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Surnommé « le Désiré » par lesroyalistes, il revient en France lors de laRestauration qui suit la chute de l'empereurNapoléonIer. Il est brièvement renversé durant lesCent-Jours, puis revient à nouveau au pouvoir après la bataille deWaterloo, installant pour la première fois en France unrégime parlementaire, certes tempéré par un très strictsuffrage censitaire.
Durant son règne, considérant l'évolution de la France entre1789 et1814,LouisXVIII s'attelle à composer avec les acquis de laRévolution et de l'Empire. Ayant quitté la France à l'âge de35 ans le même jour que la famille royale (qui estreconnue et arrêtée à Varennes), il en a 58 quand son règne commence effectivement après avoir passé23 ans[1]en exil. Il « octroie » au peuple une constitution utilisant un terme d'Ancien Régime, laCharte constitutionnelle de 1814, tout en menant une politique de réconciliation et d'oubli concernant les violences révolutionnaires en tentant de calmer laTerreur blanche. Il compose dans un premier temps avec une chambre parlementaire « plus royaliste que le roi », laChambre introuvable. Mais en1820, après l'assassinat de son neveu leduc de Berry, troisième dans l'ordre de succession au trône et seul mâle en mesure d'assurer la succession au trône, la Restauration prend un tournant plus dur, voireréactionnaire, que le roi laisse mener par le président du conseilVillèle. Son règne est aussi marqué par l'expédition d'Espagne (1823).
Il meurt sans descendance et est inhumé à labasilique Saint-Denis. Il est le dernier monarque français à recevoir ce privilège, et également le dernier mort sur le trône, les trois suivants (roi de France, roi des Français et empereur) ayant été renversés. Son frèrecadet, le comte d’Artois, lui succède sous le nom deCharlesX. La Restauration prend fin avec larévolution de 1830, qui met sur le trôneLouis-Philippe,roi des Français.
Louis Stanislas Xavier est le quatrième fils et le huitième enfant sur treize du couple formé par ledauphinLouis et Marie-Josèphe de Saxe. Tout comme son frère aîné, le futur Louis XVI, il passe son enfance auchâteau de Versailles, où il reçoit une éducation solide. Cultivé, il est finlatiniste. Il a de l'esprit[5], mais n'est pas très aimé de son grand-père, le roi Louis XV, qui le chérit encore moins que ses frères[6].
Une éventuelle initiation à lafranc-maçonnerie en compagnie de ses frères, dans laloge maçonnique dite des « Trois Frères » à Versailles, a parfois été suggérée mais jamais démontrée[10],[11],[12].
Son statut de frère du roi ne l'empêche pas de critiquer la politique de celui-ci. Mécontent et inquiet de la politique royale d'apaisement et d'ouverture aux théories desLumières, Louis Stanislas cherche à s'installer dans laprovince de Languedoc et à en faire son fief, lui permettant ainsi de se ménager une action directe et distincte de celle de frère. En 1775, il sollicite en vain le titre de gouverneur du Languedoc. Il avait même acheté l'année précédente le comté del'Isle-Jourdain qui lui assurait, par laforêt de Bouconne, accès et influence jusque dansToulouse.
Au printemps 1777, un voyage l'amène à Toulouse où il assiste le 21 juin, à une séance de l'Académie des Jeux floraux et entend la lecture de trois odes. En son honneur, les parlementaires de la ville organisent une réception chez le comteRiquet de Caraman. Il s'embarque ensuite auPort Saint-Sauveur et continue son périple sur lecanal du Midi. À chaque étape, les auberges et maisons sont décorées suivant les ordres des Riquet de Caraman, concessionnaires du canal. La décoration de la maison du receveur du canal àAgde est particulièrement soignée pour la réception deMonsieur.
Le jeune comte de Provence.Le comte de Provence en 1794.
Après avoir agité la cour deLouisXVI en facilitant la chute des ministres réformateursTurgot,Necker,Calonne, puis bloqué les réformes proposées par Calonne, en les déclarant inconstitutionnelles en tant que président de l'un des bureaux de l'Assemblée des notables de 1787, il réclame pour letiers état le doublement du nombre de députés auxétats généraux.
