Louise Bertin naît àBièvres[1] dans la propriété familiale, dont elle hérite plus tard[2]. Elle est la fille deLouis-François Bertin, directeur duJournal des débats, et de Geneviève-Aimée-Victoire Boutard. Avec l'arrêt momentané de son activité de journaliste par la suppression de la presse indépendante en 1811 et de l'infirmité de Louise, atteinte depoliomyélite, incapable de toute activité physique, son père s'occupe personnellement de l'éducation de l'enfant. Sa mère, qui était pianiste, lui enseigne sans doute l'instrument[3],[4]. Elle grandit dans un milieu artistique et littéraire. Son énergie est canalisée dans la peinture et la poésie ainsi que la musique[5]. Dans une lettre envoyée par son frère, elle possédait une certaine maîtrise de la musique à l'âge de quatorze ans[6].
L'Académie royale de musique (vers 1820), où sont données les représentations deLa Esmeralda en 1836.
Elle se forme en privé auprès deFrançois-Joseph Fétis pour le chant, ainsi qu'à la tradition des compositions de style italien. Pour lecontrepoint elle se tourne versAntoine Reicha — un ami deHaydn, dans la mouvance allemande des compositions deMozart,Beethoven etWeber — également professeur deBerlioz et deLiszt[7]. L'influence d'Antoine Reicha est probablement la plus prégnante, cette dernière portant par exemple sur l'emploi decarrures irrégulières, desmodulations inattendues ou bien un usage important des instruments à vents[8].
Lors d'une représentation privée auchâteau des Roches en 1825, Louise Bertin fait jouerGuy Mannering, inspiré duroman homonyme deWalter Scott. Cependant l'œuvre est considérée comme un travail d'apprentie compositrice, puisqu'elle n'a alors que vingt ans et n'a pas fini ses études musicales[9],[10].
Les œuvres principales de Louise Bertin, sont un opéra comique (Le Loup-garou) et deuxopéras proche dugrand opéra,Fausto (1831), ainsi queLa Esmeralda (1836), donné à l’Opéra, avecCornélie Falcon dans lerôle-titre. L'œuvre n'est jouée que six fois, lors de représentations houleuses dues aux querelles politiques dirigées contre leJournal des débats fondé par son père Louis-François Bertin[11]. Le livret écrit parVictor Hugo à partir de son drameNotre-Dame de Paris est également sous le coup de la censure (d'où le changement de titre)[12] : Victor Hugo est alors un poète avec de nombreux détracteurs.Franz Liszt réalise une réduction chant et piano de l'œuvre[13],[14].
Louise Bertin ne jouit pas de la reconnaissance due à la qualité de ses compositions, en raison aussi de la condescendance des critiques envers une femme handicapée[7] (à la suite d'une poliomyélite, elle se déplace avec des béquilles) qui voient dans ses compositions des« consolations à ses infirmités physiques » (journalLe Siècle), alors queBerlioz, qui dirige les répétitions à l'Opéra, atteste dans sa correspondance des qualités musicales et des nouveautés harmoniques d'une œuvre qu'il qualifie de « virile, forte et neuve ». Si« l’opéra survole largement les productions lyriques de l’époque »[14], l'échec deLa Esmeralda détourne la compositrice de la scène[13].
On lui doit également douzecantates, quelques œuvres instrumentales dont sixballades pourpiano, cinq symphonies de chambre (toutes restées en manuscrits), ainsi que, dans le domaine de la poésie, deux recueils de vers.
Elle est notamment citée dansLa Gazette des femmes comme femme de lettres et musicienne, citant ses trois principaux opéras, ses recueils de poèmes ainsi que quelques œuvres de musique de chambre et des mélodies[15].