Même si ce territoire n’offre guère d’unité humaine et demeure tiraillé entre influences diverses, parfois opposées, ces divers vocables ont été repris par des entreprises, des banques, des coopératives agricoles ou des administrations. Parallèlement, dès la fin duXIXe siècle, des associations ou amicales originaires du massif se sont constituées, d’abord àParis, puis dans toute la France ; en se réclamant des hautes terres, elles ont renforcé leur identité. Pour autant, le massif n’a jamais constitué un tout politique, d’où les précautions des historiens tardant à lui accorder une attention spécifique, malgré les vieilles tentatives de la confédération arverne et la puissance évocatrice de cette image d’une « forteresse » stratégique au cœur de l’unité nationale. Unité administrative et unité économique lui ont toujours fait défaut. Tout au plus la littérature touristique a tenté de populariser ces moyennes montagnes[6].
Désormais, c'est le Conseil national de la montagne (CNM), instance consultative présidée par le Premier ministre et composée notamment de parlementaires, de représentants des régions et départements, ainsi que de représentants des six massifs métropolitains, qui joue à la fois un rôle de veille et de force de proposition pour définir les objectifs de développement, d’aménagement et de protection de la montagne. Son secrétariat est assuré par le commissariat à l'égalité des territoires (CGET).
La zone diteMorvan, qui regroupe des communes des quatre départementsbourguignons, a été rattachée à la zone Massif central selon un décret de 2004 pris pour application de laloi montagne de 1985, donnant une entité d'environ 3,8 millions d'habitants et 4 072 communes[10].
Même si elle exclut encore leCharolais à l’est et s’élargit sur la bordureaquitaine (Quercy) qui est extérieure à la stricte limite géologique, cette définition administrative est intéressante car elle englobe les zones de moyenne montagne et également tous les espaces qui leur sont contigus et dont les activités sont fortement interdépendantes. Cette approche politique relève à la fois d’une volonté de prise en charge des problèmes économiques de la montagne française et d’une reconnaissance des spécificités de ces espaces, qui demeuraient jusque-là à la marge des grands projets de développement. Ce texte juridique est également l’émanation d’une volonté des pouvoirs publics, de transférer une partie de leurs compétences et de financement aux responsables locaux[6].
Le Massif central est un massif ancien de l'époquehercynienne essentiellement composé deroches granitiques etmétamorphiques. Cet ensemble a été puissamment soulevé et rajeuni à l'est par la surrection desAlpes (Paléogène) et au sud par la surrection desPyrénées. Le massif présente donc un profil fortement dissymétrique avec d'une part, de hautes terres au sud et à l'est dominant brutalement lavallée du Rhône et les plaines duLanguedoc (hautes terres que l'on peut regrouper pour simplifier sous le vocable deCévennes) et, d'autre part, la région duLimousin au nord-ouest, d'altitude beaucoup plus faible car ayant été moins soulevée, les Alpes et les Pyrénées étant plus éloignés. Toutefois, cette approche est assez schématique car le socle peut se retrouver localement à des altitudes élevées par le jeu des failles même en dehors des Cévennes et duVivarais. C'est le cas enMargeride (1 551 m), au sud de l'Aubrac (1 469 m) ou dans lesmonts du Forez (1 631 m).
En effet, ce soulèvement du socle cristallin ne s'est pas fait sans heurt. De nombreuses cassures se sont produites ainsi que des effondrements le long de failles (graben). C'est ainsi par exemple qu'est née la plaine deLimagne. Ces fossés d'effondrement s'opposent aux blocs qui sont restés en hauteur (horst), par exemple les monts du Forez. Ces cassures ont également engendré de très nombreux phénomènesvolcaniques qui se sont prolongés jusqu'à nos jours (en effet, les volcans de lachaîne des Puys n'ont que quelques milliers d'années, à commencer par le plus grand d'entre eux, lepuy de Dôme). Tous les types de volcans sont représentés dans le Massif central (hawaïen,péléen,strombolien). Ils peuvent s'étendre sur de grandes surfaces et être géologiquement complexes (stratovolcan desmonts du Cantal ou desmonts Dore) ou au contraire former des reliefs isolés (ce sont alors souvent desvolcans monogéniques, c'est-à-dire résultant d'une seule éruption), posés sur le socle cristallin (volcans de la chaîne des Puys, duVelay, duDevès).On peut aussi trouver de grands plateaux basaltiques (Aubrac,Cézallier), conséquences d'un volcanisme plutôt de type hawaïen (lave fluide s'étendant sur de grandes surfaces). Le volcanisme dans le Massif central peut donc prendre des formes très variées. Une autre singularité du massif tient à la présence au sud de grands plateauxcalcaires, lescausses, formés pour l'essentiel auJurassique et exondés à l'ère tertiaire par un jeu de failles, entrecoupés de gorges très profondes, qu'on peut qualifier decanyons (gorges du Tarn).
Ainsi, la complexité de l'histoire géologique du Massif central et la grande variété de roches que l'on y trouve expliquent la grande variété des paysages que l'on y rencontre.
Constitué auPaléozoïque, le Massif central est le quatrième massif le plus élevé de France métropolitaine, après lesAlpes, lesPyrénées et laCorse.
Le Massif central résume bien à lui seul la plupart des formes topographiques. En effet, ce vaste plateau de moyenne altitude est à la fois incliné du sud-est (plus de 1 500 mètres) vers le nord-ouest (300 à 400 mètres dans le Bas-Limousin), dénivelé par desfailles, aéré par des bassins d’effondrement, entaillé par des gorges étroites et couvert devolcans[6].
Les plateaux où dominent les roches du socle, celles de la profondeur de l’édificehercynien (granites,gneiss,schistes), sont les plus vastes. Ils ont été érodés, donnant des arènes sablonneuses et quelques chaos de blocs ébouleux (Sidobre,Margeride etmont Lozère), certains ayant même été englacés auQuaternaire comme la petite Artense à l’ouest desmonts Dore ou lesHautes Chaumes du Forez. Alors que dans le Limousin et le Morvan, les plateaux sont peu bousculés avec des hautes terres vallonnées (la « Montagne » ouplateau de Millevaches vers 900 mètres d'altitude) entourées par des gradins inférieurs (500 mètres), creusés de vallées et excavés d’alvéoles. Au contraire, dans le sud et vers l’est, ce « socle » se relève sensiblement avec d’admirables paysages (1 211 mètres dans lamontagne Noire, 1 270 mètres dans lesmonts de Lacaune, 1 699 mètres au mont Lozère, 1 565 mètres aumont Aigoual, 1 631 mètres dans lesmonts du Forez). Il domine les bassins et gorges de l’Allier, de laTruyère, de laDore ou de laLoire par des hautes terres (monts du Forez,Livradois,Devès, Margeride), tandis qu’il se termine brutalement au-dessus des plaines duLanguedoc et duRhône par des puissants talus, ravinés par les torrents méditerranéens dans les « serres » cévenoles. De nombreuses failles fragmentent alors le relief en un puzzle complexe de blocs surélevés (les « horsts » des morphologues) et de bassins étroits (sillons duThoré et duJaur au sud ; fossé deSaint-Étienne et duCreusot à l’est). Du Beaujolais aux approches deValence, une banquette cristalline vient même ménager, vers 300 mètres d’altitude, une transition entre la montagne et la plaine du Rhône[6].