Durant l'assemblée des notables organisée à Versailles à la fin de l'année 1788, le comte de Provence vota pour le doublement de la représentation duTiers-État auxétats généraux (généralement perçu,a posteriori comme une des principales causes de la Révolution française[13]), action qu'il reconnaîtra ensuite comme « une des plus grandes fautes » de sa vie[14].
À la suite du départ de la cour deVersailles pour Paris après lesjournées des 5 et 6 octobre 1789, le comte de Provence est installé auPetit Luxembourg. Comme son frère aîné, il ne se sent plus assez libre et prépare un plan d'évasion (il en prépare deux, car son épouse sortira de Paris par un autre moyen).
Dans ses mémoires[15], il explique préalablement avoir corrigé la déclaration deLouisXVI qui explique son départ de Paris, mais à aucun moment, il ne dit avoir eu connaissance, avant le, veille du départ, du plan précis deLouisXVI qui consistait à partir vers l'est afin de rejoindre la place forte deMontmédy et de reprendre militairement la main sur la Révolution.
Le, date du départ du roiLouisXVI et sa famille desTuileries, le comte de Provence quitte également sa résidence surveillée. Déguisé et muni d'un passeport anglais, il rejoint ainsi sans la moindre difficulté lesPays-Bas autrichiens, viaAvesnes etMaubeuge. Il se réfugie àBruxelles puisCoblence, capitale de l’électorat de Trèves, dont un de ses oncles maternels est l’archevêque et le souverain[16].
Il refuse de reconnaître l’autorité du roi et se voit déchu de ses droits de prince du sang par l'Assemblée législative en. Il tente de rentrer en France à la tête d’une armée de 14 000 hommes mais doit rebrousser chemin après labataille de Valmy et se réfugie àHamm, enWestphalie.
En, ayant appris l’exécution de son frère aîné, il se proclame « régent » pour ledauphin, lequel demeure prisonnier des révolutionnaires à Paris, et le proclame roi de France sous le nomde jure deLouisXVII. À la mort de l’enfant, le, il devient le dépositaire légitime de lacouronne de France et prend le nom deLouisXVIII.
Après lecoup d'État du 18 Brumaire et la mise en place duConsulat,LouisXVIII entre en négociations avecNapoléon Bonaparte en vue du rétablissement de la monarchie. Toutefois, après l'explosion de la machine infernale rue Saint-Nicaise le et la découverte de la culpabilité des royalistes, le Premier consul rompt définitivement toute négociation et adresse une réponse sans ambages au prétendant :« Vous ne devez pas souhaiter votre retour en France ; il vous faudrait marcher sur cent mille cadavres... »
En mars 1804, l'enlèvement, puis l'exécution sommaire duduc d'Enghien creusent un profond fossé entre la nouvelle dynastie des Bonaparte et lamaison de Bourbon. En juillet 1804, Louis XVIII subit à Varsovie une tentative d'empoisonnement à l'arsenic visant aussi son entourage familial[20].
Pendant l'année 1804, à la demande deNapoléon, leroi de PrusseFrédéric-Guillaume se résout à se séparer de ses hôtes ;LouisXVIII et les autres émigrés composant sa cour sont priés de quitter le territoire prussien et s'établissent àKalmar, enSuède.
LouisXVIII y invite les princes du sang, dans le but de rappeler aux souverains européens ses prétentions sur le trône de France. Seul lecomte d’Artois, son frère qu’il n’avait pas vu depuis près de douze ans, une certaine froideur ayant toujours existé entre eux, s'y rend, en. L’entrevue de Kalmar ne les rapproche pas ; ils se quittent après dix-sept jours de conférences, assez mécontents l’un de l’autre.
LefuturCharlesX reprend le chemin de Londres et Louis revient àRiga, attendre la réponse du cabinet deSaint-Pétersbourg, à propos d’un nouvel asile sur le sol russe. Le nouvel empereur,AlexandreIer de Russie, qui succédait à son père le tsarPaulIer, donne une suite favorable à sa demande et Louis s'installe à nouveau àMittau, alors enCourlande, dans l'actuelleLettonie, où une cour d'une centaine de fidèles l'a suivi[21].
