Atlas est le nom d'une divinité issue de la mythologiegrecque[2]. Selon le mythe grec, le Titan (géant)Atlas est condamné parZeus à supporter sur ses épaules lavoûte céleste :tlaô signifie en effet « porter », « supporter » engrec ancien. Les montagnes portent ainsi son nom, car c'est en ces lieux qu'il était supposé avoir réalisé son exploit, près dujardin des Hespérides, à l'extrémité occidentale du monde connu. Ce sont ces montagnes qui ont valu son nom à l'océan Atlantique[3], parce qu'il est situé au-delà de la chaîne de l'Atlas.
D'aprèsStrabon, le nom indigène de l'Atlas seraitDuris,Pline l'Ancien quant à lui rapporteDyris ouAddiris[4],[5]. Ces noms sont peut-être à rapprocher du mot « montagne » enberbère qui estadrar, dont le pluriel pourrait prendre une forme spécialederren[6] bien que celui généralement attesté soitidraren[7]. C'est la formeDeren (درن) qui est utilisée parIbn Khaldoun dans son célèbre ouvrageAl-Muqaddimah[8] lorsqu'il décrit la chaîne de montagnes de l'Atlas (à quoi il rattache comme extrémité orientale l'Aurès).
Dans le Haut-Atlas, c'est le nom de « Deren » utilisé par Ibn Khaldoun qui subsiste auprès des populations berbères locales, il y est relevé par plusieurs explorateurs européens auXIXe siècle sous des formes voisines (Deren, Dern, Drenn...). D'aprèsFoucauld,Deren serait un nom propre n'ayant pas de sens particulier. Selon J. Gatell,Adrar En-Dern (enalphabet berbère latin :Adrar n Dern) signifierait la « montagne qui parle » en référence aux clameurs mystérieuses qu'on y entendrait tous les ans durant le temps de la moisson. M. Quedenfeldt quant à lui traduitAdrar-n-Drenn par « montagne du tonnerre » ou « du fracas » en référence à un mystérieux bruit qui s'y produirait une fois par an. Ce serait, selon une tradition locale, le rugissement d'un lion gigantesque[10]. Le linguisteÉmile Laoust, qui a étudié lesChleuhs du Maroc, avance concernant ces derniers : « Les Berbères [de la région] entendent par Adrär n Deren la partie du Haut Atlas comprise entre le Tizi n Maʿsu et le Tizi n Telwät, appelé par les anciens cartographes la « Porte du Deren ». Dans le Deren se dressent les sommets les plus élevés, non seulement du massif, mais de toute l’Afrique du Nord »[11]. Il est clair qu'il s'agit du mêmeDeren évoqué par Ibn Khaldoun auXIVe siècle bien que l'aire désignée soit plus petite. Notons toutefois qu'Ibn Khaldoun utilise le motDeren (درن) et nonAdrar n Deren qui lui se traduit par « montagne de Deren ».
En prenant en considération que la terminaison-ίς est un suffixe nominal féminin engrec ancien, les formesDuris,Dyris ouAddiris rapportées par les auteurs greco-latins ont certainement pour origine un mot de la racine berbère DR commeDeren, le suffixe -n pouvant marquer le pluriel (d'où le sens possible de « montagnes »). Son évocation par Strabon dans saGeographica fait ainsi remonter l'ancrage de ce nom dans la toponymie locale jusqu'à l'Antiquité préchrétienne au moins.
Dans les dernières années, des instances officielles de l'aménagement de la langue berbère, comme l'Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) au Maroc créé par le royaume et l'État marocain, ont choisi d'employer le mot Aṭlaṣ (ennéo-tifinagh : ⴰⵟⵍⴰⵚ), pour désigner le massif de l'Atlas[12].
L'expression « les Atlas maghrébins » au pluriel est aussi parfois utilisée[13],[14],[15] du fait que l'Atlas s'étend sur un vaste territoire englobant plusieurs pays et régions.
L'Atlas s'étend sur 2 500 kilomètres de long selon un axe ouest-sud-ouest à est-nord-est, duMaroc à laTunisie en passant par le Nord de l'Algérie. Il forme une barrière entre lamer Méditerranée et leSahara.
