Louis XVI est principalement connu pour son rôle dans laRévolution française. Celle-ci commence en 1789 après la convocation desétats généraux pour refinancer l'État. Les députés du Tiers, qui revendiquent le soutien du peuple, se proclament « Assemblée nationale » et mettentde facto un terme à lamonarchie absolue de droit divin. Dans un premier temps, Louis XVIdoit quitter lechâteau de Versailles — il reste le dernier monarque à y avoir habité — pour Paris, et accepte de devenir unmonarque constitutionnel. Mais après la déclaration de guerre de l'Autriche à la France et avant la promulgation de laConstitution de 1791 qui fait de lui le dernier roi de France de la période dite de l'Ancien Régime, la famille royale quitte la capitale pour rejoindre les territoires autrichiens et est arrêtée àVarennes. L'échec de cette fuite a un retentissement important dans l'opinion publique, jusque-là peu hostile au souverain, et marque une fracture entreconventionnels.
Néanmoins, la royauté ne disparaît pas avec lui : après s’être exilés, ses deux frères cadets règnent sur la France sous les noms deLouisXVIII etCharlesX, entre 1814 et 1830. Le fils de Louis XVI, emprisonné à laprison du Temple, avait été reconnu roi de France sous le nom de « LouisXVII » par les monarchistes, avant de mourir de tuberculose dans sa geôle en 1795, sans avoir jamais régné.
Il est le cinquième enfant et troisième fils du dauphinLouis de France (1729-1765), le quatrième avec sa seconde épouseMarie-Josèphe de Saxe. De l'union de ce couple sont nés au total huit enfants :
Peu avant la naissance, Binet, le premier valet de chambre du dauphin, a dépêché auprès deLouisXV, le grand-père du futur bébé, un piqueur de laPetite Écurie pour lui annoncer la naissance imminente alors que le roi avait pris ses quartiers d'été auchâteau de Choisy-le-Roi. Juste après la naissance, le dauphin envoya quant à lui l'un de sesécuyers M. de Montfaucon annoncer cette fois-ci la nouvelle de la naissance proprement dite. Sur la route, Montfaucon croisa le piqueur qui, tombé de cheval puis mort peu de temps après[b 1], n'avait pu porter le premier message. L'écuyer apporta donc au roi les deux messages simultanément : celui de la naissanceà venir et celui de la naissancesurvenue. Ainsi averti, Louis XV donna 10louis au piqueur et 1 000livres à l'écuyer avant de se rendre immédiatement àVersailles.
La nouvelle de la naissance est annoncée aux souverains d'Europe alliés de la couronne ainsi qu'au papeBenoîtXIV. Vers 13 heures, le roi et la reineMarie Leszczyńska assistent à unTe Deum dans lachapelle du château. Les cloches des églises de Paris se mettent à sonner et, le soir, un feu d'artifice est tiré de laplace d'armes et allumé de la main du roi au moyen d'une « fusée courante », de son balcon[9].
Le nouveau-né souffre d'une santé assez fragile durant les premiers mois de sa vie. On dit de lui qu'il a un« tempérament faible et valétudinaire »[10]. Sanourrice, qui est aussi la maîtresse dumarquis de La Vrillière, ne donne pas assez de lait. Sur l'insistance de ladauphine, elle est remplacée par Madame Mallard[a 3]. Du au, le duc de Berry et son frère aîné, le duc de Bourgogne, sont envoyés auchâteau de Bellevue sur les conseils du médecingenevoisThéodore Tronchin, afin d'y respirer un air plus sain qu'àVersailles[a 4].
À l'instar de ses frères, le duc de Berry a pour gouvernante lacomtesse de Marsan,gouvernante des enfants royaux. Cette dernière favorise, d'une part, le duc de Bourgogne en tant qu'héritier du trône, et d'autre part le comte de Provence, qu'elle préfère à ses frères. Se sentant délaissé, le duc de Berry ne la portera jamais vraiment dans son cœur et, une fois sacré roi, il refusera toujours d'assister aux fêtes qu'elle organisait pour la famille royale[a 5]. La gouvernante est notamment chargée d'apprendre aux enfants la lecture, l'écriture et l'histoire sainte. Leurs parents surveillent de près cette éducation, ladauphine leur enseignant l'histoire des religions et ledauphin les langues et la morale. Il leur apprend notamment que « tous les hommes sont égaux par droit de nature et aux yeux de Dieu qui les a créés »[11].
En tant que petit-fils du roi, le duc de Berry est tenu comme ses frères à un certain nombre d'obligations et de rituels : ils assistent tant aux enterrements royaux (qui ne manquent pas entre 1759 et 1768) qu'aux mariages des personnages importants de la cour et se doivent d'accueillir malgré leur jeune âge les souverains étrangers et les hommes d'Église notamment. C'est ainsi qu'en, trois nouveaux cardinaux leur rendent visite : « Bourgogne (âgé de 5 ans) les reçut, écouta leurs discours et les harangua, tandis que Berry (22 mois) et Provence (6 mois), gravement assis sur des fauteuils, avec leur robe et leur petit bonnet, imitaient les gestes de leurs aînés »[12].
L'usage de la cour était que les enfants royaux passassent de leur gouvernante au gouverneur à l'âge de 7 ans. C'est ainsi que le duc de Bourgogne est remis au duc de La Vauguyon le, peu avant son septième anniversaire, quittant ainsi les robes d'enfant pour les habits masculins. Cette séparation d'avec sa gouvernante est difficile pour elle comme pour lui, et le duc de Berry se trouve lui aussi attristé par ce déchirement soudain. Le duc de Bourgogne est admiré par ses parents et par la cour. Intelligent et sûr de lui, il n'en demeure pas moins capricieux et convaincu de sa supériorité. Il questionne un jour ses proches en leur disant « Pourquoi ne suis-je pas né Dieu[15] ? » Tout semble montrer qu'il sera un grand roi.
Un événement anodin va pourtant changer la destinée de la famille royale : au printemps 1760, le duc de Bourgogne tombe du haut d'un cheval en carton qu'on lui avait offert quelque temps plus tôt. Il se met à boiter et les médecins lui découvrent une grosseur à la hanche. L'opération qu'il subit n'y fait rien. Le prince est alors condamné à rester dans sa chambre et ses études sont interrompues. Il souhaite pour être consolé retrouver son petit frère, le duc de Berry. C'est ainsi que dès 1760, le futur roi passe exceptionnellement aux mains du gouverneur avant d'atteindre l'âge de 7 ans. La Vauguyon recrute pour lui un second sous-précepteur[a 6]. Les deux frères sont dès lors éduqués ensemble, le duc de Bourgogne se distrayant en collaborant à l'éducation de son jeune frère, et ce dernier s'intéressant davantage à lagéographie et auxarts mécaniques. L'état de santé du duc de Bourgogne s'aggrave néanmoins et on lui diagnostique en une doubletuberculose (pulmonaire et osseuse). La cour doit se rendre à l'évidence : la mort du prince est aussi imminente qu'inéluctable. Ses parents se trouvent dans « un accablement de douleur qu'on ne peut se représenter »[16]. Dans l'urgence, l'enfant est baptisé le, fait sa première communion le lendemain et reçoit l'extrême-onction le avant de mourir en odeur de sainteté le suivant, en l'absence de son petit-frère, alité lui aussi par une forte fièvre.
Héritier de la couronne de France
La mort du duc de Bourgogne est vécue comme un drame pour ledauphin et ladauphine. Cette dernière déclarera : « rien ne peut arracher de mon cœur la douleur qui y est gravée à jamais »[17]. On installe le duc de Berry dans les appartements de son grand frère.
Louis de France (par Anne-Baptiste Nivelon, 1764), dauphin et père du futur Louis XVI ; mort en 1765.
Louis-Auguste se distingue déjà par une grande timidité ; certains y voient un manque de caractère, comme leduc de Croÿ en 1762 : « Nous remarquâmes que des trois Enfants de France, il n'y avait que Monsieur de Provence qui montrât de l'esprit et un ton résolu. Monsieur de Berry, qui était l'aîné et le seul entre les mains des hommes, paraissait bien engoncé[19]. » Il se montre néanmoins parfois à son aise devant les historiens et philosophes se présentant à la cour[e]. Il fait également preuve d'humour et de répartie[21].La Vauguyon[f] et le prédicateurCharles Frey de Neuville[23] remarquent même chez le jeune homme d'assez grandes qualités pour en faire un bon roi.
Le destin du duc de Berry allait encore être bouleversé par un événement douloureux. Le, ledauphin son père se rend en visite à l'abbaye de Royallieu et revient àVersailles sous la pluie. D'une santé déjà précaire et affligé d'un rhume, il est pris d'une violente fièvre. Il parvient à faire transporter la cour auchâteau de Fontainebleau pour changer d'air, mais rien n'y fait et son état empire au fil des mois. Après une agonie de 35 jours, le dauphin meurt le à l'âge de 36 ans[27]. Ladauphine est effondrée. Elle est d'autant moins disponible pour ses enfants qu'elle a contracté en le soignant le mal dont est mort son mari. Par respect pour lui, elle reprend en main l'éducation de ses enfants et ne change rien au programme exigeant que le feu dauphin imposait à son fils.
À la mort de son père qu'il admirait, le duc de Berry devient doncdauphin de France. Il a 11 ans et a vocation à succéder immédiatement auroi, son grand-père, qui en a 55.
Dauphin de France
Fin de l'éducation
La Dauphine Marie-Josèphe (1760 par Frédou)
Louis-Auguste est désormais dauphin, mais ce changement de statut ne l'exonère pas de poursuivre son éducation, bien au contraire.La Vauguyon recrute un adjoint supplémentaire pour enseigner au dauphin la morale et le droit public : le pèreGuillaume François Berthier. Le gouverneur incite le duc de Berry à penser de lui-même en lui appliquant la méthode dulibre examen. Pour ce faire, il lui demande de rédiger dix-huitmaximes morales et politiques ; le dauphin s'y emploie avec efficacité et parvient à y prôner notamment le libre commerce, la récompense des citoyens ou encore l'exemple moral que se doit d'afficher le roi (allusion à peine voilée aux frasques deLouisXV). L'ouvrage est récompensé par La Vauguyon, qui le fait même imprimer[28]. Le dauphin rédige même un ouvrage dans lequel sont relatées les idées inspirées par son gouverneur :Réflexions sur mes Entretiens avec M. le duc de La Vauguyon ; il y forge notamment sa vision de la monarchie en énonçant par exemple que les rois eux-mêmes « sont responsables de toutes les injustices qu'ils n'ont pas pu empêcher »[29]. Sa mère tempère cet élan libéral en lui inculquant plus encore les préceptes de la religion catholique ; c'est ainsi que le dauphin reçoit le sacrement deconfirmation le et fait sapremière communion le suivant. En grandissant, Berry commence à sortir davantage et pratique l'équitation. Il commence également à se passionner pour l'horlogerie et laserrurerie, deux loisirs qui ne le quitteront plus[30]. L'abbéJacques-Antoine Soldini vient conforter l'éducation religieuse du jeune homme. Cependant, une autre tragédie frappe le jeune prince. Sa mère la dauphine meurt de maladie le 13 mars 1767. À douze ans, le futur roi est orphelin. Sa grand-mère, la reine Marie, meurt en juin de l'année suivante mettant fin à une décennie de deuil pour la famille royale de France. Décennie tragique qui a accompagné le futur Louis XVI dans ses premières années.
Pastel deMarie-Antoinette réalisé parJoseph Ducreux en 1769 à l'intention du Dauphin afin qu'il puisse faire connaissance de sa future épouse.
Le roi veuf et âgé de 58 ans est mis en relation avec une très belle jeune femme de 25 ans et qui n'a guère froid aux yeux. La rumeur prétend même qu'elle a été prostituée. Mariée au frère de son "protecteur", elle peut paraître à la cour sous le titre decomtesse du Barry. Face au scandale, la benjamine des filles du roiMadame Louise, 32 ans, décide de mettre en œuvre un profond et ancien désir : quitter la cour, se consacrer totalement à Dieu et ainsi sauver l'âme de son père. Au printemps 1770, après avoir obtenu l'autorisation de son père, elle entre auCarmel de Saint-Denis, le plus pauvre Carmel de France. Le futur Louis XVI a 15 ans et on prépare de plus en plus ouvertement son mariage.
L'éducation proprement dite du dauphin s'arrêtera avec son « établissement », c'est-à-dire son mariage. Celui-ci sera célébré àVersailles le avec la jeune archiduchesseMarie-Antoinette d'Autriche[31],[32]. À cette occasion, l'abbé Soldini adresse au dauphin une longue lettre de conseils et recommandations pour sa vie à venir, et notamment sur les « mauvaises lectures » à éviter et sur l'attention à porter à son alimentation. Il l'exhorte enfin à toujours rester ponctuel, bon, affable, franc, ouvert mais prudent dans ses paroles[a 8]. Soldini deviendra plus tard le confesseur du dauphin devenu roi.
Mariage avec Marie-Antoinette d'Autriche
Plan du souper du jour du mariage de M. le Dauphin avec l’Archiduchesse Marie-Antoinette célébré le.Archives nationales. K/147/14/2.
Le mariage du dauphin est envisagé dès l'année 1766 parÉtienne-François de Choiseul alors que le futur roi n'a que 12 ans. Leroyaume de France étant sorti fragilisé de laguerre de Sept Ans, lesecrétaire d'État trouve judicieuse l'idée de s'allier avec l'Autriche face au puissantroyaume de Grande-Bretagne. Le roi est convaincu du projet, et dès le, l'ambassadeur d'Autriche à Paris écrit à l'archiduchesseMarie-Thérèse qu'elle « peut de ce moment regarder comme décidé et assuré le mariage du dauphin et de l'archiduchesse Marie-Antoinette »[12]. Lamère du dauphin fait néanmoins suspendre le projet dans le but de maintenir la cour deVienne dans l'expectative, « entre la crainte et l'espérance »[12]. « Suspendre » est le terme approprié, puisqu'elle meurt quelques mois plus tard, le. Le projet de mariage est alors remis sur la table.
Peu après la mort deMarie-Josèphe de Saxe, lemarquis de Durfort est envoyé en mission àVienne pour convaincre la très respectée Impératrice douairièreMarie-Thérèse etson fils des bienfaits politiques de cette union. Les négociations durent plusieurs années, et l'image donnée par le dauphin n'est pas toujours reluisante :Florimond de Mercy-Argenteau, l'ambassadeur d'Autriche à Paris, lui signale notamment que la « nature semble avoir refusé tout don à Monsieur le Dauphin, […], par sa contenance et ses propos ce prince n'annonce qu'un sens très borné, beaucoup de disgrâce et nulle sensibilité »[33]. Malgré ces avis, et malgré le jeune âge des intéressés (15 ans pour Louis-Auguste et 14 pour Marie-Antoinette), l'impératrice voit dans ce mariage l'intérêt de son pays et y donne son accord. Le, Marie-Antoinette renonce officiellement à la succession du trône autrichien et, le, une cérémonie nuptiale est célébrée à Vienne, le marquis de Durfort signant l'acte de mariage au nom du dauphin.
Gravure du mariage de l'archiduchesse Marie-Antoinette avec le dauphin, futur Louis XVI, le 16 mai 1770.
Marie-Antoinette part pour la France le au cours d'un voyage qui durera plus de 20 jours accompagnée d'un cortège d'une quarantaine de véhicules[34]. Le cortège arrive en vue deStrasbourg le. La cérémonie de « remise de l'épouse » s'effectuera au milieu duRhin, à égale distance entre les deux rives, sur l'Île aux Épis. Dans un pavillon construit sur cet îlot, la jeune femme quitte son entourage autrichien, troque ses vêtements autrichiens pour des vêtements français, avant de ressortir outre-Rhin, accueillie par un cortège français et à côté de lacomtesse de Noailles, sa nouvelle dame d'honneur[35]. ÀNancy (devenue Française quatre ans plus tôt), dans l'église de Cordeliers, l'archiduchesse adolescente s'incline devant les tombeaux desducs et duchesses de Lorraine, ses ancêtres, se rappelant que son nom est Marie-Antoinette de Lorraine d'Autriche.
La rencontre entre le dauphin et sa future épouse a lieu le, au pont de Berne, dans laforêt de Compiègne. Le roi, le dauphin et la cour sont là pour accueillir le cortège. À sa descente du carrosse, la future dauphine fait la révérence au roi et est présentée par lui au dauphin conquis mais embarrassé, lequel lui fait un discret baiser sur la joue. Le carrosse royal mène ensuite le roi, le dauphin et sa future épouse auchâteau de Compiègne, où une réception officielle est organisée le soir même pour présenter la future dauphine aux principaux membres de la cour. Le lendemain, le cortège s'arrête aucarmel de Saint-Denis oùMadame Louise s'est retirée depuis quelques mois, puis il se rend auchâteau de la Muette pour présenter sa future épouse aucomte de Provence et aucomte d'Artois, et où elle fait connaissance avec la nouvelle et dernière favorite du roi, lacomtesse du Barry.
Profil en médaillon de la dauphine Marie-Antoinette en 1770, présenté lors de son mariage.
Le mariage officiel est célébré le lendemain à lachapelle du château de Versailles, en présence de 5 000 invités. Là, Marie-Antoinette traverse lagalerie des glaces en compagnie du roi et de son futur époux jusqu'à la chapelle. Le mariage est béni parCharles Antoine de La Roche-Aymon,archevêque de Reims. Le dauphin, ceint ducordon bleu de l'ordre du Saint-Esprit, passe l'anneau au doigt de sa femme et obtient du roi le signe rituel d'assentiment[a 9]. Puis, les époux et témoins signent les registres paroissiaux. Dans l'après-midi, les Parisiens, venus nombreux assister au mariage, sont autorisés à se promener dans leparc du château où lesjeux d'eau ont été actionnés. Lefeu d'artifice prévu le soir même a été annulé à cause d'un violent orage. Le dîner est organisé dans la toute nouvellesalle de spectacle du château édifiée pour l'occasion. Le repas est accompagné par 24 musiciens habillés à la turque. Les époux, eux, mangent très peu[a 10]. Peu après minuit, ils sont accompagnés à la chambre nuptiale. L'archevêque bénit le lit, le dauphin reçoit sa chemise nuptiale des mains du roi et la dauphine des mains deduchesse de Chartres, la plus haut placée des femmes mariées de la cour. L'assistance assiste au coucher des époux, le roi lance quelques grivoiseries et les mariés sont laissés à eux-mêmes[a 11]. Le mariage n'est pas consommé cette nuit-là. À la grande déconvenue de la cour et du peuple, le dauphin se montre incapable de consommer son mariage (et donc de donner des successeurs à la couronne et de légitimer son mariage).
