Après des études secondaires dans sa ville natale, Ludwig Feuerbach part en 1823 étudier lathéologie protestante àHeidelberg sous la direction dePaulus et deCarl Daub(de), ce dernier étant un ardent partisan de Hegel. L'année suivante, « déjà déchiré entre la théologie et la philosophie », et contre l'avis de son père, il décide de se rendre àBerlin suivre les cours de Hegel, et se passionne immédiatement pour la doctrine du maître. Il abandonne alors la théologie pour se consacrer définitivement à la philosophie, et, plus particulièrement, à la défense et à la propagation des idées hégéliennes.
Il passe son doctorat àErlangen, soutenant la thèseDe ratione una, universali, infinita (de la raison une, universelle et infinie), ce qui lui permet d'obtenir en 1828 un poste d'enseignant libre (privat-docent) à l'université de cette ville. La hardiesse de quelques-unes de ses théories lui suscite déjà de nombreux adversaires, et lorsqu'en 1830 il publiePensées sur la mort et l'immortalité (Gedanken über Tod und Unsterblichkeit,Nuremberg) sans nom d'auteur, cet anonymat ne trompe personne. Il y critique les conceptions chrétiennes de l'âme ; reprenant avec talent les arguments desmatérialistes, il refuse l'immortalité à la personne, ne l'accordant qu'à laRaison. Les réactions sont très vives, même de la part de quelques disciples d'Hegel, qui, effrayés par sonathéisme, s'efforcent dans leurs professions de foi de repousser des conséquences qu'on pourrait tirer de leurs propres ouvrages. Après la polémique engendrée par cette publication, considéré par certains comme un ennemi juré de la religion, il doit quitter sa chaire en1832, et, après plusieurs demandes de poste rejetées (la dernière en 1836), il se résigne à renoncer à toute carrière universitaire.
En1837, il épouse une riche héritière, Bertha Loew, dont il a deux filles, ce qui lui permet de se consacrer uniquement à ses écrits. Il s'installe alors àBruckberg, enBavière. En1838–1839, il écrit plusieurs articles dans la revue des hégéliens de gaucheAnnales de Halle. Il y publie en 1839 laContribution à la critique de la philosophie hégélienne qui marque sa rupture avec ce courant de pensée. Plusieurs livres essentiels suivent, mi-philosophiques, mi-religieux, où la religion est implicitement sacrifiée. Au premier rang de ces ouvrages vientl'Essence du christianisme, en 1841. Ce livre lui assure un grand succès,Friedrich Engels parlant « d'effet libérateur », notamment vis-à-vis de l'hégélianisme, et proclamant : « nous devînmes tout d'un coup tous des feuerbachiens ».
Néanmoins, le livre deStirner,L'Unique et sa propriété, qui paraît en 1844, porte de violents coups aux thèses feuerbachiennes, l'Homme qu'il exaltait comme dieu de l'homme est dénoncé comme une nouvelle transcendance, une nouvellealiénation. Feuerbach écrira ensuiteL'Essence de la foi dans l'esprit deLuther, et une série de cours àFrancfort en1848–1849. En 1845,L'Essence de la religion marque une inflexion vers lenaturalisme.
En 1848, en tant que philosophecritique de la religion, il représente beaucoup pour les protagonistes de larévolution allemande de 1848. Des étudiants le pressent même de venir exposer les principes fondamentaux de sa philosophie. Il se rapproche alors dusocialisme, et s'engage en politique. Il se présente aux élections de l'Assemblée nationale de Francfort, mais sans succès. Après l'échec de larévolution allemande et le retour en Allemagne de la Restauration, ses thèses perdent de leur influence dans l'opinion.
À partir de1860, ses conditions matérielles deviennent plus difficiles à la suite de la faillite de la manufacture de sa femme. Il doit alors quitter le château deBruckberg, où il habite, pour rejoindre Rechenberg près deNuremberg. Il y meurt douze ans plus tard, le.
Feuerbach considère que le Dieu personnel est une création humaine. Bien qu'il ne se définisse pas comme athée lui-même, il considère que l'athéisme n'est pas condamnable. Tout au contraire, pour lui la morale provient de la raison et la raison est humaine. Il considère que le divin se trouve dans l'essence de l'homme[1].
Pour Feuerbach, croire enDieu est le signe d'unealiénation de l'homme qui abaisse ses propriétés (liberté,consciencetranscendantale, créativité, etc.) pour les projeter sur Dieu. Les déterminations divines sont les déterminations humaines absolutisées.« L'homme est appauvri de ce dont Dieu est enrichi ». L'homme est donc dépouillé de sa vraie nature, rendu étranger à lui-même, c'est-à-dire, au sens propre, aliéné. La tâche de la critique de la croyance en Dieu est de restituer à l'homme son être perdu en Dieu.
Dans lesPrincipes, Feuerbach corrige le penchant anthropocentrique que comporte sa philosophie de l'homme, pour faire place à une « nature » non dépendante de la raison humaine, et, dans laThéogonie, les thèmes moraux deviennent prédominants comme dans tous les derniers écrits de Feuerbach.
Karl Grün(de):Ludwig Feuerbach, in seinem Briefwechsel und Nachlaß sowie in seiner philosophischen Charakterentwicklung dargestellt. 2 Bände. C. F. Winter, Leipzig 1874. (Digitalisate:Band 1,Band 2)
Adolph Kohut:Ludwig Feuerbach. Sein Leben und seine Werke, nach den besten, zuverlässigsten und zum Teil neuen Quellen geschildert. Mit ungedruckten Briefen von Ludwig Feuerbach und Anselm Ritter von Feuerbach. F. Eckardt, Leipzig 1909.
Werner Schuffenhauer: „Vorwort zu den Gesammelten Werken Ludwig Feuerbachs“, in: Ludwig Feuerbach:Gesammelte Werke, Band 1, Zweite, durchgesehene Auflage, Berlin 2000,(ISBN3-05-000252-2)