Plus originaux, les plateaux desGrands Causses s'étendent au sud du massif, principalement entre les départements de l'Aveyron et de laLozère, en débordant dans leGard et l'Hérault (avec lecausse du Larzac). Ils témoignent des puissantes couches decalcaires déposées auMésozoïque, très perméables et très solubles, qui ont recouvert le socle[6]. Ils sont subdivisés en sept principaux causses, ici présentés par ordre décroissant de superficie :
causse de Sauveterre (Lozère et dans une moindre mesure Aveyron, bordé au nord par leLot qui le sépare de l'Aubrac et de laMargeride, à l'est par les Cévennes, au sud par leTarn et ses gorges qui le sépare du causse Méjean et à l'ouest par les causses Rouge et de Sévérac) ;
causse Méjean (Lozère, presque totalement isolé des reliefs environnants par les gorges du Tarn au nord et au nord-ouest qui le sépare du causse de Sauveterre, lesgorges de la Jonte qui le sépare du causse Noir au sud et leTarnon qui le sépare des Cévennes à l'est) ;
causse Noir (Aveyron, Gard et Lozère, entouré par le Tarn et le causse rouge à l'ouest, la Jonte et le causse Méjean au nord, les Cévennes à l'est et les gorges de la Dourbie, duTrèvezel et le Larzac au sud) ;
causse Rouge (Aveyron, cerné à l'ouest par leLévézou, à l'est par le Tarn et le causse Noir, au sud par le Tarn et le Larzac et au nord par les causses de Sévérac et de Sauveterre) ;
causse Comtal (Aveyron, situé au nord deRodez et du Lévézou, au sud de laViadène et de l'Aubrac et à l'ouest du causse de Sévérac) ;
causse de Sévérac (Aveyron, cerné à l'est par le causse de Sauveterre, au nord par le Lot et l'Aubrac, au sud par le causse Rouge et à l'est par le causse Comtal).
Les vastes surfaces pierreuses accidentées de creux (ou « sotchs ») tapissés d’argile rouge, les rochers ruiniformes, les grottes et les « avens » composent un paysage insolite. Au-dessous des corniches blanchâtres, lescanyons des rares rivières (Jonte,Tarn,Dourbie) sont entaillés sur 500 mètres de profondeur.
D’autres placages calcaires bordent lesmonts du Lyonnais, du Charolais ou duMâconnais (roche de Solutré), tandis que les plateaux karstiques du Quercy à l’ouest ont bien des points communs avec les Grands Causses (surfaces pierreuseskarstiques criblées de dépressions fermées et de gouffres), mais, moins élevés, ils appartiennent déjà à l’Aquitaine[6].
Les volcans sont liés aux grandes dislocations qui se prolongent jusqu’au Languedoc, et ont été mis en place depuis le milieu de l’ère Tertiaire et jusqu’au Quaternaire récent. Ils sont de types divers même si la morphologie de plateaux domine. Dans l’alignement méridien des Dômes (avec son célèbrepuy culminant à 1 465 mètres), les accumulations de projections l’emportent avec des formes simples (cônes de scories terminés par descratères simples ou emboîtés, dômes d’extrusion, coulées ou « cheires » rugueuses et incultes) dont l’âge récent et la perméabilité des matériaux expliquent qu’elles aient été à peine remaniées par l’érosion. Un autre type renvoie aux empilements de coulées comme dans l’Aubrac (1 469 mètres d'altitude ausignal de Mailhebiau), dans leCézallier (1 547 mètres ausignal du Luguet) ou lemassif du Devès (1 421 mètres aumont Devès). Ils donnent des plateaux monotones, démantelés par l’érosion et peu accidentés en dehors des quelques édifices quaternaires du Cézallier, des cônes de scories (les « gardes ») ou des cratères d’explosion du Devès. Au nord, des coulées ont cascadé vers leslimagnes du sud, le long des valléespliocènes. Au sud, les coulées de l’Escandorgue sont plus récentes. Dans leVelay oriental, les pics dumont Mézenc (1 753 mètres) et duMeygal (1 436 mètres) sont aussi armés par des coulées ; mais, plus anciennes, celles-ci ont été démantelées tandis que des venues delaves visqueuses, lesphonolites, ont contribué à de multiples excroissances (lessucs) restées en saillie, aux flancs tapissés de coulées de blocaille (comme lemont Gerbier-de-Jonc à 1 551 mètres) ; l’ensemble se prolonge enVivarais avec les coulées desCoirons qui se terminent en belvédère noirâtre au-dessus du Rhône. Enfin, leCantal (1 855 mètres auPlomb du Cantal, 1 783 mètres aupuy Mary) et les monts Dore correspondent à de très grands organismes oustratovolcans, constitués par des empilements de coulées, des intrusions, des projections, le tout malmené par l’érosion. Par exemple, à son apogée, le volcan du Cantal a dépassé les 3 000 mètres d'altitude. Le centre, dominé par des pitons de roches plus résistantes, présente un relief presque alpestre, tandis que le réseau hydrographique rayonnant à partir des hauts sommets, découpe les bandeaux basaltiques en « planèzes », plateaux triangulaires au front abrupt vers l’intérieur et dont la surface s’abaisse vers la périphérie.
Exemple de roche granitique striée par les glaciers sur le plateau de l'Aubrac.
Lors des anciennes périodes froides, desglaciers ont installé leurs calottes sur les plus hauts édifices, burinant descirques vers l’amont et de larges vallées en auge, comme celle duMont-Dore ou dans les vallées divergentes du Cantal (Jordanne,Cère,Alagnon, etc.). Le Cézallier et l’Aubrac ont surtout connu desglaciers de plateau dont des langues dévalaient vers les vallées de l’Allier pour le premier et vers leLot ou laTruyère pour le second (par l'intermédiaire duBès en particulier). Comme dans le Cantal ou les monts Dore, ces glaciers ont marqué le paysage avec de belles vallées en auge en périphérie (vallée du Bès en Aubrac) ou des cirques en amont (cirque d'Artout dans le Cézallier, non loin du signal du Luguet). D'autres marques, plus discrètes, sont également visibles sur ces plateaux comme les blocs erratiques ou les roches striées.
