Né àThumeries dans leNord le[2] au milieu d'une fratrie de trois frères et deux sœurs, Louis Malle est issu d'une grande famille d'industriels du sucre : son père, Pierre Malle (1897-1990), ancien officier de marine, est l'époux de la sœur deFerdinand Béghin, Françoise (1900-1982)[3]. Les deux hommes sont directeurs de l'usineBéghin-Say de Thumeries.
Il grandit dans le milieu de la grande bourgeoisie et traverse l'Occupation dans différents internats catholiques dont celui qu'il évoque plus tard dansAu revoir les enfants. Dès l'âge de14 ans, il s'initie à la réalisation de films avec la caméra 9 mm de son père.
Il est élève à l'IEP de Paris de 1950 à 1952[4], au sein de la section internationale[5]. Germe à ce moment sa carrière de cinéaste. Il est reçu au concours de l'IDHEC en 1953[6].
Louis Malle se lie ensuite à l'actrice allemandeGila von Weitershausen dont il a, en 1971, un fils, Manuel Cuotemoc, à l'actrice franco-canadienneAlexandra Stewart qui lui donne, en 1974, sa filleJustine Malle, puis, entre autres, àSusan Sarandon à la fin des années 1970.
Il épouse l'actriceCandice Bergen en 1980. Leur fille, Chloé Malle, naît en 1985. Ils sont restés mariés jusqu'à la mort de Louis Malle en Californie, en 1995.
Sa cousine, Françoise Béghin (née en 1938), fille benjamine de son oncle maternelFerdinand Béghin, est l'épouse de l'écrivain et académicienJean d'Ormesson[3].
Sur le tournage, Louis Malle a les tympans crevés lors d'une plongée et ne peut dès lors plus réaliser des travaux de ce type. Les projets qui suivent, films et documentaires, sont moins consensuels et volontiers provocateurs, optant pour des sujets plus critiques ou polémiques.
Louis Malle travaille notamment avecRobert Bresson à la préparation d'Un condamné à mort s'est échappé et assiste à une partie du tournage. Il est profondément marqué par le travail de Bresson avec les « non-acteurs » et l'importance qu'il accorde à labande-son.
C'est alors l'essor de laNouvelle Vague. Le cinéma des débuts de Malle partage avec laNouvelle Vague plusieurs caractéristiques mais le réalisateur suit ensuite son chemin seul, guidé par ses propres motivations.
Le Voleur porte un regard cynique sur la bourgeoisie et les élites politiques, qui restent les cibles favorites de Louis Malle. Le voleur du titre personnifie l'homme libre, extérieur à ce système empli de préjugés et sournois. Une acerbe critique sociale sourd dans la peinture psychologique des personnages.
Malle tourne par ailleurs plusieurs documentaires dontL'Inde fantôme : réflexions sur un voyage, série documentaire en sept épisodes de 50 minutes, en 1969, ressortie en 2023[10].
De retour d'Inde, Malle tourne un film vaguement inspiré deMa mère deGeorges Bataille, qui provoque un tollé :Le Souffle au cœur[11]. Il y évoque la relationincestueuse et romantique entre une mère et son fils. Ce thème est traité sans aucun jugement moral, ce qui sera une constante chez le réalisateur pour qui la vie s'apparente à une série de situations complexes. Il n'y a ni innocents ni coupables ou représentants du bien d'un côté et du mal de l'autre. Pour Malle, le spectateur doit être capable de se faire une opinion, sans condamner d'avance.
Trois ans plus tard, en1974,Lacombe Lucien provoque une autre controverse[12]. Le film décrit le progressif engagement d'un jeune homme désœuvré dans lacollaboration après une tentative avortée d'entrer dans laRésistance. Là encore, Malle ne porte aucun jugement, et montre un individu dont l'engagement est essentiellement dû au hasard des circonstances. Même si une partie de la critique salue le film comme un chef-d'œuvre, une autre reproche au réalisateur de ne pas avoir vécu assez durement la guerre et juge son travail comme un affront à la mémoire des Résistants[13].
Lorsqu'il revient en France en1987, c'est pour s'attacher au thème qui l'avait fait partir : la guerre et l'Occupation. C'est alors la consécration de sa carrière avecAu revoir les enfants. Dans un collège catholique, un garçon issu de la bourgeoisie découvre qu'un de ses camarades est juif. L'amitié qui se construit entre les deux adolescents ne peut empêcher une fin tragique[14].
Dans ce film, Louis Malle montre ce dont il se souvient de la guerre. L'histoire est en partie autobiographique : il a été témoin d'une situation similaire dans son enfance, celle d'un jeune Juif qui avait été caché dans son internat puis découvert par laGestapo et déporté. Il dira d'ailleurs que ce thème le hantait depuis toujours et que c'est cette histoire tragique qui l'avait amené au cinéma.
Le film reprend aussi certains éléments de ses précédents films polémiques : deLacombe Lucien il reprend le collabo « malgré lui », duSouffle au cœur il reprend la relation fusionnelle entre la mère et le fils. Là encore il ne juge personne, il n'y a ni bons ni méchants mais une certaine fatalité. Cette œuvre, marquée par la fluidité de son récit et la sobriété de sa mise en scène, est considérée comme la plus émouvante et la plus personnelle de sa carrière. Elle reçoit un triomphe critique et public et obtient plusieurs récompenses en1987 et1988 : leLion d'or àVenise, lePrix Louis-Delluc et septCésars dont ceux dumeilleur film et dumeilleur réalisateur.
↑L’idée de faire appel à Miles Davis venait deJean-Paul Rappeneau, l’assistant de Louis Malle à l’époque. Elle pourrait lui avoir été inspirée par la parution, quelques mois auparavant, du filmSait-on jamais... deRoger Vadim, dont la musique avait été composée parJohn Lewis duModern Jazz Quartet. Louis Malle fut séduit par l’idée et en particulier par la possibilité, qui lui paraissait alors inédite, d’utiliser pour son film une musique totalement improvisée. Il apprit cependant plus tard queDjango Reinhardt avait déjà eu recours à ce procédé pour les bandes originales d’un certain nombre de courts métrages (voir John Szwed,So What: The Life of Miles Davis, New York, Simon & Schuster Paperbacks, 2004 (première édition, 2002,p. 152-153)
↑Laura Tuillier, « Documentaire. Louis Malle, un radeau d’images pour traverser le tourbillon indien »,Libération,(lire en ligne)