Cependant, les noces continuent d'être célébrées les jours suivants : les époux assistent à desopéras (Persée deLully), des pièces de théâtre (Athalie,Tancrède etSémiramis). Ils ouvrent lebal organisé en leur honneur le. Les festivités se terminent à Paris le où l'on a prévu de tirer un feu d'artifice depuis laplace Louis XV (là où quelques années plus tard le roi Louis XVI et son épouse seront guillotinés). Seule la dauphine a fait le déplacement, le roi ayant voulu rester à Versailles et le dauphin étant las de ces festivités. Alors que la Dauphine etMesdames débouchent sur leCours la Reine, on leur demande de rebrousser chemin. Ce n'est que le lendemain que la jeune princesse apprendra ce qui s'est passé : durant le feu d'artifice, un incendie s'est déclarérue Royale, créant un mouvement de panique ; de nombreux passants ont été écrasés par des voitures et piétinés par des chevaux. Le bilan officiel fait état de 132 morts et des centaines de blessés. Les jeunes époux sont atterrés. Le dauphin écrit aussitôt aulieutenant général de policeAntoine de Sartine : « J'ai appris les malheurs arrivés à mon occasion ; j'en suis pénétré. On m'apporte en ce moment ce que le Roi me donne tous les mois pour mes menus plaisirs. Je ne puis disposer que de cela. Je vous l'envoie : secourez les plus malheureux »[12]. La lettre est accompagnée d'une somme de 6 000livres.
Laconsommation du mariage du dauphin, loin d'être une affaire privée, va rapidement devenir une affaire d'État : par sa descendance, ce n'est pas uniquement sa famille mais la monarchie tout entière que le futur roi doit pérenniser. Mais cette consommation pleine et entière au sens où l'épouse tombe enceinte, ne sera effective que le, soit plus de 7 ans après le mariage du dauphin, mais une première tentative fut révélée en 1773.
Selon l'écrivainStefan Zweig, Louis-Auguste, victime d'une malformation des organes génitaux, aurait tenté chaque nuit d'accomplir sondevoir conjugal, en vain. Ces échecs quotidiens se répercutent dans la vie de cour, le dauphin devenu roi étant incapable de prendre des décisions importantes et la reine compensant son malheur dans des bals et des fêtes. L'auteur avance même que le roi est « incapable de virilité » et qu'il lui est donc impossible « de se comporter en roi »[33]. Puis, toujours selon l'auteur, la vie du couple est rentrée dans l'ordre le jour où Louis XVI a enfin eut le courage de faire confiance à la chirurgie. Néanmoins selonSimone Bertière[30], l'une des biographes deMarie-Antoinette, cette infirmité physique n'a pas été la cause de la longue abstinence des époux, puisque le dauphin ne souffrait justement d'aucune infirmité de ce type. Certes, dès (soit deux mois seulement après le mariage), le roiLouisXV profite d'une absence momentanée du dauphin pour convoquerGermain Pichault de La Martinière, un chirurgien alors réputé. Il lui pose deux questions médicales très précises : « Le jeune prince souffre-t-il d'unphimosis et est-il nécessaire de le circoncire ? Sesérections sont-elles entravées par unfrein trop court ou trop résistant qu'un simple coup de lancette pourrait libérer ? ». Le chirurgien est clair : « le dauphin n'a aucun défaut naturel qui s'oppose à la consommation du mariage. » Le même chirurgien le redira deux ans plus tard en disant que « nul obstacle physique ne s'oppose à la consommation »[30]. L'impératriceMarie-Thérèse d'Autriche s'empare du sujet, refusant de croire que sa fille pourrait être la cause de cet échec, disant « Je ne saurais me persuader que c'est de sa part que cela manque »[30]. En, devenu roi, Louis XVI se fait à nouveau examiner, cette fois-ci parJoseph-Marie-François de Lassone, médecin de la cour ; et en, c'est au docteur Moreau, chirurgien à l'Hôtel-Dieu de Paris, que revient la tâche d'examiner à nouveau le souverain. Les deux médecins sont formels : l'opération n'est pas nécessaire, le roi n'a aucune malformation.
Les docteurs Lassone et Moreau avancent néanmoins plusieurs raisons à ce retard conjugal, le premier parlant d'une « timidité naturelle » du monarque et le second d'un corps fragile qui semble néanmoins « prendre plus de consistance »[30]. D'autres auteurs, comme le biographe Bernard Vincent[a 12], dénoncent quant à eux les coutumes de la cour qui, ajoutées à la timidité du roi et à la fragilité de son corps, ne pouvaient que retarder le moment suprême. En effet, les époux vivent dans des appartements séparés, et seul le roi a le droit de rendre visite à son épouse quand il s'agit de remplir le devoir conjugal. Une fois devenu roi, Louis XVI vit dans des appartements encore plus éloignés de ceux de sa femme qu'auparavant, et les allées et venues vers son épouse se font toujours sous le regard de courtisans curieux, notamment par la traversée dusalon de l'Œil-de-bœuf. L'auteur ajoute que l'éducation prude et pudibonde des deux jeunes époux, au moment où ils étaient éduqués chacun dans leur pays, ne les avait pas disposés à s'abandonner du jour au lendemain aux audaces des relations conjugales. Car les adolescents, en étant tenus de passer leur première nuit ensemble[g], furent subitement confrontés à la vie adulte sans y avoir été préalablement préparés. Et ni leur éducation, ni leur corps à peine pubère ne pouvaient les aider à surmonter cette étape. Peu sûr de lui et peu romantique, Louis XVI trouvera refuge dans l'une de ses activités préférées : la chasse.
Les mois et les années passent sans que de réels progrès soient perçus, le couple delphinal et ensuite royal commençant à s'habituer à cette situation. Marie-Antoinette voit dans cette période une occasion de « jouir un peu du temps de la jeunesse », explique-t-elle àMercy-Argenteau[30]. Un semblant de consommation survient en où la dauphine confie à sa mère : « je crois le mariage consommé mais pas dans le cas d'être grosse »[30]. Le dauphin se précipite quant à lui chez le roi pour lui annoncer la nouvelle. Il semble en vérité que le dauphin n'a pu quedéflorer son épouse sans aller jusqu'au bout. L'attente est récompensée le. Le suivant, la princesse écrit à sa mère : « Je suis dans le bonheur le plus essentiel pour toute ma vie. Il y a déjà plus de huit jours que mon mariage est consommé ; l'épreuve a été réitérée, et encore hier soir plus complètement que la première fois […]. Je ne crois pas être grosse encore mais au moins j'ai l'espérance de pouvoir l'être d'un moment à l'autre »[30]. L'accomplissement du devoir conjugal portera son fruit à quatre reprises puisque le couple royal aura autant d'enfants, sans compter unefausse couche en :Marie-Thérèse Charlotte (née en 1778),Louis-Joseph (né en 1781),Louis-Charles (né en 1785) etMarie-Sophie-Béatrice (née en 1786). Après ces quatre naissances, les époux n'entretiendront plus de relations conjugales. Ces échecs et cette nouvelle abstinence donneront au roi l'image d'un roi soumis aux volontés de sa femme. La longue route vers la consommation a terni au fil du temps l'image du couple. Et l'écrivain Simone Bertière d'affirmer : « une chasteté volontaire, respectueuse du sacrement conjugal, aurait pu être portée à son [celui de Louis XVI] crédit après le libertinage de son grand-père. Mais le ridicule des années stériles collera à son image, tandis que celle de la reine ne se remettra pas de sa course imprudente aux plaisirs frelatés »[30].
Quatre années de vie du couple delphinal
Entre le mariage du dauphin et son accession au trône s'écoulent quatre années, pendant lesquelles Louis-Auguste est volontairement éloigné du pouvoir par le roi, comme ce dernier le faisait auparavant avec son propre fils. Il met donc son temps à profit pour présider les cérémonies officielles, la chasse (à courre ou au fusil), les salons deMesdames et la fabrication de clés et de serrures. Chez ses tantes, le dauphin rencontre ses tantes et ses frères accompagnés le moment venu par leurs épouses[36]. Les jeux, divertissements etpièces de théâtre du répertoire français y occupent une place importante pour des princes et princesses au sortir de l'adolescence. Chaque participant y fait souvent l'acteur, y compris ladauphine ; le dauphin, lui, y est peu enclin.
Le couple se montre volontiers en public, notamment en prodiguant quelques instants de réconfort auprès des plus pauvres. L'historienPierre Lafue écrit que « populaires sans l'avoir cherché, les deux époux frémissaient de joie en écoutant les acclamations monter vers eux, dès qu'ils paraissaient en public »[13]. Leur première visite officielle àParis et au peuple parisien se déroule le. Lors de cette journée, le couple a reçu un accueil des plus chaleureux et la foule nombreuse n'a cessé de les acclamer. Au programme de cette longue journée, Louis-Auguste et son épouse ont été reçus àNotre-Dame, sont montés prier devant lachâsse deSainte Geneviève dans l'abbaye du même nom avant de finir par une promenade dans lesTuileries, ouvertes à tous pour l'occasion[a 13]. L'ambassadeur AutrichienMercy-Argenteau résume la journée en affirmant que « cette entrée est d'une grande conséquence pour fixer l'opinion publique »[12]. Le couple prend goût à ces accueils triomphaux et n'hésite pas, dans les semaines suivantes, à sortir à l'Opéra, à laComédie-Française ou encore à laComédie-Italienne.
Les premiers symptômes de la maladie apparaissent le précédent. Ce jour-là, le roi est àTrianon et a prévu d'aller chasser avec son petit-fils et héritier, le dauphin. Se sentant fiévreux, le monarque suit la chasse à bord d'une calèche. Quelques heures plus tard, son état s'aggrave etLa Martinière lui ordonne de retourner àVersailles. Il y subit unesaignée mais celle-ci ne produit aucun effet ; deux jours plus tard, le, les médecins font savoir que le roi a contracté lavariole, comme plusieurs membres de sa famille auparavant (notammentHugues Capet ou encorele Grand Dauphin). Pour éviter la contagion, le dauphin et ses deux frères sont maintenus à distance de la chambre royale. Le visage du roi est couvert de pustules le. Ne se faisant plus guère d'illusions sur son état de santé, il fait venir son confesseur, l'abbéLouis-Nicolas Maudoux, dans la nuit du. L'Extrême-Onction lui est administrée le au soir.
Vers 16 heures le lendemain, le roi rend son dernier soupir. Leduc de Bouillon,grand chambellan de France, descend alors dans lesalon de l'Œil-de-bœuf pour y crier la célèbre formule : « Le roi est mort, vive le roi ! »[a 14]. Entendant cela de l'autre bout du château, le tout nouveau monarque jette un grand cri[30] et voit accourir vers lui les courtisans venus le saluer ; parmi eux lacomtesse de Noailles, qui sera la première à lui décerner le titre de Majesté. Le roi s'écrie : « Quel fardeau ! Et l'on ne m'a rien appris ! Il me semble que l'univers va tomber sur moi ! »[13]. La reine Marie-Antoinette aurait quant à elle soupiré : « Mon Dieu ! protégez-nous, nous régnons trop jeunes »[30].
Aussitôt après la mort de Louis XV, la cour se réfugie provisoirement auchâteau de Choisy-le-Roi, afin d'éviter tout risque de contagion et de quitter l'atmosphère empuantie duchâteau de Versailles. C'est à cette occasion que le nouveau roi prend l'une de ses premières décisions : celle d'inoculer l'ensemble de la famille royale contre lavariole[a 15]. Le but de cette opération est d'administrer à très faible dose dans le corps humain des substances contaminées, le sujet devenant par la suite immunisé à vie. Néanmoins, le risque est réel puisqu'une dose trop importante peut faire contracter la maladie et par là causer la mort du patient. Le, le roi reçoit donc cinq injections et ses frères seulement deux chacun[h]. Les premiers symptômes de la variole apparaissent rapidement chez le roi : il souffre de douleurs aux aisselles le, est pris de fièvre et de nausée le 24 ; quelques boutons apparaissent le 27 et une légèresuppuration survient le 30. Mais la fièvre retombe le et le roi est définitivement hors de danger. L'opération est donc un succès, tant pour lui que pour ses deux frères chez qui les symptômes ont été presque imperceptibles[a 16].
Parmi les premières décisions notables du nouveau monarque, nous pouvons en relever trois autres : il fait enfermerMadame du Barry[i] et prend le nom deLouis XVI et non celui deLouis-AugusteIer comme la logique le voudrait, afin de se placer dans la lignée de ses prédécesseurs. Enfin, il convoque tous les ministres en place,intendants de province et commandants des forces armées neuf jours plus tard. Pour l'heure, il s'isole dans son bureau pour travailler, correspondre avec les ministres, lire des rapports et écrire des lettres aux monarques européens.
Le nouveau roi décide de gouverner seul et n'envisage pas de déléguer cette tâche à un chef de gouvernement. Néanmoins, il lui faut un homme de confiance et d'expérience pour le conseiller dans les décisions importantes qu'il aura à prendre. C'est la tâche de l'homme qu'on appelle officieusement le « Principal ministre d'État ». Louis XVI en nommera successivement sept pendant son règne :
Charles Gravier de Vergennes (1781-1787) : il exerce ce pouvoirde facto car officiellement le roi se passe de principal ministre pendant cette période ;
Marie-Antoinette suggère au roi de nommer à cette fonction leduc de Choiseul, ancien ministre deLouisXV tombé en disgrâce en 1770. Le roi refuse de le nommer principal ministre d'État mais consent tout de même à le réintégrer à la cour. Il assiste à l'entrevue entre celui-ci et la reine et lui lance en guise d'affront : « Vous avez perdu vos cheveux, vous devenez chauve, votre toupet est mal garni »[15].
« Monsieur, dans la juste douleur qui m'accable et que je partage avec tout le Royaume, j'ai pourtant des devoirs à remplir. Je suis Roi : ce seul mot renferme bien des obligations, mais je n'ai que vingt ans. Je ne pense pas avoir acquis toutes les connaissances nécessaires. De plus, je ne puis voir aucun ministre, ayant tous été enfermés avec le Roi dans sa maladie. J'ai toujours entendu parler de votre probité et de la réputation que votre connaissance profonde des affaires vous a si justement acquise. C'est ce qui m'engage à vous prier de vouloir bien m'aider de vos conseils et de vos lumières. Je vous serai obligé, Monsieur, de venir le plus tôt que vous pourrez à Choisy, où je vous verrai avec le plus grand plaisir »[15].
Deux jours plus tard, le, le comte de Maurepas vient auprès du roi àChoisy pour lui témoigner sa reconnaissance et s'engager à son service. Ayant à ses côtés un ministre d'État, il ne reste plus au roi qu'à convoquer le premierconseil au cours duquel il lui faudra décider s'il garde ou non les ministres déjà en place. Ce premier conseil n'aura pas lieu à Choisy mais auchâteau de la Muette, la cour ayant dû à nouveau déménager carMesdames souffrent des symptômes de lavariole. Le premierconseil se tient donc auchâteau de la Muette, le. Le nouveau roi n'y prend aucune décision, se limitant à faire plus ample connaissance avec les ministres en place et à leur donner la ligne de conduite qui doit être la leur : « Comme je ne veux m'occuper que de la gloire du royaume et du bonheur de mes peuples, ce n'est qu'en vous conformant à ces principes que votre travail aura mon approbation »[15].
Le roi procède à unremaniement des ministres progressif. Le changement commence le par la démission duduc d'Aiguillon, secrétaire d'État de laGuerre et desAffaires étrangères. Loin de l'exiler comme le veut la coutume, le roi lui alloue la somme de 500 000 francs. D'Aiguillon est remplacé aux Affaires Étrangères par lecomte de Vergennes, diplomate réputé pour être compétent et travailleur, « le plus sage ministre que la France eût rencontré depuis longtemps, et le plus habile qui se trouvât aux affaires en Europe » selon l'historienAlbert Sorel[41].
Le, en lacathédrale de Reims, il est sacré selon la tradition remontant àPépin le Bref. Le dernier sacre, celui de Louis XV, a eu lieu le ; depuis, le principe même de cette cérémonie a été très critiqué par le mouvement desLumières : L'Encyclopédie et lesphilosophes critiquent le rituel, n'y voyant qu'un exacerbation du pouvoir de Dieu et une comédie destinée à maintenir les peuples dans l'obéissance[42]. Lecontrôleur général des finances,Turgot, reproche au monarque cette cérémonie coûteuse évaluée à 760 000livres ; peu de temps auparavant,Nicolas de Condorcet a écrit à Turgot pour lui demander de faire l'impasse sur « la plus inutile et la plus ridicule de toutes les dépenses » de la monarchie. Turgot pense alors à faire une sorte de sacre allégé, probablement près de la capitale, àSaint-Denis où àNotre-Dame, pour réduire les coûts[42]. Cependant, pieux et très attaché à l'œuvre de ses prédécesseurs, même s'il est décidé à redresser la situation économique mal en point, le roi ne recule pas là-dessus et maintient la cérémonie avec autant de faste que prévu.
Lacathédrale Notre-Dame de Reims, lieu emblématique des sacres des rois de France, est métamorphosée pour les festivités, un véritable bâtiment étant construit à l'intérieur, avec balustrade, colonnes, lustres, faux marbres… C'est aussi la première fois depuisLouisXIII que le roi est marié au moment de son sacre, ce qui rend possible le sacre de son épouse consort. Mais le dernier sacre d'une reine, celui deMarie de Médicis le à labasilique Saint-Denis, avait eu lieu comme un sombre présage,HenriIV ayant été assassiné le lendemain ; du reste la reine, dans la construction absolutiste du pouvoir, avait vu son importance politique diminuer. Décision est finalement prise de ne pas sacrer Marie-Antoinette. Elle assiste à la cérémonie depuis la plus grande des tribunes, avec les femmes importantes de la Cour[42].
La cérémonie est présidée par l'archevêque de ReimsCharles Antoine de La Roche-Aymon, celui-là même qui avait baptisé et marié le dauphin. La cérémonie dure près de six heures - une loge permettant aux spectateurs de se reposer a été aménagée derrière la tribune de la reine[42] ; toutes les étapes ont lieu, le lever du roi, l'entrée, le serment, le rituel de chevalerie, les onctions, la remise des insignes, le couronnement, l'intronisation, la grand-messe, l'hommage des pairs, la messe-basse et la sortie. Toutefois la cérémonie omet, intentionnellement, le serment du roi devant « Dieu, le clergé et le peuple »[43]. Selon la tradition, le prélat prononce la formule suivante en posant lacouronne deCharlemagne sur la tête du souverain : « Que Dieu vous couronne de la gloire et de la justice, et vous arriverez à la couronne éternelle »[15]. Conformément au rituel, le roi se rend ensuite dans le parc de la ville pour guérir lesécrouelles des quelque 2 400 scrofuleux venus pour l'occasion, leur adressant à chacun la formulecérémoniale : « Le roi te touche, Dieu te guérisse ».
Le couple royal gardera un très bon souvenir de la cérémonie et des festivités consécutives.Marie-Antoinette écrira à sa mère que « le sacre a été parfait […]. Les cérémonies de l'Église [furent] interrompues au moment du couronnement par les acclamations les plus touchantes. Je n'ai pu y tenir, mes larmes ont coulé malgré moi, et on m'en a su gré […]. C'est une chose étonnante et bien heureuse en même temps d'être si bien reçu deux mois après la révolte, et malgré la cherté du pain, qui malheureusement continue »[44].
Premières mesures économiques et financières de Turgot
À peine la cour revenue àVersailles le, le roi s'entretient quotidiennement avecTurgot pour préparer les mesures de redressement économique du pays. L'anciencontrôleur général des finances, l'abbéTerray, avait suggéré une proclamation officielle debanqueroute de la France, devant le déficit de 22 millions delivres existant à l'époque[a 20]. Turgot refuse de proposer la banqueroute et suggère un plan plus simple : faire des économies. Il dit pour cela au monarque : « Si l'économie n'a précédé, aucune réforme n'est possible »[15]. Il encourage donc le roi à poursuivre la réduction des dépenses de la cour qu'il avait déjà commencée.
