D'uneéloquence remarquée, il se distingue par l'intransigeance et l'inflexibilité de ses principes prônant l'égalité et la vertu, ainsi que par l'efficacité de ses missions au cours desquelles il redresse la situation de l'armée du Rhin et participe à lavictoire des armées républicaines àFleurus. Combattant politiquement lesGirondins, lesHébertistes puis lesIndulgents, il fait voter la confiscation des biens des ennemis de la République au profit des patriotes pauvres. Il est l'orateur désigné desrobespierristes dans leurs conflits avec les autres partis politiques à laConvention nationale, c'est lui qui lance les accusations et lesréquisitoires à la Convention contreDanton ouHébert. Pour éviter lesmassacres dont sont responsables lessans-culottes dans lesdépartements, notamment enVendée, ou pour centraliser la répression, ce point fait débat, il fait supprimer les Tribunaux révolutionnaires départementaux et rassemble toutes les procédures au Tribunal révolutionnaire de Paris.
Dans un contexte où la Révolution vient d’abolir la monarchie et où le sort de Louis XVI divise les députés, Saint-Just prend une position ferme : le roi déchu ne doit pas être jugé comme un citoyen ordinaire, mais considéré comme déjà coupable du simple fait d’avoir trahi la nation.
Louis Antoine de Saint-Just[3] est le fils aîné de Louis Jean de Saint-Just de Richebourg ( –), un capitaine de cavalerie décoré de l'ordre de Saint-Louis, et de Marie-Anne Robinot (née à Decize le, morte en 1815), elle-même fille de Léonard Robinot, conseiller, notaire royal et grenetier augrenier à sel de Decize, et de Jeanne Houdry, mariés le.
Louis Antoine est né le àDecize, dans leNivernais, et il estbaptisé le même jour dans l'église de la ville : son parrain est Jean Antoine Robinot, curé deVerneuil, et sa marraine est Françoise Ravard[4]. Il est aussitôt mis en nourrice àVerneuil jusqu'à l'âge de huit ans. Après un court séjour àMorsain lors duquel naissent les deux sœurs d'Antoine, Louise-Marie-Anne et Marie-Françoise-Victoire, le et le[5], la famille retourne à Decize, où les oncles de Louis Antoine exercent des responsabilités municipales[6].
En, la famille déménage pour laPicardie, et s'installe dans une vaste demeure àBlérancourt, où le père meurt un an plus tard, laissant la famille dans une gêne relative puisque sa veuve conserve le privilège d'exemption de l'impôt ordinaire[6].
Après avoir fréquenté l'école du village, Saint-Just est mis en pension de 1779 à 1785 au collège Saint-Nicolas desOratoriens deSoissons[7] (actuel collège Saint-Just), établissement coté où son oncle et son père avaient déjà étudié et où il côtoie les enfants de la classe aisée et dirigeante de la province[8]. Les cours dispensés à Saint-Just allient histoire,rhétorique,latin et enseignement religieux. Il y acquiert une connaissance sérieuse des auteurs de l'Antiquité greco-latine[9]. C'est à ce moment qu'il rédige une histoire des seigneurs duchâteau de Coucy proche deBlérancourt. C'est à cette occasion qu'il découvre et étudie le fonctionnement de laféodalité d'Ancien-Régime[10]. À la fin de 1785, au cours de ses vacances, il s'éprend de Louise-Thérèse Sigrade Gellé, fille de Louis-Antoine Gellé, notaire royal aubailliage deCoucy-le-Château, mais son père le dédaigne et marie, assez précipitamment, sa fille à un clerc de son étude[11]. Celle-ci le fuira pour rejoindre Saint-Just à Paris en[12].
Le jeune homme est alors dans une "situation semi-carcérale"[18] et conscient que l'organisation sociale de son époque est sur le point de changer telle une "civilisation finissante"[19]. Il adopte une posture de refus quelques semaines avant l'ouverture desÉtats généraux[20]. Cette posture sera constamment impregnée de la tradition cynique[20]. C'est dans ce contexte que débute la rédaction en 1788 des vingt chants dupoèmeOrgant . Ils seront publiés entre avril et mai 1789[19]. Il n'a jamais désavoué ce poème au point de demander à CamilleDesmoulins une annonce en faveur du poème dans le journalLe Vieu Cordelier en janvier 1790[21]. Selon Bernard Pivot, cité par Anne Quenneday, Saint-Just essaye alors de percer dans le monde littéraire[22]. C'est avec la même "quête de pûreté et de simplicité"[20] qu'il rédigeLa Raison à la morne etArlequin Diogène, en référence à un auteur cynique.