Une fois réinstallé,LouisXVIII rédige son dernier manifeste public pendant son séjour à l’étranger. Il se décide, cette fois, à accepter nettement la Révolution et ses suites. Non seulement il admet l’amnistie entière pour tous les votes antérieurs à 1804, ainsi que l’engagement de conserver à chaque Français ses grades, ses emplois et ses pensions, il garantit en outre la liberté et l’égalité pour les personnes, le maintien de toutes les propriétés et la protection de tous les intérêts sans exception.
« Au sein de lamer Baltique, en face et sous la protection du ciel, fort de la présence de notre frère, de celle du duc d’Angoulême, notre neveu, de l’assentiment des autres princes de notre sang, qui tous partagent nos principes et sont pénétrés des mêmes sentiments qui nous animent, nous le jurons ! Jamais on ne nous verra rompre le nœud sacré qui unit nos destinées aux vôtres, qui nous lie à vos familles, à vos cœurs, à vos consciences ; jamais nous ne transigerons sur l’héritage de nos pères, jamais nous n’abandonnerons nos droits. Français ! Nous prenons à témoin de ce serment le Dieu de saint Louis, celui qui juge toutes les justices ! Donné à Mittau, le2 décembre de l’an de grâce 1804, et de notre règne le dixième[22] — Louis. »
Cette déclaration, imprimée àHambourg, au nombre de dix mille exemplaires, est répandue sur tout le continent et envoyée enFrance à toutes les autorités constituées, ainsi qu’aux plus notables habitants de chaque département.
Le second séjour àMittau duprétendant ne dure que trois ans. Les défaites d’Austerlitz, d’Eylau et deFriedland aboutissent autraité de Tilsit, signé le, par lequel la France et la Russie deviennent alliées. Alexandre laisse entendre àLouisXVIII que sa présence à Mittau en Courlande pourrait gêner son nouvel allié. Comprenant qu’il devait chercher un nouvel asile et n'ayant plus à choisir qu’entre leNouveau Monde et l’Angleterre,LouisXVIII se décide pour l’hospitalité britannique. Vers le milieu d’, depuisGöteborg enSuède, il avertit le comte d’Artois de sa prochaine arrivée, ce qui n’était pas pour lui plaire. Les confidents du comte d'Artois réussissent à persuader un des membres du cabinet britannique,Lord Canning, qu’il était nécessaire, dans l’intérêt même dugouvernement britannique d’éloignerLouisXVIII deLondres et de le confiner enÉcosse. Le Royaume-Uni est alors la seule puissance encore en lutte avec laFrance impériale et qui refuse àLouisXVIII le titre de roi, en lui signifiant qu’à aucune époque, le rétablissement de sa famille n’avait semblé moins plausible. Après de longues tractations,LouisXVIII accepte de débarquer enAngleterre, comme simple particulier sous le nom de comte deL’Isle-Jourdain (que ses contemporains transformeront en « comte de Lille ») et en promettant de ne pas faire d’action politique sur le sol britannique.
Ses revenus, à l'époque, s’élèvent à 60 000 francs environ[23] que lui payaient le gouvernement britannique et lacour du Brésil, mais il devait mener un train de vie réduit puisque cette somme était répartie entre ses protégés, ses agents dans les différentes cours d’Europe (pour être au courant des politiques menées) et que la guerre entraînait une inflation des prix qui étaient déjà élevés.
Allégorie du retour des Bourbons le :LouisXVIII relevant la France de ses ruines.S. M. Louis XVIII, roi de France & de Navarreaprès avoir signé la Paix dans son Cabinet au Château des Tuileries, estampe gravée en mai 1814, éditée parFrancisque Noël etBance ainé, début XIXe.
Au fur et à mesure desguerres napoléoniennes, et spécialement à partir de 1812, les coalisés semblent reprendre l’avantage, éveillant enLouisXVIII l’espérance du retour.
Après ladéfaite de Napoléon en 1814, les coalisés réunis aucongrès de Vienne hésitent encore sur le successeur à choisir à Napoléon. Désireux d’installer sur le trône de France un allié, mais aussi un chef légitime, ils hésitent entreLouisXVIII, dont l’impopularité pose un problème, le « roi de Rome », fils de Napoléon, mais aussi le maréchalBernadotte ou encoreEugène de Beauharnais, et à défaut une république.Talleyrand emporte finalement l’opinion des Alliés en faveur deLouisXVIII.
