La famille revient en France après la naissance de Marie. Le père de Marie lui donne ainsi goût à la littérature française, et sa mère l'incite à l'apprentissage de la langue allemande[6]. La maison familiale se trouve près de la ville deMonnaie[6] Durant un séjour à Francfort, elle rencontreJohann Wolfgang von Goethe qui lui donnera une "bénédiction"[7]. De 1819 à 1821, elle est éduquée au couvent desSœurs du Sacré-Cœur de Jésus, dans l'ancienhôtel Biron (actuelmusée Rodin) de l'âge de quatorze à seize ans[8],[9]. Elle poursuit sa formation intellectuelle en Touraine, en étant influencée par de grands écrivains tels queChateaubriand,Rousseau ou mêmeLamartine.
Le, elle épouse le comte Charles Louis Constantd’Agoult ( -), colonel de cavalerie, premier écuyer deMadame la Dauphine qui a laissé d'intéressants mémoires sur laguerre d'indépendance espagnole durant la période napoléonienne[10]. Elle lui donne deux filles :
Louise (1828-1834) ; morte dans les bras de sa mère à l'âge de six ans. « Je la serrai contre mon sein. Elle poussa un cri, et je sentis son corps affaissé peser d’un poids inerte sur ma poitrine[11]. »
En 1833 commence sa liaison avec le compositeurFranz Liszt, rencontré lors d'un concert dans un salon de la noblesse parisienne. La comtesse a alors vingt-huit ans, l'artiste six ans de moins. Malgré leur différence de position sociale, ils éprouvent aussitôt une violente passion réciproque. Sa relation avec son mari est de plus altérée par la mort de leur fille Louise en 1834, quelques mois après le début de sa relation avec Liszt : « Par une de ces duretés de la nature et du sort dont le cœur humain s’étonne, la perte d’un enfant, l’affliction commune, au lieu de nous rapprocher, mon mari et moi, ne fit qu’étendre entre nous la distance et le silence[11] ». Elle quitte son mari pour Liszt en 1835. Ensemble, ils quittent la France et arrivent àGenève le. Puis ils voyagent enItalie, où ils demeurent de 1837 à 1839, séjournant successivement àBellagio,Milan,Venise,Lugano,Modène,Florence,Bologne etRome. Ce sont ces voyages qui ont inspiré au compositeur son cycle de recueils pour piano intituléAnnées de pèlerinage[12].
Trois enfants qu'elle a de Liszt naissent pendant ces années d'errance :
Blandine[13] (1835-1862) épouse en 1857Émile Ollivier, avocat et homme politique français. Ils ont un fils, Daniel ;
Selon SabineCantacuzène, elle aurait en outre eu un garçon,Charles d'Avila, non reconnu parFranz Liszt, adopté et élevé par la famille D'Avila àParme en Italie[15]. Ce garçon pourrait être issu de sa liaison avecLouis Tribert, riche propriétaire foncier dans la région deChampdeniers ; elle séjourna dans son logis de Puyraveau[16]. Selon un des fils Tribert, celui-ci aidait financièrement Marie d'Agoult en lui versant un revenu régulier par le fruit de différents placements boursiers, comme en 1866 où il place pour elle 30 000 francs ; il n'habitait pas avec elle boulevard Malesherbes, mais avec le personnel dans une maison de la rue de Chaillot, « dans l'illusion d'une vie de couple ».
Marie d'Agoult comme son amieGeorge Sand choisit un pseudonyme masculin pour publier ses écrits. Le choix de son pseudonyme fut fait après un dialogue avecÉmile de Girardin : « Je pris machinalement le crayon et j’écrivis Daniel. C’était le nom que j’avais donné à l’un de mes enfants, le nom du prophète sauvé de la fosse aux lions, qui lisait dans les songes[11]. » Elle choisit donc le nom qu'elle donna à un de ses fils comme pseudonyme.
En 1850, elle publie sous le nom de Daniel Stern,Histoire de la Révolution de 1848. Bien que n'ayant pas directement participé aux événements, elle rapporte approximativement les faits et les analyses de façon personnelle[17]. Cette histoire immédiate et contemporaine demeure une référence pour les historiens[18].
En 1846, elle avait publié unEssai sur la liberté. Pour elle, la liberté est attachée à la condition humaine et s'accroît avec la connaissance[18].
Marie d'Agoult est enterrée aucimetière du Père-Lachaise, division 54. Sa tombe est ornée d'un monument commandé par Tribert[19] et sculpté parHenri Chapu (exposé au salon de 1877, inauguration en 1880).
La relation de Marie d'Agoult avecGeorge Sand a été parfois amicale, le plus souvent conflictuelle[20].