Dans les plaines, le volcanisme a créé des formes mineures, dégagées par le déblaiement des sédiments (buttes isolées, anciennes coulées « inversées » en plateaux tabulaires telGergovie ou la montagne de la Serre), et celles-ci ont parfois servi de site aux villes comme àClermont-Ferrand ou auPuy-en-Velay[6]. Justement, ces plaines constituent un dernier type de paysage. Souvent étroites (« vallons » et « rougiers » autour descausses, petits bassins de périphérie comme àBrive-la-Gaillarde ou enchâssés à l’intérieur des terres comme àAurillac,Ambert ouMontluçon, couloirs dégagés dans les dépôts houillers entre les pays de la Loire et les pays de la Saône ou du Rhône), elles prennent plus d’ampleur le long de la Loire (bassin du Puy-en-Velay, de l’Emblavez, duForez, deRoanne) et de l’Allier (les « limagnes ») avant de se rejoindre dans les bocages de l’Allier, dans cetteSologne bourbonnaise formée d’épandages argilo-sableux. La Grande Limagne de Clermont est un « bon pays » traditionnel, tantôt argileux et plus humide, tantôt montueux avec les buttes calcaires ou volcaniques, tantôt marneux et couvert d’une terre noire qui lui vaut de riches cultures. Ces plaines, où se concentre une grande partie de la vie urbaine et industrielle, évoquent les autres bassins de l’Europe hercynienne (fossé duRhin moyen, fossé de l’Ohře enBohême) et ouvrent le massif vers le nord, en direction de la région parisienne[6].
Selon l'image d'Épinal propagée par leshussards noirs de laIIIe République, l'Auvergne (et plus largement le Massif central) est sur le plan national lechâteau d'eau de la France : le linéaire cumulé duréseau hydrographique de l'Auvergne approche les 23 000 km pour lescours d'eau permanents (de plus d'un km de long) et les 38 000 km si on y additionne les écoulements temporaires (de plus d'un km de long). Leseaux stagnantes couvrent une superficie de118 000ha[12],[13]. Mais cette ressource est inégale et vulnérable. Certes, le régime des eaux renvoie à la variété des climats et à l’influence du relief qui se retrouve dans la pente assez forte des rivières, dans la violence paradoxale des crues, dans l’importance des charges solides des rivières. Mais les précipitations globales restent modestes, et ce d’autant plus que les bassins intérieurs, notamment le val d’Allier, sont peu arrosés avec des pluies d’été rapidement évaporées[6].
L’écoulement se fait surtout vers l’ouest et le nord, avec des régimes de caractère océanique, remarquables par les crues de saison froide et des basses eaux prononcées en été. Cette mauvaise tenue – tout comme les risques d’inondations –, ont fait multiplier lesbarrages qui peuvent soutenir les débits pour l’alimentation des nappes, l’irrigation des plaines ou la production électrique avant même de se soucier des besoins des touristes. En outre, les réserves profondes sont rares et peu importantes. Les lacs sont nombreux, mais de petite taille, mises à part les retenues artificielles. Certes, il faut également tabler sur l’altitude et les apports de l’enneigement qui assurent une certaine rétention hivernale des eaux de pluie et, à l’opposé, des hautes eaux printanières. Mais ce manteau nival est irrégulier et la fonte des neiges ne joue qu’un rôle occasionnel dans des débits globalement médiocres, les modules spécifiques dépassant rarement 10 l/(s·km2)[6].
Sur l’Allier, le rapport entre la moyenne du mois le moins bien alimenté et la moyenne du mois des hautes eaux est de un à six, contre un à cinq pour laSeine et un à deux pour leRhône. De même, sur la bordure méditerranéenne, les régimes deviennent plus irréguliers encore, signalés par un écoulement modeste mais surtout par des ondes de crues d’automne et de printemps (comme sur lesGardons, l’Ardèche, l’Orb, l’Hérault). Ces dernières sont redoutées par leur violence et la rapidité de leur propagation, pas seulement en milieu méditerranéen. Il arrive que des crues océaniques et méditerranéennes se conjuguent, accompagnées parfois de la fonte des neiges, comme sur le hautTarn, leLot supérieur, le haut Allier ou la hauteLoire, mais des accidents marquent aussi les plateauxlimousins, y compris en été, à l’occasion de gros orages[6].
Il n’en reste pas moins que l’eau constitue une richesse et un des potentiels du Massif central, intervenant de plus en plus, à la fois comme ressource pour de nombreuses activités et comme milieu à protéger. Il joue un rôle clef pour les filières deseaux minérales (le massif compte environ le tiers des sources et produit la moitié des eaux minérales en France) etthermales (une vingtaine de stations auxquelles s’ajoutent les produits et services dérivés comme le « thermoludisme » ou l’industrie des cosmétiques), sans oublier l’agriculture irriguée des plaines, l’industrie, la production d’énergie (centrales hydroélectriques implantées tardivement sur le bassin de laDordogne avec les grosses usines deBort-les-Orgues,Marèges, l’Aigle,Chastang etArgentat, bassin de laTruyère très productif avec Sarrans ouGrandval, bassins de laSioule, duTarn et de l’Agout avec les sites duLévézou), les loisirs (pêche) et le tourisme[6].
L’embouteillage a donné naissance à un secteur en pleine expansion (Volvic,Vichy,La Salvetat,Quézac). Des progrès ont été accomplis sur le plan de la gestion comme de la caractérisation quantitative de la ressource (localisation, débits, interrelations entre les rivières, nappes, lacs, retenues ou zones humides, relations entre ressources en eau et forêt) et de la genèse de sa qualité (processus physiques, chimiques, biologiques ou morphologiques). À ces connaissances s’ajoutent celles sur l’impact des activités humaines sur les milieux aquatiques et, peu à peu, s’affirme dans le massif un véritable pôle d’excellence scientifique[6].
Les hivers sont longs et rigoureux, les bassins pouvant être encore plus froids que les sommets lors des journées de brouillard et « d’inversion de température ». Il gèle plus de cent jours par an au-dessus de 600 mètres d’altitude dans leMorvan et enLimousin, mais seulement à 750 mètres dans le Velay et au-dessus de 1 000 mètres dans lesCévennes. De novembre à mai, l’enneigement n’est pas négligeable, mais il est rarement persistant du fait des « redoux » liés aux vents d’ouest. Accompagné de vents violents (« l’écir », la « burle »), il est responsable descongères qui bloquent la circulation sur les plateaux[6].
En « moyenne montagne », la neige manque pour lessports d’hiver mais trouble les transports plus vigoureusement que dans les grandes vallées alpestres. Dans l’ensemble, les étés sont frais en altitude et il peut geler en toute saison au-dessus de 700 mètres ; les plaines ont des étés lourds et orageux, tandis que le sud connaît une sécheresse qui reflète aussi bien la latitude que le voisinage de la Méditerranée. Le climat de « moyenne montagne » présente donc bien des nuances[6] :
La façade nord-est (vallées de l'Allier et de la Loire, monts du Forez, du Livradois, de la Margeride, du Velay, du Nord-Vivarais et du Beaujolais) emprunte déjà quelques traits climatiques continentaux ou plutôt « intramontagnards », comprenant des bassins rendus fertiles par l'irrigation, mais faiblement arrosés (parmi les records d'aridité français : 53 cm/an àMeilhaud dans le Puy-de-Dôme) et des plateaux et hautes croupes à dominante forestière, modérément mais régulièrement arrosés avec de nombreux orages de mai à septembre (cumuls annuels de 115 cm à Chalmazel dans la Loire, 110 cm aux Estables en Haute-Loire, 85 cm àChâteauneuf-de-Randon en Lozère). Bien que les hivers soient plus froids que sur la façade ouest, l'enneigement est moins abondant en raison du déficit de précipitations (les perturbations océaniques se déchargent sur les premiers reliefs). Mais la neige tombe souvent plus bas, notamment par flux de nord qui induit aussi un vent glacial en montagne : la burle. Lesnévés s'attardent sur le Haut-Forez et le Mézenc jusqu'en mai/juin. La forêt spontanément peut atteindre les sommets (pins).
