Il est aussi responsable du lancement des opérations de rapatriement en Israël des Juifs éthiopiens, lesBeta Israel, à partir de 1977. Il lance par ailleurs une politique decolonisation intensive desTerritoires palestiniens.
Né àBrest-Litovsk à une époque où la vie desJuifs y était très dynamique, Begin reçut une éducation combinant l'étude religieuse traditionnelle de laTorah et des études laïques ; il fréquenta notamment le mouvement de jeunesse juive sioniste de gaucheHashomer Hatzaïr[1]. En 1929, la famille a rejoint la nouvelle branche du mouvementBetar, créée cette année-là. Begin a rejoint après avoir entendu le chef sionisteZeev Jabotinsky parler pour la première fois au théâtre de la ville. Il conserva toute sa vie l'application des principes religieux et resta proche dujudaïsme rabbinique orthodoxe. Cela lui valut d'ailleurs le pseudonyme de « rabbi Haim Sussover » des années plus tard lorsqu'il luttait au sein de l'Irgoun contre le pouvoir britannique enPalestine. Le père de Menahem Begin était un leader de sa communauté et unsioniste convaincu, admirateur deTheodor Herzl. Les parents de Begin périrent au cours de laShoah.
Photo de Menahem Begin lors de son arrestation par leNKVD (photo retrouvée dans les archives duKGB.)
Le, Begin épousa Aliza Arnold, qu'il rencontra chez son père, un donateur du parti révisionniste, dans la ville de Drohobych en Galice, où Begin étudia le droit. Jabotinsky était témoin à son mariage[1], auquel ont assisté des centaines de membres du Betar et de connaissances. En, Begin a un fils,Benyamin Zeev Begin(en).
Le grand tournant de la vie de Begin est sa rencontre avecVladimir Jabotinsky, le fondateur dusionisme révisionniste anti-socialiste et du mouvement de jeunesseBetar. Jabotinsky l'impressionne beaucoup. Begin intègre le Betar dès sa création en1928, puis en prend la tête en1939, malgré quelques désaccords[C'est-à-dire ?] avec Jabotinsky, qui meurt le.
Quatre mois plus tard, en, l'Allemagne nazie envahit laPologne. Peu de temps avant le déclenchement de laSeconde Guerre mondiale, Begin préparait les Betarim à l'immigration enTerre d'Israël. En, il est nommé commissaire du Betar enEretz Israël [4], poste qu'il occupe pendant les six derniers mois de son service dans l'armée.
Cela marque les débuts de l'engagement politique de Begin. En1939, il s'enfuit àVilnius, ville faisant alors partie de la Pologne jusqu'à l'invasion de ce pays par l'Allemagne et son partage subséquent en 1940 entre l'Allemagne et l'URSS (en vertu dupacte Molotov-Ribbentrop dit de non-agression réciproque). Le, il est arrêté par leNKVD et détenu à laprison Lukiškės à Vilnius. Accusé d'être un agent de l'impérialisme britannique, il est alors condamné à huit ans deGoulag, puis transféré le au camp de travail dePetchora enSibérie, expériences racontées plus tard dans son autobiographie.
Durant son internement, les parents et le frère de Begin, restés à Brest, sont assassinés par les Allemands après leur occupation de la ville le. Les Allemands ont sorti sa mère de l'hôpital et l'ont assassinée. Selon Begin, les Allemands ont enlevé son père avec 500 Juifs, et les ont conduits au coude de la rivière Bog. Son père ayant apparemment compris ce qui les attendait, est allé à la tête du groupe et a chanté «Je crois en la venue du Messie» et «Espoir». Les Allemands ont ligoté les Juifs et les ont jetés dans la rivière.
Libéré par les Russes après la signature desaccords Sikorski-Maïski en, il s'engage en Union soviétique dans ce qui deviendra le2e corps polonais sous le commandement du généralWładysław Anders, qui obtient de Staline d'être évacué avec sa troupe via le Kazakhstan puis l'Iran jusqu'en Palestine, où il parvient vers juillet 1942. Begin est dit en avoir déserté en avec 3 000 autres soldats juifs, sans qu'Anders ne veuille les rechercher[2],[a].
Le, à l'âge de 30 ans, Menahem Begin devient le commandant de l'Irgoun. À partir de ce moment et jusqu'à la création de l'État d'Israël, il vit dans la clandestinité, échappant à une traque continuelle par les autorités britanniques[3].
Le 1er février 1944, Begin publie une proclamation à plusieurs milliers d’exemplaires, affichée sur les murs de Tel-Aviv, Jérusalem et Haïfa, intitulée « La Révolte », qui appelle « le peuple hébreu de Sion à tirer les leçons de l’holocauste et à lancer une guerre contre l’Angleterre, jusqu’à la fin de l’occupation. Nous exigeons que la souveraineté de la terre d’Israël soit transférée immédiatement à un gouvernement hébreu provisoire »[1].