Au lendemain de la signature de la convention d'armistice par le comte d'Artois, frère du roi, le samedi 23 avril 1814, il débarque à Calais le.
« Octroyant » uneCharte constitutionnelle restaurant la royauté bourbonnienne à ses sujets, il devientroi de France sous le nom deLouisXVIIIle Désiré[24]. Les termes « octroyer » et « roi de France » sont importants en droit, puisqu’ils signifient que la souveraineté appartient au roi, et non au peuple ou à la nation : c’est lui qui octroie la Charte aux Français et non les Français qui décident d’une constitution ; contrairement à un roi des Français qui serait roi parce que les Français l’ont mis sur le trône, un roi de France est souverain de droit divin. Il nie donc la théorie révolutionnaire de la souveraineté nationale, voire de la souveraineté populaire, comme en témoigne sa devise « union et oubli » (union des Français, oubli de la Révolution française et de Napoléon)[25].
Le 2 mai, Louis XVIII, dans sa déclaration de Saint-Ouen, écarte toute idée de retour à l'Ancien Régime, sans pour autant accepter le projet de constitution d'inspiration monarchique du 6 avril 1814 qui lui est soumis, rédigé par le gouvernement provisoire et le Sénat.
Signataire dutraité de Paris, le 30 mai, il accepte quelques jours plus tard la Charte du 4 juin 1814 que lui soumet la commission de rédaction présidée par le chancelier de France (ministre de la Justice),Charles Henri Dambray.
Mais la Restauration ne dure pas. Confronté au non-paiement de sa pension, attribuée par letraité de Fontainebleau, et devant le mécontentement croissant des Français, Napoléon quitte sonexil de l'île d'Elbe et débarque àGolfe-Juan le.
La défaite deWaterloo, contre cette coalition, le, amène à son tour, en juillet 1815, la réinstallation deLouisXVIII sur le trône de France, aux termes d'un secondtraité de Paris, qui sera signé le 20 novembre 1815.
Ce secondtraité de Paris impose à la France de sévères conditions : paiement d'une lourde indemnité et occupation par les troupes étrangères, conditions que Louis XVIII va s'attacher à adoucir.
Le règne de Louis XVIII est consacré à la lourde tâche de concilier les héritages révolutionnaires et napoléoniens avec ceux de l’Ancien Régime. Il défend ces derniers, sans pour autant accéder aux demandes des plusultras de ses propres partisans.
D'autres n'oublient pas que c'est un ancien émigré, chassé par la Révolution qui a exterminé une partie de sa famille, et ramené sur le trône deFrance avec l'aide d'étrangers.
En même temps, il s'entoure aussi d'anciennes gloires du premier Empire, ralliées à la Restauration. Il nomme même un ancienrégicide,Fouché comme ministre du gouvernement provisoire qui suit son retour.
Il met un point d’honneur à toujours constituer un ministère issu de la majorité parlementaire, ce à quoi rien ne le contraint, préfigurant ainsi leparlementarisme qui se mettra en place en France par la suite.
En septembre 1815, il fait appel, pour diriger le gouvernement, auduc de Richelieu, de tendance libérale, qui a longuement séjourné en Russie durant l'émigration et y a noué des liens d'amitié avec la famille impériale russe, en étant, en particulier, l'artisan du développement de la ville d'Odessa.
Lors ducongrès d'Aix-la-Chapelle, à la fin de 1818, Richelieu obtient, avec le soutien du tsarAlexandreIer, une forte décote de l'indemnité mise à la charge de la France par le traité de Paris du 20 novembre 1815, et le départ des troupes étrangères d'occupation.
Sur un plan diplomatique, lecongrès d'Aix-la-Chapelle marque le retour de la France dans le « Concert des nations », que la Révolution et le régime impérial lui avaient fait quitter[26].
Les opposants de Louis XVIII restent trop faibles et divisés pour menacer en quoi que ce soit la position royale. Le roi dissout ainsi une première Chambre ultra en 1816, la célèbreChambre introuvable.
