(en). Il essaie par deux fois de reprendre le pouvoir à Mogadiscio, mais, en, il est mis en déroute par l'armée du généralMohamed Farrah Aidid et est contraint à l'exil. Il part pourNairobi, mais, au bout de deux semaines, devant la levée de boucliers de groupes d'opposition ayant le soutien du gouvernement kényan, il s'installe finalement auNigeria. L'Italie refusera de lui porter asile. Il meurt le àLagos d'un infarctus du myocarde. Ses restes sont inhumés dans sa ville natale en Somalie.
↑Nadine Puechguirbal,Le genre entre guerre et paix : conflits armés, processus de paix et bouleversement des rapports sociaux de sexe : étude comparative de trois situations en Érythrée, en Somalie et au Rwanda,Éditions Dalloz,.