LeMoyen Atlas est le plus septentrional des massifs atlasiques duMaroc. Il est limité au nord par le fleuveSebou, qui le sépare duRif, et au sud par laMoulouya et l'Oum Errabiaa. Il est constitué de reliefs généralement arrondis séparés par desplateaux fertiles.
Plus au sud, le Haut Atlas est le plus haut et le plus accidenté des massifs de l'Atlas. Il s'étend de la côteatlantique à lafrontière algéro-marocaine. À son extrémité sud-ouest, il plonge de façon relativement abrupte vers la plaine côtière alors que sa bordure septentrionale descend plus doucement versMarrakech. Lavallée de l'Ourika se trouve au nord du massif. Au sud, le massif est coupé au niveau deOuarzazate par la vallée duDrâa qui forme des bassins d'eau douce.
L'Anti-Atlas est le plus méridional des massifs atlasiques. Il s'agit d'un vieux massiférodé et désertique en bordure duSahara. Il se prolonge à l'est jusqu'audjebel Saghro qui forme une transition avec le Haut Atlas.
EnAlgérie, l'Atlas est formé de deux longues chaînes montagneuses, d'ouest en est, séparées par dehauts plateaux entre 900 et 1 200 mètres d'altitude et de vastesdépressions (sebkha) généralement occupées par des lacs salés (chott).
Au nord, le long de la Méditerranée, l'Atlas tellien s'étire sur 1 500 kilomètres, de la frontière marocaine où il prolonge le Moyen Atlas à lafrontière tunisienne.
Au sud, dans le prolongement du Haut Atlas, l'Atlas saharien forme un rempart à plus de 2 000 mètres d'altitude face au désert. Bien qu'arides, les montagnes sont plus fertiles que les hauts plateaux salés au nord et le Sahara au sud. Cette chaîne montagneuse est prolongée à l'est par l'Aurès, qui culmine à 2 328 mètres d'altitude audjebel Chélia, puis jusqu'enTunisie par ladorsale tunisienne.
Géologiquement, il convient de distinguer le système atlasique (Atlas au sens strict comprenant le Haut Atlas, le Moyen Atlas, l'Atlas saharien, les Aurès et l'Atlas tunisien) de l'Anti-Atlas et de l'Atlas tellien. Le système atlasique est une chaîne intra-continentale d'âgetertiaire qui est héritée d'un système derift développé à la fin duTrias et au début duJurassique c'est-à-dire en même temps que lerifting qui a donné naissance à l'Atlantique central d'une part et à laTéthys d'autre part. Il inclut deux domaines peu déformés (plateaux) : lesmesetas marocaine et oranaise. Le système atlasique est bordé au sud par une faille majeure dite « accident sud-atlasique » ; cette structure importante, que l'on peut suivre sur plus de 2 000 km d'Agadir àTunis, assure le chevauchement de l'Atlas sur le domaine saharien situé au sud. Cet accident est toujours actif actuellement, comme en témoigne, par exemple, le séisme d'Agadir en 1960. Vers le nord, le système atlasique est limité par le front des chaînes duRif (Maroc) et duTell (Algérie et Tunisie).
Des travaux récents[16] ont montré que le relief particulièrement élevé du Haut-Atlas résulterait d'un soulèvement thermique (remontée de l'asthénosphère) qui viendrait s'ajouter au soulèvement tectonique résultant du raccourcissement horizontal de la croûte terrestre. Le domaine àlithosphère amincie constituerait ainsi une bande d'orientation NE-SW, jalonnée devolcans récents, que l'on peut suivre desîles Canaries à la Méditerranée.
L'Anti-Atlas, situé au sud de l'accident sud-atlasique, appartient à la catégorie deschaînes varisques (ou hercyniennes). Il s'agit donc d'une chaîne ancienne très différente du système atlasique. Son relief actuel résulterait néanmoins essentiellement du soulèvement thermique évoqué précédemment.
L'Atlas tellien ou Tell, situé en bordure de la Méditerranée, appartient à la catégorie deschaînes alpines. Cette chaîne est issue de la fermeture de laTéthys (océan disparu).
