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| Nom de naissance | Julien Michel Leiris |
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| Activité | écrivain, poète, ethnologue |
| Fratrie | Pierre Leiris(d) |
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| Parentèle | Xavier Vilató (petit-neveu) |
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| Genre artistique | autobiographie, essai, poésie, critique d'art |
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Michel Leiris, de son nom complet Julien Michel Leiris, né le àParis16e et mort le à 89 ans àSaint-Hilaire dans l'Essonne[2], est unécrivain,poète,ethnologue etcritique d'artfrançais.
Michel Leiris est né le au sein d'une famille bourgeoise cultivée habitant au 41,rue d'Auteuil dans le16e arrondissement deParis. Sa famille le pousse contre son gré à faire des études de chimie alors qu'il est attiré par l'art et l'écriture. Il fréquente les milieux artistiques après 1918, notamment lessurréalistes jusqu'en 1929. Il se lie d'amitié avecMax Jacob,André Masson,Picasso, etc. Son œuvre a marqué les recherches ethnographiques et ethnologiques.
En 1935, dansL'Âge d'homme, voici comme il se décrit :
« Je viens d’avoir trente-quatre ans, la moitié de la vie. Au physique, je suis de taille moyenne, plutôt petit. J’ai des cheveux châtains coupés court afin d’éviter qu’ils ondulent, par crainte aussi que ne se développe une calvitie menaçante. Autant que je puisse en juger, les traits caractéristiques de ma physionomie sont : une nuque très droite, tombant verticalement comme une muraille ou une falaise, marque classique (si l'on en croit les astrologues) des personnes nées sous le signe du Taureau ; un front développé, plutôt bossué, aux veines temporales exagérément noueuses et saillantes. […] Mes yeux sont bruns, avec le bord des paupières habituellement enflammé ; mon teint est coloré ; j'ai honte d'une fâcheuse tendance aux rougeurs et à la peau luisante […]. »
— Je viens d'avoir trente-quatre ans, 1in Michel Leiris,L'Âge d'homme, Gallimard, 1939.
Son grand-père paternel, Jacques Eugène Leiris (1819-1893), employé de commerce, a pris part auxjournées de juin 1848[3].
Sa mère, Marie-Madeleine née Caubet (1865-1956), catholique fervente, a fréquenté laSorbonne, parlait couramment l’anglais, mais n’exerça aucune fonction rémunérée.
Eugène Leiris (1855-1921), son père, travaille dès l’âge de quatorze ans. Il est agent de change d’Eugène Roussel (1833-1894) puis de son successeur Jacques Sargenton, caissier des titres de ce dernier, puis son fondé de pouvoirs. Établi à son compte vers 1910, il devient l’homme d’affaires deRaymond Roussel (fils d’Eugène Roussel et écrivain à qui Leiris voue une immense admiration). Eugène Leiris décède, le, des suites d’une opération de la prostate.Max Jacob, retiré, fin, au couvent des bénédictins de Saint-Benoît-sur-Loire, adresse, le, ses condoléances à Michel Leiris. C'est la première des lettres qu’il lui adresse (deux par mois) au cours des deux années qui suivent. Les soixante-six lettres, dont cinquante-deux de à, conservées par Leiris ont été publiées[4].
Eugène et Marie Leiris qui ont perdu une fille, Madeleine, élèvent quatre enfants : trois fils, Jacques (1896-1982), Pierre (1897-1975), dont les deux fils, François et Henri, décèdent au combat en, Michel et leur nièce Juliette (1888-1992), marraine de Michel. Elle est, pour lui, une sœur aînée, une seconde mère mais aussi, grâce à son excellente mémoire, celle qui lui permet de vérifier l’exactitude de ses souvenirs d’enfance. Juliette épouse le Gustave Jannet (1883-1935). Le couple vient habiter Paris, près de chez les Leiris, Michel peut ainsi continuer à voir sa sœur tous les jours.
