Le 30 juin 2006, Manu Dibango, en concert sur la grande plage de Saint-Nazaire à l'occasion du festival «Plages arrière».
Manu Dibango naît àDouala de parentsprotestants ; Michel Manfred N'Djoké Dibango, son père, est fonctionnaire et issu de l'ethnieYabassi et sa mère, couturière à la maison, appartient à l'ethniedouala. C'est dans la chorale du temple, où sa mère est occasionnellement professeur, qu'il est initié au chant, tandis que legramophone parental lui fait découvrir surtout la musique française, américaine et cubaine amenée par les marins de ces pays débarquant dans le port de Douala avec leurs disques[4].
Sa scolarité commence par l'école du village et se poursuit à « l'école des blancs », où il obtient soncertificat d'études. Son père l'envoie poursuivre ses études en France[5].
Au printemps1949, il débarque àMarseille, où il est accueilli par son « correspondant » M. Chevallier, sévère instituteur deSaint-Calais[6]. C'est dans la famille d'accueil de cette commune deSarthe qu'il passe son adolescence et découvre la culture française. Son autobiographieTrois kilos de café rappelle qu'il est arrivé avec dans son sac 3 kilos de café, denrée rare et chère à cette époque, pour payer ses premiers mois de pension[7]. Ensuite, étudiant àChartres, puis àChâteau-Thierry au début desannées 1950, il y découvre lejazz, joue de lamandoline et y apprend lepiano.
Lors d'un séjour dans un centre de colonie réservé aux enfants camerounais résidant en France àSaint-Hilaire-du-Harcouët[8], il découvre lesaxophone emprunté à son ami Moyébé Ndédi et y rencontreFrancis Bebey. Ce dernier lui apprend les bases du jazz et ils forment un petit groupe jouant de cette musique ; mais c'est àReims, où il prépare lebaccalauréat philo, qu'il s'initie au saxophone et commence à se produire dans les « boîtes » et les bals de campagne, au grand dam de son père, qui lui coupe les vivres en1956, lorsqu'il échoue à la seconde partie du bac[5].
Différents contrats le mènent à la fin de l'année 1956 en Belgique, où il joue dans des orchestres dans des clubs privés, des cabarets : àBruxelles, où il fait la connaissance d'une artiste peintre et mannequin (Marie-Josée dite Coco qu'il épouse en 1957[9]), àAnvers et àCharleroi, où sonjazz s'africanise au contact du milieu congolais dans l'ambiance de l'accession duCongo belge à l'indépendance en1960. Il est notamment chef d'orchestre dans la boîte bruxelloiseles Anges Noirs[10], que les politiciens et intellectuels congolais, en pleine négociation pour l'indépendance de leur pays, fréquentent. C'est là qu'il rencontre leGrand Kallé, qui l'engage dans son orchestre. Ils enregistrent plusieurs disques, qui remportent le succès enAfrique (notammentIndépendance Cha Cha au Congo Léopoldville) et font une tournée auCongo Léopoldville en.
Le couple Dibango prend parallèlement en gérance l’Afro-Negro àLéopoldville, où Manu lance letwist en1962 avec le titreTwist A Léo. En1963, à la demande de son père, il ouvre son propre club auCameroun,le Tam Tam, qui se révèle un échec financier à cause du couvre-feu imposé pendant laguerre civile, si bien qu'il revient enFrance en 1965[11].
En 1967, Manu Dibango trône à la tête de son premierbig band. Il crée et développe son style musical, novateur et urbain et découvre lerhythm and blues. Il participe à une série d’émissions télévisées intituléePulsations, dont le producteur estGésip Légitimus qui encourage le musicien à durcir son propos musical, et urbaniser son inspiration. Gésip le met alors en relation avecDick Rivers etNino Ferrer, vedettes de l'époque ayant aussi participé aux émissionsPulsations deGésip Légitimus. Il joue de l'orgue Hammond pour Dick Rivers pendant six mois, puis est engagé par Nino Ferrer. Ce dernier le fait jouer de l'orgue, puis du saxophone quand il s'aperçoit qu'il sait jouer de cet instrument, avant de lui donner la direction de l'orchestre. En1969, son albumafro-jazzSaxy Party produit chez Mercury (Philips), composé de reprises et de compositions personnelles, le font renouer avec le succès[12].
Manu Dibango utilisa largement les concepts originaux d’émissions de Gésip pour produireSalut Manu, émision qu’il anime brièvement dans lesannées 1980
Dans lesannées 1980, Manu Dibango trouve un accord financier avecMichael Jackson pour l'utilisation de sa chanson dans l'albumThriller, mais ce dernier, par la suite, autoriseraRihanna à utiliser la musique de Dibango pour le titreDon't Stop the Music. La chansonSoul Makossa fait la conquête desÉtats-Unis et lui vaut d'y faire une tournée. Ses accents africains passionnent les musiciens noirs des deuxAmériques, du nord au sud.