Depuis leXIVe siècle jusqu'en 1771, lesParlements disposaient d'importants pouvoirs en matière civile, politique et judiciaire. Parmi les 15 parlements existant à la fin du règne deLouisXV, la compétence duParlement de Paris s'étendait sur les 75 % duroyaume de France. Chaque décision d'un parlement avait valeur de loi ; de plus, chaque décret royal ne pouvait être applicable que s'il avait préalablement été enregistré (c'est-à-dire avalisé) par le parlement compétent. Au fil des siècles, le pouvoir des parlements n'avait cessé de s'étendre au point de devenir un pouvoir autonome pouvant rivaliser avec l'absolutisme royal. Une brochure parlementaire de 1732 ira loin dans ce sens en précisant que le roi « ne peut contracter avec ses peuples que dans le sein du parlement, lequel, aussi ancien que la Couronne et né avec l'État, est la représentation de la monarchie tout entière »[15]. Las de cet accroissement des pouvoirs des parlements, Louis XV et avec lui le chancelierMaupeou entreprennent en 1771 de retirer purement et simplement aux parlements leurs pouvoirs, charges et privilèges qu'ils s'étaient octroyés au fil du temps. La nouvelle magistrature, organisée enConseils supérieurs, fut cantonnée à rendre justice gratuitement et limitée dans sondroit de remontrance.
Dès son avènement, Louis XVI va revenir sur cette réforme. Le, il convoque tous les magistrats exilés à une réunion qu'il présidera le suivant aupalais de justice de Paris. Devant les parlementaires réunis, il leur adresse ces mots : « Je vous rappelle aujourd'hui à des fonctions que vous n'auriez jamais dû quitter. Sentez le prix de mes bontés et ne les oubliez jamais ! […] Je veux ensevelir dans l'oubli tout ce qui s'est passé, et je verrais avec le plus grand mécontentement des divisions intestines troubler le bon ordre et la tranquillité de mon parlement. Ne vous occupez que du soin de remplir vos fonctions et de répondre à mes vues pour le bonheur de mes sujets qui sera toujours mon unique objet »[15]. Le soir même, des feux d'artifice sont lancés aupont Neuf et au palais de justice pour saluer ce retour[a 22].
Attentif à son image auprès du peuple et confiant dans les conseils de Maurepas face à la complexité du sujet, Louis XVI revient donc sur des privilèges que Maupeou qualifiait au moment de son renvoi de « procès qui durait depuis trois cents ans »[13] et qu'il avait fait gagner au roi. Ce rappel des parlements va rendre illusoires les tentatives de réformes profondes que le roi envisagera d'entreprendre les années suivantes, ce qui contribuera à nourrir le climat révolutionnaire qui se prépare déjà.Madame Campan, femme de chambre deMarie-Antoinette, écrira plus tard que « le siècle ne s'achèverait pas sans que quelque grande secousse vînt ébranler la France et changer le cours de ses destinées »[13].
Pour assurer le devenir du royaume,Turgot va entreprendre une profusion de réformes visant à débloquer le libre fonctionnement politique, économique et social de la société, et à mettre au pas les parlements.
Comme l'explique en 1854 l'historienVictor Duruy : « C’étaient là de bien grandes nouveautés ; Turgot en projetait d’autres plus redoutables : abolition descorvées qui pesaient sur les pauvres ; établissement sur lanoblesse et leclergé d’un impôt territorial ; mais amélioration du sort des curés et vicaires, qui n’avaient que la plus petite portion des revenus de l’Église, et suppression de la plupart desmonastères ; égale participation de l’impôt par création d’uncadastre ;liberté de conscience et rappel desprotestants ; rachat des rentes féodales ; un seul code : un même système de poids et mesures pour tout le royaume ; suppression desjurandes etmaîtrises qui enchaînaient l’industrie ; la pensée aussi libre que l’industrie et le commerce ; enfin, comme Turgot s’occupait des besoins moraux aussi bien que des besoins matériels, un vaste plan d’instruction publique pour répandre partout les Lumières »[45].
Turgot souhaite en effet abolir plusieurs pratiques jusqu'alors bien établies : suppression desjurandes etcorporations, suppression de certaines coutumes interdisant par exemple aux apprentis de se marier ou excluant les femmes des travaux debroderie[a 24]. Abolition aussi duservage et de lacorvée royale. Dans le plan de Turgot, la corvée serait remplacée par un impôt unique à tous les propriétaires fonciers, ce qui étendrait le paiement de l'impôt aux membres du clergé et de la noblesse.
Turgot s'attelle aussi à un projet « révolutionnaire » de mise en place d’une pyramide d’assemblées élues à travers le royaume : municipalités de communes, d’arrondissement puis de province et une municipalité de royaume. Lesdites assemblées ayant pour but de répartir l'impôt direct, de gérer les questions de police, d'assistance et de travaux publics.
Ce vaste projet de réformes ne manque pas de rencontrer un certain nombre de détracteurs, à commencer par les parlementaires. Turgot peut compter sur l'appui du roi, qui ne manque pas à plusieurs reprises de pratiquer le « lit de justice » pour appliquer ses décisions. À partir d'une remarque d'un ouvrier de sa forge, il dira encore en : « Je vois bien qu'il n'y a que Monsieur Turgot et moi qui aimions le peuple »[46]. Le soutien du roi est perçu comme capital pour le ministre, qui dira au souverain : « Ou vous me soutiendrez, ou je périrai »[13]. Les opposants se font de plus en plus nombreux et dépassent au fil du temps le cercle des parlementaires. Une coalition se forme contre Turgot et regroupe, aux dires deCondorcet, « la prêtraille, les parlements routiniers et la canaille des financiers »[13]. Certes, le peuple et les paysans accueillent à bras ouverts les édits abolissant les maîtrises, les jurandes et la corvée royale ; des troubles éclatent même à la suite de l'excès d'enthousiasme[a 25]. Néanmoins, le roi commence à recevoir des lettres de remontrance des parlements, et à essuyer des critiques émanant de la cour. Louis XVI tempère et rappelle aux parlements que les réformes entreprises n'ont pas pour but de « confondre les conditions »[13] (clergé, noblesse, tiers-état).
Le ministre commence à baisser dans l'estime du roi, qui ne se prive pas de dire que « M. Turgot veut être moi, et je ne veux pas qu'il soit moi »[47]. La disgrâce devient inéluctable quand Turgot prend part au vote visant à démettre de ses fonctions lecomte de Guines, ambassadeur à Londres, accusé de pratiquer une diplomatie visant à faire entrer la France dans la guerre. De Guines est un ami de Marie-Antoinette et cette dernière demande au roi de punir les deux ministres ayant demandé la démission du comte, à savoirMalesherbes etTurgot. Écœuré par cette demande, Malesherbes démissionne du gouvernement en. Le roi prend ses distances avec Turgot et condamne l'ensemble de ses réformes : « On ne doit pas faire des entreprises dangereuses si on n'en voit pas le bout. », affirme Louis XVI[12]. Le, une double nouvelle éclate : Turgot est renvoyé, et le comte de Guines est fait duc. Turgot refuse la pension qui lui est proposée, énonçant qu'il ne doit « pas donner l'exemple d'être à la charge de l'État »[48].
Certains historiens[a 26] réfutent l'idée selon laquelle le roi avait purement et simplement cédé à sa femme. La décision de congédier Turgot (et surtout d'élever de Guines) serait davantage l'« achat » du silence du comte, lequel aurait été au courant de beaucoup de choses sur la diplomatie française risquant de mettre le roi dans l'embarras. Une autre raison du renvoi résiderait aussi dans le refus de Turgot de financer l'intervention de la France dans laguerre d'indépendance des États-Unis, le mauvais état des finances du Royaume ne le permettant pas. Quoi qu'il en soit, cet épisode sera pour les historiens l'illustration parfaite de l'ascendant de la reine sur son mari, et constituera les prémices de l'état de faiblesse du roi vis-à-vis de sa femme ; l'historienneSimone Bertière écrit qu'à chaque victoire de la reine, « le prestige du roi est entamé, son autorité décroît d'autant que le crédit de celle-ci augmente. Ce n'est là qu'apparence [mais] l'autorité, elle aussi, se nourrit d'apparence. »[30] Turgot lui-même, dans une lettre écrite à Louis XVI le que ce dernier lui a renvoyé sans même l'ouvrir, lance au roi cet avertissement : « N'oubliez jamais, Sire, que c'est la faiblesse qui a mis la tête deCharlesIer sur unbillot »[15].
Pour l'heure, Necker propose au roi de supprimer les parlements et intendants de province, et de les remplacer par des assemblées provinciales recrutées, sur proposition du roi, dans le clergé, la noblesse et le tiers-état ; le roi s'engageant à favoriser la noblesse d'épée et non la noblesse de robe. Ce projet de réforme institutionnelle, déjà mis sur la table sous Turgot, a pour objectif qu'à terme toutes les assemblées soient directement élues. Bien qu'expérimentée àBourges et àMontauban, cette réforme est unanimement condamnée par les intendants, les princes et les parlementaires. La réforme est donc vouée à l'échec et ne verra finalement pas le jour.
Necker entreprend parallèlement une série de mesures populaires. Il fait tout d'abord affranchir les derniersserfs du domaine royal par une ordonnance du[49]. Refusant l'abolition sans distinction de la servitude personnelle, il abolit toutefois dans tout le royaume le « droit de suite », et affranchit tous les « main-mortables [les serfs] des domaines du roi », ainsi que les « hommes de corps », les « mortaillables » et les « taillables » [d'où vient l'expression « taillable et corvéable à merci »][49]. Cette ordonnance avait été favorisée par l'intervention deVoltaire, qui avait plaidé en 1778 la cause des serfs de l'abbaye de Saint-Claude du Mont-Jura[49]. Il autorise en outre les « engagistes qui se croiraient lésés » par cette réforme à remettre au roi les domaines concernés en échange de contreparties financières[49]. Afin de favoriser l'imitation de son acte royal d'affranchissement des serfs dans les domaines royaux, l'ordonnance précise que« considérant bien moins ces affranchissements comme une aliénation, que comme un retour audroit naturel, nous avons exempté ces sortes d'actes [d'affranchissement] des formalités et des taxes auxquelles l'antique sévérité des maximes féodales les avaient assujettis »[49]. Néanmoins l'ordonnance n'est guère appliquée[49], et le servage persiste localement jusqu'à laRévolution qui l'abolit avec lesprivilèges lors de la célèbrenuit du 4 août1789. Le, un édit autorise les femmes mariées, les mineurs et les religieux à toucher des pensions sans autorisation (notamment celle du mari en ce qui concerne les femmes mariées)[50]. Il abolit en outre laquestion préparatoire, infligée aux suspects, et rétablit l'institution dumont-de-piété.
À cette série de réformes « républicaines » et à l'expérimentation malheureuse des assemblées de provinces va s'ajouter une erreur politique du ministre qui lui sera fatale. En, il adresse au roi unCompte rendu de l’état des finances destiné à être publié. Il révèle pour la première fois au grand public l'usage détaillé des dépenses publiques et dévoile, dans un souci de transparence, tous les avantages dont bénéficient les privilégiés de la cour. Ces derniers désavouent le ministre et dénoncent en retour, avec l'appui d'experts en finances, le bilan en trompe-l'œil que le ministre fait de son action, masquant la dette de46 millions de livres laissée par les dépenses de guerre, et soulignant au contraire un excédent de10 millions[a 27]. « La guerre qui avait si bien réussi contre Turgot recommença sous son successeur », explique Victor Duruy.
Calonne prend ses fonctions à une époque troublée, car suite à l'éruption du volcan islandais Laki, la France et une grande partie de l'Europe sont touchées par un hiver très rude à la fin de l'année1783. Louis XVI, ému, réactive des ordonnances spéciales qui lui donnent le droit de prélever un impôt spécial auprès des catégories aisées de la population de Paris, ainsi que du clergé et des princes, pour venir en aide aux indigents touchés[55],[38]. Cela vaut à Louis XVI une immense popularité auprès des couches inférieures de la population.
Dans le même temps, Calonne s'emploie à rétablir la confiance des Français en s'efforçant d'exploiter les ressources déjà existantes dans le royaume, et à encourager l'initiative industrielle et commerciale. Puis, dans un second temps, il entreprend une réforme prudente mais déterminée du royaume. Dans un discours donné en devant laChambre des comptes, il évoque l'idée d'un « plan d'amélioration générale », en « régénérant » les ressources plutôt qu'en les « pressurisant », afin de « trouver le vrai secret d'alléger les impôts dans l'égalité proportionnelle de leur répartition, ainsi que dans la simplification de leur recouvrement »[15]. L'objectif à peine voilé est ainsi de réformer l'ensemble dusystème fiscal et ce faisant de combler le déficit de l'État.
Le, Calonne présente au roi son plan d'action se décomposant en trois volets :
égalité de tous devant l'impôt (suppression des privilèges fiscaux de lanoblesse et duclergé, création d'un impôt unique assis sur les revenus de la propriété foncière (la « subvention territoriale ») ;
création d'assemblées nouvelles élues par les propriétaires et qui devront associer les sujets du Roi à l'administration du pays.
Ce programme, assure Calonne au roi, « vous assurera de plus en plus de l'amour de vos peuples [et] vous tranquillisera à jamais sur l'état de vos finances »[56].
Estampe mise en couleur, gravure par Claude Niquet d'après un dessin de Very et Girardet, représentant l'Assemblée des notables tenue à Versailles le 22 février 1787.
La réforme fiscale et institutionnelle de Calonne fait dire au roi : « Mais c'est du Necker tout pur que vous me donnez là ! »[13] Face aux réticences desparlements, il convainc Louis XVI de convoquer uneAssemblée des notables, réunissant des membres du clergé, de la noblesse, des corps de ville, voire délégués des cours souveraines, non pas élus mais désignés par le roi[k]. L'objectif de cette assemblée est de faire passer les principaux points de la réforme en les soumettant à l'avis (et donc potentiellement à l'approbation) de ses membres. L'assemblée se tient àVersailles le. Calonne, devant les 147 membres réunis, tente de faire passer sa réforme ; seulement, l'aveu qu'il fait dudéficit public de 12 millions delivres émeut l'assistance[a 30]. Et Calonne perd tout espoir de persuasion quand il justifie son projet de réforme en énonçant : « On ne peut pas faire un pas dans ce vaste royaume sans y trouver des lois différentes, des usages contraires, des privilèges, des exemptions, des affranchissements d'impôt, des droits et des prétentions de toutes espèces ! »[13] Devant le tollé provoqué au sein d'une assemblée de notables réticents à approuver une réforme dont ils seraient les victimes, Louis XVI ne se sent pas la force de contrer les opposants et désapprouve son ministre.
Cette section est trop longue. Elle pourrait gagner à être raccourcie ou répartie en plusieurs sous-sections. Il est également possible que sa longueur crée un déséquilibre dans l'article, au point d'en compromettre laneutralité en accordant à un aspect du sujetune importance disproportionnée.
Conçu au début des années 1770 par les bijoutiers Charles-Auguste Böhmer et Paul Bassenge, ce collier de 2 800carats avait été proposé à la vente àLouisXV pour l'offrir à son ultime maîtresseMadame du Barry, mais le roi mourut avant de l'acheter. À deux reprises, en 1778 et 1784, la reineMarie-Antoinette refuse le bijou bien que le roi soit prêt à le lui offrir.
L'un des personnages clés de cette affaire est lecardinal de Rohan,évêque de Strasbourg et ancien ambassadeur àVienne. Débauché, il est amoureux de la reineMarie-Antoinette. Seulement, il n'est pas apprécié de cette dernière puisqu'il s'est ouvertement moqué de sa mère, l'impératriceMarie-Thérèse d'Autriche[a 32]. C'est en voulant revenir dans les grâces de la reine qu'il va être escroqué dans l'affaire du collier. Dans la nuit du, il attend une femme dans le bosquet deVersailles : il pense qu'il s'agit de la reine, mais c'est en fait une prostituée, Nicole Leguay, qui vient à sa rencontre, déguisée et envoyée parJeanne de Valois-Saint-Rémy, également appeléeMadame de La Motte. La fausse reine confie au cardinal : « Vous pouvez espérer que le passé sera oublié »[57]. Madame de La Motte déclare peu après au cardinal que la reine souhaite se procurer le collier à l'insu du roi, quitte à le payer en plusieurs fois : le rôle de Rohan serait donc de faire l'achat au nom de Marie-Antoinette. Elle remet alors au cardinal un billet de commande apparemment signé par la reine mais en fait parLouis Marc Antoine Rétaux de Villette qui a imité la signature. Rohan n'y voit que du feu et passe ainsi commande auprès des deux bijoutiers pour une somme de1 600 000livres payables en quatre fois, la première échéance survenant le[a 32].
Le, la reine reçoit la visite auTrianon de Böhmer, l'un des deux bijoutiers. Il lui donne le billet de la premièretraite avant de s'éclipser ; ne comprenant rien à cette démarche, la reine brûle le billet. Le1er août; ne voyant rien venir, Böhmer interrogeMadame Campan, la femme de chambre de Marie-Antoinette, qui l'informe que le billet est détruit. Böhmer s'écrie alors : « Ah ! Madame, cela n'est pas possible, la reine sait qu'elle a de l'argent à me donner[56] ! » Le bijoutier annonce à Madame Campan que la commande a été passée par Rohan sur ordre de la reine. N'en croyant rien, la femme de chambre lui conseille d'en parler directement à la reine. Il est reçu le par Marie-Antoinette qui, entendant le récit, tombe des nues. Elle lui avoue ne rien avoir commandé et avoir brûlé le billet. Furieux, Böhmer rétorque : « Madame, daignez avouer que vous avez mon collier et faites-moi donner des secours ou une banqueroute aura bientôt tout dévoilé »[56]. La reine en parle alors au roi et, sur les conseils deBreteuil, alorsministre de la Maison du Roi, il décide de faire arrêter Rohan.
Louis René Édouard de Rohan.
Le cardinal Rohan est convoqué le par le roi : il avoue son imprudence mais nie être l'instigateur de l'affaire, faute qu'il rejette sur Madame de La Motte. Il est arrêté le jour même en habits liturgiques dans laGalerie des Glaces, alors qu'il se rend à lachapelle du château pour célébrer la Messe de l'Assomption. Il estembastillé le soir même mais il prend soin de faire détruire par son secrétaire certains documents qui, par leur absence, dissimulent la vérité sur le véritable rôle de Rohan. Ce dernier est accusé de deux choses :escroquerie etcrime de lèse-majesté. Louis XVI lui laisse le choix d'être jugé par leParlement de Paris pour le délit ou par lui-même pour le crime. La seconde option a l'avantage de juger l'affaire discrètement sans tout dévoiler au grand jour mais Rohan choisit néanmoins d'être jugé par le Parlement.