Il épouse en 1926 Louise Godon (1902-1988)[2] surnomméeZette, fille « naturelle » de Lucie Godon (1882-1945) qui la fait passer pour sa sœur[5]. Lucie a encore trois sœurs, Jeanne (1886-1973), Berthe (1893-1984) qui se marie en 1925 avec le peintreÉlie Lascaux, et Germaine (1896-1918).Daniel-Henry Kahnweiler vit avec Lucie Godon depuis 1904 et l'épouse en 1919. Michel Leiris devient ainsi le beau-fils du puissant marchand de tableaux, s'occupant notamment dePicasso, ami deMax Jacob,Georges Braque,Juan Gris, et théoricien du cubisme[6]. Chez les Kahnweiler, on rencontre régulièrementAndré Masson et ses amis, le critique d’artMaurice Raynal (1884-1954),Élie Lascaux,Suzanne Roger et son mariAndré Beaudin, le sculpteurJacques Lipchitz, le musicienErik Satie, le dramaturgeArmand Salacrou et sa femme Lucienne, des écrivains et poètesAntonin Artaud,Charles-Albert Cingria (1883-1954),André Malraux et sa femme Clara.
Les parents de Michel Leiris s’installent, en 1904, au 8rue Michel-Ange dans un quartier d’Auteuil. De 1906 à 1909, Michel fréquente, jusqu’à la classe de neuvième incluse, l’école privée mixte de la rue Michel-Ange.
Au mois d’, il entre au coursKayser-Charavay, avenue Montespan, pour une année scolaire. En, il est en classe de septième, et l’année suivante en sixième, au cours Daguesseau, dirigée par l’abbé Llobet,rue Boileau.
Puis, en, il intègre lelycée Janson-de-Sailly pour y suivre les cours de cinquième. En, Michel termine sa quatrième avec le deuxième prix de français et le premier prix de récitation. En, il obtient, à la fin de sa classe de seconde, les premiers prix de composition française et d’exercices latins, mais, pour raison disciplinaire, il doit quitter le lycée Janson-de-Sailly. Sa famille le protège des nouvelles concernant laPremière Guerre mondiale.
Au mois d’, il entre à l’école Vidal de larue de Passy, pour y suivre la classe de première. Michel obtient en, la première partie du baccalauréat latin-langues, avec l’indulgence du jury. Il retourne, en, au cours Kayser-Charavay pour suivre sa classe de philosophie. Il échoue, en, à la deuxième partie du baccalauréat. L’été 1918, les Leiris s’installent au 2rue Mignet dans le 16e arrondissement de Paris. Michel suit des cours de philosophie dans une école privée, l'« école Descartes ». Il repasse, le, la deuxième partie du baccalauréat (philosophie) qu’il obtient « tant bien que mal » d'après ses dires. Il découvre le jazz, le whisky, les boîtes de Montmartre et des chanteuses noires américaines, commeBricktop, venues s'installer à Paris après la guerre.
En 1919, Michel Leiris, menant une vie de « bâton de chaise », essaie d'avoir un emploi stable. Après deux tentatives comme employé de commerce aux magasins Peter Robinson et chez le commissionnaire Max Rosambert, il abandonne très rapidement. Il débute en août une liaison de quatre ans avec celle qu'il appelle Daisy S. dans sonJournal et, vingt ans plus tard, « Kay » dansL'Âge d'homme.
Durant l’automne 1920, il prépare l’examen d’entrée à l’Institut de chimie. En février 1921 il fait la connaissance deMax Jacob,Maurice Ravel,Erik Satie,Georges Henri Rivière. Le, Michel Leiris commence son service militaire aufort d'Aubervilliers, puis à l’Institut Pasteur, où il termine ses deux ans de conscription. En 1922, il rencontre au printempsAntonin Artaud chez Max Jacob et, en octobre, se lie d'amitié avec le peintreAndré Masson. Il devient alors l'un des piliers du groupe de larue Blomet avec Masson,Georges Limbour, Artaud etRoland Tual[7].