Il s'oppose aux groupes sionistes à idéologie socialiste menés parDavid Ben Gourion, qu'il trouve trop complaisants avec la puissance coloniale britannique ; il s'en tient à la ligne dusionisme dit révisionniste fixée par Jabotinsky. Il n'a de cesse de dénoncer les mesures prises contre l'immigration juive enPalestine et de lutter pour que le gouvernement britannique retire ses troupes et tienne la promesse que constituait ladéclaration Balfour.
Pourtant, les Britanniques maintiennent des limitations strictes à l'immigration juive en Palestine afin de ménager les populations arabes. Begin en est outré et accuse les Britanniques d'appliquer des mesures pro-arabes. Il appelle aux armes, et l'Irgoun déclenche une rébellion qui vise les installations et les positions britanniques. Begin continue à échapper aux services britanniques et à l'Agence juive qui le pourchassent et à commander clandestinement une armée de milliers de combattants, jusqu'au retrait britannique en1948.
Au cours des quatre années où Begin commande l'Irgoun, l'organisation mène près de 300 opérations, parmi lesquelles l'explosion de l'hôtel King David en, dans l'aile où se trouvait leBritish Government Center, l'attaque de la prison d'Acre et la libération des prisonniers de l'Irgoun et duLehi en.
À la suite de la pendaison de membres de l'Irgoun par l'administration britannique en, après la condamnation à mort de trois autres de ses membres en, l'Irgoun enlève deux sous-officiers britanniques et annonce que la pendaison de ses hommes entraînera la pendaison des deux Britanniques. À partir de ce moment, les Britanniques décident la suspension des pendaisons de membres de l'Irgoun jusqu'à leur retrait de Palestine.
Le, Menahem Begin coordonne l'attentat contre l'hôtel King David à Jérusalem. Des membres de l'Irgoun, déguisés en Arabes, font sauter la partie de l'hôtel abritant le Secrétariat britannique, le Commandement militaire et une branche de la Division criminelle. En dépit d'un coup de téléphone prévenant de l'attaque, les Britanniques n'avaient pas fait évacuer le bâtiment. Quatre-vingt-douze personnes sont tuées, la plupart employées du Secrétariat ou de l'hôtel : 28 Britanniques, 41 Arabes, 17 Juifs et 5 non répertoriés. Dans le même temps 45 personnes sont blessées à des degrés divers.
En, lemandat britannique pour laPalestine prend fin. Il y a un débat animé parmi les historiens sur la question de savoir à quel point les opérations terroristes de la clandestinité ont été un facteur accélérant pour la fin du mandat britannique en Palestine et a mis la lutte pour l'indépendance de ce qui deviendra l’État Israël à l'ordre du jour de la politique mondiale.
Le, Begin signe un accord avec le représentant du gouvernement provisoireIsraël Galili. Cet accord entraine le démantèlement progressif de l'Irgoun et son intégration dans l'armée israélienne. L'accord stipule que les opérations de l'Irgoun sont interrompues « en tant que brigade militaire dans l'État d'Israël et sur le territoire du gouvernement d'Israël ».
Le a lieu lemassacre de Deir Yassin perpétré par une centaine de combattants de l'Irgoun et duLehi dont Begin nie l'existence dans ses mémoires[4] disant que ses « soldats avaient comme priorité de sauver les Juifs de Jérusalem. Il y a bien eu des combats pour passer par ce village, mais pas de massacre de civils. Ce sont des calomnies de laHaganah pour nous salir. Cela a rendu service à nos combattants, car cette nouvelle a fait fuir les habitants des villages suivants, mais elle a sali pour toujours l'image d'Israël » (traduit du roumain).
L'attaque du village et le massacre qui suivit, dont des exécutions dans une carrière attenante, fit plus de cent morts selon l'historien israélien Benny Morris[5].
Stèle sur la plage de Tel-Aviv commémorant les victimes de l’Altalena.
Begin avait envoyé des agents en Europe, en particulier en France, pour acheter des armes. Au printemps 1948, ils réussissent à acheter un bateau rebaptiséAltalena (nom de plume de Zéev Jabotinsky) pour transporter de nouveaux immigrants, ainsi que des armes. Le bateau transportait 900 combattants volontaires d'Europe recrutés et entraînés par l'Irgun, ainsi qu'une cargaison d'armes et de munitions offertes par la France[6], chargées dans le plus grand secret le 9 juin 1948 àSète[7], suffisantes pour équiper plusieurs milliers de combattants[8].