Le procès du cardinal Rohan se tient en. Le prévenu est soutenu par les membres influents de lamaison de Rohan et par lesévêques et leSaint-Siège. L'opinion publique est également en faveur de son acquittement puisque l'histoire de la signature fabriquée ne convainc pas le peuple[a 33] et la reine, ayant brûlé le billet, ne peut prouver son innocence. Rohan est acquitté par unarrêt du par 26 voix contre 22. Convaincu de la culpabilité de l'homme d'Église, Louis XVI l'exile à l'abbaye de La Chaise-Dieu.
Le roi et la reine, et plus largement le système monarchique lui-même, sont les victimes de cette affaire puisque montrés du doigt par le peuple. Marie-Antoinette est effondrée, confiant à son amieMadame de Polignac : « Le jugement qui vient d'être prononcé est une insulte affreuse [mais] je triompherai des méchants en triplant le bien que j'ai toujours tâché de faire »[56]. La tenue d'un procès public a eu pour effet un déballage par la presse et une sympathie pour le cardinal Rohan. Spectateur de la sortie triomphale du cardinal de laBastille vers son lieu d'exil,Goethe remarque : « Par cette entreprise téméraire, inouïe, je voyais la majesté royale minée et bientôt anéantie »[57].
Redressement de la marine française et visite du chantier de Cherbourg
Louis XVI entame à partir du unvoyage à Cherbourg pour voir l'avancement des travaux. Hormis le sacre deReims et lafuite à Varennes, il s'agit du seul déplacement provincial du souverain pendant son règne. Accompagné deCastries et deSégur, il est accueilli partout chaleureusement par la foule et distribue au peuple des pensions et exonérations fiscales[a 34]. La visite du chantier commence dès l'arrivée du roi le : parcourant larade encanot, il écoute sur l'Île Pelée les explications du directeur des travaux lemarquis de Caux, inspecte la fosse du Gallet et préside un grand dîner le soir-même[a 34]. Le lendemain, il assiste à plusieurs manœuvres maritimes à bord duPatriote ; un témoin raconte que le roi y fait des « questions et des observations dont la sagacité étonnait les marins qui avaient l'honneur d'approcher ». Il écrit à Marie-Antoinette : « Je n'ai jamais mieux goûté le bonheur d'être roi que le jour de mon sacre et depuis que je suis à Cherbourg »[59]. L'historien de la merÉtienne Taillemite s'interroge en 2002 : « Acclamé à chacune de ses apparitions par une foule aussi immense qu'enthousiaste, il pouvait mesurer la ferveur royaliste qui demeurait alors celle du peuple puisque [lors de ce voyage] aucune fausse note ne put être remarquée. Comment ne comprit-il pas qu'il possédait là un atout majeur capable de contrer toutes les intrigues du microcosme versaillais et parisien ? »[60]. Le même historien ajoute : « [On pouvait rêver que le roi] saurait mener la rénovation du royaume comme il avait su conduire à bonne fin celle de sa marine »[60].
Archevêque de Toulouse, connu pour êtreathée et réputé pour avoir des mœurs dissolues, Brienne avait présidé l'assemblée des notables et à ce titre attaquéCalonne et son projet de réforme. Désormais responsable des affaires, il est poussé par le roi à continuer les efforts de son prédécesseur médiat ; il reprend donc à son compte l'essentiel du projet qu'il avait lui-même condamné. Criant à la trahison, les notables se manifestent : face à une telle résistance, le roi et son ministre décident de dissoudre purement et simplement l'assemblée le. Les lois passent donc par le chemin ordinaire de leur enregistrement par leparlement, ce qui là non plus n'est pas une mince affaire.
Le parlement commence pourtant à valider le principe de lalibre circulation des grains et la mise en place d'assemblées provinciales et municipales. Néanmoins, le, les parlementaires refusent d'enregistrer l'édit créant lasubvention territoriale nécessaire pour réduire ledéficit. Le, les parlementaires persistent dans leur refus, invoquant, commeLa Fayette avant eux[a 35], que « seule la Nation réunie dans sesétats généraux peut consentir un impôt perpétuel »[61].
Las des résistances du parlement, Louis XVI le convoque le enlit de justice : la seule lecture des édits par le roi leur donne force de loi. Le lendemain pourtant, le parlement prononce la nullité du lit de justice, une première dans la vie monarchique. Une semaine plus tard, lemagistratDuval d'Eprémesnil déclare qu'il est temps de « débourbonailler »[15] et de rendre au parlement ses pouvoirs.Calonne, contre qui une information est ouverte pour « déprédations »[15], se réfugie enAngleterre, ce qui fait de lui le premierémigré de laRévolution[a 35].
Le, à l'initiative deBrienne, le roi exile le parlement àTroyes. Chaque parlementaire reçoit unelettre de cachet et s'exécute. L'accueil dans Troyes est triomphal[a 35] et les parlements de province se solidarisent, ainsi que laChambre des comptes et laCour des aides. Le roi capitule le en renonçant officiellement à l'édit desubvention territoriale et promet la convocation desétats généraux pour 1792. Le parlement revient àParis sous les applaudissements de la foule. Celle-ci montre du doigt Calonne,Brienne et Marie-Antoinette, dont on brûle les effigies[a 36]. L'agitation gagne alors laprovince.
Lasubvention territoriale ayant été abandonnée,Brienne ne voit plus qu'un seul moyen pour renflouer les caisses du royaume : le recours à l'emprunt. Convaincu, Louis XVI convoque leparlement en « séance royale » pour le, en vue de lui faire accepter un emprunt de 420 millions delivres sur5 ans. Lors de cette session, les parlementaires s'insurgent contre cette forme inusitée de « séance royale » et demandent la convocation desétats généraux pour 1789[a 36]. Le roi accepte l'idée sans préciser de date et demande le vote immédiat de l'emprunt, déclarant : « J'ordonne que mon édit soit enregistré »[15]. Leduc d'Orléans lui lance : « C'est illégal ! » et le roi de lui répondre : « Si, c'est légal. C'est légal parce que je le veux ! »[62]. À la suite de cette séance du, l'emprunt quinquennal est lancé et les frondeurs sont punis : les conseillers Fréteau et Sabatier sont arrêtés et leduc d'Orléans est exilé sur ses terres deVillers-Cotterêts.
Édit de Versailles et abolition de la question préalable
L'édit de tolérance de Versailles, signé par Louis XVI en 1787.
Durant l'hiver 1787-1788, le parlement entre dans une sorte de « trêve » puisqu'il enregistre sans difficulté plusieurs textes royaux parmi lesquels :
Dans les premiers mois de 1788, Louis XVI et ses ministresBrienne etLamoignon envisagent de cantonner les pouvoirs duparlement aux seules questions dejustice et de réserver la vérification et l’enregistrement des actes royaux, édits et ordonnances au profit d'une « cour plénière » dont les membres seraient nommés par le roi[a 37]. S'insurgeant contre cette idée, les parlementaires anticipent cette réforme institutionnelle et publient le uneDéclaration des lois fondamentales du royaume dans laquelle ils rappellent notamment qu'ils sont seuls gardiens de ces lois et que la création de nouveaux impôts est du ressort des états généraux[63]. Furieux, le roi réagit deux jours plus tard en cassant cette déclaration et en demandant l'arrestation des deux principaux instigateurs de la révolte,d'Eprémesnil etMonsabert qui, après s'être réfugiés dans l'enceinte du parlement, finissent par se rendre avant d'être emprisonnés[a 38].
Le, Louis XVI convoque à nouveau unlit de justice et fait enregistrer sa réforme.Lamoignon annonce le transfert d'un pan entier des compétences du parlement augrand bailliage (47 tribunaux d'appel), et de surcroît le contrôle sur les lois du royaume ne sera plus effectué que par la « Cour plénière » toujours en projet. Mais à peine l'édit du promulgué, la plupart des parlements entrent en résistance, comme ceux deNancy,Toulouse,Pau,Rennes,Dijon,Besançon etGrenoble ; plusieurs villes sont le théâtre d'insurrections, comme àGrenoble lors de laJournée des Tuiles du. À la date fixée pour la première séance de la Cour plénière, le peu depairs et deducs ayant fait le déplacement àVersailles se résignent à errer dans les couloirs duchâteau faute de participants ; un témoin rapporte que la réforme est « morte avant d'être née »[56].
Face à ce mouvement d'une telle ampleur, le roi et Brienne annulent la création de la Cour plénière et, le, annoncent la convocation des états généraux pour le. Durant l'été 1788, l'État cesse ses paiements pour six semaines et, le, l'état debanqueroute est proclamé. Brienne démissionne le (il sera créécardinal le suivant).
Parallèlement à l'état de cessation des paiements et de banqueroute du royaume, le climat de l'année 1788 est calamiteux : à un été pourri ravageant les récoltes, l'hiver glacial donne des températures de- 20 °C qui paralysent les moulins, gèlent les fleuves et défoncent les routes[a 39]. Le blé manque et le peuple a faim.
Le début de l'année 1789 voit éclater en France plusieurs émeutes dont certaines sont violemment réprimées ; le prix du pain et le contexte économique en sont les principales causes. Au mois de mars, les villes deRennes,Nantes etCambrai sont le théâtre de violentes manifestations ; àManosque, l'évêque estlapidé car accusé decollusion avec les accapareurs de grains[a 40] ; des maisons sont pillées àMarseille. Petit à petit, les émeutes gagnent laProvence, laFranche-Comté, lesAlpes et laBretagne. Du 26 au, l'« émeute duboulevard Saint-Antoine » est sévèrement réprimée par les hommes du général suisse lebaron de Besenval qui, ayant reçu les ordres donnés à contrecœur par le roi[a 40], fera tuer quelque300 manifestants. C'est dans ce climat de violence qu'allaient s'ouvrir lesétats généraux.
Les parlementaires, jouissant jusque-là d'une grande popularité, vont rapidement se déconsidérer auprès de l'opinion en dévoilant imprudemment leur conservatisme. Le en effet, leParlement de Paris et d'autres parlements avec lui demandent que lesétats généraux soient convoqués en trois chambres séparées votant par ordre comme ce fut le cas lors des précédentsétats généraux de 1614, empêchant ainsi toute réforme d'ampleur.
Louis XVI et Necker sont en revanche partisans d'une forme plus moderne en encourageant le doublement dutiers état et le vote par tête (passant ainsi à un nombre de voix par député, et non par ordre qui aurait pour effet d'opposer le tiers-état, comptant pour une voix, au clergé et à la noblesse, comptant ainsi pour deux). Ils convoquent l'Assemblée des notables le pour traiter ces deux points ; au sein de cette assemblée se distinguent deux camps : celui des « patriotes » favorable au doublement du tiers et au vote par tête, et celui des « aristocrates », partisan des formes de1614. L'assemblée des notables se réunit àVersailles à partir du. Hormis quelques députés tels que lecomte de Provence,La Rochefoucauld etLa Fayette, l'assemblée se prononce à une très large majorité en faveur des formes de 1614, les seules à être selon elle « constitutionnelles »[15]. Le roi maintient sa position et se tourne à nouveau vers les parlements, l'avis de l'assemblée des notables n'étant que consultatif.
Le paraissent les lettres royales donnant des précisions quant à l'élection desdéputés. Le roi y déclare notamment : « Nous avons besoin du concours de nos fidèles sujets pour nous aider à surmonter toutes les difficultés où nous nous trouvons »[56]. Tout français de sexe masculin âgé d'au moins 25 ans et inscrit aurôle descontributions peut prendre part au vote. Pour lanoblesse et leclergé, la circonscription est lebailliage et lasénéchaussée (suivant les régions) ; pour letiers état, lesuffrage s'opère en deux degrés à la campagne (assemblées de paroisse puis assemblées de chef-lieu) et en trois degrés dans les grandes agglomérations (assemblées de corporation, assemblées de ville et assemblées de bailliage ou de sénéchaussée)[a 41].
Chaque assemblée de chef-lieu a pour mission de réunir lesdoléances dans uncahier dont un exemplaire est transmis àVersailles. La plupart des revendications qui y sont exprimées sont modérées et ne remettent pas en cause le pouvoir en place ni l'existence de la monarchie[a 42].
« Qu'est-ce que le Tiers-État ? Le plan de cet Écrit est assez simple. Nous avons trois questions à nous poser : 1° Qu'est-ce que le Tiers-État ?Tout. 2° Qu'a-t-il été jusqu'à présent dans l’ordre politique ?Rien. 3° Que demande-t-il ?À y devenir quelque chose. »
Le, sont reçus àVersailles l'ensemble des députés. Sur un total de 1 165, 1 139 sont présents (les députés de Paris n'étant pas encore désignés) : 291 duclergé (dont 208 simples curés), 270 de lanoblesse et 578 dutiers état[a 43]. L'historienJean-Christian Petitfils note que les « élus des deux premiers ordres eurent droit à l'ouverture des deux battants de la porte, tandis que ceux du tiers durent se contenter d'un seul ! »[64].
Le, soit la veille de l'ouverture des états généraux, unemesse solennelle est célébrée en l'église Saint-Louis en présence de la famille royale (sauf ledauphin, trop malade pour quitter sa chambre). L'homélie du célébrant, l'évêque de NancyMonseigneur de La Fare (par ailleurs député du clergé), dure plus d'une heure. Le prélat commence par une maladresse en prononçant ces mots : « Sire, recevez les hommages du clergé, les respects de la noblesse et les très humbles supplications du tiers état »[54]. Puis il se tourne versMarie-Antoinette et stigmatise ceux qui dilapident les deniers de l'État ; s'adressant ensuite à nouveau au roi, il déclare : « Sire, le peuple a donné des preuves non équivoques de sa patience. C'est un peuple martyr à qui la vie semble n'avoir été laissée que pour le faire souffrir plus longtemps »[15]. De retour auchâteau, la reine s'effondre et le roi s'indigne[a 44]. Le lendemain,, s'ouvriront les états généraux et, par là même, laRévolution française.
Le roi a pu également être influencé parVictor-François, duc de Broglie qui, dans un mémoire daté du début de 1776, attire l’attention du souverain sur la réalité du conflit entre la Grande-Bretagne et les colonies américaines. Il s’agit ici, lui dit-il, d’« une révolution absoluë, […] d’un continent qui va se séparer de l’autre » et qu’« un nouvel ordre […] va naître. » Il ajoute qu’il est de l’intérêt de la France « de profiter de la détresse de l’Angleterre pour achever de l’accabler[65].
L'intervention de laFrance auprès descolons américains se déroule tout d'abord dans la clandestinité. En septembre 1775,Julien Alexandre Achard de Bonvouloir se rend sur place pour étudier les possibilités d'une assistance discrète auprès des insurgés[66]. Ces tractations aboutissent, en 1776, à la vente secrète d'armes et de munitions et par l'octroi de subsides pour deux millions de livres[67].Beaumarchais reçoit du roi et de Vergennes l'autorisation de vendre poudre et munitions pour près d'un million delivres tournois sous le couvert de la compagnie portugaiseRodrigue Hortalez et Compagnie. L'acheminement de poudre, armes et munitions s'opère moyennant un échange avec dutabac deVirginie ; le premier convoi, capable d'armer 25 000 hommes, atteintPortsmouth en 1777 et joue un rôle crucial dans la victoire américaine deSaratoga[a 47].
SelonVergennes, ministre des Affaires étrangères, la décision de s'allier avec les Américains a été prise par Louis XVI seul, de manière souveraine. Il en témoigne dans une lettre datée du aucomte de Montmorin alors ambassadeur enEspagne :« La décision suprême a été prise par le roi. Ce n'est pas l'influence de ses ministres qui l'a décidé : l'évidence des faits, la certitude morale du danger et sa conviction l'ont seules entraîné. Je pourrais dire avec vérité que Sa Majesté nous a donné du courage à tous »[68]. Cette décision s'avère risquée à plus d'un titre pour le roi : risque de défaite, risque de banqueroute, et aussi risque de voir arriver en France en cas de victoire les idées révolutionnaires peu compatibles avec la monarchie.
Les hostilités entre les forces françaises et britanniques s'ouvrentlors du combat du 17 juin 1778 : lafrégateHMS Arethusa est envoyée par laRoyal Navy au large dePlouescat pour attaquer la frégate françaiseBelle Poule. Malgré de nombreuses victimes, le royaume de France en ressort vainqueur. Louis XVI s'appuie sur cette agression britannique pour déclarer la guerre à son cousinGeorgeIII du Royaume-Uni le suivant ; il déclare alors : « les insultes faites au pavillon français m'ont forcé de mettre un terme à la modération que je m'étais proposée et ne me permettent pas de suspendre plus longtemps les effets de mon ressentiment »[56]. Ordre est alors donné aux navires français de combattre la flotte anglaise. Le premier affrontement entre les deux flottes a lieu le : c'est labataille d'Ouessant, qui voit sortir de ce combat la France victorieuse et Louis XVI adulé par son peuple.
Le roi charge le comteCharles Henri d'Estaing de commander la flotte envoyée en aide auxinsurgents américains. À la tête de 12 vaisseaux de ligne et de 5 frégates, il transporte avec lui plus de 10 000 marins et un millier de soldats. LaFlotte du Levant quitteToulon le pour arriver au large deNewport (Rhode Island) le suivant. Hormisune victoire à La Grenade, le commandement du comte d'Estaing se caractérise par une série d'échecs cuisants pour la France, illustrée notamment par leSiège de Savannah au cours de laquelle il perd 5 000 hommes.
Vue générale de lacapitulation de Yorktown le, avec le blocus de la flotte française. Le rôle deGrasse a été essentiel dans cette victoire.
Poussé par son allié espagnol, Louis XVI fait rassembler près deBayeux environ 4 000 hommes, le but étant de débarquer sur l'Île de Wight puis en Angleterre parSouthampton. Le roi est réticent sur l'opération et pense alors, sinon à envahir l'Angleterre, du moins maintenir dans laManche les navires anglais, affaiblissant du même coup leur participation outre-Atlantique. Mais la flotte franco-espagnole ne peut déloger les navires anglais chargés de protéger l'île et change donc de cap ; ladysenterie et letyphus frappent les hommes, et ni le commandant de cette arméeLouis Guillouet d'Orvilliers, ni son successeurLouis Charles du Chaffault de Besné ne parviennent à une confrontation directe avec la flotte anglaise. Le projet doit être abandonné.
À partir de 1782, une coalition de rebelles prend le pouvoir enSuisse. La France, contrairement à ce qu'elle avait fait pour lesÉtats-Unis, contribue à la répression de cette rébellion et envoie des renforts pour rétablir le pouvoir en place. Vergennes justifie cette intervention en affirmant qu'il fallait éviter queGenève ne devienne « une école de sédition »[56].
Relations avec les Provinces-Unies
En éclate dans lesProvinces-Unies la révolte des « patriotes » demandant austathouderGuillaumeV d'Orange-Nassau qu'il renvoie le conservateurduc de Brunswick. La France prend le parti des « patriotes » et les soutient toujours lorsqueGuillaumeV est destitué en septembre 1786. Seulement, ce dernier est rétabli dans ses fonctions en 1787 : les « patriotes » sont écrasés et la France essuie un échec diplomatique cinglant.