Des vers à M. Dormefeuille rédigés en avril 1789 lui sont également attribués. Il aurait rédigé ces vers en l'honneur d'un comédien,Philippe-Antoine Dorfeuille. M. Dorfeuille allait de ville en ville dans leMidi puis dans l'Ouest pour faire écouter ses chants populaires etsatiriques sur l'actualité politique et sociale. Certains de ces textes étaient publiés dansLa Lanterne Magique et patriotique, revue qu'il portait avec lui comme illustration de chansons comme “Mademoiselle Constitution” et “Marie Liberté”. Philippe Antoine aurait joué dans une représentation de la pièceAndromaque le 26février 1789 dans ce qui deviendra lethéâtre de l'Odéon. Après un premier acte applaudi, le comédien aurait subi des nombreux colibets qui l'auraient empêché de jouer aussi bien que possible lors du deuxième acte. Dorfeuille se verra ainsi refusé l'admission à laComédie française. Il semble que l'intention de Saint-Just aurait pu être de soutenir un comédien pour la qualité de son jeu d'acteur autant que ses textes satyriques. Il y a à la fois un enjeu de solidarité et un enjeu de prise de contact car Saint-Just est intéressé par ses compétences rhétoriques, sa capacité à susciter l'émotion (vers 4-7):
RÉVÈLE-moi par quelle adresseTon art a fait passer mon cœurDe la fureur à la tendresse,De la surprise à la douleur.
Les deux personnages se reverront entre fin 1792 et mars 1793. Dorfeuille se rapprochera des hébertistes en publiant le père Duchesne à partir de janvier 1794 puis sera arrêté le 12 ventôse an III (2 mars 1795)[22].
Saint-Just y adopte une poste dejuriste prenant la défense des usagers lésés desbiens communaux. Dans le premier il revient notamment sur l'appropriation de la terre parBernard Pottier. Au début duXVIe siècle, ce dernier se serait construit unchâteau dont la cour encerclerait 2arpents. Il s'est donc approprié 2 arpents 62verges en ajoutant la surface couverte par le bâtiment. Mais puisqu'il craignait l'expropriation car son appropriation s'était faite sans aucun titre légal, il aurait conclu un accord en1619 avec 9notables dont lelieutenant de la justice et leprocureur fiscal. Il aurait alors donné à lamairie en compensation 2 arpents dont un dans unmarais appelé le camp de la Herse et un autre à côté du marais du Pavé. Or il fallait 10 notables pour entériner l'accord sans quoi c'est toute lacommune qui devait être consultée. L'accord est donc frappé de nullité car jamais homologué. Saint-Just en veut pour preuve lajurisprudence du jugement du 22 novembre1660 rendu auParlement sur l'échange inégal proposé par le seigneur d'Eggly. Leverdict réclamait au seigneur fautif de donner le triple de la surface appropriée à la commune[25].Saint-Just conclut ainsi le passage:
"Ce ne sont point ici les droitsavares d'un individu que je fais ici parler, ce sont les droits inviolables et imprescriptibles de la société, ce sont les droits de l'agriculture, conséquemment de lapatrie, les 3 arpents que la communauté reçut en échange des mains de Bernard Pottier ne sont point même de la valeur des 2 arpents 62 verges qu'il s'appropria.
Mais comme par une espèce de droit commun, dans ce temps-là, le fort se jouait du faible [...]"
avant de poursuivre sur d'autres litiges liés à Bernard Pottier[26].
Ces deux rapports témoignent d'un passage de la critique cynique initiée dansOrgant à la critique de la réalité existante qui ne passe plus par la métaphore[27].
Saint-Just aurait participé à la fête de la Fédération où il aurait rencontré Robespierre avant de lui écrire en août 1790.
