Luca Pacioli, ou Luca di Borgo commence ses études àBorgo Sansepolcro enToscane. En 1464, il les poursuit àVenise où il suit les cours de Domenico Bragadino, lecteur public de larépublique de Venise. Il est en même temps le précepteur des trois fils du marchand vénitien Antonio Rompiasi. Dans la cité lacustre, il rédige son premier livre de mathématiques, un traité d'arithmétique probablement conçu pour être utilisé comme livre de texte. Malheureusement, il est perdu. Après avoir quitté Venise en 1470, il rejoint Rome où il rencontre en 1471 le grand humaniste polymatheLeon Battista Alberti. Il y est ordonnémoine franciscain, dès lors, on l'appellera Fra (frère) Luca Pacioli. Il est moine, vers 1476, dans le couventSan Francesco della Vigna de Venise, mais on l'autorise cependant à enseigner les mathématiques. De 1477 à 1480, il enseigne les mathématiques àPérouse, où il achève la rédaction d'un ouvrage d'arithmétique. Ce deuxièmeopus, imprimé en 1478, s'intituleTractatus mathematicus ad discipulos perusinos[n 3]. Il sillonne ensuite l'Italie et y dispense ses cours à Zara (l'actuelleZadar),Florence etUrbino où il œuvre comme précepteur des enfants du duc d'Urbino[n 4],[5].
En 1487, Pacioli retourne à Pérouse, où il s'attelle à la première traduction en italien desÉléments d'Euclide. Sa traduction repose sur le texte latin de Giovanni Campano (1220-1296) qui a lui-même travaillé sur des versions arabes. Elle sera publiée en 1509, malheureusement, aucun exemplaire ne nous est parvenu. En 1489, il retourne à Rome, où il est nommé professeur à l'université La Sapienza. L'année suivante, il enseigne la géométrie àNaples et un an plus tard, il retourne dans son village natal, où il entreprend de rédiger le plus long de ses deux ouvrages majeurs, laSumma de arithmetica geometria proportioni et propotionalita, qui sera publié à Venise en 1494[6].
Alors qu'il se trouve à Venise en pleine révision de l'ouvrageSumma de arithmetica geometria proportioni et propotionalita, il reçoit un message deLudovico Sforza : le duc deMilan l'invite à rejoindre l'académie qui se regroupe dans cette ville. C'est ainsi qu'en 1496, Luca Pacioli se met en route pour la capitale du Milanais. Pendant son séjour à Milan, il prend part aux réunions du palais ducal et se consacre à l'enseignement des mathématiques à l'université. C'est dans cette ville qu'il commence à rédigerDe divina proportione. Dans cet ouvrage, publié en 1509 et dédié à« Son excellence le prince Ludovic Sforza », le mathématicien cite les membres les plus éminents de l'Académie de Milan, dont« les très perspicaces architectes et inventeurs assidus de choses nouvelles », qui compte parmi leurs rangs son amiLéonard de Vinci. Les deux hommes partagent de nombreux points communs, dont le goût de la géométrie, tant dans ses aspects théoriques que pratiques. Léonard avait, par exemple, lu lesÉléments d'Euclide. De la même manière, tous deux sont attirés par l'étude des applications pratiques de la géométrie à l'art, que Pacioli avait découverte grâce àPiero della Francesca[n 5],[8].
À la chute de Ludovic Sforza, en 1499, l'Académie de Milan est dissoute, ce qui pousse, quelques mois plus tard, Luca Pacioli et Léonard de Vinci à se rendre ensemble àMantoue — comme le rapporteGiorgio Vasari — puis à Venise et enfin àFlorence, oùCésar Borgia décerne à Léonard les titres d'architecte militaire en chef et de maître ingénieur. À Florence, Pacioli et De Vinci continuent de collaborer ; c'est d'ailleurs dans cette ville que Léonard réalise la plupart des illustrations deDe divina proportione. C'est dans cette ville, et pendant les premières années duXVIe siècle, que Pacioli s'implique comme jamais dans les affaires de l'Église catholique, à tel point que le papeAlexandre VI le nomme supérieur de l'Ordre franciscain pour laRomagne. Et en 1506, il entre au monastère de Santa Croce de Florence. Mais ce retrait de l'enseignement intensif des mathématiques ne dure pas longtemps. La relation entre Luca et Léonard prend fin — en bons termes à ce que l'on sait — en 1507, quand Léonard part pour Milan et Luca pour Pise, où il reprend à la fois l'enseignement et l'écriture. L'année suivante, il s'installe à Venise, où il s'attache à achever le texte deDe divina proportione, qui sera imprimé en 1509. Cette même année, il publie également sa traduction italienne desÉléments d'Euclide[n 6]. Il enseigne aussi les mathématiques à l’université de Pavie, on le retrouve ensuite àBologne et, en 1510, à Pérouse où il s'établit. Quatre ans plus tard, il met le cap vers Rome, mais peu de temps après, il commence à sentir le poids de l'âge — il avoisine les soixante-dix ans — et décide alors d'arrêter les voyages et de se retirer de la vie active. Cette même année, il rentre dans sa ville natale, San Sepolcro, où il passe les dernières années de sa vie à écrire. C'est là qu'il meurt en 1517. À sa mort, il laisse une œuvre inédite intituléeDe viribus quantitatis (Du pouvoir des nombres)[10].
Première illustration d'unpetit rhombicuboctaèdre en creux par Léonard de Vinci pour laDivina proportione.[11]Lettre A de son alphabet.