Autres relations diplomatiques
Il poursuit la politique traditionnelle française d'appuyer des missions catholiques au Proche-Orient. Face au vide créé par l'interdiction de la Compagnie de Jésus (lesJésuites) en 1773, il choisit lesLazaristes pour les remplacer dans les missions en territoire ottoman. Le PapePieVI accepte ce changement, symbolisé par la prise en charge du centre des missions catholiques en Orient, lelycée Saint-Benoît àConstantinople, par la Congrégation de la Mission deSaint Vincent de Paul, le.
Les états généraux s'ouvrent le vers 13 heures par une séance solennelle d'ouverture dans lasalle des Menus-Plaisirs àVersailles. L'événement se passe dans des conditions difficiles pour le roi, car depuis plus d'un an, le petit dauphin Louis Joseph Xavier François est malade, ce qui ne favorise pas le contact entre le roi et le tiers-état. Le dauphin mourra le,ce qui affectera profondément la famille royale[pertinence contestée][70].
La cérémonie débute par un bref discours du roi dans lequel il déclare notamment : « Messieurs, le jour que mon cœur attendait depuis longtemps est enfin arrivé, et je me vois entouré des représentants de la Nation à laquelle je me fais gloire de commander »[a 44]. Il expose ensuite brièvement le cap de redressement des finances mais prévient toute tentative de réforme : « Une inquiétude générale, un désir exagéré d'innovations se sont emparés des esprits, et finiraient par égarer totalement les opinions si on ne se hâtait de les fixer par une réunion d'avis sages et éclairés »[54].
Sous un tonnerre d'applaudissements[a 51], le roi laisse la parole auGarde des SceauxBarentin. Ce dernier fait l'éloge du souverain, rappelant que les Français ont grâce à lui une presse libre, qu'ils ont fait leur l'idée d'égalité, et qu'ils sont prêts à fraterniser[a 51] ; mais dans sa déclaration ne sont traités ni le mode de votation des trois ordres, ni l'état des finances du royaume.
Puis vient le tour deNecker. Durant un discours de plus de 3 heures (prononcé par un assistant au bout de quelques minutes), il se perd dans de vaines flatteries et rappelle l'existence du déficit de 56 millions delivres. Ne présentant aucun plan d'ensemble et n'annonçant rien de nouveau, il déçoit son auditoire. Il affirme enfin sa position concernant le mode de votation, en se prononçant en faveur du vote par ordre.
Le roi lève enfin la séance. Pour beaucoup de députés, cette journée fut ennuyeuse et décevante[a 52].
Débats autour du mode de votation
Le, les députés du tiers état se réunissent dans la grande salle et prennent, comme enAngleterre, le nom decommunes[a 52]. Ils proposent au clergé et à la noblesse, qui dans l'immédiat votent séparément, de procéder ensemble à la vérification des pouvoirs des députés, mais ils se heurtent à un refus des deux ordres.
Le, les députés de la noblesse décident, par 141 voix contre 47, de se constituer en chambre séparée et de vérifier de cette manière les pouvoirs de ses membres. La décision est plus nuancée chez le clergé où, à un écart de quelques voix, il est également décidé de siéger séparément (133 pour et 114 contre). Des conciliateurs sont désignés pour atténuer les divergences mais ils avouent leur échec le.
Le, le dauphinLouis-Joseph de France, meurt à l'âge de 7 ans. Le couple royal est très affecté par la disparition du prétendant au trône, mais cet événement survient dans l'indifférence générale[a 53]. Son petit frère Louis de France, futurLouisXVII, porte désormais à 4 ans le titre de dauphin.
Proclamation de l'assemblée nationale (17 juin 1789)
Le, les députés du Tiers prennent acte du refus de la noblesse de se joindre à eux. Forts de l'appui de plus en plus présent du clergé (plusieurs membres les rejoignent quotidiennement), et estimant représenter « les quatre-vingt-seize centièmes au moins de la nation »[71], ils décident par l'intermédiaire du représentant qu'ils ont élu, le mathématicien et astronomeJean Sylvain Bailly, de s'autoproclamerassemblée nationale et de déclarer purement et simplement illégale la création de tout nouvel impôt sans leur accord. La constitution de cette assemblée, proposée parSieyès, est votée par 491 voix contre 89.
Le, le clergé décide de se joindre au tiers état. Le même jour, le roi s'entretient avecNecker etBarentin. Necker propose un plan de réformes proche des revendications du Tiers : vote par tête et égalité de tous devant l'impôt notamment. Barentin, quant à lui, demande au roi de ne pas céder face aux revendications et lui déclare : « Ne pas sévir, c'est dégrader la dignité du trône »[72]. Le roi ne décide rien pour le moment et propose la tenue d'une « séance royale » le où il exprimera ses volontés.
Les députés du Tiers décident alors, sur proposition du célèbre docteurGuillotin, de trouver une autre salle pour se réunir. C'est alors qu'ils entrent dans lasalle du Jeu de paume, située à deux pas. C'est dans cette salle que l'assemblée, à l'initiative deJean-Joseph Mounier[a 55], se déclare « appelée à fixer la constitution du royaume » puis, à l'unanimité sauf une voix, elle prête le serment de ne « jamais se séparer » tant qu'une nouvelleconstitution ne sera pas donnée au royaume de France. Elle déclare enfin que « partout où ses membres sont réunis, là est l'Assemblée nationale ! »[56].
Le, Louis tient un conseil d'État à l'issue duquel le plan proposé par Necker le est repoussé, malgré le soutien des ministresMontmorin,Saint-Priest etLa Luzerne.
Les députés de la noblesse et la majorité de ceux du clergé quittent alors la salle ; les députés du Tiers sont, quant à eux, tendus et intrigués par la présence massive des troupes. Au bout de plusieurs minutes de flottement, le député d'AixMirabeau intervient et s'adresse à la salle : « Messieurs, j'avoue que ce que vous venez d'entendre pourrait être le salut de la patrie, si les présents du despotisme n'étaient toujours dangereux. Quelle est cette insultante dictature ? L'appareil des armes, la violation du temple national pour vous commander d'être heureux ! […] Catilina est-il à nos portes ! »[15]. Face au tumulte provoqué par cette harangue, legrand maître des cérémoniesHenri-Évrard de Dreux-Brézé s'adresse alors àBailly, doyen de l'Assemblée et du Tiers, pour lui rappeler l'ordre du roi. Le député rétorque : « La Nation assemblée ne peut recevoir d'ordre ». C'est alors que Mirabeau s'interpose et, selon la légende, lui répond cette célèbre phrase : « Allez dire à ceux qui vous ont envoyé que nous sommes ici par la volonté du peuple et que nous n'en sortirons que par la puissance des baïonnettes »[56]. Informé de l'incident, Louis XVI aurait alors lâché : « Ils veulent rester, eh bien, foutre, qu'ils restent ! »[15]. Unerévolution bourgeoise et pacifique vient ainsi de s'accomplir et il faut désormais au roi opter entre l'acceptation de lamonarchie constitutionnelle ou l'épreuve de force. Il semble s'orienter vers la première solution tandis que son entourage se montre plus intransigeant, notamment son frère lecomte d'Artois qui accuse Necker, ce banquier libéral, de trahison et d'attentisme[73].
Défection de l'armée
Le surlendemain, la majorité des députés du clergé et47 députés de la noblesse (dont leduc d'Orléans, cousin du roi) se joignent auTiers état. Louis XVI cherche à donner le change et, le, ordonne « à son fidèle clergé et à sa fidèle noblesse »[61] de se joindre au Tiers ; paradoxalement, il fait déployer autour deVersailles et deParis trois régiments d'infanterie, officiellement pour protéger la tenue des états généraux, mais en réalité pour pouvoir disperser les députés par la force si cela s'avère nécessaire[a 56]. Seulement, plusieurs compagnies refusent de se soumettre aux ordres et certains soldats jettent leurs armes avant de venir dans lesjardins du Palais-Royal se faire applaudir par la foule. Les « patriotes » parisiens suivent de près les mouvements de l'armée et, lorsqu'une quinzaine degrenadiers insoumis sont enfermés dans laprison abbatiale de Saint-Germain-des-Prés, 300 personnes viennent les libérer : « Les hussards et les dragons envoyés pour rétablir l'ordre crient « Vive la Nation ! » et refusent de charger la foule »[61].
L'Assemblée nationale proclamée le prend le nom deConstituante le. Pendant ce temps, le roi renvoieNecker (dont il a peu apprécié l'absence lors de la séance royale du) pour le remplacer par lebaron de Breteuil, monarchiste convaincu. Il appelle lemaréchal de Broglie au poste demaréchal général des camps et armées du roi, réinstauré pour faire face aux événements.
L'annonce du renvoi de Necker et de la nomination de Breteuil et de Broglie mettent Paris en effervescence[15]. À partir de ce moment, lesmanifestations se multiplient à Paris ; une d'entre elles est réprimée auxTuileries, faisant un mort côté manifestants[a 58].
« C’est ainsi que l’on se venge des traîtres. » Gravure de 1789 dépeignant des soldats ou des miliciens portant les têtes deJacques de Flesselles et du marquis de Launay sur des piques.
Le, les 407 grands électeurs de Paris (qui avaient élu leurs députés pour les états généraux) se réunissent à l'hôtel de ville de Paris pour se constituer « comité permanent ». Ils fondent une milice de 48 000 hommes encadrée par desgardes-françaises et adoptent comme signe de reconnaissance lacocarde bicolore rouge et bleu, aux couleurs de la ville de Paris (le blanc, symbole de la nation, est inséré dans lacocarde tricolore née dans la nuit du 13 au)[74].
Le matin du 13, Louis XVI écrit à son frère cadet, lecomte d’Artois : « Résister en ce moment, ce serait s’exposer à perdre la monarchie ; c’est nous perdre tous. […] Je crois plus prudent de temporiser, de céder à l’orage, et de tout attendre du temps, du réveil des gens de bien, et de l’amour des Français pour leur roi »[75].
Il ne reste plus aux manifestants qu'à trouver des armes. Le, une foule estimée à 40 000-50 000 personnes[a 59] se présente devant l'hôtel des Invalides. Les officiers réunis sous les ordres deBesenval sur leChamp-de-Mars refusent à l'unanimité de charger contre les manifestants. C'est ainsi que ces derniers s'emparent librement à l'intérieur des Invalides d'environ 40 000 fusils Charleville, unmortier et une demi-douzaine de canons[a 59]. Il ne manque plus que de la poudre et des balles, et l'idée se répand que laforteresse de la Bastille en regorge.
Vers 10h30, une délégation des électeurs de Paris se rend auprès dugouverneur de la prisonBernard-René Jordan de Launay pour négocier la remise des armes demandées. Après deux refus, Launay fait sauter 250 barils de poudre ; l'explosion est considérée à tort comme une charge contre les assaillants. Soudain, un ancien sergent desgardes suisses entouré de 61gardes-françaises arrive des Invalides avec les canons volés et les place en position d'attaque contre la Bastille. La forteresse capitule, la foule s'y engouffre en libérant les 7 prisonniers enfermés et s'empare des munitions. La garnison de la Bastille, après avoir massacré une centaine d'émeutiers, est conduite à l'Hôtel de ville tandis que la tête deLaunay, décapité sur le trajet, est exposée sur unepique. Ignorant tout des événements, Louis XVI ordonne trop tard que les troupes stationnées autour de Paris évacuent la capitale.
Le lendemain, le roi apprend à son réveil dugrand-maître de la garde-robeFrançoisXII de La Rochefoucauld les événements de la veille. Selon la légende, le roi lui demande : « C'est une révolte ? » Et le duc de La Rochefoucauld de répondre : « Non, Sire, c'est une révolution »[72].
Toujours le, le roi se rend à l'Assemblée pour confirmer aux députés qu'il a ordonné aux troupes de se retirer des alentours deParis. Sous les applaudissements des députés, il conclut sa venue en disant : « Je sais qu'on a osé publier que vos personnes n'étaient point en sûreté. Serait-il donc nécessaire de vous rassurer sur des bruits aussi coupables, démentis d'avance par mon caractère connu ? Eh bien, c'est moi qui ne suis qu'un avec la Nation qui me fie à vous : aidez-moi en cette circonstance à assurer le salut de l'État ; je l'attends de l'Assemblée nationale »[54]. En s'adressant directement à l'Assemblée nationale, Louis XVI vient de reconnaître officiellement son existence et sa légitimité. Aussitôt, une importante délégation conduite parBailly se rend à l'Hôtel de ville de Paris pour annoncer au peuple les dispositions du roi et ramener le calme dans la capitale. Dans une ambiance festive et dansante, Bailly est nommémaire de Paris etLa Fayette est élu par l'Assemblée commandant de laGarde nationale.
Rappel de Necker et adoption de la cocarde tricolore par le roi (16-17 juillet 1789)
Cocarde plissée bleu-blanc-rouge.
Le, le roi tient un conseil en présence de lareine et de ses deux frères. Lecomte d'Artois et Marie-Antoinette demandent au roi de transférer la cour àMetz pour plus de sécurité mais le souverain, soutenu par lecomte de Provence, la maintient à Versailles[a 60]. Il regrette plus tard de ne pas s'être éloigné de l'épicentre de la Révolution[56]. Il annonce en outre dans ce conseil qu'il va rappelerNecker et donne l'ordre àArtois (dont il reproche la philosophie répressive) de quitter le royaume, faisant du futurCharlesX l'un des tout premiers émigrés de la Révolution.
Le, Louis XVI prend la route de Paris pour aller à la rencontre de son peuple. Accompagné d'une centaine de députés, il a choisi de se rendre à l'Hôtel de ville, devenu le centre symbolique de la contestation populaire. Il est reçu par le nouveau maire, Bailly, qui s’adresse à lui en ces termes : « J’apporte à Votre Majesté les clefs de sa bonne ville de Paris : ce sont les mêmes qui ont été présentées àHenriIV, il avait reconquis son peuple, ici le peuple a reconquis son roi »[76]. Sous les cris de « Vive la Nation ! », il se fait apposer sur son chapeau lacocarde tricolore. Il pénètre ensuite dans l'édifice en passant sous la voûte formée par les épées des gardes nationaux. C'est alors que le président du collège électoral,Moreau de Saint-Méry, le complimente : « Le trône des rois n'est jamais plus solide que lorsqu'il a pour base l'amour et la fidélité des peuples »[54]. Le roi improvise alors un petit discours au cours duquel il déclare approuver les nominations de Bailly et La Fayette ; se montrant alors à la foule qui l'acclame en contrebas, il lance à Saint-Méry : « Mon peuple peut toujours compter sur mon amour »[56]. Enfin, à la demande de l'avocatLouis Éthis de Corny, on vote l'érection d'un monument à Louis XVI à l'emplacement même de laBastille[54].
Comme le note l'historien Bernard Vincent en commentant cette réception à l'Hôtel de ville : « Avec la prise de la Bastille, le pouvoir suprême venait bel et bien de changer de camp »[a 62].
L'Assemblée nationale régnant désormais sur le pays, lesintendants du roi quittent leur poste dans lesprovinces. Une grande peur gagne alors la paysannerie française : on craint en effet que lesseigneurs, pour se venger des événements survenus à Paris, ne mandatent des « brigands » contre le peuple des campagnes.
Ajoutée à la faim et à la crainte desaccapareurs deblé, la grande peur incite les paysans à créer des milices un peu partout en France. À défaut de tuer les brigands imaginaires, les membres de la milice incendient les châteaux et massacrent des comtes notamment. L'Assemblée, hésitante face à ces exactions, décide de calmer le jeu. Néanmoins, la peur gagne la ville de Paris où, le, leconseiller d'ÉtatJoseph François Foullon et son gendreBerthier de Sauvigny sont massacrés sur laplace de Grève.
Pour mettre fin à l'instabilité régnant dans les campagnes, les ducs deNoailles et d'Aiguillon lancent à l'Assemblée constituante l'idée de faire table rase de tous les privilèges seigneuriaux hérités de l'époque médiévale. C'est ainsi qu'au cours de la séance nocturne du sont supprimés lesdroits féodaux, ladîme, lescorvées, lamainmorte et ledroit de garenne notamment. L'assemblée affirme l'égalité devant l'impôt et l'emploi, abolit lavénalité des charges et tous les avantages ecclésiastiques, nobiliaires et bourgeois.
Le rapport rendu le parJean-Joseph Mounier présentait un ordre de travail pour la rédaction d'une Constitution débutant par une déclaration des droits[77]. Cette déclaration devait servir, en tant que préambule, à proposer à l'univers un texte « pour tous les hommes, pour tous les temps, pour tous les pays »[15] et codifier l'essentiel de l'esprit desLumières et duDroit naturel. L'idée était également d'opposer à l'autorité royale l'autorité de l'individu, de la loi et de la Nation[a 63].
Le, l'Assemblée entame la discussion finale du texte, déposé parLa Fayette et inspiré de laDéclaration d'indépendance des États-Unis. L'adoption du texte s'opère article par article, pour finir le, date à laquelle les députés commencent à examiner le texte de la Constitution elle-même.
La Déclaration fixe à la fois les prérogatives du citoyen et celles de la Nation : le citoyen par l'égalité devant la loi, le respect de la propriété, la liberté d'expression notamment, et la Nation par lasouveraineté et laséparation des pouvoirs entre autres. Le texte est adopté « en présence et sous les auspices de l'Être suprême », un dieu abstrait et philosophique.
Les débats, houleux, surviennent au milieu de 3 catégories de députés qui commencent à se démarquer les uns des autres : la droite (aristocrates), les partisans dustatu quo commed'Eprémesnil ou l'abbé Maury ; le centre (Monarchiens) conduits notamment parMounier et favorables à une alliance entre les roi et le tiers-état ; et enfin la gauche (patriotes), elle-même composée d'une branche modérée favorable à unveto minimal du roi (Barnave,La Fayette,Sieyès) et d'une branche extrême comptant encore peu de députés (Robespierre etPétion notamment).
Veto royal (11 septembre 1789)
À la suite de l'adoption du texte final de laDéclaration des droits de l'homme et du citoyen le, l'Assemblée se penche à la question du droit deveto du roi. Après quelques jours de débats, lesquels se sont déroulés en l'absence du principal intéressé, les députés votent le, à une très large majorité (673 voix contre 325), le droit de vetosuspensif proposé par les patriotes. Concrètement, le roi perd l'initiative des lois, et ne conserve que le droit depromulgation et ledroit de remontrance. Louis XVI accepte cette idée par esprit de conciliation, grâce àNecker qui, ayant négocié cette option avec les patriotes, a su convaincre le roi d'accepter le droit de veto ainsi voté[a 64].
La marche des femmes sur Versailles, le, telle que vue par l'hagiographie des journées révolutionnaires.
Malgré son retour au gouvernement,Necker ne parvient pas à redresser les finances du royaume. Il recourt donc au traditionnel remède à l'emprunt : deux emprunts sont lancés en, mais les résultats sont médiocres. Necker se rend donc en dernier recours à l'Assemblée pour lui proposer une contribution extraordinaire qui pèserait sur l'ensemble des citoyens, et qui équivaudrait au quart des revenus de chacun ; d'abord réticente à voter cet impôt lourd, ladite assemblée l'adopte à l'unanimité, convaincue par les mots que lui a lancésMirabeau : « Votez donc ce subside extraordinaire […] la hideuse banqueroute est là : elle menace de consumer, vous, vos propriétés, votre honneur […] et vous délibérez[72] ! » La levée de cette contribution ne résout cependant pas les difficultés économiques du pays, le pain devenant de plus en plus rare et le chômage de plus en plus fort (une des conséquences de l'émigration des aristocrates, parmi lesquels beaucoup d'employeurs).