L'Esprit de la Révolution et de la constitution en France (juin 1791)
Après ses essais littéraires et son passage à une critique actuelle et directe de la domination, Saint-Just semble évoluer vers une analyse de la révolution en cours avec''L'Esprit de la Révolution et de la constitution de France'' paru en juin 1791[28].Dans ce texte, l'auteur desRapports cherche à montrer qu'il est tout à fait compétent pour comprendre et analyser les grands problèmes de gouvernance que connaît la France en révolution. À ce moment-là, ses lettres à son éditeur Beuvin semblent témoigner d'une envie croissante d'habiter àParis.Ces sujets et ce texte sont en grande partie influencés par l'œuvre deMontesquieu, notamment sur les thématiques de: juste étendue du territoire, importance de la population et au besoin d'une bonne constitution[28].Son travail constitue "autant un texte politique qu’un objet à même d’appuyer les prétentions électorales", lui permettant de gagner en popularité[29]Ainsi, selon Miguel Abensour:
"Mais il ne faut pas s'y tromper:L'Esprit de la Révolution est comme une publication de circonstance destinée à faire connaître son auteur et à préparer ainsi l'avenir."
En septembre 1791 après l'arrestation du roi et l'adoption de la nouvelle constitution commence la rédaction de l'ouvrage resté inachevé''De la Nature''. L'auteur accomplit une double mise à distance. D'abord, il trouve des limites au principe de meilleure constitution développé par Montesquieu. Ensuite, il s'opposer au contrat social de Rousseau jusque dans ses fondements[32].En effet, selon Saint-Just, dans l'état de nature les Hommes sont vertueux et s'associent spontanément entre eux dans une république naturelle. Ainsi, ils ne sont ni des individus diminués (des"sauvages") qui ont besoin d'un gouvernement pour être bons (conception deMontesquieu), ni des individus désirant absolument rester seul pour être heureux (conception deRousseau)[33].Saint-Just se centre alors sur la notion de rapports de force plutôt que d'inégalité[34].Ainsi, les rapports humains auraient existé de façon naturelle, c'est-à-dire en respectant l'authenticité de chacun. "Naturel" a un sens très précis chez Saint-Just,
La nature est le point de justesse et de vérité dans les rapports des choses ou leur moralité[35].
C'est-à-dire que ce qui est naturel, ce n'est pas quelque chose d'originel à l'homme mais bien plutôt quelque chose qui est cohérent avec ses désirs, son bonheur. L'auteur utilise même une métaphore mécaniste en comparant cet ordre naturel aux lois de la physique ("l'ordre physique")[36].À partir de cette conception originale de l'état de nature, le futur conventionnel explique comment les rapports humains deviennent ce qu'ils sont à l'époque où il écrit. La notion importante ici est la "convention" que Saint-Just critique.
Selon lui c'est l'existence d'une convention imposée à la nature de l'homme qui empêche les être humains de développer ce qu'il nomme des "rapports homogènes"[37].Cette contrainte crée donc un décalage entre l'état des rapports humains sous la convention et l'état dans lequel ils devraient être s'ils suivaient la nature. La convention éloigne l'homme de l'homme naturel. L'homme qui vit selon des conventions développe alors des passions[38].Pour le blérancourtois, les passions sont une destabilisation de l'homme. Mais Saint-Just opère une distinction entre "passions" et "sentiments de l'âme" ainsi il ne rejette pas toute émotion:<blocquote>Il ne faut pas confondre les sentiments de l'âme avec les passions; les unes sont le présent de la nature et principe de la vie sociale, les autres sont le fruit de l'usurpation et les principes de la vie sauvage[39].