Cette diversité de climat se retrouve dans la végétation et les paysages : des verdoyants volcans d'Auvergne aux causses arides, du maquis cévenol à l'austère Forez, se décline une multitude de variations et micro-climats[6].
Le régime pluviométrique du Massif central est principalement soumis aux influences bordièresocéaniques ouméditerranéennes. Son inclinaison vers le nord-ouest lui inflige les perturbations venant régulièrement de l’ouest ; les caractères méditerranéens étant limités à une frange méridionale étroite (Cévennes) caractérisée par l'intensité des perturbations, surtout en automne, et leur espacement (longues périodes sèches). Le relief intervient pour modifier ces deux tendances, soit par l’effet de l’altitude (refroidissement, précipitations abondantes), soit par l’orientation des massifs, multipliant les contrastes, soit par l'aridité relative et la pseudo-continentalité des bassins[6].
L’opposition entre les versants ouest et est l’emporte sur les nuancesadret-ubac bien connues dans lesAlpes. À cet égard, le grand alignement volcanique de lachaîne des Puys à l’Aubrac, et dans sa continuité, quoique dans une moindre mesure, les plateaux du Rouergue et du Tarn, jouent le rôle de limite climatique : dès que l’on passe cette ligne de crêtes fortement arrosée, vers l’est apparaît un milieu plus sec que l’on peut qualifier d’intramontagnard (Velay,Margeride), traditionnellement plus favorable auxcéréales[6], ou méditerranéen dans la partie sud, ce qu'atteste la présence de la vigne et d'autres essences héliophiles dans les vallées languedociennes.
Sur les versants exposés à l’ouest, l’étagement classique passe par unechênaie à basse altitude, souvent mêlée dechâtaigniers à l’ouest et au sud-ouest. Puis, à mi-pente lahêtraie, d’abord mélangée dechênes, puis exclusive ou assortie derésineux (sapins,épicéas) et debouleaux, compose le paysage normal de la couverture forestière, largement remaniée par l’homme[6].
Couvert de nombreuses forêts, le Massif central est devenu« la tête chauve de la France » avec seulement 10 % d'occupation forestière à la suite de vastes défrichements opérés au fil des siècles et qui ont connu leur paroxysme auXIXe siècle. L'exode rural a depuis inversé le processus, les forêts du Massif central couvrent 27 % du territoire (ce qui estproche de la moyenne nationale) et ont tendance à s'étendre, favorisées par ladéprise agricole[14].
Le sanglier occasionne de nombreux dégâts sur les culturesLe vautour a été réintroduit en plusieurs endroits, notamment dans lesgorges du Tarn
Comme la végétation, et probablement davantage qu’elle, la faune du Massif central a été modifiée par l’Homme. Du fait de la diversité desbiotopes, du contact entre milieux océaniques, continentaux et méditerranéens ainsi que des interventions anthropiques, le Massif central est aujourd’hui porteur debiodiversité et d’une grande quantité d’espèces animales. Certaines ont été décimées, comme laloutre, lebusard cendré, l’aigle royal, lacistude d'Europe ou lerâle des genêts. D’autres ont été introduites avec succès sur les hauts sommets volcaniques (Sancy,Cantal,Mézenc) ou cristallins, comme lamarmotte, lemouflon ou lechamois. Legrand-duc, qui s’était raréfié, a retrouvé un certain dynamisme dans les escarpements rocheux des vallées de montagne, tout comme lefaucon pèlerin (Cantal,Corrèze). Finalement, mieux protégés, les rapaces sont en augmentation, à l’image duvautour fauve réintroduit, avec levautour percnoptère, dans lesGrands Causses. Cette préservation des biotopes a souvent permis une recolonisation naturelle par de nombreuses espèces :pic noir,chouette de Tengmalm,grenouille rieuse, etc[6].
Alors que peu d’oiseaux restent sédentaires au-delà de 1 200 mètres d'altitude, beaucoup migrent à travers les hautes terres vers des contrées plus clémentes ; en réalité, le Massif central constitue bel et bien un corridor écologique entre lapéninsule Ibérique et le reste de l’Europe[6].
La présence de loups est avérée dans le Massif central.
Malgré leur mobilité, diverses espèces obéissent à des conditions d’habitat bien connues. Lecastor est présent dans certaines vallées (Allier,Sioule,Lignon[Lequel ?]),Dourbie,Tarn comme la loutre (Corrèze,Creuse, ouest duPuy-de-Dôme et duCantal) ou lesécrevisses à pattes blanches qui peuplent les rivières non polluées. Lesaumon atlantique se retrouve dans la haute vallée de l’Allier. Des espères rares comme lesMerles de roche ou àplastron nichent dans les éboulis des versants des monts d’Auvergne ou du Forez. Dans les grandes forêts, surtout de conifères, lamartre est présente dans tout le Massif central[6].
Les petits mammifères abondent jusqu’à créer une gêne pour l’agriculture :taupe,belette,mulot oucampagnol. Les forêts abritent lesanglier et lechevreuil dont on redoute également les dégâts sur les cultures et prairies. Des plans de gestion de ces populations sont devenus nécessaires. Leblaireau est présent dans l'Aveyron, le Cantal, dans la Haute-Loire ou dans le Puy-de-Dôme. La belette ou l’hermine sont mieux représentées dans l'Aveyron et enLozère tandis que lafouine est repérée jusqu’à 1 300 mètres d’altitude dans tout le massif[6].
Le retour des prédateurs, et notamment duloup, dont les indices de présence se multiplient dans les parties orientales et méridionales du Massif central[15], ne laisse pas d’inquiéter chasseurs et éleveurs[6].
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La Confédération arverne, formée par le peuples desArvernes (actuelleAuvergne) et plusieurs peuples voisins, clients ou tributaires correspondait à une grande partie du massif.
Le centre-ville deThiers vu du bas de la ville.Paysage rural dans les environs deSaint-Urcize (Cantal).
Le Massif central est une région désormais plutôt urbaine (60 % de sa population se concentre sur une trentaine d'aires urbaines qui couvrent un quart de son territoire), au sein de laquelle se trouvent quelques grandes villes commeClermont-Ferrand,Saint-Étienne etLimoges.
Cette région, de moins en moins isolée grâce notamment à l'A75 « la méridienne », l'A89, l'A71 et comporte de nombreux départements au secteur agricole et agro-alimentaire riches et dynamiques. De nouvelles grandes agglomérations se dessinent, notammentRodez (48 000 habitants),Brive-la-Gaillarde (75 000 habitants) ou encoreLe Puy-en-Velay etThiers.