L'opinion publique s'émeut de cette impasse et, sensible aux poussées contre-révolutionnaires de la cour et du roi (que l'on surnomme désormaisMonsieur Veto), se méfie de plus en plus du souverain et de son entourage. Par exemple, dans la chansonLa Carmagnole, composée probablement lors de la journée du :
« Monsieur Véto avait promis D’être fidèle à sa patrie ; Mais il y a manqué.
Ne faisons plus quartier. »
Cette méfiance se change bientôt en révolte quand le peuple apprend qu'au cours d'un dîner donné le1er octobre àVersailles en l'honneur durégiment de Flandre (venu prêter main-forte à la défense de la cour), certains officiers n'ont pas manqué de fouler aux pieds lacocarde tricolore et de crier « À bas l'Assemblée ! », le tout en présence de Louis XVI et de la reine[15].
Les Parisiens apprennent la nouvelle, relayée et amplifiée par les journaux ;Marat etDesmoulins en appellent aux armes contre cette « orgie contre-révolutionnaire »[a 65]. Selon les registres officiels, ne sont entrés dans la capitale depuis 10 jours que « 53 sacs de farine et 500setiers de blé »[56] ; face à cette pénurie, le bruit court que du blé est abondamment conservé àVersailles et en outre que le roi envisage de transporter la cour àMetz[a 65]. Les Parisiens veulent donc ramener le blé et retenir le roi, quitte à le ramener dans la capitale.
Le, une foule de femmes envahit l'Hôtel de ville de Paris pour faire part de ses doléances et informer qu'elle va marcher sur Versailles pour en parler à l'Assemblée et au roi lui-même. Conduites par l'huissierStanislas-Marie Maillard[a 66], environ 6 000 à 7 000 femmes, ajoutées à quelques agitateurs déguisés, se rendent à pied à Versailles, « armées de fusils, de piques, de crocs de fer, de couteaux emmanchés sur des bâtons, précédées de sept ou huit tambours, de trois canons et d'un train de baril de poudre et de boulets, saisis au Châtelet »[56].
Apprenant la nouvelle, le roi rentre précipitamment de la chasse et la reine se réfugie dans lagrotte duPetit Trianon[a 66]. Vers 16 heures, le cortège des femmes arrive devant l'Assemblée ; une délégation d'une vingtaine d'entre elles est reçue dans lasalle des Menus-Plaisirs, qui exige que le roi promulgue les décrets des 4 et et signe laDéclaration des droits de l'homme. Une horde de citoyennes survient alors dans la salle, criant : « À bas la calotte ! À mort l'Autrichienne ! Les gardes du roi à la lanterne ! »[56].
Louis XVI accepte de recevoir cinq des femmes du cortège, accompagnées du nouveau président de l'Assemblée,Jean-Joseph Mounier. Le roi leur promet du pain, embrasse l'une de ces femmes (Louison Chabry, âgée de17 ans[a 67]), laquelle s'évanouit sous le coup de l'émotion. Les femmes ressortent en criant « Vive le roi ! » mais la foule hurle à la trahison et menace de les pendre. Elles promettent alors de retourner voir le roi pour obtenir davantage. Louis XVI donne alors àJérôme Champion de Cicé,Garde des Sceaux l'ordre écrit de faire venir du blé deSenlis et deLagny ; il promet également à Mounier qu'il promulguera le soir même les décrets des4 et, et qu'il signera également la Déclaration. Se montrant enfin au balcon aux côtés de Louison Chabry, il émeut la foule qui l'acclame alors.
La Fayette et la famille royale à Versailles, le 6 octobre.
Après 7 heures de route[a 68], le cortège arrive à Paris, encadré par la Garde nationale et les têtes fraîchement coupées de la matinée. Des chariots de blé accompagnent également la famille royale, si bien que la foule déclare qu'elle ramène dans la capitale « le boulanger, la boulangère et le petitmitron »[61]. Après un détour protocolaire à l'Hôtel de ville, le cortège parvient aupalais des Tuileries, où la famille royale élit malgré elle son dernier domicile ; un mois plus tard, l'Assemblée siège à lasalle du Manège, non loin de là. Le, lesdéputésFréteau etMirabeau proposent[1] d'instaurer le titre deroi des Français à la place de celui de roi de France. L'Assemblée adopte[2] cette nouvelle titulature le, et décide le que le souverain ne sera pas titré[3]« roi des Navarrais » ni« des Corses ». L'Assemblée officialisera ces décisions par un décret[79] du. Louis XVI commence à utiliser la nouvelle titulature (orthographiée« roi des François ») dans seslettres patentes à partir du[4]. Le, l'Assemblée décrète[5] que sonprésident devra demander au roi que lesceau de l'État porte la nouvelle titulature. Le nouveau sceau est utilisé dès le, avec la formulation« Louis XVI par la grâce de Dieu et par la loy constitutionnelle de l'État roy des François ». Et l'Assemblée décide par décret[6] du, que le titre de roi des Français sera désormais gravé sur les monnaies du royaume (où figurait toujours celui de roi de France et de Navarre :Franciæ et Navarræ rex). Le titre est ensuite maintenu dans laconstitution de 1791.
Politique de déchristianisation et réactions du roi
L'un des premiers actes de cette volonté de déchristianiser les institutions s'opère par le décret du par lequel l'Assemblée, à l'initiative deTalleyrand, décide à 568 voix contre 346 que les biens du clergé serviront à combler le déficit national[80].
Le, l'Assemblée met en circulation 400 millions d'assignats, sortes debons du Trésor, destinés à éponger les dettes de l'État. La valeur de ces assignats était à terme garantie par la vente des biens du clergé ; néanmoins, l'émission excessive de ces bons aura pour conséquence une forte dépréciation, allant jusqu'à 97 % de leur valeur.
« Décret de l'Assemblée national [sic] qui supprime les ordres religieux et religieuses. Le mardi 16 février 1790. » Caricature anonyme de 1790. « Que ce jour est heureux, mes sœurs. Oui, les doux noms de mère et d'épouse est bien préférable à celui de nonne, il vous rend tous les droits de la nature ainsi qu'à nous. »
Le, l'Assemblée vote l'interdiction desvœux religieux et la suppression desordres religieux réguliers, hors institutions scolaires, hospitalières et caritatives. Les ordres tels que lesBénédictins, lesJésuites et lesCarmélites sont déclarés illégaux. Dans plusieurs villes, de violents heurts opposent les catholiques royalistes aux révolutionnaires protestants, tels àNîmes où, le, les affrontements font 400 morts[a 70].
LaConstitution civile du clergé est votée le, remplissant d'effroi Louis XVI en personne. Désormais, lesdiocèses seront alignés sur lesdépartements récemment créés : il y aura donc 83évêques pour 83 diocèses (pour 83 départements), et en outre 10 « évêques métropolitains » à la place des 18archevêques existants. Mais la réforme, décidée sans concertation ni avec le clergé ni avecRome, prévoit également que les curés et les évêques seront désormais élus par les citoyens, même non catholiques. N'ayant plus de revenu à la suite de la vente des biens du clergé, les prêtres seront donc des fonctionnaires publics rémunérés par l'État mais devront, en contrepartie, prêter serment de fidélité « à la Nation, à la loi et au roi » (article 21). La constitution coupe les membres du clergé en deux camps : lesprêtres jureurs (légèrement majoritaires), fidèles à la constitution et au serment de fidélité, et lesprêtres réfractaires, refusant de s'y soumettre. La constitution civile du clergé et la Déclaration des droits de l'Homme seront condamnées par le papePieVI dans lebref apostoliqueQuod aliquantum, ramenant au sein de l'Église quelques prêtres jureurs. L'Assemblée se vengera par le biais du décret du rattachant au Royaume l'État pontifical d'Avignon et leComtat Venaissin.
Orchestrée parLa Fayette au nom desfédérations (les associations degardes nationaux deParis et de province), la Fête de la Fédération rassemble environ 400 000 personnes, en ce compris les députés, leduc d'Orléans venu deLondres, les membres du gouvernement doncNecker, et la famille royale. Une messe est présidée parTalleyrand, entouré de300 prêtres enétole tricolore.
Le roi est acclamé tout au long de cette journée et les Parisiens viennent dans la soirée crier sous ses fenêtres : « Régnez, Sire, régnez ! »[13].Barnave reconnaît : « Si Louis XVI avait su profiter de la Fédération, nous étions perdus »[72]. Mais le roi ne profite pas de la situation : pour certains historiens[a 71], le roi veut éviter une guerre civile[m] ; l'autre explication vient du fait que le roi a peut-être déjà entrepris de quitter le pays.
Avant la fuite de Varennes, la situation deLouisXVI se complique de jour en jour[82]. L'Assemblée nationale lui retire quasiment en permanence des prérogatives[83], un décret limite considérablement saliberté de mouvement[83], et il subit différentes menaces et humiliations[83]. Découragée, Marie-Antoinette ne pense qu'à la fuite[82] mais pas Louis XVI, qui ne veut pas, par crainte d'uneguerre civile.
Après un plan d'enlèvement mené par lecomte d'Artois etCalonne impossible à mettre en œuvre, et une tentative d'assassinat deBailly etLa Fayette projetée parFavras en 1790, le roi construit un plan d'évasion du royaume en direction deMontmédy où l'attend lemarquis de Bouillé. Les historiens divergent quant à la finalité même du projet. Louis XVI semble avoir donné son approbation au projet de fuite sans autre arrière-pensée que de se mettre en sécurité, ainsi que sa famille[84]. Mais selon Bernard Vincent, si le roi avait réussi à trouver refuge à l'est, « alors cela changeait tout : une vaste coalition pourrait se former - alliant entre autres l'Autriche, la Prusse, la Suède, l'Espagne et pourquoi pas l'Angleterre - qui mettrait la Révolution à genoux, prendrait appui sur la France profonde, renverserait le cours de l'histoire et rétablirait le roi Louis et le régime monarchique dans leurs droits immémoriaux »[a 72]. La date de l'évasion est fixée au ; les modalités pratiques tels que la production de faux passeports, les déguisements et le transport notamment sont confiées àAxel de Fersen, amant de la reine et désormais appui de la famille royale.
Le, vers 21 heures, Fersen fait venir à laPorte Saint-Martin laberline qui servira à transporter la famille royale. À minuit et demi, le roi déguisé envalet de chambre, la reine etMadame Élisabeth montent dans une voiture de louage pour rejoindre la berline où sont déjà installés ledauphin, sasœur et leur gouvernanteMadame de Tourzel. La voiture prend alors le départ ; Fersen accompagne la famille royale jusqu'àBondy où il prend congé d'elle.
Le à 7 heures, le valet de chambre s'aperçoit de la disparition du roi.La Fayette, l'Assemblée nationale, puis la ville deParis tout entière apprennent la nouvelle ; on ne sait pas encore s'il s'agit d'un enlèvement ou d'une évasion. Le roi a fait déposer à l'Assemblée un texte écrit de sa main, laDéclaration du roi, adressée à tous les Français à sa sortie de Paris, dans lequel il condamne l'Assemblée qui lui a fait perdre tous ses pouvoirs et exhorte les Français à revenir vers leur roi. De fait, dans ce texte rédigé le, il explique qu’il n’a ménagé aucun effort tant qu’il « a pu espérer de voir renaître l’ordre et le bonheur », mais lorsqu’il s’est vu « prisonnier dans ses États » après que sa garde personnelle lui eut été retirée, lorsque le nouveau pouvoir l’a privé du droit de nommer les ambassadeurs et de déclarer la guerre, lorsqu’on l’a bridé dans l’exercice de sa foi, « il est naturel, dit-il, qu’il ait cherché à se mettre en sûreté »[85].
Ce document ne fut jamais diffusé dans son intégralité. D'une part, Louis XVI y dénonce lesJacobins et leur emprise croissante sur la société française. D'autre part, il y explique sa volonté : une monarchie constitutionnelle avec un exécutif puissant et autonome vis-à-vis de l'Assemblée. Ce document historique majeur, traditionnellement appelé « le testament politique de Louis XVI » a été redécouvert en[86]. Il est aumusée des Lettres et Manuscrits à Paris. Le roi commente son sentiment sur la révolution, en critique certaines conséquences sans pour autant rejeter les réformes importantes commel'abolition des ordres et l'égalité civile.
Pendant ce temps, la berline continue vers l'est, traversant la ville deChâlons-sur-Marne avec 4 heures de retard sur l'horaire prévu. Non loin de là, àPont-de-Sommevesle, l'attendent les hommes deChoiseul ; ne voyant pas arriver la berline arriver à temps, ils décident de s'en aller.
L’arrestation du roi et de sa famille à Varennes.
À 8 heures du soir, le convoi s'arrête devant lerelais deSainte-Menehould puis reprend sa route. La population s'interroge sur la mystérieuse voiture, et très vite s'ébruite la rumeur selon laquelle les fugitifs ne sont autres que le roi et sa famille. Le maître de poste,Jean-Baptiste Drouet, est convoqué à l'Hôtel de ville : face à unassignat à l'effigie du roi qu'on lui tend, il reconnaît le souverain comme étant l'un des passagers du convoi. Il se lance alors à la poursuite de la berline avec ledragon Guillaume en direction deVarennes-en-Argonne, vers laquelle se dirigeait la voiture. Prenant des raccourcis, ils arrivent avant le convoi et parviennent à prévenir les autorités quelques minutes seulement avant l'arrivée du roi. La famille royale arrive vers 10 heures et se heurte à un barrage. Leprocureur-syndicJean-Baptiste Sauce contrôle les passeports, qui semblent en règle. Il s'apprête à laisser repartir les voyageurs quand le juge Jacques Destez, qui avait vécu àVersailles, reconnaît formellement le roi. Louis XVI avoue alors sa véritable identité ; il ne parvient pas à convaincre la population qu'il envisageait de regagnerMontmédy afin d'y installer sa famille, d'autant plus que le maître de poste de Châlons arrive à ce moment précis, porteur d'un décret de l'Assemblée enjoignant d'arrêter les fuyards. Choiseul, qui a réussi à rejoindre le roi, propose à ce dernier de faire dégager la ville par la force, ce à quoi le roi lui répond d'attendre l'arrivée du généralBouillé ; mais celui-ci ne vient pas et seshussards pactisent avec la population. Le roi confie alors à la reine : « Il n'y a plus de roi en France »[87].
Le retour du cortège à Paris.
Informée le au soir des événements qui se sont déroulés àVarennes, l'Assemblée envoie trois émissaires à la rencontre de la famille royale :Barnave,Pétion etLa Tour-Maubourg. La jonction s'opère le au soir àBoursault. Le cortège passe la soirée àMeaux et reprend le lendemain la route de Paris, où l'Assemblée a déjà décrété la suspension du roi. Une foule immense s'est massée le long des boulevards pour voir passer la voiture de la famille royale ; les autorités ont placardé des affiches sur lesquelles il est écrit : « Quiconque applaudira le roi sera bastonné, quiconque l'insultera sera pendu »[88]. Durant le trajet, le roi conserve un calme exemplaire comme le note Pétion : « Il semblait que le roi revenait d'une partie de chasse […] il était tout aussi flegme, tout aussi tranquille que si rien n'était arrivé […] j'étais confondu de ce que je voyais »[56]. Quant à Marie-Antoinette, elle constatera en se regardant dans un miroir que ses cheveux avaient blanchi[a 73].
Pour l'historienMona Ozouf, la fuite manquée du roi a brisé le lien de l'indivisibilité du roi et de la France, car, explique-t-elle, elle « présente aux yeux de tous la séparation du roi et de la nation : le premier, tel un vulgaire émigré, a couru clandestinement à la frontière ; la seconde rejette désormais comme dérisoire son identification au corps du roi, qu'aucune restauration ne parviendra plus à faire revivre ; par où, bien avant la mise à mort du roi, elle accomplit la mort de la royauté »[64].
L'idée républicaine, déjà en chemin, va s'accélérer subitement à l'occasion de la fuite manquée du roi. Le, une pétition réclamant l'instauration d'uneRépublique réunit 30 000 signatures àParis[a 74]. Le, lesJacobins deMontpellier réclament à leur tour la création d'une République.Thomas Paine fonde à la fin juin le club de laSociété républicaine, aux idées plus avancées que celui des Jacobins, au sein duquel il élabore unmanifeste républicain, où il appelle les Français à en finir avec la monarchie : « La nation ne peut jamais rendre sa confiance à un homme qui, infidèle à ses fonctions, parjure à ses serments, ourdit une fuite clandestine, obtient frauduleusement un passeport, cache un roi de France sous le déguisement d'un domestique, dirige sa course vers une frontière plus que suspecte, couverte de transfuges, et médite évidemment de ne rentrer dans nos états qu'avec une force capable nous dicter sa loi »[89]. Cet appel est placardé sur les murs de la capitale puis, le, sur le portail de l'Assemblée nationale ; cette initiative ne manque pas de choquer un certain nombre de députés, lesquels se désolidarisent de ce mouvement :Pierre-Victor Malouet parle de « violent outrage » à la Constitution et à l'ordre public,Louis-Simon Martineau demande l'arrestation des auteurs de l'affiche etRobespierre, enfin, s'écrie : « On m'a accusé au sein de l'Assemblée d'être républicain. On m'a fait trop d'honneur, je ne le suis pas ! »[89].
L'Assemblée poursuit la rédaction de la Constitution à partir du et adopte le texte le. Précédée de laDéclaration des droits de l'homme, elle reconnaît l'inviolabilité du roi, écarte laConstitution civile du clergé (réduite au statut de loi ordinaire), maintient lesuffrage censitaire et prévoit la nomination des ministres par le roi hors de l'Assemblée. Pour le reste, l'essentiel du pouvoir est dévolu à l'Assemblée, élue pour deux ans. En revanche, rien n'est prévu en cas de désaccord entre les pouvoirs législatif et exécutif : le roi ne peut dissoudre l'Assemblée et celle-ci ne peut censurer les ministres. Ce texte jugé plutôt conservateur déçoit les députés de gauche[a 75].
L'un des premiers domaines qui va échapper au roi est celui de la politique extérieure, qu'il avait jusqu'alors menée avec fierté et efficacité.
LaBelgique tout d'abord qui, influencée par l'essor révolutionnaire de la France, connaît l'indépendance et la déchéance de l'empereurJosephII le, lequel est aussitôt remplacé par son frèreLéopoldII. L'Autriche reprend le contrôle de la Belgique et laRépublique liégeoise prend fin le.
Le, l'Assemblée profite de lacrise de Nootka opposant l'Espagne (alliée de la France) à laGrande-Bretagne pour décider qui, du roi ou de la représentation nationale, dispose du droit de déclarer la guerre. La question est tranchée ce jour-là par ledécret de Déclaration de paix au monde aux termes duquel l'Assemblée décrète que cette décision n'appartient qu'à elle seule. Elle affirme en effet que « La nation française renonce à entreprendre aucune guerre dans le but de faire des conquêtes […] elle n'emploiera jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple ».
