Durant l'entre-deux-guerres, la Mandchourie est un champ de bataille politique et militaire. L'influence japonaise s'y étend à partir du sud tandis que celle de laRussie soviétique gagne à partir du nord. En1925, l'URSS contrôle le nord de la Mandchourie. Pendant l'époque desseigneurs de la guerre en Chine,Zhang Zuolin s'établit en Mandchourie, mais, étant trop indépendant et menaçant pour le Japon voisin (quioccupait la Corée), il est assassiné par les services secrets de l'armée du Guandong lors de l'incident de Huanggutun. De plus en plus le Japon cherche àvassaliser la Chine et en1931, l'incident de Mukden sert de prétexte à l'invasion japonaise de la Mandchourie, qui est donc formellement détachée de la Chine. Avec les investissements japonais et ses riches ressources naturelles, la Mandchourie devient un puissant bassin industriel japonais. L'administration mandchoue est directement financée par l'empire japonais dont les troupes occupent le territoire.
Le, le Japon déclare la zone indépendante de larépublique de Chine sous le nom d'« État mandchou (Mandchoukouo) ».Changchun, Tchang Tchouen en version romanisée de l'époque (長春), choisie comme capitale, est renommée Xinjing, Hsinking (新京), signifiant « nouvelle capitale ». En1932, installé par les Japonais comme chef de l'exécutif après l'incident de Tientsin,Aihsin Jueluo Puyi est le dernier empereur de ladynastie Qing. En1934, Puyi, sous le nom deKangde (« bien-être et vertu »), est nommé empereur du Mandchoukouo, rebaptisé « Grand Empire mandchou ». De 1931 à1935, le Premier ministre est, dans un premier temps,Zheng Xiaoxu. Peu apprécié, tant par l'empereur que par le peuple, il est démis de ses fonctions, et remplacé parZhang Jinghui, qui reste à ce poste jusqu'en1945.
Selon un document retrouvé en2007 par le journaliste Reiji Yoshida, laKōa-in (Agence de développement de l'Asie orientale) fournit des fonds aux trafiquants de drogue en Chine, en vue de l'utilisation d'une partie des bénéfices de la vente de l'opium, de l'héroïne et de lamorphine au profit des gouvernements d'occupation du Mandchoukouo, deNankin et deMongolie[2].
La majorité des États ne reconnaissent pas le Mandchoukouo. Ladoctrine Stimson desÉtats-Unis, par exemple, était très claire sur le sujet. Les déclarations de laSociété des Nations affirmant que le Mandchoukouo est toujours une partie de la Chine entraînent le retrait du Japon de cette organisation en1934.
Certains États reconnaissent officiellement le Mandchoukouo entre 1932 et1944. Le premier est leSalvador () (leVatican ne le reconnaît pasde jure, maisde facto en[3], avec la nomination d'Auguste Gaspais, comme simple représentant et non pas délégué apostolique), puis l'Espagne franquiste, et les deux partenaires japonais de l'Axe, l'Italie () et l'Allemagne nazie () et enfin d'autres États, tous membres ou partenaires de l'Axe ou occupés par Hitler : laHongrie, laSlovaquie, laRoumanie, laBulgarie, laFinlande, leDanemark, laCroatie. L'Union soviétique reconnaît le Mandchoukouode jure lors duPacte nippo-soviétique du.
Pays reconnaissant le Mandchoukouo.Le cabinet de 1940, avec le Premier ministreZhang Jinghui, en uniforme militaire, troisième au premier rang en partant de la droite.
En 1939, le Mandchoukouo a été réorganisé en dix-neuf provinces et une municipalité spéciale. La municipalité de Harbin a été supprimée et quatre nouvelles provinces ont été ajoutées.
Cet État a disposé de forces armées qui ont joué un rôle symbolique dans les opérations. Ses effectifs étaient de plus de 110 000 hommes à l'origine montant jusqu’à 200 000 hommes répartis dans les armes suivantes :
L'administration japonaise établit dès1932 àBeiyihe, près de Harbin, une unité de recherchebactériologique, dont la mission est l'étude de maladies comme lapeste, lecholéra et letyphus. Dirigée parShirō Ishii, cette unité est transférée àPingfang en1936. Agrandie par mandat impérial et incorporée à l'armée duKantôgun sous le nom d'unité 731, elle procède jusqu'en1945 à des expérimentations sur des milliers de prisonniers humains, en majorité des civilschinois,coréens etrusses, dont des femmes et des enfants.
Afin de développer le territoire au bénéfice de l'Empire, le gouvernement japonais créa laKōa-in, l'Agence de développement de l'Asie orientale, chargée, d'une part, d'assurer le contrôle des richesses pillées par l'armée du Kantôgun, et, d'autre part, de structurer l'occupation, et de soutenir l'effort de guerre.
Selon les travaux menés par un comité conjoint d'historiens composé de Zhifen Ju, Mitsuyochi Himeta, Tōru Kubo etMark Peattie, laKōa-in a supervisé un système detravaux forcés, impliquant dix millions de civils chinois, enrôlés dans lesmines et les usines du Mandchoukouo[9].