Cependant, il existe encore dans le Massif central des régions fortement enclavées, très rurales et très faiblement peuplées, notamment dans les parties sud et ouest du massif, comme les départements duCantal, de laCreuse ou de laLozère. Ce dernier est par ailleurs le département la moins peuplé de France métropolitaine.
Dès l’entre-deux-guerres, les autobus ont rendu de grands services dans les campagnes et autour des villes. Aujourd’hui, ces services publics ont largement disparu et il a fallu attendre longtemps avant que les petites routes sinueuses ne soient améliorées, qu’un réseau cohérent apparaisse et que les premières autoroutes voient le jour : deSaint-Étienne versLyon, dès lesannées 1970, mais surtout, grâce au « plan routier Massif central » (1975), entreClermont-Ferrand et Saint-Étienne au début desannées 1980, de Clermont-Ferrand àBourges et Paris vers1989, de Clermont àBéziers ou àPérigueux tout récemment[6].
Ainsi, deux axes autoroutiers majeurs traversent désormais le Massif central : l'A75Paris-Clermont-Ferrand-Béziers (qui suit d'ailleurs en grande partie le tracé de laligne des Causses, en déclin) favorise les échanges entreParis et lamer Méditerranée, tandis que l'A89Bordeaux-Clermont-Ferrand-Lyon se pose comme le chaînon manquant de la traversée est-ouest de l'Europe. D'autres autoroutes, telles l'A20 ou l'A72 contribuent au désenclavement.
Des travaux sont en cours sur laroute Centre-Europe Atlantique (RCEA) et sur laRN 88 Lyon-Toulouse. Mais il manque une ouverture vers le Nord-Estvia laBourgogne et les flux restent modestes au cœur du massif, même pour le transit. Il n’empêche que le Massif central profite désormais d’un réseau routier de très bon niveau avec un maillage serré équivalent à celui des autres régions, fait remarquable si on le rapporte au faible peuplement des régions traversées, au profil et à l'altitude. Il n’en reste pas moins que les flux, malgré leur progression, sont bien inférieurs à ceux des grands couloirs de circulation français[6].
Hormis sur sa frange occidentale, bénéficiant de la grande ligneParis-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT), la desserte ferroviaire du Massif central a toujours été médiocre, malgré lechemin de fer dont l'implantation fut difficile (rampes à forte déclivité, construction detunnels ouviaducs fort coûteux comme ceux desFades, deGarabit ou duViaur), alimentant le mythe de « l'enclavement » d’un massif contourné plus que traversé ; la concurrence entre les compagnies ferroviaires désireuses de canaliser le trafic duvin a certes été bénéfique, mais les tracés ont alors obéi plus aux besoins de lacompagnie des Chemins de fer du Midi qu'aux nécessités locales[6].
Le réseau est donc incomplet, décevant par les carences, la dégradation de certaines lignes locales et la lenteur des services collectifs offerts. Malgré la mise en service de quelques matériels rajeunis, il tarde à se moderniser à l’exception des périphéries urbaines (Lyon-Saint-Étienne,Clermont-Ferrand-Issoire) ou de quelques liaisons interurbaines (Albi-Rodez) ; seuls l'axe de laLimagne jusqu’au sud de Clermont-Ferrand et les grandes périphéries urbaines procurent au massif un regain de trafic (Ouest lyonnais et stéphanois, étoiletoulousaine)[6].
Globalement, depuis2002, le trafic voyageurs croît dans le Massif central en incluant les lignes de banlieue comme celles des hautes terres ; cette progression est due à un contexte favorable au chemin de fer du fait, entre autres, de la hausse duprix du pétrole, des engorgements urbains qui font se reporter de nombreuses personnes vers le rail. Elle est aussi le fruit des politiques régionales pour la plupart de plus en plus favorables au rail. En revanche, lefret ferroviaire recule avec la désaffectation de certaines lignes et le réseauTGV tarde à s'implanter à l’exception de Lyon-Saint-Étienne[6].
Les aéroports deClermont-Ferrand (425 896 passagers en 2013),Limoges (299 654) etRodez (143 392) sont les plus fréquentés.
C’est en marge du Massif central que se trouvent les grandes infrastructures aéroportuaires (Toulouse,Lyon,Montpellier), captant une partie de la population des hautes terres. Ces plates-formes présentent des dynamiques globalement positives, le nombre de lignes tendant à croître. Au centre-nord du massif, l'aéroport de Clermont-Ferrand-Auvergne est le plus important. Il est caractérisé par un réseau de niveau régional avec des lignes vers les principales métropoles françaises ou de la proche Europe. Mais, il reste fragile en lien avec le transfert d’une partie de sonhub au profit deLyon-Saint-Exupéry. Le nombre de passagers a beaucoup diminué (près de 900 000 passagers en 2000 contre 400 000 en 2009). Les aéroports deLimoges-Bellegarde (nord-ouest) etRodez-Marcillac (sud-est) se développent d'année en année et leur offre de destinations —low cost ou non — se diversifient ainsi, tout en restant modestes.Limoges a gagné près de 225 000 passagers en 10 ans. L'aéroport de Saint-Étienne-Loire s'est développé en accueillant plusieurs compagnies[16] ; il accueille 110 000 personnes par an.Rodez a gagné 70 000 passagers en 10 ans. Les aéroports d'Aurillac,Le Puy-Loudes,Brive possèdent au moins une liaison versParis, mais le transit ne dépasse pas les 40 000 passagers par an. Les habitants sont souvent dépendants des décisions des compagnies à bas prix (notamment à destination duRoyaume-Uni) tandis que les liaisons entre les métropoles et surtout avec Paris ont des coûts très élevés et n’offrent pas une clientèle suffisante[6].
Malgré les insuffisances dénoncées par les usagers de base comme par les entrepreneurs, la couverture en nouvelles technologies de communication s’est nettement amendée dans le Massif central. Non seulement, l’irrigation enfibres optiques progresse le long des axes de transports, mais surtout latéléphonie mobile et lehaut débit se diffusent, laissant de moins en moins de vides en dehors de quelques territoires de confins. Il s’agit donc d’un incontestable progrès, réalisé à court terme, avec de réels efforts descollectivités territoriales et le soutien des chambres consulaires dans le cadre du programme « Cybermassif » qui déploie des centres de services destinés auxPME dans une douzaine de bassins d’emplois (Montluçon,Moulins,Vichy,Mende,Le Puy-en-Velay, etc.)[6].
Au total, loin des clichés de l’enclavement, le Massif central est de plus en plus traversé, assurant un trait d’union entre l’Atlantique et l’Europe rhénane, entre le Nord et laMéditerranée. Dans le domaine des transports, l’ouverture des grandes transversales Nord-Sud (A 75,A 89 etA 20) ainsi que l’amélioration de laRoute Centre-Europe Atlantique, peut-être doublée dans le futur par le projet de liaison ferroviairetransversale Alpes Auvergne Atlantique (TAA), contribuent à repositionner le Massif central comme un espace d’échanges de personnes et de marchandises, d’idées et de culture entre l’Europe, y compris orientale, et le Sud. D’ores et déjà, des partenariats se développent avec le Sud-Ouest européen et d’autres régions aux enjeux similaires[6].