Il habite encore chez sa mère,rue Mignet, dans le16e arrondissement de Paris, et prépare, seulement pour la forme, un certificat de chimie. Le, libéré du service militaire, il met fin à ses études de chimie. Il dira lui-même :« J’obéis à ma vocation — et renonçant aux vagues études que j’avais poursuivies jusqu’alors — je quittai le laboratoire où j’avais fini mon service […], décidé à consacrer toute mon activité à la littérature. » En mars 1924, il rencontreMarcel Jouhandeau, naît une amitié tourmentée qui prend fin en 1936[8].
Au mois d’, Michel Leiris est représentant en librairie, métier qui l’ennuie, mais lui laisse le temps d’écrire. Il adhère au syndicatCGT des V.R.P. (voyageurs représentants placiers).Marxiste, il est néanmoins sensible aux critiques deSouvarine à l'endroit du Parti communiste soviétique.
À vingt-huit ans, il obtient son premier emploi stable ; le, il entre àDocuments, revue fondée en 1929, parGeorges Bataille,Georges Henri Rivière,Carl Einstein et financée par le marchand d’artGeorges Wildenstein, comme secrétaire de rédaction, succédant au poète et romancier,Georges Limbour, et précédant l'ethnologue,Marcel Griaule, à son retour d’Éthiopie. Une rencontre décisive pour sa carrière d’ethnographe.
De 1929 à 1935, il suit unepsychanalyse sous la conduite d'Adrien Borel. Il ressent le besoin, pour la parachever, ou en constater l'échec, d'écrire uneautobiographie :L'Âge d'Homme. Cette première œuvre est ensuite prolongée par les quatre tomes deLa Règle du Jeu, rédigés de 1948 à 1976.
Avec l’appui deGeorges Henri Rivière, sous-directeur dumusée d'Ethnographie du Trocadéro depuis 1929, Leiris est officiellement recruté, en, par Marcel Griaule en tant qu’homme de lettres et étudiant en ethnologie faisant fonction de secrétaire archiviste de la Mission ethnographique, la « Mission Dakar-Djibouti ». Bien qu'il n'ait pas de formation d'ethnologue, l'intérêt qu'il a montré au cours de sa collaboration à la revueDocuments pour les relations entre les sciences sociales et le marxisme lui vaut d'avoir été choisi pour cette expédition, une place dans celle-ci restant disponible,Luis Buñuel ayant refusé le mandat qui lui avait été offert d'y participer comme cameraman chargé de documenter la mission[9]. Michel Leiris tient le journal de bord de cette mission, mais qui est surtout son propre journal de route, publié sous le titre deL'Afrique fantôme, dont la tonalité est de plus en plus personnelle et intime.

La mission comprend, en 1931, six personnes :Marcel Griaule (chef de la mission), Marcel Larget, un naturaliste, chargé de l’intendance et second de la mission, Leiris,Éric Lutten (enquêtes sur les technologies et prises de vue cinématographiques),Jean Mouchet (études linguistiques) et Jean Moufle (enquêtes ethnographiques). Plus tard,André Schaeffner (musicologue), Abel Faivre (géographe et naturaliste),Deborah Lifchitz (1907-1943), linguiste, etGaston-Louis Roux, recruté sur la recommandation de Leiris comme « peintre officiel de la Mission » chargé d’étudier et collecter des peintures éthiopiennes anciennes et d’en exécuter des copies. À ces personnes, il est essentiel d'ajouter Abba Jérôme Gabra Mussié, un grand lettré éthiopien qui sera à la fois l'interprète et l'informateur principal de Leiris àGondar.
De retour à Paris, Leiris a du mal à se réadapter à la vie parisienne. Il habite encore — avec sa femme — chez sa mère,rue Wilhem.