Ayant accepté les résultats de la Révolution,LouisXVIII apparaît comme un roi modéré, menant une vie de cour sans fastes excessifs, trop fade même aux yeux de certains, particulièrement en comparaison du régime précédent.
Malgré une apparente faiblesse,LouisXVIII réussit non seulement à maintenir un équilibre entre ultras et libéraux, mais aussi à ramener la paix et la prospérité dans une nation épuisée par les dernièresguerres napoléoniennes.
LouisXVIII démontre une certaine force de caractère et il est d'ailleurs capable, à l'occasion, de traits d'humour féroces[27].
Très jaloux de son pouvoir, le roi veut tout contrôler. N'appréciant pas les longs rapports[pas clair], il crée un système d'« anarchie paternelle », cédant souvent aux influences de sa cour, aux nombreuses sollicitations des anciens émigrés spoliés par la Révolution[28].
En vertu dutraité de Paris du 20 novembre 1815, une ordonnance du 8 janvier 1817, suivie par une loi du 15 avril 1818,abolit l'esclavage et la traite négrière.
Les élections partielles du constituent une nouvelle avancée pour les libéraux mais l'élection de l'abbé Grégoire comme député de l'Isère provoque un retournement d’alliance au gouvernement.
En sens inverse, une autre vague de contestation naît avec le violentassassinat, en 1820, de son neveu leduc de Berry, alors troisième à la succession au trône derrière son père lecomte d'Artois et son frère aîné leduc d'Angoulême et seul membre de la famille à pouvoir assurer sa descendance.
LouisXVIII essayant les bottes deNapoléon et préparant la campagne d'Espagne, caricature anglaise deGeorge Cruikshank publiée le.
En 1820, le roi d'EspagneFerdinandVII doit faire face à un soulèvement populaire conduit par les libéraux. Ce mouvement révolutionnaire lui reproche l'absolutisme de son pouvoir et les nombreuses répressions à l'encontre des libéraux.FerdinandVII doit alors se soumettre, et remettre en vigueur laConstitution de 1812 et ainsi confier le pouvoir à des ministres libéraux.
Des élections ont lieu en 1822 auxCortes, qui donnent la victoire àRafael del Riego, dans une Europe secouée par les mouvements démocrates qui perturbent l'ordre intérieur des États.FerdinandVII s'est retiré àAranjuez, où il se considère comme prisonnier des Cortes.
En France, lesultras pressent le roiLouisXVIII d'intervenir. Pour tempérer leur ardeur contre-révolutionnaire, le duc de Richelieu fait déployer le long desPyrénées des troupes chargées de protéger la France contre la prolifération du libéralisme venant d'Espagne et la contagion de la « fièvre jaune ». En, ce « cordon sanitaire » devient un corps d'observation, puis se transforme très vite en une expédition militaire.
Les libéraux négocient leur reddition en échange du serment du roi de respecter les droits des Espagnols.FerdinandVII accepte. Mais le, se sentant appuyé par les troupes françaises,FerdinandVII abroge de nouveau laConstitution de Cadix, manquant ainsi à son serment. Il déclare « nuls et sans valeur » les actes et mesures du gouvernement libéral. C'est le début de la « décennie abominable » pour l'Espagne.