Des projets concrets et à court ou moyen terme se font, afin de relier le mieux possible les périphéries comme les confins du Massif au reste du pays et de l'Europe, au travers de l'aménagement de laRCEA (Nantes/Bordeaux-Limoges-Montluçon-Mâcon-Genève/Strasbourg) de laLGV Poitiers - Limoges ou du projetLGV Paris Orléans Clermont-Ferrand Lyon.
D'autres projets comme l'installation de téléphériques àThiers et àClermont-Ferrand ont été proposés.
Sur le plan économique, les hautes terres du Massif central sont toujours un bastionagricole à l’échelle nationale française, avec desproduits agroalimentaires de qualité et la part des actifs agricoles dans la population active totale y est souvent plus élevée qu’ailleurs. Mais 8 % d’actifs agricoles à l’échelle du massif, cela signifie aussi que la quasi-totalité des emplois restants relève des secteurssecondaire ettertiaire, de l’industrie (21,6 %), dubâtiment et destravaux publics (6,4 %), ducommerce (12 %) et surtout desservices (52 %)[6].
La part des actifs relevant du secteur secondaire est supérieure à la moyenne nationale et si le Massif central ne peut être qualifié de « région industrielle », notamment parce que cette branche reste diffuse, concentrée sur quelques espaces privilégiés, on doit relever que l’ensemble s’appuie, selon l’Insee, sur un tissu de pas moins de 23 274 établissements. La majorité est constituée de petites entreprises, mais 966 ont plus de cinquante salariés, dont 178 plus de deux cents ; ces dernières regroupant le tiers de l’emploi industriel montagnard[6].
L'examen de l'évolution en valeur absolue de la population active est aussi riche d'enseignements. Si, dans la majeure partie du Massif central, elle régresse, les cartes montrent que les cantons les plus frappés sont non seulement de rares foyers industriels mais aussi des secteurs souvent agricoles qui n'arrivent pas à maintenir un potentiel secondaire et tertiaire déjà très faible. Seules les agglomérations et leurs auréoles périurbaines se distinguent, avec de rares cantons touristiques et, une fois encore, les bordures orientales du massif (Loire,Rhône,Haute-Loire principalement)[6].
La situation a beaucoup évolué depuis une génération. L’exode rural appartient de plus en plus au passé et l’heure est souvent à l’accueil de « nouveaux habitants » (Cévennes,Limousin). Les transports, même s’il reste beaucoup à faire, se sont nettement améliorés, surtout dans le domaine autoroutier et l’on découvre que le Massif central possède de nombreux atouts jusque-là ignorés : les faibles densités et donc les « grands espaces », un patrimoine de savoir-faire et de produits locaux, un environnement préservé sont autant d’aménités que les habitants du massif ont tout loisir de valoriser auprès d’une société et de consommateurs largement demandeurs. Par ailleurs, les acteurs de la vie économique sont devenus très divers : entreprises et entrepreneurs locaux, depuis la micro-entreprise (y compris agricole ou artisanale) jusqu’aux grandes structures, entreprisesmultinationales dont la présence fonctionne comme un signal positif pour d’autres investisseurs, État encore bien représenté parfois en association avec descollectivités territoriales. Le monde des petites entreprises, associées quelquefois en réseaux, participe également à l’émergence de nouveaux systèmes productifs, souvent dynamiques, multipliant les initiatives et stimulant l’inventivité des uns ou des autres. Déconsidérés au temps de la grande entreprise et dufordisme triomphant, cessystèmes productifs locaux sont redécouverts et révèlent que le développement peut s’inscrire dans une culture, une histoire, un territoire. Ces nouvelles forces s’observent tant dans l’agriculture que dans l’industrie ou dans d’autres activités tertiaires, par exemple dans le domaine dutourisme rural[6].
L’agriculture pèse toujours un poids considérable mais avec guère plus de 100 000 exploitations agricoles. En fait, lesfermes traditionnelles, trop petites et peu spécialisées, ont souvent fermé leurs portes et le mouvement est loin de se ralentir dans le haut-Limousin ou les massifs de l’est. Le parcellaire est relativement morcelé avec un remembrement moins intense en altitude. Dans les exploitations restantes – une ou deux par hameau - la spécialisation et l'intensification sont parfois vigoureuses. Selon le CERAMAC, c’est là un premier atout dans la compétition actuelle entre les régions[6].
Mouton noir du Velay.Élevage bovin en Limousin.Vignoble de Cahors (château de Chambert).
L'orientation vers l'élevage est nette : les deux tiers des agriculteurs en dépendent et neuf hectares sur dix sont consacrés auxfourrages (cultures temporaires, prairies permanentes ou naturelles). Dans tous les cas, techniques modernes et races sélectionnées ont fait beaucoup progresser les rendements. L'orientation laitière (à peine 20 % des fermes) s'impose lorsque la taille des exploitations apparaît mesurée, quand un débouché commercial vers l'industrie agroalimentaire ou des possibilités devente directe de produits laitiers transformés existent (fromages fermiers, etc.) ; des bassins laitiers cohérents se dessinent sur les hautes terres de l'est (Velay,monts du Lyonnais), dans la montagne volcanique auvergnate, dans laChâtaigneraie, sur laplanèze de Saint-Flour ou dans lesSégalas aveyronnais.
L’original « rayon de Roquefort » dans la partie sud-ouest du massif (environ 100 km autour deRoquefort-sur-Soulzon,Larzac), s’intensifie également mais avec de moins en moins d’éleveurs debrebis laitière. Sur les moyens plateaux, lapolyculture céréalière peut se maintenir tout en étant subordonnée à la production animale (maïs ensilé, par exemple). L'élevage pour la viande (vaches allaitantes, ovins et systèmes mixtes) s'impose avec l'agrandissement des fermes. On discerne de solides bassins de production qu'ils soient anciens (aire charolaise du Bourbonnais ou de la plaine deRoanne, aire limousine, foyer ovin des bocages du nord et de l’ouest ou des moyennes montagnes méridionales) ou plus récents (monts du Cantal etAubrac,Margeride,Livradois-Forez). Enfin, on rappellera que la spécialisation céréalière s'est surtout concentrée dans le bas pays, en particulier sur les bonnes terres deLimagne (blé,maïs de semence,oléagineux,betterave sucrière,tabac). Dans les vallées abritées ou sur les coteaux, parfois envahis par la friche, quelques terroirs viticoles résistent ou renaissent :Saint-Pourçain et coteaux de Limagne,Côte-roannaise,Côtes-du-forez,Beaujolais, pays deBrive, pays d’Entraygues-sur-Truyère et du Fel, bassins deMarcillac, deMillau ou surtout deCahors, bas-Vivarais[6].