Il se met à étudier l'ethnologie en suivant les cours deMarcel Mauss à l'Institut d'ethnologie, puis prend la responsabilité du Département d'Afrique noire du musée d'Ethnographie du Trocadéro (ancêtre dumusée de l'Homme).
Il fait un trait, commePaul Nizan (dansAden Arabie), sur le voyage comme mode d'évasion, en signantL'Afrique fantôme : monumental journal de voyage dans lequel il détourne les techniques d'enquête et de retranscription ethnographiques pour les appliquer à la description du quotidien et des conditions de travail de l'équipe de chercheurs. La publication de ce texte dans la collection « Les documents bleus » chezGallimard en 1934 provoque la rupture avecMarcel Griaule qui craint que la révélation des méthodes brutales utilisées pour la collecte de certains objets sacrés ne porte atteinte à la réputation des ethnographes[10].
Leiris se donne comme mission d'obtenir les diplômes qui légitimeront ses activités. Son mémoire sur la langue secrète desDogons présenté à l’École pratique des hautes études en sciences religieuses mais ajourné parLouis Massignon qui lui reproche de procéder par« explosions successives de pensée » et non par enchaînements discursifs, est soutenu en. Entretemps, en, Leiris commence à suivre les cours sur les religions primitives deMaurice Leenhardt à l’EPHE et, à partir du mois de novembre, prépare une licence de lettres à laSorbonne.
En 1936, il obtient un certificat d’histoire des religions (option religions primitives), mention bien, et le de la même année, un certificat de sociologie. En, il décroche un certificat d’ethnologie (options linguistique et Afrique Noire), mention bien, et le 21 d’octobre le diplôme d’amharique de l’École nationale des langues orientales vivantes, mention bien. De 1937 à 1939, il participe aux travaux du Collège de Sociologie, fondé parGeorges Bataille etRoger Caillois, qui, entre autres, s'emploie à « appliquer » les thèses sur le sacré deMarcel Mauss et deRobert Hertz aux faits sociaux et politiques contemporains[11].

Au printemps de l’année 1938, désormais licencié ès lettres, Leiris est nommé directeur de service au Laboratoire d’ethnologie duMuséum national d'histoire naturelle (c'est-à-dire aumusée de l'Homme), puis il entre comme chercheur auCentre national de la recherche scientifique (CNRS) tout en demeurant affecté au musée de L'Homme. Il en reste salarié jusqu’à sa retraite, en 1971.
Au mois d’, le linguisteBoris Vildé (1908-1942), l’anthropologueAnatole Lewitsky (1901-1942) et la bibliothécaireYvonne Oddon (1902-1982) créent le « secteur Vildé » du réseau de résistance ditGroupe du musée de l'Homme.
Leiris entretient des rapports cordiaux avec le groupe, sans en faire partie, notamment pour préserver la sécurité et les intérêts deKahnweiler – qui, comme juif, a dû quitter Paris et se réfugier dans le sud-ouest de la France – et de la galerie Simon (devenue galerie Louise Leiris en 1941[12]), mais Michel Leiris et son épouse abritent, sans aucune réserve,Deborah Lifchitz, juive d’origine polonaise, dans leur appartement de larue Eugène-Poubelle. Cette collaboratrice de la Mission Dakar-Djibouti, amie et collègue deDenise Paulme au musée de L'Homme, meurt à Auschwitz après son arrestation par la police française, le. Leiris dédiera à sa mémoireLa Langue secrète des Dogons de Sanga au moment de sa publication en 1948.
Durant la fin de la guerre, il organisera également dans son appartement le la lecture de la première pièce de théâtre dePicasso,Le Désir attrapé par la queue, regroupant une importante partie de l'intelligensia parisienne (Sartre, Beauvoir, Lacan, Reverdy…) sous la direction d'Albert Camus[13].