Trois ouvrages de Luca Pacioli ont été publiés de son vivant. Deux autres sont parvenus jusqu’à nous sous la forme de manuscrits inédits[n 7]
Summa de arithmetica, geometria, de proportioni et de proportionalita (Venise,1494), résume en dix chapitres l'ensemble des connaissances mathématiques de son époque. Les sept premiers, longs d'un peu plus de deux cents pages, traitent d'arithmétique. Le huitième, de quelque quatre-vingts pages, aborde l'algèbre de l'époque. Le neuvième de cent cinquante pages environ, s'intéresse aux questions commerciales, notamment à la tenue des livres de comptabilité. C'est dans ce texte qu'il présente laméthode vénitienne de tenue des comptes, maintenant connue sous le nom decomptabilité en partie double[12],[n 8]. Pour la première fois, un ouvrage met à la disposition de tous ... des connaissances éparses, enseignées jusque là uniquement par l'apprentissage. La comptabilité devient une matière à enseigner avec son manuel[13]. Le dixième, de près de cent cinquante pages lui aussi, répond à des questions de géométrie pratique[n 9],[15].
De viribus quantitatis, (1496-1508)[16]. Le manuscrit est conservé à la Bibliothèque universitaire de Bologne (Codex n. 250). Il est resté inédit jusqu'à sa publication en 1997[17][n 10]. C’est avant tout un recueil de problèmes mathématiques amusants qui précède de plus d’un siècle la parution desProblèmes plaisants et délectables deClaude-Gaspard Bachet de Méziriac. On y trouve également de nombreux exemples decarrés magiques ainsi que le premier tour demagie de cartes décrit dans un manuscrit[18].
De divina proportione (écrit à Milan entre 1496 et 1498 et publié à Venise en1509[19]). Trois exemplaires du manuscrit existaient. Le premier, dédié à Ludovic le More, est conservé à laBibliothèque de Genève, le second, dédié àGaleazzo Sanseverino, est conservé à labibliothèque Ambrosienne de Milan, le troisième, dédié àPier Soderini, a disparu. La première partie du livre,Compendio de Divina Proportione, traite dunombre d'or, que Luca Pacioli nomme la divine proportion. Cette première partie est illustrée par des planches représentant soixante types depolyèdres. Elles sont dues à Léonard de Vinci. L'œuvre traite aussi de l'usage de laperspective par les peintresPiero della Francesca,Melozzo de Forlì etMarco Palmezzano. La troisième partie de l'ouvrage,Libellus in tres partiales tractatus divisus, est une traduction en italien de l'ouvrage (en latin) de Piero della Francesca sur les cinqsolides de Platon,De Corporibus regularibus, mais n'inclut aucune référence à l'auteur originel.Giorgio Vasari traita Luca Pacioli d'« usurpateur », pour avoir publié sous son nom les écrits de Piero della Francesca qui étaient en sa possession depuis la mort du peintre (voirPlagiat par Luca Pacioli pour plus de détails). L'édition de 1509 comprend une série de xylographies représentant 23 lettres majuscules « exécutées simplement avec la règle et le compas, en utilisant les seules figures du cercle et du rectangle. L'ancien logo « M » duMetropolitan Museum of Art de New York était tiré de cet alphabet[20].
Une édition en latin desÉléments d’Euclide, publiée en 1509, à Venise, par le typographe Paganinus de Paganinis.
Un traité d'abaque, écrit pour ses élèves de Pérouse. Le manuscrit, resté inédit, est conservé à labibliothèque du Vatican. Il y est référencé comme le codice Vaticano Urbinate 3129.
Un traité sur le jeu d'échecs,De Ludo Schacorum. Longtemps considéré comme perdu, un manuscrit de ce traité a été redécouvert en 2006, dans la bibliothèque du Comte Guglielmo Coronini (22 000 volumes) et publié en 2008[21],[22].
↑Certaines sources indiquentRome comme lieu de décès
↑Il rédige ou diffuse des ouvrages écrits en langue vulgaire, l'italien[2]
↑Traité de mathématiques à l'usage des étudiants pérousiens. Rédigé en latin, il était conçu pour servir de référence à l'université de Pérouse. Le contenu de ce traité sera en grande partie réutilisé dans l'une des deux œuvres majeures de Pacioli, laSumma de arithmetica (Résumé d'arithmétiques)[4]
↑Dans une lettre du 19 décembre 1508, adressée au Sénat vénitien, Luca Pacioli fait part de son intention de faire publier ses œuvres complètes. Il y cite une œuvre dont on a perdu toute trace : une traduction en langue vulgaire desÉléments d’Euclide
↑L'ouvrage contient aussi larègle des 72 utilisée en finance
↑Il convient de préciser que presque tous les sujets présentés dans laSumma étaient déjà connus. Pacioli était avant tout un compilateur et un vulgarisateur, et non un chercheur élaborant de nouvelles méthodes ou des théorèmes. Il tenterait néanmoins d'apporter une contribution originale : il essaya de donner aux aspects algébriques une justification logique proche de la rigueur euclidienne[14]
↑Amadeo Agostini publia dès 1924 une longue étude sur le sujet,Il De viribus quantitatis di Luca Pacioli in :Periodico di matematica 4
↑Luca Pacioli,De viribus quantitatis, transcrit par Maria Garlaschi Peirani, éd. Augusto Marinoni, Milan, Ente Raccolta Vinciana, 1997
↑Mathknow: Mathematics, Applied Science and Real Life (Sous la direction de Michele Emmer et Alfio M. Quarteroni) page 193 (en Anglais aux éditions springer).