Malgré salatitude très méridionale, l’Atlas est sujet à unclimat montagnard. Plushumide en allant vers le nord, plus sec en allant vers le sud. En hiver, laneige tombe jusqu’à 900 m, voire 750 m côtéubac dans la région deKhénifra ce qui est remarquablement bas pour la position géographique du massif, au sud de lamer Méditerranée. Sous ces altitudes, il pleut beaucoup, mais habituellement pas de neige. À l’inverse, au-dessus de 3 700 m, toutes lesprécipitations se font sous forme de neige.
Parmi les animaux figurent leMacaque berbère (Macaca sylvanus), leLéopard de Barbarie (Panthera pardus panthera), leCerf de Barbarie (Cervus elaphus barbarus), leMouflon à manchettes (Ammotragus lervia), laGazelle de Cuvier (Gazella cuvieri), l'Ibis chauve (Geronticus eremita), leCincle plongeur (Cinclus cinclus) et laVipère naine de l'Atlas (Vipera monticola). Certaines sont totalement éteintes mais demeurent emblématiques : l'Ours de l'Atlas (Ursus arctos crowtheri), seule espèce africaine d'ours disparue à la fin duXXe siècle, leLion de l'Atlas (Panthera leo leo) disparu à l'état sauvageen1943[réf. nécessaire] et l'Auroch d'Afrique du Nord (Bos primigenius africanus), disparu depuis l'Antiquité. Le léopard (Panthère de Barbarie) est aujourd'hui presque éteint en Afrique du Nord. Il reste une petite population dans les montagnes de l'Atlas et des observations récentes auraient également été signalées en 2007 dans la zone frontalière entre le Maroc et l'Algérie. Il en reste aussi quelques-uns au Maroc dans les forêts du versant nord du Haut-Atlas que la route traverse pour gagner Imilchil. Elles sont naturellement protégées[17].
Les espèces d'arbres caractéristiques sont leCèdre de l'Atlas (Cedrus atlantica), lePin noir de l'Atlas (Pinus nigra subsp.salzmannii var.mauretanica) ou encore leChêne zéen (Quercus canariensis).
Les poètes et historiensantiquesgrecsHomère etHérodote voient en l'Atlas la frontière occidentale du monde connu.
Au cours de l'expansion de l'islam, les géographesarabes considèrent l'extrémité nord-ouest de l'Atlas comme une île coincée entre lamer Méditerranée au nord et le désert aride au sud. Une fois leurs idées suffisamment ancrées, cette île se soulève contre le pays montagneux d'Andalousie. Cette partie du monde constitue alors pour eux leurs limites extérieures. D'autre part, ces géographes arabes ont étendu le concept d'Atlas plus à l'est, au-delà de ses limites naturelles.
↑M.Quedenfeldt,Division et répartition de la population berbère au Maroc. Traduit de l'allemand par H. Simon ..., A. Jourdan,(lire en ligne),p. 121
↑Laoust, Emile 1876-1952VerfasserIn,Contribution à une étude de la toponymie du Haut Atlas Adrär n Deren d'après les cartes de Jean Dresch(OCLC965543840,lire en ligne)
↑Asinag N° 14, Institut royal de la culture amazighe
↑SamirAmin,L'économie du Maghreb (1) : La colonisation et la décolonisation, Les Éditions de Minuit (réédition numérique FeniXX),(ISBN978-2-7073-3405-3,lire en ligne)
↑Recherches méditerranéenes, Éditions Ophrys,(lire en ligne)
↑VincentDubreuil et Jean-PierreMarchand,Le climat, l'eau et les hommes: ouvrage en l'honneur de Jean Mounier, Presses universitaires de Rennes,(ISBN978-2-86847-245-8,lire en ligne)
↑AndréMichard,Continental Evolution : The Geology of Morocco, Springer,(lire en ligne)
↑Gouvernement général de l'Algérie,Le livre d'or du centenainre de l'Algérie française, Alger-Nice, Éditions d'Alger, Jacques Gandini, alger 1930, réimp. 2003 jacques gandini, nice, 2003,p. 531