Chateaubriand, ministre des Affaires étrangères du gouvernement Villèle, déclare dans sesMémoires d'outre-tombe : « Enjamber d'un pas les Espagnes, réussir là où Bonaparte avait échoué, triompher sur ce même sol où les armes de l'homme fantastique avaient eu des revers, faire en six mois ce qu'il n'avait pu faire en sept ans, c'était un véritable prodige ! »
LouisXVIII souffre dediabète et d’unegoutte qui empire avec les années[30] et lui rend tout déplacement extrêmement difficile à la fin de son règne. Dans ses dernières années, le roi podagre doit marcher à l'aide de béquilles et est souvent déplacé enfauteuil roulant dans ses appartements, lui-même se baptisant« le roi fauteuil »[31] alors que les plus virulents des bonapartistes, puis le petit peuple, l'affublent du quolibet de « gros cochon » ou « CochonXVIII »[32]. Vers la fin de sa vie, il est atteint d'artériosclérose généralisée, en outre lagangrène ronge son corps devenu impotent et appesanti par l'hydropisie. À la fin du mois d', la gangrène sèche qui a attaqué un pied et le bas de la colonne vertébrale, a provoqué une large plaie suppurante en bas du dos et l'a rendu méconnaissable. Fièrement, il refuse de s'aliter, reprenant les propos deVespasien :« Un empereur doit mourir debout ». Mais, le, sa terrible souffrance l'oblige à se coucher. Il se décompose vivant et dégage une odeur si nauséabonde que sa famille ne peut rester à son chevet. Un de ses yeux a fondu[pas clair] ; le valet de chambre, en voulant déplacer le corps, arrache des lambeaux du pied droit ; les os d'une jambe sont cariés, l'autre jambe n'est qu'une plaie, le visage est noir et jaune[33].
Carrosse funéraire de Louis XVIII, musée des Carrosses.
À 68 ans, le roiLouisXVIII s'éteint le à quatre heures du matin, dans sa chambre dupalais des Tuileries. Sans descendance, c'est alors son dernier frère, lecomte d'Artois, qui lui succède sur le trône à l'âge de 67 ans, devenant le roiCharlesX.
Louis XVIII est le dernier roi de France à être autopsié et embaumé[35] : le pharmacienLabarraque doit asperger le corps d'une solution dechlorure de chaux afin d'arrêter la marche de la putréfaction[36].
L'année du décès en fonction de Louis XVIII (1824) correspond au millénaire de l'accession au trône du premier roi de NavarreEneko Aritza en 824, 36 générations les séparant. Letitre de roi de Navarre, associé à celui de roi de France, sera encore porté par son successeur jusqu'à son renversement en 1830.
Un roi sacré devait avoir des pouvoirs divins (le roi de France, par exemple, guérissait lesécrouelles), et montrer une image d'homme puissant, valide, en bonne santé. Ne pouvant montrer au public qu'un physique diminué,LouisXVIII renonça au sacre.
Cependant, une sculpture deLouisXVIII, en costume de sacre, fut commandée par ses soins en 1815 au sculpteurCortot. Elle est exposée dans la gypsothèque de lavilla Médicis àRome[46].
Différents portraits officiels deLouisXVIII ont été peints, le plus connu et le plus solennel étant celui exécuté parAntoine-Jean Gros, aujourd'hui conservé auMusée de l'Histoire de France, auchâteau de Versailles, dupliqué en peinture et en gravure. Dans la tradition de ce type de portrait, il est représenté debout, en tenue de sacre et en pied, à côté d'une colonne, symbole de stabilité, du trône, symbole de souveraineté, de tous les attributs de cette dernière :sceptre,couronne,main de justice[47]... Plus étonnant, comme il était d'usage de commander en pendant un portrait de la souveraine, le roi demande au même artiste de figurer sa nièce, laduchesse d'Angoulême avec les attributs de la reine de France. Les deux portraits sont placés en vis à vis à l'Assemblée[48].
Le plumeau du chapeau que le roi tient à la main étant fait d'abondantes plumes d'autruches blanches, et son manteau fleurdelisé étant colleté et fourré d'hermine, il suscita l'épigramme intitulé : "leGros l'a peint"(le gros lapin), qui fustigeait le peintre autant que le modèle.
En matière d'art populaire, dans la continuité de la caricature révolutionnaire sousLouisXVI[49],LouisXVIII est notamment figuré en cochon et l'épithète populaire « gros cochon », fréquente[50], est reproduite par la littérature, notamment chezVictor Hugo[51].
L'imagerie populaire et la caricature sont moins originales et diversifiées à son endroit qu'elles ne le seront pourCharlesX[52]. À travers différentes représentations, elles le caricaturent facilement, en mettant en image sa corpulence et son appétit, ce qu'Annie Duprat analyse en constatant que« la mise en image du gros appétit et de la forte corpulence des Bourbons, bien au-delà d'une simple plaisanterie, renvoie à tous les écrits et à toutes les représentations des rois ogres, anthropophages et dévoreurs du peuple par le biais des impôts et de la guerre »[53].