Louis XVI est maintenu commeroi des Français par lanouvelle Constitution. Il est toujours roi« par la grâce de Dieu », mais aussi« par la loi constitutionnelle de l'État »[94], c'est-à-dire non plus seulement un souverain de droit divin, mais en quelque sorte le chef, le premier représentant du peuple français. Il conserve la totalité des pouvoirs exécutifs, qu'il exerce en vertu de la loi humaine[95]. Cette constitution maintenait en outre le changement du titre dudauphin en « prince royal » (qui avait eu lieu le).
La nouvelle Assemblée, élue au suffrage censitaire, ne comporte aucun député de l'ancienne Assemblée constituante. Elle comprend 745 députés : 264 inscrits au groupe desFeuillants, 136 à celui desJacobins et 345Indépendants.
Nouvelle crise économique à la fin de l'année 1791
La France traverse une nouvelle crise à la fin de l'année 1791 : l'agitation populaire qui gagne lesAntilles provoque une réduction dusucre et ducafé, et donc la montée de leur prix. La valeur desassignats se dégrade, le prix dublé augmente et le peuple a faim.
Crises diplomatiques et déclaration de guerre à l'Autriche
Les et, la nouvelle Assemblée adopte deux décrets sur l'émigration : dans le premier, elle demande aucomte de Provence de revenir en France dans les deux mois sous peine de perdre ses droits à laRégence ; le second exhorte l'ensemble des émigrés à rentrer sous peine d'être accusés de « conjuration contre la France »[61], passible de lapeine de mort. Le roi valide le premier décret mais oppose sonveto à deux reprises au second, les et. L'Assemblée adoptera plus tard la loi du mettant à disposition de la Nation les biens mobiliers et immobiliers confisqués aux individus considérés comme ennemis de la Révolution, c'est-à-dire les émigrés et fugitifs, les prêtres réfractaires, les déportés et détenus, les condamnés à mort, les étrangers ressortissants des pays ennemis.
Unultimatum est adressé àFrançoisII le lui enjoignant de chasser les émigrants français de son pays, lequel demeure sans réponse. Le roi accepte donc, à la demande de l'Assemblée, dedéclarer la guerre à l'Autriche le 20 avril 1792. Beaucoup reprocheront au roi ce « double jeu »[a 77] : si la France l'emporte, il sortira renforcé des événements ; si elle perd, il pourra retrouver ses pouvoirs monarchiques grâce à l'appui des vainqueurs.
Face à la déroute de l'armée, au renvoi des ministresServan,Roland etClavière, et au refus du souverain d'adopter les décrets sur la création du camp de fédérés et la déportation des prêtres réfractaires, les Jacobins et les Girondins entreprennent une épreuve de force pour le, date anniversaire duserment du Jeu de paume. Plusieurs milliers de manifestants parisiens, conduits parSanterre, sont ainsi encouragés à se rendre aupalais des Tuileries pour protester contre la mauvaise gestion de la guerre.
Les événements vont s'accélérer davantage le par la publication dumanifeste de Brunswick où leduc de Brunswick avertit les parisiens que s'ils ne se soumettent pas « immédiatement et sans condition à leur roi », Paris sera promis « à une exécution militaire et à une subversion totale, et les révoltés […] aux supplices qu'ils méritent ». Le couple royal est dès lors soupçonné d'avoir inspiré l'idée de ce texte[a 79]. Robespierre demande la déchéance du roi le.
Le vers 5 heures du matin, lessections des faubourgs, ainsi que les fédérés marseillais et breton, envahissent laplace du Carrousel. La défense du palais des Tuileries est assurée par 900gardes suisses, leur commandant lemarquis de Mandat ayant été convoqué à l'Hôtel de ville (où vient de se former uneCommune de Paris) avant d'y être assassiné. Le roi descend dans la cour du palais à 10 heures et se rend compte que l'édifice n'est plus protégé. Il décide donc d'aller trouver refuge avec sa famille à l'Assemblée. C'est alors que les insurgés s'engouffrent dans le palais et massacrent tous ceux qu'ils y croisent : gardes suisses, domestiques, cuisiniers et femmes de chambre. Le château est pillé et les meubles dévastés. L'assaut fera plus d'un millier de morts (dont 600 suisses sur 900)[a 80] et les survivants seront par la suite jugés et exécutés.
La Commune insurrectionnelle obtient de l'Assemblée la suspension immédiate du roi et la convocation d'une convention représentative. Le soir même, le roi et sa famille sont transportés aucouvent des Feuillants où ils vont rester trois jours dans le plus grand dénuement.
Transfert de la famille royale à la maison du Temple
Louis le Dernier et sa famille conduits au Temple le 13 Aoust 1792 (estampe de 1792, auteur inconnu).
Le, l'Assemblée élit unconseil exécutif de 6 ministres et fixe pour début septembre l'élection de la Convention. Elle rétablit par ailleurs la censure et demande aux citoyens de dénoncer les suspects. Elle demande enfin que la famille royale soit transférée aupalais du Luxembourg mais la Commune exige que ce soit auprieuré hospitalier du Temple, sous sa garde.
Les prisons parisiennes renferment entre 3 000 et 10 000 détenus[a 83], constitués deprêtres réfractaires, agitateurs royalistes et autres suspects. La Commune veut en finir avec les ennemis de la Révolution avant qu'il ne soit trop tard. Un officier municipal informe le roi, enfermé à la maison du Temple, que « le peuple est en fureur et veut se venger »[72].
Le, lesPrussiens franchissent l'Argonne, mais les armées françaises deKellerman etDumouriez (successeur deLa Fayette passé à l'ennemi) se rejoignent le 19. L'armée française se retrouve en supériorité numérique et dispose d'une nouvelle artillerie que l'ingénieurGribeauval lui a donnée quelques années plus tôt sous l'impulsion de Louis XVI.
La bataille s'engage àValmy le. Les Prussiens sont rapidement défaits et se réfugient derrière leur frontière. L'invasion de la France est stoppée nette et, comme l'affirmeraGoethe qui accompagnait alors l'armée prussienne : « D'ici et de ce jour commence une ère nouvelle dans l'histoire du monde »[61].
C'est dans le contexte de lavictoire de Valmy qui galvanise les esprits que la Convention se réunit pour la première fois le, marquant dès son arrivée l'abolition de laMonarchie.
Abolition de la monarchie et derniers mois (1792-1793)
Marie-Antoinette, sa filleMadame Royale,Madame Élisabeth et leurs deux servantes sont transférées dans l'étage supérieur de la tour le suivant, dans un appartement similaire à celui du désormais ancien roi.
Le, un débat crucial s'engage sur le point de savoir par qui le procès sera conduit. Le député deVendéeMorisson affirme que le roi a déjà été condamné en ayant été déchu. En face de lui, certains commeSaint-Just réclament sa mort, déclarant notamment que le roi est l'« ennemi » naturel du peuple, et qu'il n'a pas besoin de procès pour être exécuté.
Les preuves de la culpabilité du roi sont ténues jusqu'au, jour de la découverte auxTuileries d'unearmoire de fer dissimulée dans l'un des murs des appartements du roi. Selon leministre de l'IntérieurRoland de la Platière, les documents qui y ont été trouvés démontrent la collusion du roi et de la reine avec les émigrés et les puissances étrangères ; il affirme également, sans plus de précision, que certains députés y sont compromis[a 84]. Bien que selon certains historiens, commeAlbert Soboul, les pièces rapportées « n'apportent pas la preuve formelle de la collusion du roi avec les puissances ennemies »[15], elles vont néanmoins convaincre les députés d'inculper le roi. Dans un discours du resté célèbre,Robespierre prône solennellement la mort sans délai du roi déchu, déclarant que les « peuples […] ne rendent point de sentences, ils lancent la foudre ; ils ne condamnent point les rois, ils les replongent dans le néant […]. Je conclus que la Convention nationale doit déclarer Louis traître à la patrie, criminel envers l'humanité, et le faire punir comme tel […]. Louis doit mourir parce qu'il faut que la patrie vive »[99].
Après des débats houleux, la Convention décide que Louis Capet sera bel et bien jugé, le tribunal étant la Convention elle-même. Elle confirme le que Louis Capet sera « traduit à la barre pour y subir son interrogatoire »[61]. Saint-Just croit alors bon de préciser que « ce n'est pas [un monarque] que nous allons juger ; c'est la monarchie [et la] conspiration générale des rois contre les peuples »[89]. En réalité, avant même le début du procès, le verdict estécrit d'avance car la grande majorité des députés a conscience qu'une autre solution que la condamnation du Roi conduirait à fragiliser la République[100], ce qui fait dire à l'historienJean-Clément Martin qu'il s'agit d'un « procès qui n’en est pas un»[100].
Le1er interrogatoire a lieu le. Vers 13 heures, deux personnalités viennent le chercher :Pierre-Gaspard Chaumette (procureur de laCommune de Paris) etAntoine Joseph Santerre (commandant de lagarde nationale). L'appelant désormais sous le nom de Louis Capet, ils se voient rétorquer par l'intéressé : « Capet n'est pas mon nom, c'est le nom d'un de mes ancêtres. […] Je vais vous suivre, non pour obéir à la Convention, mais parce que mes ennemis ont la force en main »[101]. Arrivé dans lasalle du Manège au grand complet, l'accusé est accueilli parBertrand Barère, le président de la Convention, qui le prie de s'asseoir et lui annonce : « Louis, on va vous lire l'acte énonciatif des délits qui vous sont imputés. » Barère de reprendre ensuite un par un les chefs d'accusation et de demander au roi de répondre à chacun d'entre eux. Les motifs d'inculpation sont nombreux : massacres des Tuileries et du Champ-de-Mars, trahison du serment prêté à la Fête de la Fédération, soutien des prêtres réfractaires, collusion avec les puissances étrangères, etc. Répondant à chacune des questions avec calme et brièveté, Louis XVI soutient qu'il a toujours agi dans le respect des lois qui existaient alors, qu'il a toujours combattu l'usage de la violence et qu'il a désavoué l'action de ses frères[99]. Pour finir, il nie reconnaître sa signature sur les documents qu'on lui montre, et obtient des députés l'aide d'un avocat pour assurer sa défense. Après quatre heures d'interrogatoire, le roi est ramené à la Tour du Temple et confie à Cléry, son seul interlocuteur désormais : « J'étais bien éloigné de penser à toutes les questions qui m'ont été faites. » Et le valet de chambre de remarquer que le roi « se coucha avec beaucoup de tranquillité »[101].
Les interrogatoires se succèdent sans rien donner, chacune des parties campant dans ses positions. Le, de Sèze s'adresse aux députés en ces termes : « Je cherche parmi vous des juges, et je ne vois que des accusateurs »[72]. Le, Robespierre réfute l'idée que le sort du roi soit remis entre les mains du peuple par le biais d'assemblées primaires ; il affirme en effet que les Français seraient en ce sens manipulés par les aristocrates : « Qui est plus disert, plus adroit, plus fécond en ressources, que les intrigants […], c'est-à-dire que les fripons de l'ancien et même du nouveau régime ? »[99].
La conclusion des débats revient à Barère le, au moyen d'un discours dans lequel il souligne l'unité de la conspiration, les divisions desGirondins sur l'appel au peuple, et enfin l'absurdité du recours à celui-ci. La reprise des délibérations est programmée pour le suivant, où trois points seraient abordés : la culpabilité du roi, l'appel au peuple et la peine à infliger. D'ici là, le roi consacre ses journées à la prière et à l'écriture ; à ce titre, il avait le rédigé sontestament.
L'issue du procès prend la forme du vote de chaque député sur les trois questions évoquées par Barère, chacun des élus votant individuellement à la tribune.
La Convention se prononce le sur les deux premières questions, à savoir :
culpabilité du roi pour « conspiration contre la liberté publique et la sûreté générale de l'État » : 691 pour et 10 abstentions ;
recours au peuple pour ratifier le jugement : 424 contre, 287 pour, 12 abstentions.
Du à 10 heures au à 20 heures se déroule le vote relatif à la sentence à appliquer, chacun des votants est amené à justifier sa position :
366 voix pour la mort immédiate, 34 pour la mort avec sursis à exécution, 319 voix pour la détention et le bannissement, 2 voix pour les travaux forcés.
Une partie de l'Assemblée demande un nouveau vote, arguant que certains députés n'étaient pas d'accord avec la catégorie dans laquelle leur voix était classée. Le se déroule ce nouveau scrutin[102] :
361 voix pour la mort immédiate, 26 pour la mort sous réserve d'examiner la possibilité d'un sursis à exécution (amendementde Mailhe[103]), 44 pour la mort avec sursis, 290 pour d'autres peines, 5 abstentions[104],[n].
Le a lieu un nouvel appel nominal : « Sera-t-il sursis à l'exécution du jugement de Louis Capet ? ». Le vote est terminé le 20 à 2 heures du matin :
380 voix contre le sursis à exécution, 310 pour, soit 70 voix de majorité pour l'exécution sans délai.
Selon son bourreau, il déclare lors de son installation sur l'échafaud : « Peuple, je meurs innocent ! », puis au bourreau Sanson et ses assistants « Messieurs, je suis innocent de tout ce dont on m'inculpe. Je souhaite que mon sang puisse cimenter le bonheur des Français ».
L'acte de décès est rédigé le. L'original de l'acte a disparu lors de ladestruction des archives de Paris en 1871 mais il avait été recopié par des archivistes. Voici ce que dit le texte :« Du lundi, l'an Second de la République française. Acte de décès de Louis Capet, du dernier, dix heures vingt-deux minutes du matin ; profession, dernier Roy des Français, âgé de trente-neuf ans [sic], natif de Versailles, paroisse Notre-Dame, domicilié à Paris, tour du Temple ; marié àMarie-Antoinette d'Autriche, ledit Louis Capet exécuté sur la Place de la Révolution en vertu des décrets de la Convention nationale des quinze, seize et dix-neuf dudit mois de janvier, en présence 1° de Jean-Antoine Lefèvre, suppléant du procureur général sindic du département de Paris, et d'Antoine Momoro, tous deux membres du directoire dudit département et commissaires en cette partie du conseil général du même département ; 2° de François-Pierre Salais et de François-Germain Isabeau, commissaires nommés par le conseil exécutif provisoire, à l'effet d'assister à ladite exécution et d'en dresser procès-verbal, ce qu'ils ont fait ; et 3° deJacques Claude Bernard[106] et deJacques Roux, tous deux commissaires de la municipalité de Paris, nommés par elle pour assister à cette exécution ; vu le procès-verbal de ladite exécution dudit jour dernier, signé Grouville, secrétaire du conseil exécutif provisoire, envoyé aux officiers publics de la municipalité de Paris cejourd'huy, sur la demande qu'ils en avaient précédemment faite au ministère de la justice, ledit procès-verbal déposé aux Archives de l'état civil ; Pierre-Jacques Legrand, officier public (signé) Le Grand »[107].
Sépulture
Chapelle expiatoire (située dans le 8ᵉ arrondissement de la ville de Paris en région Île-de-France)
L'abbéBerlier prononce une oraison funèbre depuis Jersey le 21 janvier 1794.
Chaque année depuis 1815, des messes catholiques sont célébréesen mémoire de Louis XVI, dans de nombreuses communes de France, le, jour anniversaire de sonexécution.
Cinq statues du roi sont encore présentes en France :
La statue deNantes au sommet de lacolonne Louis-XVI. La colonne est érigée en 1790 et n'est surmontée d'une statue du roi en empereur romain qu'en 1823. L’œuvre du sculpteurDominique Molknecht est remplacée par une copie du sculpteur nantais Georges Perraud en 1926.
La statue duLoroux-Bottereau enLoire-Atlantique. Située devant l'église Saint-Jean-Baptiste, l’œuvre originale de 1823 deDominique Molknecht se trouve actuellement à l'office de tourisme de la ville ; une copie a pris sa place devant l'église.
La statue dePlouasne dans lesCôtes-d'Armor. Située dans les jardins duchâteau de Caradeuc, l’œuvre est commandée en 1826 par la mairie àDominique Molknecht pour être placée dans la niche de l’hôtel de ville ; mais étant achevée après larévolution de 1830, elle est reléguée au musée des Beaux-arts de Rennes durant 120 ans. En 1950, le propriétaire du château de Caradeuc Alain de Kernier obtient le prêt de cette statue du roi auprès de la mairie de Rennes, et la place au bout d'une courte allée portant aujourd'hui le nom d'allée de Louis XVI.
La statue deSorèze dans leTarn. Elle est située dans les jardins de l'abbaye-école de la ville depuis 1857 ; elle est commandée par le Père Henri-Dominique Lacordaire à l'occasion de la fête séculaire de l'école[109], pour honorer le fondateur de l'École royale militaire de Sorèze en 1776.
La statue deNant dans l'Aveyron. Elle est visible à l'office du tourisme, mais elle n'a plus de tête, après avoir été décapitée trois fois. Le roi avait des palmes du martyre sur sa tête.
En 2011, leministère de la justice de laRépublique française a officiellement reconnu sur son site internet que « la procédure judiciaire ayant conduit à la condamnation à mort de Louis XVI ne fut pas parfaitement légale au regard des lois de l'époque.»[98]
- :Son Altesse Royale Louis-Auguste de France, fils de France,duc de Berry ;
- :dauphin de France(à la mort de son pèreLouis, il devient l'héritier du trône de France ; le dauphin de France n'a pas à l'époque le prédicat d'altesse royale) ;
- :Sa Majesté le roi de France et de Navarre(il est toujours considéré comme roi par les royalistes et par les pays qui ne reconnaissent pas la République française) ;
- :Sa Majesté leroi des Français(c'est à partir du que Louis XVI prend[4] le titre de roi des Français, que l'Assemblée avait adopté[2] le, et qu'elle officialisera par décret[79] le ; laConstitution, qui entrera en vigueur le, maintiendra cette nouvelle titulature).
La reine Marie-Antoinette (1755-1793) et ses enfants (de g. à d., Marie-Thérèse Charlotte, Louis Charles et Louis-Joseph Xavier, le berceau vide devait recevoir la princesse Sophie-Béatrice, morte à moins d'un an (11 mois) en 1787) parÉlisabeth Vigée-Lebrun, (1787)
Durant son enfance, Louis XVI était d'une santé fragile et certains lui prêtaient une composition « faible et valétudinaire »[10]. Son corps malingre paraissait être exposé à toutes lesmaladies infantiles[b 2]. Puis à 6 ans, selon l'historienPierre Lafue, « son visage était déjà formé. Il avait les yeux ronds et gris de son père, avec un regard qui devait devenir de plus en plus flou à mesure que samyopie s'accentuerait. Son nez busqué, sa bouche assez forte, son cou gros et court annonçaient le masque plein auquel les dessins satiriques se plairaient, plus tard, à donner un aspect bovin »[b 3].
À l'âge adulte pourtant, le roi se caractérise par un certain embonpoint et une taille hors du commun pour l'époque : 6 pieds et 3 pouces de haut, soit environ 1 mètre 93 (selon l'historienJean-François Chiappe), ou : de 1 mètre 86 à 1 mètre 90 selon d'autres sources[112]. Il est également doté d'une forte musculature lui donnant une force étonnante : le roi fait à plusieurs reprises la démonstration de soulever à bras tendu une pelle contenant un jeunepage accroupi[a 87].