Le bilan reste déconcertant de complexité du fait, d'une part de résultats économiques décevants et, d'autre part, d'une absence d'unité. Les résultats sont donc loin des espérances nées des années 1970 : qu'il s'agisse des revenus, descoûts de production ou desrendements ; la part des compensations publiques et européennes dans le budget des exploitations révèle cette impuissance de hautes terres largement assistées. Le tableau remet en cause les choix opérés jusqu'ici (modèle productiviste) et légitime quelques inquiétudes face aux évolutions de laPAC. Déjà, lesquotas laitiers ont entraîné une âpre sélection et la voie de l'extensification peut avoir des conséquences fâcheuses sur les sociétés locales et les paysages. Seul, le choix des productions de qualité offre d'excellentes opportunités mais le Massif central tarde à suivre cette direction, surtout si on le compare aux montagnes de l'Est du pays[6].
Toujours selon le CERAMAC, malgré une image favorable née d’une certaine préservation de l’environnement, le devenir de l’agriculture du Massif central est plein d’incertitudes et de contrastes, notamment entre des bastions agricoles solides (centre-ouest du Massif central) ou en voie de réorganisation (Cantal, Aubrac, plateaux limousins, Combrailles auvergnates, Margeride…), et des espaces à la dérive, en voie de désagrégation et sans orientations agricoles clairement définies (Livradois, Forez, Montagne limousine, Cévennes). C'est là que la crise et le dépeuplement sont les plus avancés sauf quand des activités non agricoles sont engendrées par des influences urbaines venues de l'extérieur, des plaines rhodaniennes ou méditerranéennes. Dans le cadre d’une activité en proie au doute (incertitudes sur la pérennité des financements européens, crainte d’une libéralisation plus franche des échanges internationaux, crises sanitaires successives, etc.), le Massif central retrouve aujourd’hui de réels atouts dans le cadre d’une « agriculture de territoire » et de qualité, génératrice de valeur ajoutée. Tout l’enjeu des prochaines années est de valoriser au mieux ces avantages comparatifs après d’une clientèle de plus en plus réceptive[6].
Sur l'ensemble du Massif central, l'emploi industriel, sauf en quelques foyers, demeure modeste et n'a pas connu decroissance significative. La fonction secondaire (bâtiment compris) ne fournit en général qu'une part médiocre de l'emploi : de 1/10 à 1/4 sur l'ensemble des cantons du Massif central, parfois moins. Toutefois, dès lors que l'on comptabilise les entreprises de 1 à 10 salariés, les chiffres atteignent des valeurs plus notables, ce qui témoigne de structures souvent émiettées. Il n'en reste pas moins que ce tissu desPME apparaît encore incertain dans le milieu rural : la moyenne montagne compte peu de ces « districts industriels », souples et innovants, qui assurent - ailleurs - la prospérité des campagnes[6]. Ces cas ne sont pas applicables dans les villes deThiers etAmbert qui ont un très haut taux d'emplois industriels.
De fait, le tableau actuel de l'industrie rurale est assez facile à résumer avec sa localisation plutôt montagnarde, ses PME, ses branches « classiques » (travail du bois, industrie agroalimentaire, textile,cuir) ou plus renouvelées (métallurgie,pharmacie,plastique). Dans les bas pays ou dans les vallées, l'activité manufacturière se concentre surtout dans les villes. En fait, à la suite d'une histoire commune, certaines cités ou bassins houillers ont bénéficié d'un réel développement mais les crises et les licenciements n’ont pas manqué. Plusieurs ensembles d'importance sont ainsi classés comme pôles de reconversion : bassin de Montluçon, d'Issoire-Brassac, de Saint-Étienne, deFigeac-Decazeville ou de Roanne. La plupart des foyers s’est pourtant maintenue : Val d'Allier - qui court depuis Issoire etBrioude jusqu'àVichy et reste dominé par l'agglomération clermontoise, bassins de Saint-Étienne et de Roanne, Yssingelais, sillon du Thoré, sites deThiers, vallée de laDore, Montluçon-Commentry, Limoges,Rodez,Tulle-Brive. En dehors des régions orientales, la répartition inégale de l'industrialisation répond assez bien à celle de l'urbanisation, mais les structures n'offrent guère d'unité et la géographie reste contrastée[6].
À l’échelle du massif, quatre grands secteurs d’activité regroupent la moitié des effectifs salariés. Il s’agit desindustries agroalimentaires (IAA), avec une dynamique positive dans la période récente, de la métallurgie et de la transformation des métaux grâce à de nombreuses petites unités dispersées et à quelques grosses unités déterminantes pour le massif, tant par le volume d’emplois proposés que par la valeur ajoutée créée. S’ajoute le secteur de lachimie, ducaoutchouc et du plastique symbolisé par la firmeMichelin, qui procure environ 18 % de l’emploi industriel total du massif. Le textile, cuir,habillement, représente, sur le papier, le quatrième secteur du massif par l’emploi proposé, mais avec une très forte déperdition de main-d’œuvre. Le Massif central offre aujourd’hui un éventail de productions diversifié et finalement assez compétitif comme en témoigne la multiplication des pôles de compétitivité labellisés par l’État[6].
La fonction touristique suscite de nombreux espoirs chez certains acteurs qui espèrent dans ce massif de moyenne montagne un espace à l'image desAlpes ou desPyrénées. Mais son impact en termes d'emplois est limité, en dehors de quelques espaces spécialisés. La carte du taux de fonction touristique montre ces inégalités : des cantons sont peu concernés (bocages de l'Allier,Limagne,Combrailles et plateauxlimousins, ouestaveyronnais et nordlozérien) alors que de rares foyers s'imposent, parfois méconnus (montagne volcanique enAuvergne,lac de Vassivière en Limousin, haut Allier ethaute-Ardèche, vallées duLot etgorges du Tarn,Cévennes etGrands Causses). Il faut y ajouter des espaces de loisirs et derésidences secondaires, en particulier à l'est (Lyonnais,Forez,Velay etVivarais) profitant du voisinage lyonnais. Enfin, les traditions thermales sont incontestables : l'ancienne région Auvergne détenait le cinquième rang national bien que les stations (Vichy,Le Mont-Dore,La Bourboule,Châtel-Guyon,Royat) s'adaptent très inégalement à la nouvelle donne médicale et ludique. Globalement, la moyenne montagne en tant qu'espace de tourisme souffre d'une faible clientèle potentielle (accès, éloignement) et surtout du manque de moyens ou d'initiatives des ruraux, indifférents ou réticents face à cette activité. Il en résulte encore globalement de faibles capacités d'accueil et des équipements ou hébergements marchands trop peu rénovés en dehors des raresstations de sports d'hiver, la pratique duski de fond restant moindre que dans leJura. La fréquentation est donc diffuse et marquée par la dispersion des lieux, des acteurs et des équipements[6].
La clientèle extérieure au massif est modeste : quelques Parisiens, des vacanciers de l'Ouest ou duMidi, et beaucoup d'« originaires » émigrés revenant au « pays » à la belle saison ; l'aspect ponctuel se retrouve dans la multiplication des résidences secondaires, en particulier autour des grandes agglomérations, dans les « suds » ou dans les secteurs où l'exode a libéré des habitats de caractère[6].