En1839, dansBéatrix,Honoré de Balzac fait des allusions directes à Marie d'Agoult qui se reconnaît dans le personnage deBéatrix de Rochefide[21], mais elle apprécie si peu ce portrait qu'elle se met aussitôt à haïr Balzac dès la parution du roman[22]. On reconnaît aussi George Sand dans le même roman, décrite, elle, sous les traits flatteurs deFélicité des Touches, une authentique intellectuelle.
Son amitié a été précieuse àJulie-Victoire Daubié[23], première bachelière de France, qu'elle a mise en relation avec le milieu journalistique[24].
Elle a entretenu une longue correspondance entre 1838 et 1876 avecHortense Allart, femme de lettres, monarchiste conservatrice, amie deSainte-Beuve, maîtresse deChateaubriand en 1829[25].
Victor Hugo, apprenant son décès, n’est pas tendre à son sujet dans ses carnets : « Peu de talent, petite âme[26]. »
Sarah Frydman, sérieLa Symphonie du destin, plusieurs volumes parlent des amours de Marie d'Agoult[27],[28].
Ann Bandle, "L'égérie rebelle de Franz Liszt", Genève, Éditions Slatkine, 2023
CharlesDupêchez,« L’éveil d’une aristocrate aux idées républicaines : le cas de la comtesse Marie d’Agoult, alias « Daniel Stern » », dans Edward Castleton et Hervé Touboul (dir.),Regards sur 1848, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté,(ISBN978-2-84867-539-8,DOI10.4000/books.pufc.22659,lire en ligne),p. 389–410.
Il existe aussi des ouvrages en anglais, allemand et italien.
↑Daniel Stern (Maried’Agoult),« Mes souvenirs », dansMes souvenirs, Calmann Lévy, éditeurs (Bibliothèque contemporaine),(lire en ligne),p. 117–133
↑ab etcLire: Claus Helbing:Die Bethmanns. Aus der Geschichte eines alten Handelshauses zu Frankfurt am Main. Gericke, Wiesbaden 1948. Cette famille figure en 1416 dans leRegistrum parochianorum (registre des paroissiens) deGoslar, puis dans l'élite dirigeante de cette ville passée du catholicisme au protestantisme comme toute la population de Goslar lors de la Réforme, elle s'établit auXVIIIe siècle à Francfort où elle fonde une des plus célèbres maison de banque protestante
↑L'Echo Régional, supplément gratuit au N°3106 du 12 septembre 2008 - Guide du Val d'Oise 2008-2009 : Sur la trace des écrivains
↑a etbDaniel Stern (Maried’Agoult),« Mes souvenirs », dansMes souvenirs, Calmann Lévy, éditeurs (Bibliothèque contemporaine),(lire en ligne),p. 15–27
↑Daniel Stern (Maried’Agoult),« Mes souvenirs », dansMes souvenirs, Calmann Lévy, éditeurs (Bibliothèque contemporaine),(lire en ligne),p. 65–71
↑Daniel Stern (Maried’Agoult),« Mes souvenirs », dansMes souvenirs, Calmann Lévy, éditeurs (Bibliothèque contemporaine),(lire en ligne),p. 151–165
↑Daniel Stern (Maried’Agoult),« Mes souvenirs », dansMes souvenirs, Calmann Lévy, éditeurs (Bibliothèque contemporaine),(lire en ligne),p. 167–192
↑Blandine-Rachel Liszt, née le 18 décembre 1835 àGenève et morte le 12 septembre 1862 àSaint-Tropez. Elle est la première femme de l'homme politique françaisÉmile Ollivier (1825-1913), qu'elle épouse le 22 octobre 1857 àFlorence. Elle meurt à vingt-six ans des suites de l'accouchement de leur fils Daniel, deux mois après lui avoir donné naissance.
↑Cosima Francesca Gaëtana Liszt, née le 18 août 1837 àCôme, épouseHans von Bülow le 18 août 1857 ; elle divorce le 20 juillet 1869 pour devenir l’épouse deRichard Wagner le 25 août 1870. Elle meurt le1er avril 1930 àBayreuth, à 92 ans.
↑Yves-Jean Saint-Martin,Félix Dubois 1862-1945 : Grand reporter et explorateur de Panama à Tamanrasset, Paris, L'Harmattan, 2000,(ISBN978-2-29640-416-8).
↑CharlesDupêchez,« L’éveil d’une aristocrate aux idées républicaines : le cas de la comtesse Marie d’Agoult, alias « Daniel Stern » », dans Edward Castleton et Hervé Touboul (dir.),Regards sur 1848, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté,(ISBN978-2-84867-539-8,DOI10.4000/books.pufc.22659,lire en ligne),p. 389–410