Portrait caricaturé
À la suite de lafuite de Varennes de la famille royale, s’ensuit toute une série de caricatures. Ces dernières représentent Louis XVI sous les traits d’un cochon, ce qui lui vaut plus tard le surnom de « roi-cochon »[113],[114].
Personnalité
Caractère et traits de personnalité
Enfant, le futur roi se montre « taciturne », « austère » et « sérieux »[b 3]. Sa tanteMadame Adélaïde l'encourage ainsi : « Parle à ton aise, Berry, crie, gronde, fais du tintamarre comme ton frère d'Artois, casse et brise mes porcelaines, fais parler de toi »[b 3].
DepuisLouisXIV, la noblesse est en grande partie « domestiquée » par le système de cour. L'étiquette régit la vie de la cour en faisant du roi le centre d'un cérémonial très strict et complexe. Cette construction deLouisXIV vise à donner un rôle à une noblesse qui avait été jusque là souventrebelle et toujours menaçante pour le pouvoir royal.
Le refus d'entrer dans le grand jeu de l'étiquette explique la très mauvaise réputation que lui fera la noblesse de cour. En la privant du cérémonial, le roi la prive de son rôle social. Ce faisant, il se protège également. Si à l'origine la cour sert à contrôler la noblesse, la situation se renverse très vite : le roi se trouve à son tour prisonnier du système.
Il arrive enfin parfois au roi de réagir étrangement avec son entourage, en se livrant parfois à des farces enfantines, comme chatouiller son valet de chambre ou pousser un courtisan sous une lance d'arrosage[a 88].
La faiblesse que ses contemporains lui attribuaient[117] fera dire au roi : « Je sais qu'on me taxe de faiblesse et d'irrésolution, mais personne ne s'est jamais trouvé dans ma position »[15], signifiant ainsi que sa personnalité n'est pas une cause exclusive des événements de laRévolution.
Grand chasseur, Louis XVI est aussi un prince studieux et érudit, qui aime autant laserrurerie et la menuiserie que la lecture. Il est féru d'histoire, de géographie, de marine et de sciences. Il fait de la marine une priorité de sa politique étrangère, et en a une connaissance théorique si pointue, qu'il se plaît, quand il visite le nouveau port militaire deCherbourg (et voit pour la première fois la mer), à faire des remarques dont la pertinence stupéfie ses interlocuteurs.
Passionné degéographie et de science maritime, Louis XVI mandateJean-François de La Pérouse pour effectuer le tour du monde etcartographier l'océan Pacifique qui restait alors encore mal connu, malgré les voyages deCook et deBougainville. Le roi est à l'origine de toute l'expédition, tant dans le lancement de celle-ci que dans le choix du navigateur, en passant par les détails du voyage. La Pérouse lui-même ayant des doutes sur la faisabilité de ce projet, il suggère au roi de renoncer au projet ; comme le note un des amis du navigateur, « c'est Sa Majesté qui a choisi La Pérouse pour l'exécuter, il n'y a pas eu moyen qu'il s'en débarrassât »[60].
L'expédition part deBrest le à bord de deux navires :La Boussole etL'Astrolabe. Le roi n'a plus de nouvelles régulières à partir du. On pense alors que l'équipage a été massacré par une peuplade de l'île deVanikoro[a 89].
La chasse est un des loisirs préférés du roi ; à l'issue de chaque sortie, il note dans son carnet le bilan détaillé des pièces abattues par ses soins. C'est ainsi que l'on sait qu'il ne se passa « rien » le (c'est-à-dire qu'il ne réussit aucune prise), et qu'au bout de 16 ans de règne il aura inscrit à son tableau de chasse 1 274 cerfs et un total de 189 251 animaux abattus par lui seul[a 88]
« Il aime avant tout la chasse. Comme son grand-père il a la chasse dans le sang. Il chasse cent dix-sept fois en 1775, cent soixante et une en 1780. Il voudrait bien sortir plus souvent - son grand-père, lui, sortait jusqu'à six fois par semaine - mais ce n'est pas possible à cause du travail et de toutes les exigences de son état. […] Il chasse à courre le cerf, le chevreuil et le sanglier. Il aime bien aussi les chasses au fusil (appelées « tirés ») pour les faisans, les bécassines et les lapins. En 1780, dans sa récapitulation de fin d'année, il dénombre88 chasses du cerf,7 du sanglier,15 du chevreuil et88 tirés. Toutes ces chasses sont de véritables hécatombes. Le nombre des pièces varie de mille à mille cinq cents par mois. La plupart sont des volatiles, mais il n'est pas rare de prendre le même jour quatre ou cinq sangliers ou deux ou trois cerfs »[118].
« Après la chasse, la lecture est l'occupation préférée du roi. Il ne peut pas vivre sans lire. Il est curieux de toute lecture. Il a constitué lui-même sa bibliothèque. […] Au premier rang de ses lectures favorites figurent les journaux »[118].
Serrurerie et horlogerie
« De l'habileté manuelle de ce prince et de son goût pour la serrurerie et l'horlogerie, on a beaucoup parlé. […]. Lui plaît aussi beaucoup le dessin d'architecture »[118].
Sciences
Comme son grand-père, il se passionne aussi pour la botanique »[118]. Il aime aussi se promener dans les combles duchâteau de Versailles pour mieux admirer son parc et ses plans d'eau.
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En matière de politique étrangère, la reine a peu d'influence sur son époux malgré les pressions qu'elle exerce régulièrement sur lui. Dans une lettre écrite àJosephII, elle déclare à celui-ci : « Je ne m'aveugle pas sur mon crédit, je sais que surtout pour la politique [étrangère], je n'ai pas grand ascendant sur l'esprit du Roi […] je laisse croire au public que j'ai plus de crédit que je n'en ai véritablement, parce que si on ne m'en croyait pas, j'en aurais moins encore »[15].
Outre sa relation avec Marie‑Antoinette, Louis XVI entretenait des liens étroits avec d’autres membres de son entourage, parmi lesquelsFrançoise Boze. Sur la base d’une correspondance conservée à laBibliothèque nationale de France, l’historienne Aurore Chéry identifie Boze comme une confidente proche — et possible maîtresse — du roi. Selon Chéry, la correspondance est explicite sur la nature étroite de leur relation et lui attribue un rôle discret mais stratégique dans les affaires personnelles et politiques de Louis XVI. Cette interprétation constitue une hypothèse originale de Chéry et n’a pas été confirmée par d’autres historiens spécialisés sur la monarchie[119].
Le naît àVersailles laloge maçonnique dite des « Trois Frères Unis ». Soulevant l'hypothèse probable selon laquelle les « trois frères » en question sont Louis XVI,LouisXVIII etCharlesX, l'historien Bernard Vincent ne confirme cependant pas cette idée, mais admet qu'une loge établie à deux pas du château ne pouvait qu'avoir reçu l'assentiment du roi[a 90]. Il rappelle par ailleurs qu'il a été retrouvé unemédaille de Louis XVI datée du, renfermant lecompas, l'échelle graduée, l'équerre, la poignée detruelle et lesoleil. Enfin, pour consolider son avis sur les accointances du souverain avec les francs-maçons, Bernard Vincent rappelle que lorsque le roi se rend à l'hôtel de ville de Paris pour adopter lacocarde tricolore, il est accueilli sur les marches par la « voûte d'acier », une double haie mécanique formée par les épées croisées desgardes nationaux et qui symbolise les honneurs maçonniques[a 91].
De son côté, le courant royalistecontre-révolutionnaire a dressé dès la même époque le portrait d'un « roi martyr », conservateur, très catholique, aimant son peuple mais incompris de lui. Une importante hagiographie s’est rapidement développée[124].
En 1922,Albert Mathiez le décrit comme un« gros homme, aux manières communes, [qui] ne se plaisait qu'à table, à la chasse ou dans l'atelier du serrurierGamain. Le travail intellectuel le fatiguait. Il dormait auConseil. Il fut bientôt un objet de moquerie pour les courtisans frivoles et légers »[126].
À rebours de ces lectures bienveillantes, l’historienJoël Félix (Louis XVI et Marie-Antoinette. Un couple en politique, 2006) propose une vision plus autoritaire du souverain. La quatrième de couverture de l’ouvrage résume ainsi sa position : « Loin de voir en Louis XVI un homme bienfaisant, faible et indécis, balloté par les événements entre ses ministres et la famille royale, l’auteur dépeint un monarque sûr de lui, jaloux de son autorité, volontiers despotique et belliqueux, et à la pensée politique claire »[129].
Plus récemment, l’historienneAurore Chéry (L’Intrigant. Nouvelles révélations sur Louis XVI, 2020) rejoint Félix sur l’idée d’un roi à la personnalité affirmée, sûre de lui et jalouse de son autorité, tout en mettant l’accent sur son rôle actif dans les transformations politiques : elle décrit Louis XVI comme « un roi déterminé, au caractère entier, un tacticien contraint de fonder sa politique sur la ruse, la dissimulation et la manipulation » et « un souverain aux idées avant-gardistes et à la personnalité dérangeante, à la fois allumeur de révolutions et républicain bien décidé à transformer le monde »[130].
À l'international, certains historiens le comparent parfois àCharlesIer d'Angleterre etNicolasII[136],[137] ; ces trois monarques ont chacun été victime de régicides, ont été en leurs temps accusés par leurs détracteurs de velléités absolutistes et ont lors des crises importantes auxquels ils ont été confrontés, multiplié les maladresses, fait preuve de piètres qualités de négociateurs et se sont entourés de mauvais conseillers précipitant leur pays dans l'abîme, avant d'être remplacés par des dirigeants révolutionnaires rendus responsables d'expériencesdictatoriales voire proto-totalitaires[138],[139].
Représentations dans la culture populaire
Le roi Louis XVI a été dépeint sur de nombreux supports variés[140].
↑C'est le 8 octobre 1789 que fut proposé[1] par lesdéputésFréteau etMirabeau d'instaurer le titre de roi des Français à la place de celui de roi de France. L'Assemblée adopta[2] cette nouvelle titulature le 10 octobre, et décida le 12 octobre que le souverain ne serait pas titré[3]« roi des Navarrais » ni« des Corses ». Le roi commença à l'utiliser (orthographiée« roi des François ») dans seslettres patentes à partir du 6 novembre[4]. Le, l'Assemblée décréta[5] que sonprésident devait demander au roi que lesceau de l'État porte la nouvelle titulature. Le nouveau sceau fut utilisé dès le 19 février, avec la formulation« Louis XVI par la grâce de Dieu et par la loy constitutionnelle de l'État roy des François ». Et l'Assemblée décida par décret[6] du, que le titre de roi des Français serait désormais gravé sur les monnaies du royaume (où figurait toujours celui de roi de France et de Navarre :Franciæ et Navarræ rex).
↑Ce prénom ne devient « officiel » que le jour de sonbaptême, à savoir le.
↑« Ondoyé » et non « baptisé » (il le sera le 18 octobre 1761), l'ondoiement étant caractérisé par la seule ablution baptismale, en attendant de procéder plus tard aux autres cérémonies qui ont été omises. L'ondoiement était généralement conféré aux bébés en danger de mort ou ne pouvant pas être baptisés dans l'immédiat.
↑Ce trait de caractère ne manqua pas d'étonner l'historienDavid Hume lors d'une visite à la cour en 1763. Il racontera plus tard que « le duc de Berry, l'aîné, un garçon de dix ans, s'avança et me dit combien j'avais d'amis et d'admirateurs dans ce pays, et qu'il se comptait parmi eux à cause du plaisir qu'il avait tiré de la lecture de beaucoup de passages de mes œuvres. »[20].
↑« Trempe d'esprit supérieure, discernement et justesse d'esprit - éclairé, point dévot de complexion - fier, fermé, subordonné, équitable, bon par raison et non par faiblesse, économe, solide, ne s'amusant point d'enfantillage, né pour aimer 20 millions d'hommes et non 5 ou 6 personnes. »[22].
↑L'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche ne voulait pas que le mariage fût annulé pour non-consommation, car cette union somme toute politique était importante à ses yeux.
↑Marie-Antoinette ne fut pas inoculée puisqu'elle avait déjà subie une attaque bénigne à Vienne et était donc immunisée.
↑Il envoie l'ordre suivant auduc de la Vrillière,ministre de la maison du roi : « Il est nécessaire, comme elle sait beaucoup de choses, qu'elle soit enfermée, plus tôt que plus tard. Envoyez-lui unelettre de cachet pour qu'elle aille dans un couvent de province et qu'elle ne voie personne. Je lui laisse le choix de l'endroit et de la pension pour qu'elle vive honnêtement. »[37].
↑C'est par ce mode de désignation que l'assemblée des notables se distingue desÉtats généraux.
↑Et notamment Pierre Lafue, Jean-François Chiappe, Bernard Faÿ et Éric Le Nabour. Bernard Vincent (Vincent 2006) s'interroge quant à lui en ces termes : « Comment se peut-il qu'un monarque absolu, qui plus est catholique et de droit divin, ait tout fait - achevant par là même de ruiner les finances de son pays - pour que les Américains en révolte, majoritairement protestants de surcroît, puissent (1) rompre le lien colonial les unissant à l'Empire britannique, (2) proclamer leur indépendance, (3) rejeter la monarchie, (4) devenir une république et même jeter les premières bases d'un régime démocratique ? ».
↑Un témoin de la Fête raconte : « S'il avait eu du caractère, le roi aurait pu se placer à la tête des fédérés, qui étaient si bien disposés pour lui qu'un simple mot, un seul signe, aurait suffi à les rallier autour et à faire d'eux des instruments dociles de l'autorité royale. »[81].
↑On remarque que 361 est une voix de plus que la somme des autres votes exprimés : ce qui peut être l'origine de la rumeur souvent colportée (par exemple surHerodote.net) que le roi n'aurait été condamné qu'à une seule voix de majorité. Pourtant les votes avec réserve de l'amendement de Mailhe n'étaient pas tous opposés à l'exécution, ainsi que le montre le vote suivant qui dégage une majorité définitive de 70 voix pour l'exécution sans délai.
↑Louisquatorzienne : adjectif, s'écrit soit d'un seul mot ou avec un tiret entre louis et quatorzienne[115].
↑L'historienBernard Faÿ raconte que le roi s'est une seule fois laissé à jouer avec la reine et d'autres courtisans, mais y perdit dans la même partie la somme de60 000 livres. Il jura alors de ne plus s'adonner aux jeux d'argent[12].
↑Extrait duregistre des baptêmes (1754) de l'église Notre-Dame de Versailles :L'an mil sept cent cinquante quatre le vingt trois du mois d'Aoust a été ondoyé un prince, fils de Très haut, très puissant, et Excellent prince Louis Dauphin de France, et de très haute, très puissante et excellente princesse Marie Joseph de Saxe, Dauphine de France, par monsieur l'abbé de Chabannes Aumosnier du Roy, en présence de nous soussigné prêtre de la Congrégation de la mission faisant les fonctions curialles le Curé absent. Signé : LEROUX, prêtre.Archives départementales des Yvelines
↑Provence et Artois ont épousé respectivement en 1771 et 1773 deux filles du roi de Sardaigne tandis que leur sœur épousera en 1775 l'héritier du trône sarde. En 1775, Artois, 18 ans, aura un premier apparemment promis à ceindre la couronne puisque ses frères aînés se montrent incapables d'engendrer
↑Correspondance secrète entre Marie-Thérèse et le comte de Mercy-Argenteau, éd. Alfred d'Arneth et M. A. Geffroy, 3 vol., Firmin-Didot, Paris, 1874,tomeII.
↑Henri Doniol,Histoire de la participation de la France à l'établissement des États-Unis d'Amérique : Correspondance diplomatique et documents, volume 2, Paris, Imprimerie nationale,,p. 679.
↑Jean-Sylvain Bailly, Berville,Mémoires de Bailly : notice sur sa vie, notes et éclaircissements historiques, Paris, Baudoin,, 885 p.(lire en ligne),p. 58.
↑a etbMuratori-Philip, Anne. Madame Royale. France, Fayard, 2016.
↑ab etcMémoire justificatif de Louis XVI, France, J. Moronval,, p.55-56.
↑Humbert, Raymond. 1789-1799 : il était une fois la Révolution: Les manuels scolaires racontent. N.p., Dessain et Tolra (réédition numérique FeniXX), 1989.,p.61
↑Buchez et Roux,Histoire parlementaire de la Révolution française, Paris, Paulin,(lire en ligne),p. 44.
↑Aimé Césaire,Toussaint-Louverture,La Révolution française et le Problème colonial, p. 164-165 ; Jean-Daniel Piquet,L'émancipation des Noirs dans la Révolution française (1789-1795), Paris, Karthala, 2002 p. 183-186.
↑Amendement stipulant « qu’il serait digne de la Convention d’examiner s’il ne serait pas politique et utile de presser ou de retarder le moment de l’exécution » (Jacques-Philippe Giboury,Le procès de Louis XVI devant la convention nationale).
↑Archives parlementaires de 1787 à 1860 : recueil complet des débats législatifs et politiques des Chambres françaises. Première série, 1787 à 1799. Tome LVII. Du 12 janvier 1793 au 28 janvier 1793.
↑"Louis XVI, élevé au trône à l’âge de vingt ans, y apportoit un sentiment bien précieux lorsqu’il est modéré, bien dangereux quand il est excessif, la défiance de soi-même. Le vice de son éducation avoit été tout le contraire de celui qu’on reproche à l’éducation des princes on l’avoit trop intimidé ; et, tant qu’avoit vécu son aîné, le duc de Bourgogne, on lui avoit trop fait sentir, du côté de l’intelligence, la supériorité qu’avoit sur lui ce prince réellement prématuré.La situation du Dauphin étoit donc l’inquiétude et la perplexité d’une âme qui pressent sa destinée et ses devoirs, et qui n’ose espérer de pouvoir les remplir, lorsqu’il se vit tout à coup chargé du gouvernement d’un empire. Son premier sentiment fut la frayeur de se trouver roi à vingt ans ;"Mémoires de Marmontel(tome 3, page 85.)
↑Guillaume Perrault, « Gueniffey : «Robespierre incarne d'une façon chimiquement pure l'idée de la table rase» »,Le Figaro,(lire en ligne, consulté le).
Louis XVI, sa vie, ses œuvres et ses mémoires, avec une préface de M. Berryer et suivi de la biographie des Régicides, auteur : inconnu, Paris : Librairie Catholique Martin-Beaupré, 1865, 2 volumes (407 et 456 p.). Ouvrage rare, non répertorié à la BNF.
Henry d'Yvignac,Scènes et tableaux du Règne de Louis XVI, Paris, Editions Gautier, 1934, 251 p.
Aurore Chéry,L'Intrigant, nouvelles révélations sur Louis XVI, Paris, Flammarion, 2020, 592 p.
Maurice de la Fuye,Louis XVI, Paris, Editions Denoël, 1943, 486 p.
Claude Goyard (présenté par),Jean Imbert (sous la préśidence de) et Georges Flécheux (sous la preśidence de),Le bicentenaire du procès du Roi : actes du colloque, Sénat, 8 janvier, Palais de justice, 9 janvier 1993, Paris, Éditions F.-X. de Guibert,, 219 p.(ISBN978-2-86839-310-4,OCLC2868393101).