C'est au cours de ces années de guerre que prend formeLa Règle du jeu, une vaste et méticuleuse entreprise autobiographique. Considéré comme l'un des plus grands prosateurs duXXe siècle (Georges Perec, Walter Benjamin,Claude Lévi-Strauss)[14], Leiris renouvelle totalement ce genre littéraire, le dégageant de la chronologie, disloquant celle-ci, et procédant par associations d'images, de mots et d'idées, et paranalepses. En même temps qu'un travail de et sur la mémoire, c'est à une mise en abîme de l'écriture qu'il se livre alors : s'écrire, se décrire, se vivre en écrivant[15], une construction littéraire qui est aussi une conduite de vie dont le pivot est une unique « règle du jeu » morale et esthétique fondée sur le sacrifice de l'auteur et finalisée à la création « alchemique » d'un homme nouveau, d'un nouveau lien communautaire. De 1948 à 1976, quatre tomes sont publiés :Biffures[16],Fourbis,Fibrilles,Frêle Bruit où, à l'image des longues phrases à périodes et parenthèses qui les parsèment, se lit une sorte de mise en boucle de soi — de soi et de son rapport au monde, aux autres, au langage — qui n'est pas sans évoquer lesEssais de Montaigne[17].

En octobre1942, Leiris rencontreSartre auHavre. Les deux écrivains se sont auparavant mutuellement lus et appréciés, Leiris subjugué parLa Nausée et Sartre impressionné parL'Âge d'homme.
Cette rencontre sera décisive pour la pensée et l'écriture de Leiris, au point qu'il réalisera une longue préface àL'Âge d'homme (« De la littérature considérée comme une tauromachie »), marquée par la thématique sartrienne de la « littérature engagée ». Après la Libération, il devient membre de l'équipe fondatrice de la revueLes Temps modernes dirigée par Sartre. Il participe également, avecAlioune Diop,Aimé Césaire dont il devient l'ami, etGeorges Balandier, à la fondation de la revuePrésence africaine en 1945. Il écrit également des nouvelles et de nombreux poèmes.
Parallèlement, devenu ethnologue, et, à partir de 1943, chercheur du CNRS aumusée de l'Homme, il exercera une grande influence sur une nouvelle génération d'ethnologues commeGeorges Condominas,Georges Balandier,Paul Mercier ouGilbert Rouget.
En1948, il apporte son soutien ausionisme et auGroupe Stern, qui « combatl’impérialismeanglais, non seulement en tant qu’ennemi dupeuple juif, mais aussi en tant qu’oppresseur dupeuple arabe. »[18]
ABordeaux en1951, il est invité au procès des16 de Basse-Pointe, coupeurs de canne martiniquais accusés du meurtre de leur administrateurbéké. Il confie alors à la barre que c’est à laMartinique qu’il a vu« le spectacle de misère le plus effroyable de [son] existence »[19]. Le procès se conclut par l'acquittement de tous les accusés.
En1957, il est nomméSatrape duCollège de 'Pataphysique, et publie de nombreux textes dans larevue du Collège.
À la suite d'un voyage en Chine encouragé par l'Association des amitiés franco-chinoises avec Jean-Paul Sartre, au lieu de publier l'attendu carnet enthousiaste sur son séjour dans le pays communiste, il tente en 1957 de se suicider, ce qu'il relatera dans le troisième tome deLa Règle du jeu,Fibrilles.
En 1960, Michel Leiris participe à la fondation et à la direction desCahiers d'études africaines publiés par l’École pratique des hautes études (VIe section).
En juillet de la même année, prenant position contre lecolonialisme, il est notamment un des premiers signataires duManifeste des 121 - Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie, et également membre duMouvement de la paix, publié en septembre dans différents périodiques, qui furent saisis ; vingt-neuf des signataires, dont Leiris, furent inculpés de provocation à l’insoumission et à la désertion.