Mais en Israël Ben Gourion exige que toutes les armes soient remises à laHaganah et interdit le déchargement de la cargaison. Begin veut en garder 20 % pour ses troupes sur le front de Jérusalem[9], ne cède pas, ne croit pas que le chef du gouvernement provisoire puisse mettre à exécution sa menace d’ouvrir le feu[1]. Il se trompe. Plusieurs obus sont tirés sur l’Altalena et le bateau coule, Begin ne quittant le navire en flammes que le tout dernier[1]. Une partie seulement des armes fut déchargée[10], seize Juifs furent tués, une trentaine blessés[8]. Begin s'opposa à toutes représailles, disant « Jamais je ne permettrai qu’un Juif tire sur un autre Juif »[1]. Dans ses mémoires, il se dit fier d'avoir su éviter la guerre civile : « ils finiront peut-être aussi par comprendre qu'il est parfois préférable qu'un homme verse des larmes sur un acte abominable commis en Israël, plutôt que le peuple ait à en pleurer les conséquences[11] ».
La tragédie de l'Altalena reste en Israël un sujet sensible suffisant à transformer un échange courtois en débat passionné[8].Itzhak Rabin etYigal Allon étaient en charge des troupes gouvernementales lors de la bataille devant les plages de Tel Aviv.
Dans les jours qui suivent ladéclaration d'indépendance de l'État d'Israël du, Begin fait un discours diffusé par la radio pour appeler ses hommes à rendre les armes et à rejoindre laHaganah afin de constituer les nouvelles « Forces de Défense d'Israël »,Tsahal. Les Israéliens entendent alors sa voix pour la première fois. Lors de parades de ses troupes, il renouvelle son ordre de rendre les armes.
Les actions de l'Irgoun et du groupe clandestinLehi (également connu sous la dénomination de « groupe Stern ») sont dénoncées par la gauche israélienne qui les considère comme relevant d'actes terroristes. Ces deux organisations sont dissoutes en 1948 pour éviter tout risque de guerre civile, et Begin s'engage alors dans un combat politique pendant les trente années suivantes.
Begin fonde son propre parti politique, leHérout (« Liberté ») en1948, à la droite de l'échiquier politique israélien, et en marge de l'ancien parti révisionniste déclinant qui avait été fondé par Jabotinsky lui-même. Aux élections de1949, le Herout gagne 18 sièges au Parlement de laKnesset. Le parti révisionniste sans représentant à l'Assemblée est alors dissout et Begin devient ainsi l'unique leader du courant révisionniste.
De 1948 à1977, le Herout représente la principale alternative auparti travailliste dominant à la Knesset et la tension est grande entre Menahem Begin etDavid Ben Gourion. Le public est à l'époque surpris par l'apparence de Begin et ses manières qui semblent d'une autre époque. Par exemple, Begin, qui a été diplômé en Droit en Pologne, continue de préférer le costume et la cravate, là où les socialisants préfèrent des tenues informelles.
Refusant l'accord d'indemnisation des victimes de laShoah que Ben Gourion négocie avec le chancelier allemandKonrad Adenauer,Begin est accusé d'être l'un des commanditaires d'unattentat raté commis envers le chancelier (de fait, les commanditaires pensaient que le colis piégé n'atteindrait pas sa cible, mais un policier fut tué)[réf. nécessaire].
L'engagement de Begin a un écho particulier auprès des citoyens défavorisés et notamment des nouveaux immigrants d'origineséfarade, plutôt religieux dans leur ensemble, et quifuient les pays arabes. Ils sont pleins de ressentiment envers l'élite israélienneashkénaze hautaine, majoritairementathée et politiquement (très vaguement) proche du communisme soviétique.
Begin accepte de participer au gouvernement d’union nationale en 1967 et influe sur le déclenchement de la guerre des Six Jours.
Les messages anti-socialistes, anti-élitistes et empreints de signification religieuse que formule Begin attirent ainsi cette base populaire qui lui accorde systématiquement ses voix aux élections et finit par le porter au pouvoir en. Pour cela, Begin avait accepté en1973 le plan du généralAriel Sharon de former unecoalition plus large des partis de l'opposition, en s'alliant au Parti libéral, au Parti du centre et à d'autres groupes plus petits pour constituer leLikoud (« consolidation »).
Begin parvient à réaliser ce qui paraissait impensable jusque-là : remporter les élections contre le parti travailliste, ce qui était une première dans la courte histoire de l'État d'Israël. Il devient alors Premier ministre.