Le, Manu Dibango décide d'attaquer les maisons de disques deMichael Jackson et deRihanna (Sony BMG,Warner etEMI) pour avoir utilisé sans autorisation le thème deSoul Makossa[13]. Le tribunal donne sa décision le en déboutant sur la forme le chanteur camerounais. Finalement la procédure se solde par un arrangement financier à l'amiable[14].
Au milieu des années 80 il crée Le Soul Makossa Gang, sa troupe musicale qui le suit partout, avec notamment son pianisteJustin Bowen et la chanteuse camerounaiseSissy Dipoko.
Dans les années 1990, il revisite le patrimoine de la chanson de plusieurs artistes africains. Il est nommé « grand témoin de la Francophonie » auxJeux olympiques d'été de 2016.
En 1997, Dibango crée le Festival Soirs au Village (titre d'une de ses chansons) dans la ville qui l'a accueilli,Saint-Calais. Ce festival a lieu tous les ans depuis.
En 2001, il est invité par Werrason pour une collaboration dans la chanson humanitaireCroix-Rouge de l'albumKibwisa Mpimpa avec la chanteuse Nathalie Makoma.
Manu Dibango en 2006.
En2000, le chanteur guadeloupéenLuc Léandry l'invite sur le titreBondié bon extrait de son albumPeace and love.
Le, la secrétaire générale de l'Organisation internationale de la francophonie,Michaëlle Jean, nomme Manu Dibango «grand témoin de la Francophonie» aux Jeux olympiques et paralympiques de Rio 2016[17]. Il est accompagné sur scène de plusieurs choristes qu'il contribue à mettre en lumière parmi lesquelles la chanteuseTaty Eyong[18].
Le, il passe en vedette au premier Jazz Festival dePort-Barcarès.
En septembre 2022, la ville deSaint-Calais inaugure une sculpture en hommage à Manu Dibango, réalisée par l'artiste plasticien Franck Caulier. L'œuvre est implantée dans le « Jardin des Couleurs » sur les quais de l'Anille[25].
Avec son épouse Coco Dibango, diteson Ange-Gardien, Manu Dibango a une fille : Georgia (morte le, près de trois ans après la disparition de son père, quelques jours avant ses 54 ans), à ses côtés sur scène durant plusieurs années en tant que danseuse et choriste dans divers albums, dont le fameux titreQui est fou de qui, chouchou en 1976 (duo père fille), avant de devenir son manager (1995-2002).
Ils élèvent trois autres enfants : Michel (qui a aussi travaillé aux côtés de son père), James (artiste et musicien connu sous le nom de James BKS[26]) et Marva.
En 1983, quandHervé Bourges est nommé à la tête de la chaîne publiqueTF1, après avoir dirigéRFI, Manu Dibango devient l’un de ses conseillers pour la musique. Les deux hommes, qui se sont connus auCameroun au milieu des années 1970, ont noué une amitié durable. C’est ainsi que le grand public découvre, dans des programmes de début de soirée, lesAfricains deTouré Kunda, lesAntillais deKassav, lesMaghrébinsDjamel Allam ouDjurdjura[36].
De 1992 à 1994, alors que son amiHervé Bourges préside le futur groupeFrance Télévisions, Manu Dibango anime son émission « Salut Manu !» surFrance 3, pour deux saisons. Il devînt ainsi une figure familière à latélévision avec cette émissionhebdomadaire où se croisentchanteurs,musiciens etrappeurs. Il la conçoit comme une« fête du samedi soir » décontractée, où il présente beaucoup de jeunes talents, sans céder au jeu de la promotion. Comme il l’explique, « Salut Manu !» entend« fouiller dans le ventre de Paris pour y trouverDakar,New York ouSarcelles. Là, il y a des gens qui élèvent le débat »[36].
↑Le 11 décembre 2012, dans l'émissionBoomerang d'Augustin Trapenard surFrance Inter, Manu Dibango explique avoir choisi la nationalité camerounaise après l'accession à l'indépendance de son pays :« Manu Dibango et son saxo », surFrance Inter,(consulté le) :« […] Donc on était français effectivement jusqu'en 60. Il y en a qui ont choisi de demeurer français et il y en a qui ont choisi de prendre la nationalité d'origine, dont moi ».
↑a etbFrançois Bensignor (Dans Hommes & Migrations 2020/3 (n° 1330), pages 228 à 233), « Hommage à Manu Dibango », surcairn.info (matières à réflexion),