« Avec la coopération du Japon, de la Chine et du Mandchoukouo, le monde peut vivre en paix. » Affiche de propagande du Bureau d'Information du gouvernement du Mandchoukouo. Le drapeau du Mandchoukouo et du gouvernement collaborateur chinois — à droite — arbore les couleurs des « Cinq races sous une union » (Hans, Mandchous, Mongols,Huis et Tibétains
En 1931-1932, il y a 100 000 fermiers japonais ; d'autres sources mentionnent 590 760 habitants de nationalité japonaise. D'autres parlent d'une population japonaise forte de 240 000 personnes, augmentant plus tard à 837 000 individus.
À Xinjing, les Japonais composent 25 % de la population. Le gouvernement japonais projette, dans des plans officiels, l'émigration de cinq millions de Japonais au Mandchoukouo entre 1936 et1956. Entre 1938 et 1942, un contingent de 200 000 jeunes fermiers arrive dans le pays ; en adjoignant ce groupe, après1936, ce sont 20 000 familles japonaises complètes qui vivent au Mandchoukouo. Quand le Japon perd la maîtrise des mers et des airs enmer Jaune, cette migration cesse.
Quand l'Armée rouge envahit le Mandchoukouo en 1945, elle capture 850 000 colons japonais.
Pendant l'occupation japonaise, l'éducation se développe, afin de satisfaire les besoins des immigrants du régimeShōwa. Ainsi, les Japonais installent un grand nombre d'écoles et d'universités techniques, jusqu'à compter douze mille écoles primaires au Mandchoukouo, deux cents collèges, cent quarante écoles normales (pour préparer les professeurs), et cinquante écoles techniques et professionnelles. Au total, le système scolaire gère alors six cent mille enfants et jeunes élèves avec vingt-cinq mille professeurs. Il y a également mille six cents écoles privées (avec l'autorisation japonaise), dont cent cinquante écoles demissionnaires, ainsi que vingt-cinq écoles russes àHarbin.
Le Mandchoukouo déclare son indépendance le et, le 20 mars, le nouveau gouvernement annonce que le département des communications va remplacer l'administration chinoise à partir du1er août[11]. Cependant, les militaires japonais maintiennent une telle pression sur les postiers chinois que les autorités deNankin ordonnent un blocus des activités postales. Ces dernières, sous administration chinoise, cessent totalement le. Le département des communications de Xinjing met en place une nouvelle administration avec une telle promptitude que les bureaux sont rouverts le avec l'émission d'une première série courante.
Pour ces timbres, le gouvernement retient deux dessins : lapagode blanche deLiaoyang et le portrait dePuyi. De à, les timbres porteront une inscription de cinqcaractères chinois signifiant « administration postale de l'État mandchou » ; à partir de, l'inscription est composée de six caractères signifiant « administration postale de l'Empire mandchou », indiquant par là le changement de régime. Ces inscriptions ne figurent pas sur des séries de timbres émis à partir de 1935 et destinés à affranchir le courrier à destination de la Chine car cette dernière ne reconnaîtra jamais le Mandchoukouo. Uneorchidée (reconnue comme symbole impérial) apparaît dans le dessin des timbres en 1935. Durant son existence, le Mandchoukouo émet douze séries de timbres courants (y compris ceux pour la Chine), treize séries de timbres commémoratifs, quinze séries d'entiers postaux, deux séries de timbres pour la poste aérienne, des livrets officiels destinés à l'UPU et quelques dizaines de produitsphilatéliques. Les derniers timbres du Mandchoukouo (une série pour la poste aérienne) ne sont pas émis. Commandés tardivement, ils arrivent à Xinjing courant 1945, pour une mise en circulation prévue pour le 20 septembre.
Après la dissolution du gouvernement, les timbres en réserve sont surchargés localement avec des sinogrammes signifiant « république de Chine ». Beaucoup le sont par l'administration deLüshunkou etDalian entre 1946 et 1949.
LeManchuria Daily News, a publié, pour les cérémonies du couronnement, unSouvenir Enthronement supplement avec une typographie très particulière, la couverture est ornée d'un dessin de Catherine Balliet Lum et Eleanor Peter Lum.
↑Voir « Colonial Sovereignty in Manchuria and Manchukuo » par David Tucker, page 87 dansThe state of sovereignty: territories, laws, populations, sous la direction de Douglas Howland & Luise White, Indiana University Press, 2009.
↑Iliyas Sarsembaev,La Question territoriale, enjeu géopolitique et idéologique dans les relations sino-russes, thèse de doctorat, IEP Paris, 2004-2005,p. 47.
↑Philippe Masson,La Seconde Guerre mondiale - Stratégies, moyens, controverses, chronologie, filmographie, Tallandier, 2003, p. 725.
↑Zhifen Ju,Japan's atrocities of conscripting and abusing North China draftees after the outbreak of the pacific war, Joint study of the sino-japanese war, 2002. De ce nombre, 2,7 millions ont trouvé la mort lors des opérations de laPolitique des Trois Tout(三光作戦,Sankō Sakusen?,« tue tout, brûle tout, pille tout »), une stratégie de laterre brûlée.