« Je suis comme les femmes pas très jolies, que l'on s'efforce d'aimer par raison. »
— Louis XVIII
« Qui pouvait résister à l’esprit déflorateur deLouisXVIII, lui qui disait que l’on n'a de véritables passions que dans l’âge mûr, parce que la passion n’est belle et furieuse que quand il s’y mêle de l’impuissance et qu’on se trouve alors à chaque plaisir comme un joueur à son dernier jeu. »
« Et les uns accouraient, et les autres se rangeaient : car un roi qui passe, c'est toujours un tumulte. Du reste l'apparition et la disparition deLouisXVIII faisait un certain effet dans les rues de Paris. Cela était rapide, mais majestueux. Ce roi impotent avait le goût du grand galop ; ne pouvant marcher, il voulait courir ; ce cul-de-jatte se fût fait volontiers traîner par l'éclair. Il passait, pacifique et sévère, au milieu des sabres nus. Sa berline massive, toute dorée, avec des grosses branches de lys peintes sur les panneaux, roulait bruyamment »
↑Charles Porset,Hiram sans-culotte ? Franc-maçonnerie, lumières et révolution : trente ans d'études et de recherches, Paris, Honoré Champion, 1998,p. 207.
↑Alec Mellor,Quand les francs-maçons étaient légitimistes, Dervy-Livres, 1986,p. 25.
↑Jean-André Faucher,Histoire de la franc-maçonnerie en France, Nouvelles Éditions Latines, 1968,
↑Google livre "LouisXVIII, le roi politique (1755-1824) de Cédric Gildas, page 116, consulté le 6 juin 2020
↑Sur tous les documents officiels,LouisXVIII se considéra roi depuis 1795 et fit le décompte des années de son règne en conséquence. Néanmoins, il ne sera juridiquement pas roi avant laRestauration en 1814.
↑Le site« Histoire passion » donne approximativement une conversion contemporaine : aux alentours de 385 000 euros, se basant sur la base d’un franc germinal qui valait à l’époque 4,5 grammes d’argent-métal.
↑Jean-Michel Agar,Observations sur le nouveau projet de loi pour la conversion des rentes, Delaunay,,p. 96.
↑Raoul de Cisternes,Le duc de Richelieu, son action aux Conférences d'Aix la Chapelle, sa retraite du pouvoir, Paris, Calmann Lévy,, 411 p.(lire en ligne)
↑Comme le montre l'anecdote suivante : parmi les prérogatives du roi de France, figurait la capacité d’anoblir tout sujet méritant.LouisXVIII se trouvait ainsi assiégé par une horde de quémandeurs qui estimaient à tort ou à raison être de bons candidats à l’anoblissement. Parmi ceux-ci, on peut citer le publicisteGenoud, qui insistait pour que sa lettre d’anoblissement mentionne bien une particule devant son nom.LouisXVIII répondit à son entourage « Eh bien ! puisqu’il veut tant une particule, on va lui en mettre une devant, et une derrière ! » et le solliciteur se fit anoblir sous le nom de « Monsieur de Genoude », Comité permanent d'études lamartiniennes,Actes du congrès, 1961,vol. 3,p. 441 (n. 13). On rapporte aussi le mécompte du philosophe et homme politiqueAntoine Quatremère : sur ordre royal, la particule qu'il avait sollicitée ne fut ajoutée qu'après son nom, ce qui l'aurait obligé à joindre à son patronyme celui deQuincy.
Philipped’Hardouineau,Mémoires sur l’exil de la famille royale, Paris, Vernarel et Tenon,. — Texte publié parAlphonse de Beauchamp dansMémoires secrets et inédits pour servir à l’histoire contemporaine, tome 2, pp. 129-222. — Cette relation, parue sous l’anonymat, est due au vicomte Philippe d’Hardouineau, aide de camp deLouisXVIII. Il accompagna le roi en exil entre 1795 et 1801. Son récit s’attarde plus particulièrement sur le séjour à Mittau ;
Comte Remacle,Relations secrètes des agents de Louis XVIII à Paris sous le Consulat (1802-1803), 1899, Paris, Librairie Plon, 472 pages,lire en ligne ;