Le, année de l’accession à l’indépendance des colonies françaises d’Afrique noire et de Madagascar, une commission paritaire du CNRS se réunit en conseil de discipline pour examiner le cas des chercheurs signataires du « Manifeste des 121 ». Pour se défendre, Leiris affirme que sa vocation d’ethnologue le pousse à défendre les peuples qu’il étudie et dont il est« l’avocat désigné, celui qui plus que quiconque doit s’attacher à faire admettre leurs droits, sans excepter le droit de lutter à leur tour pour se constituer en nation. » Le, un blâme lui est infligé.
En, quelques mois après la sanction concernant la signature du « Manifeste des 121 », il est promu maître de recherche au CNRS.
Jean Rouch conseille à Leiris en 1967 de postuler au grade de directeur de recherche au CNRS (ce qui lui prolonge de trois ans sa carrière). Il est nommé directeur de recherche en.
Il préside avecSimone de Beauvoir, l’association des amis du journal maoïsteLa Cause du peuple. Il s’associe au mouvement demai 1968.
En 1968, il rejointAndré du Bouchet,Yves Bonnefoy,Paul Celan,Jacques Dupin etLouis-René des Forêts au comité de rédaction de la revueL'Éphémère, jusqu'au dernier numéro en 1972.
AvecRobert Jaulin etJean Malaurie, il assure durant l'année 1969 la critique des théories d’ethnologie dans le cadre de l’enseignement « critique » et « polémique » donné à la Sorbonne, parallèlement aux cours officiels d’ethnologie.
Il laisse, en plus de son œuvre autobiographique, d'importantes études de critique esthétique et d'ethnologie. Il a notamment travaillé sur la croyance en la possession — le culte des génies « zar » — dans le nord de l'Éthiopie, l'analysant dans une perspective proche du thème sartrien de la mauvaise foi existentielle et des travaux d'Alfred Métraux, dont il était un ami proche[20], sur le cultevaudou en Haïti.
En matière de critique d'art, Leiris est l’un des observateurs les plus aigus de son temps, et il s'est principalement intéressé à la peinture moderne figurative, consacrant des articles et des essais aux grands peintres « réalistes » duXXe siècle :Pablo Picasso,Wifredo Lam,André Masson,Alberto Giacometti ouFrancis Bacon (dont on peut considérer qu’il fut le « découvreur »), avec qui il partagera une amitié dès 1966.
En 1980, Leiris refuse leGrand prix national des Lettres.

En, Michel et Louise Leiris font don au musée national d'art moderne (Centre Pompidou-Paris) de leur collection de peintures et sculptures, plus de deux cent-cinquante œuvres (de Picasso, Bacon, Giacometti, Braque, Ernst, Gris, Masson, Klee, Miró, Vlaminck, Derain, etc.)[21].
Quelques mois plus tôt, son bureau au musée de l’Homme lui est supprimé[22], une mesure rapportée fin septembre par l’assemblée des professeurs du Muséum national d'histoire naturelle, après les protestations et pétitions du personnel du musée.
AvecJean Jamin, Leiris a fondé en 1986 au musée de l'Homme la revue d'histoire et d'archives de l'anthropologieGradhiva, aujourd'hui publiée par lemusée du Quai Branly, ainsi que la collection « Les cahiers de Gradhiva » publiée aux éditions Jean-Michel Place. Son dernier entretien est accordé à Bernard-Henri Lévy le[23].
Hospitalisé à l’Hôpital américain de Neuilly (du au) à la suite d'une crise cardiaque, il décède le dimanche, à9 h 15 du matin, dans sa maison de campagne àSaint-Hilaire (Essonne). Il est incinéré au crématorium ducimetière du Père-Lachaise le, et ses cendres sont placées dans le caveau (97e division) où reposent Lucie (née Godon, 1882-1945) et son mariDaniel-Henry Kahnweiler (1884-1979), Jeanne Godon (1886-1973) etZette (Louise Alexandrine) Leiris (née Godon le à Paris, fille de Lucie, morte à la clinique Hartmann de Neuilly-sur-Seine le).