Les évolutions sont pourtant évidentes, probablement moins du fait des politiques touristiques en elles-mêmes que d'un ensemble d'éléments dynamiques « extérieurs ». Parmi ceux-ci, le désenclavement du massif stimule ainsi l'activité touristique tout en proposant des équipements et ouvrages d'art qui constituent en eux-mêmes de véritables attractions (phénomène duviaduc de Millau). Il s'agit aussi de nouvelles pratiques et de nouveaux besoins liées à l'arrivée de nouvelles populations. De même, la présence de parcs à thèmes et d'espaces de scénovision concourt aujourd'hui à offrir une vision plus moderne du territoire. Le Massif central a également une carte à jouer sur le court séjour ou les loisirs, car la région suscite une découverte active ou contemplative d'un patrimoine, de savoir-faire et de paysages devenus rares. Le tourisme dans le Massif central revêt des visages et des caractères très variés, dépassant largement le stade des clichés habituels dutourisme rural. Territoires de l'arrière-pays méditerranéen, territoires convoités par les étrangers, territoires de grands sites culturels, territoires qui s'ouvrent et dont les moyens de transports – anciens comme nouveaux – constituent en eux-mêmes des facteurs d'attrait touristique, bien loin de la simple image des volcans auvergnats et de la « France profonde »[6].
Partout ou presque, les statistiques soulignent que les actifs relevant ducommerce et desservices sont les plus nombreux, les valeurs les plus faibles s’observant dans les vieilles terres agricoles du cœur du massif (monts d’Auvergne,Margeride) ou dans le bastion industriel de l’Yssingelais[6].
Lesemplois tertiaires sont majoritairement urbains, mais les campagnes se sont également « tertiarisées », notamment par le biais du développement des services, avec au passage une part non négligeable d’emplois relevant du secteur touristique. Autre constat statistique : l’Insee nous apprend qu’en 1999, si 109 550 emplois relèvent de l’agriculture dans l’entité Massif central, 102 147 sont fournis par l’éducation, 122 225 par l’administration publique et 186 804 par le secteur de la santé et de l’action sociale. Lesecteur financier, avec quelques solides héritages, joue également un rôle, tandis que le commerce mobilise un nombre important d’actifs malgré de profondes restructurations liées à l’installation de lagrande distribution dont certaines origines sont parfois locales (groupe Casino deSaint-Étienne)[6].
La nébuleuse tertiaire est donc relativement complexe, avec des limites difficiles à tracer, mais dont les chiffres montrent qu’elle occupe plus de la moitié de la population active. La palette des emplois d'anciennes villes industrielles, quasi mono-fonctionnelles, a donc été profondément modifiée par cette montée du tertiaire. Certes, la fonction commerciale héritée des petites villes-marchés reste partout fondamentale : c'est un trait commun pour les organismes urbains sans grande envergure de la moyenne montagne[6].
Mais les services jouent désormais un rôle majeur : administrations et équipements scolaires caractérisent bon nombre de villes moyennes, chefs-lieux départementaux en particulier. Enfin, au niveau supérieur de la hiérarchie, àClermont-Ferrand comme àLimoges ou à Saint-Étienne, l'essor des activités tertiaires a été spectaculaire, s’accompagnant souvent d’importantes opérations d’urbanisme. Direction d'administration, commerces,banques,assurances, services sanitaires et hospitaliers, services éducatifs et de recherche (université, grandes écoles) renforcent aujourd’hui les « métropoles régionales ». Dans les campagnes, les évolutions sont contrastées : l’effacement du commerce traditionnel côtoie l'ouverture desupermarchés. De la même façon, les services enregistrent des évolutions variables : beaucoup se maintiennent, parfois grâce à la mise en place de « maisons des services » soutenues par les collectivités, sans oublier l'essor des services médicaux et paramédicaux : le vieillissement de la population associé à un meilleur encadrement médical que par le passé en sont à l'origine. Il s'agit là d'un des principaux gisements d'emplois[6].
La culture, dans cette zone rurale, est bien moins développée que dans la large ceinture plus urbaine qui entoure le massif. Alors que les produits culturels multimédia sont largement accessibles via internet, lespectacle vivant et les arts picturaux le sont beaucoup moins ; il y a trop peu de structures de diffusion (la distance étant un autre frein). Les artistes sont, à l'image des habitants du massif, globalement peu nombreux.
Toutefois, on observe la présence forte de certaines formes, comme la musique rock soutenue enAuvergne. Certains « pôles » se sont dessinés dans les trois dernières décennies, à l'image d'Aurillac. Abritant le Festival International des Arts de la Rue[17] et son lieu de production, la ville (géographiquement au cœur du Massif central) voit l'apparition d'un pole regroupant l'ensemble des secteurs de ladanse (formation, création, diffusion, pratique amateur, scène conventionnée, enseignement supérieur et secondaire, centre de recherche et ressources, 7 compagnies implantées, 2 festivals, etc.) autour du Centre de Danse, du Mouvement et de l'Image[18] et le développement descultures urbaines.
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Le Massif central est marqué par des traditions musicales fortes et pour certaines encore vivaces, comme celle duviolon en Auvergne et Limousin, de lavielle à roue en Bourbonnais ou de lacabrette. Les musiquesauvergnate etlimousine disposent d'un répertoire de chants, airs et danse varié, collecté tout au long duXXe siècle.
Les espaces et régions couvertes par le Massif central sont partagées entre les trois grands ensembles linguistiques de France : lalangue d'oïl (français), l'occitan et l'arpitan[19].
Entre les deux ensembles que sont l'occitan et le français se situe le Croissant, zone de transition linguistique entre ces deux langues[28]. Cette zone s'étend de l'Est de laCharente jusqu'à l'Allier en passant au nord duLimousin[29].
Le versant oriental, autour du département de laLoire et lesmonts du Lyonnais, est quant à lui du domaine du francoprovençal.
↑Explication de la carte géologique de la France : publiée par ordre de M. le Ministre des travaux publics. Tome 1 / rédigée sous la direction de M. Brochant de Villiers,... par MM. Dufrénoy et Élie de Beaumont,..., 1841-1879(lire en ligne).
↑Simone Escoffier,La rencontre de la langue d'oïl, de la langue d'oc et du francoprovençal entre Loire et Allier : limites phonétiques et morphologiques, Lyon, Thèse de doctorat Lettres Lyon,, 269 p..
↑Le patrimoine linguistique morvandiau-bourguignon au cœur des langues romanes d'Europe. Actes du colloque de Saulieu (3 novembre 2001), Éditions Glacem / « Vents du Morvan », 2005.
↑Claude Régnier,Les parlers du Morvan, « Académie du Morvan »,Château-Chinon, 1979.
↑Maximilien Guérin, « Les parlers du Croissant : des parlers minorisés et marginalisés »,Promotion ou relégation : la transmission des langues minorisées d’hier à aujourd’hui,Université de Poitiers,(lire en ligne).