Le Likoud gagne les élections de 1977 et, pour former le gouvernement, s'allieMouvement démocratique pour le changement fondé un peu plus tôt par des personnalités comme le généralYigaël Yadin, le professeurAmnon Rubinstein,Shmuel Tamir etMeir Amit. Yadin jouera un rôle important lors des négociations israélo-égyptiennes. Cinq représentants du parti religieuxAgoudat Israel se joignent à cette majorité de centre-droit.Moshe Dayan, ancien ministre « travailliste » de la Défense de 1967 à 1973, devint ministre « Likoud » des Affaires étrangères.
Menahem Begin, Jimmy Carter et Anouar el-Sadate célébrant les accords de Camp David en 1978.
Les principales réalisations du mandat de Menahem Begin furent lesaccords de Camp David et letraité de paix israélo-égyptien. Il procéda au retrait israélien duSinaï, comme demandé partiellement par la controverséeRésolution 242 (1967) qui avait formulé la nécessité qu'Israël se retire « de territoires » après laguerre des Six Jours pour mettre fin auconflit israélo-arabe. Les accords de Camp David et le traité de paix avec l'Egypte permirent à Israël de se dégager de l'encerclement par trois pays arabes (Egypte, Jordanie, Syrie), mais lui donnèrent les mains libres pour accentuer l'occupation des territoires palestiniens de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem Est.
Les bases militaires du Sinaï furent réimplantées dans leNéguev, avec des aides financières et des garanties politiques desÉtats-Unis. La démolition de colonies de peuplement israéliennes dans le Sinaï, notamment la ville deYamit, suscita une opposition interne dans leLikoud qui menaça de scinder le parti.
Begin prit très au sérieux l'antisionisme deSaddam Hussein. Israël discuta avec laFrance pour ne pas fournir à l'Irak son réacteur nucléaire deOsirak. Puis en1981, Begin ordonna lebombardement et la destruction du réacteur nucléaire deTamuz par l'aviation israélienne.« À aucun prix, Israël ne permettra à un ennemi de développer des armes de destruction massive qu'il pourrait utiliser contre notre peuple » est connu comme la « doctrine Begin ». Cette opération fut dénoncée par de nombreux gouvernements étrangers dont les États-Unis par le biais d'une lettre de protestation deRonald Reagan, et la résolution 487 duConseil de sécurité des Nations unies la condamna. La gauche israélienne condamna également l'opération.
Begin est très marqué par les échecs de la campagne du Liban : le revirement puis l'assassinat deBachir Gemayel, les fortes pertes israéliennes, la mauvaise image dans l'opinion d'une guerre non nécessaire à la sécurité d'Israël, lemassacre de Sabra et Chatila. Il apprend également la mort de sa femme Aliza survenue en Israël alors qu'il est en voyage officiel à Washington. Déprimé, Begin annonce sa démission le, passe les commandes du gouvernement àYitzhak Shamir le.
Begin se retire de la vie politique et ne quitte que rarement son appartement au cours de ses dernières années, sauf pour se rendre sur la tombe de son épouse. Mort àJérusalem en1992, il est enterré sans grande cérémonie aucimetière juif du Mont des Oliviers, mais demeure la figure phare de l'histoire politique israélienne qui a ouvert la voie à plus de 34 ans deprimature tenue par la droite (Begin et Shamir 1977-1984, Shamir 1986-1992, Netanyahou 1996-1999, Sharon 2001-2006, Netanyahou 2009-2021, Bennett 2021-2022, Netanyahou 2022-2025...).
↑Anders dit « pas un seul d’entre eux ne fut arrêté par nous. Je partais du principe que, par rapport aux minorités nationales, je ne devais pas appliquer à la lettre les règlements ». Harvey Sarner (inGeneral Anders and the soldiers of the The Second Polish Corps, Cathedral City: Brunswick Press, 1997, p. iii) dit plus : que Begin fut libéré régulièrement, le document faisant de lui un déserteur n'ayant été rédigé que pour couvrir Anders aux yeux des Britanniques.
↑Général Anders,Mémoires, 1939-1946, La Jeune Parque, Paris 1948,p. 222.
↑Eytan, 2021, « la tête de Begin est mise à prix... Les services de Renseignements M6 le suivent partout : en Israël, en France et aux Etats-Unis... Une chasse à l’homme sans relâche. Elle durera plusieurs années, même après la création de l’Etat d’Israël. Dans le dossier confidentiel numéro 94 495, nous pouvons lire : Menahem Begin est un homme dangereux pour la Grande Bretagne ; un terroriste, un gangster et un espion pour le solde de l’Union Soviétique ».
(en)Biographie sur le site de lafondation Nobel (le bandeau sur la page comprend plusieurs liens relatifs à la remise du prix, dont un document rédigé par la personne lauréate — leNobel Lecture — qui détaille ses apports)