Leiris a légué ses biens àAmnesty International, à laFédération internationale pour les droits humains, auMouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP). Sa bibliothèque, ses manuscrits littéraires et sa correspondance sont donnés à laBibliothèque littéraire Jacques-Doucet, tandis que ses travaux et archives ethnographiques, ses documents politiques sont déposés à la bibliothèque du Laboratoire d'anthropologie sociale du Collège de France.Jean Jamin en a été l'exécuteur testamentaire.
Bon nombre de ces œuvres ont été traduites en allemand, anglais, italien, espagnol, portugais (Brésil), polonais, roumain, russe, japonais, chinois (mandarin), serbe.
L'Âge d'homme a figuré au programme de l'agrégation de lettres en 2005.

Après la parution, sous la direction de Denis Hollier, deLa Règle du jeu en 2003 dans laBibliothèque de la Pléiade, la publication dans cette même collection et sous la même direction du deuxième volume des œuvres de Michel Leiris, comprenantL'Âge d'homme précédé de L'Afrique fantôme et de nombreux appendices, dontMiroir de la tauromachie, a été réalisée en.
Les Éditions les Cahiers, spécialisées dans l'édition de cahiers d'auteur, ont publié trois numéros desCahiers Leiris. Chaque numéro rassemble une pluralité inédite d’études, d’entretiens, de témoignages, d’hommages, de textes littéraires et de documents iconographiques. Les horizons divers de ses contributeurs offrent une lecture croisée de Michel Leiris et de son œuvre comme de leur héritage dans la réflexion et la création contemporaines.
Plusieurs périodiques français ou étrangers (Europe, Littérature, Critique, Il Verri, L'ire des vents, Le Magazine littéraire, Sub-stance, Sulfur, Modern Literay Notes, Konteksty) ont consacré des numéros spéciaux à Michel Leiris.
Une grande expositionLeiris & Co : Picasso, Miró, Masson, Giacometti, Lam, Bacon..., à l'initiative de Laurent Le Bon, placée sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Marie-Laure Bernadac et Denis Hollier, avec Jean Jamin comme conseiller scientifique, a été programmée au Centre Pompidou-Metz ; elle a eu lieu du au, et a été accompagnée d'un important catalogue de 400 pages et de 350 illustrations, dirigé par Agnès de la Beaumelle, Marie-Laure Bernadac et Denis Hollier, réunissant quarante-cinq contributeurs, et co-édité par le Centre Pompidou-Metz et les Éditions Gallimard. Après avoir connu une fréquentation sans précédent au centre Pompidou-Metz (plus de 200 000 visiteurs en cinq mois), cette exposition s'est clôturée par un colloque international consacré à la vie et l'œuvre de Leiris, organisé par Denis Hollier et Jean Jamin les (au musée du Quai Branly) et (au centre Pompidou-Metz). Les actes en ont été publiés, sous le titreLeiris unlimited, en aux Éditions du Centre national de la recherche scientifique (, Paris, CNRS Éditions).
Le nouveau musée de l'Homme lui a rendu hommage l'après-midi du dimanche, lors de manifestations consacrées au "Printemps des poètes", par des lectures de poèmes ou d'extraits de ses écrits autobiographiques, dits par Bruno Raffaelli de la Comédie française.
Max Jacob prévient Leiris en qu’il avait utilisé ses lettres pour le caractère d’un personnage d’un roman en cours (paru en),L’Homme de chair et l’homme reflet, où l’on peut lire :« Maxime [Lelong] croyait de son devoir d’être ingénieur-chimiste […]. Il se détestait, se regardait aux glaces pour se détester davantage, rageait contre ses vêtements pauvres […]. Il souffrait de tout sans se l’avouer ou en le criant trop pour qu’on le prît au sérieux. »
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