Pour Saint-Just, les émotions sont donc fondamentales à la vie en société alors que les passions sont une destabilisation qui émane de l'état politique.En effet, une autre distinction opérée par Saint-Just dans ce texte est la différence entre l'état social et l'état politique. L'état social est l'état de l'organisation des rapports humains où l'indépendance de chacun est respectée et où chacun vit selon sa nature.Cet état est celui des individus appartenant au même peuple par opposition aux rapports entre individus de peuples différents[40].L'état politique est au contraire, à partir de la convention, un état où les rapports entre humains du même peuple sont aussi distants que les rapports entre humains de peuples différents[41].Dans cet état:
Dans ce sens, la terre n'est maintenant peuplée que de sauvages, et le cœur le plus tendre, à l'aide de l'imagination la plus vive, conçoit à peine la société première tant est grande l'altération de l'esprit humain, quelle que soit la source de l'ordre présent des choses, elle est une œuvre de ténèbres puisque le monde est malheureux, c'est pourquoi je crois peu aux religions, elles ont enfanté beaucoup de crimes de mauvaises lois et d'impiétés. Il n'en faut point parler.
Se positionnant par rapport à Montesquieu, Saint-Just lui reproche de ne pas comprendre pourquoi les sauvages fuient à la vue des hommes venus d'autres continents. Pour Saint-Just, ils ne font que respecter ce rapport politique où ils se méfient d'autres peuples alors qu'ils sont profondément naturels et bons entre eux[42].Face à cet état des choses, l'auteur d'Organt ne propose pas un retour en arrière, jugé impossible pour lui.
Hélas, il ne faut plus songer à faire goûter aux hommes l'attrait de l'innocence, on ne ferait plus que des êtres faibles et dépravés; la vertu même n'est plus innocente. Mais la nature n'est pas seulement faite pour les bois, que si l'homme a trouvé le bonheur à courir les mers, à fertiliser les champs qu'il soit navigateur et laboureur, mais qu'il reprenne sa véritable dignité et sache que le principe même de son bonheur, de ses délices, de son opulence, de sa conservation, sont dans un état social qu'il ne connaît point[43].
Ainsi, selon Miguel Abensour, "Il rejette donc la loi politique au profit de la loi naturelle ou sociale."[44].
Élection comme député pour le département de l'Aisne (15 septembre 1792)
Le roi a été arrêté le 10 août, déchu puis emprisonné à la prison du Temple. C'est alors que la République est proclamée le 22 septembre 1792. Des débats ont alors lieu à laConvention nationale pour décider de son sort. Le débat concerne l'inviolabilité du roi et donc la manière dont il doit être jugé. Pour Miguel Abensour[46].:
Tandis que les débats s'enlisent dans l'examen de problèmes juridiques et constitutionnels, Saint-Just fait radicalement changer la question de terrain: reprenant la tradition politique du tyrannicide, il soutient qu'il ne s'agit pas de juger le roi, mais de l'anéantir, bref de le tuer en tant qu'ennemi du genre humain.
Saint-Just affirme ainsi que le roi ne doit être jugé ni comme citoyen ni comme roi car il n'appartient pas au corps des citoyens en tant que "tyran". Il met l'accent sur l'importance de ce jugement pour la révolution à venir. Ainsi résume Abensour[47]:
Des choix effectués en la matière dépendront le sort de la liberté et la nature de la République qui reste à établir.
Adjoint auComité de salut public le, puis élu le, lors de l'extension du comité, il est envoyé dans l'Aisne, l'Oise et laSomme par arrêté du comité du, mais ne remplit pas cette mission[51],[52].
Le, au nom duComité de salut public, Saint-Just présente devant laConvention unrapport sur laloi contre les Anglais, un texte législatif qui plaçait sous surveillance étroite tous les sujets anglais résidant en France. Ce rapport est produit devant l'assemblée constituante révolutionnaire alors qu'un député demande l'abolition de la loi ou de son application à tous les étrangers. Sur la base de ce rapport, la Convention décrète la détention jusqu'à la paix de tous les étrangers, sujets des États contre lesquels la République était en guerre[53],[54].
Nommé ensuite par arrêté du comité du et décret dureprésentant aux armées avec son ami et conventionnelPhilippe Le Bas, il rejoint l'armée du Rhin jusqu'au, hormis un séjour à Paris du 14 au 20frimairean II (4 –)[50]. Les deux représentants transforment le 5brumairean II () le tribunal militaire en « commission spéciale et révolutionnaire » afin d'accélérer les procédures et de renforcer la sévérité contre les prévaricateurs et les « partisans de l'ennemi »[55]. Saint-Just fait prendreBitche et délivrerLandau.
Envoyé ensuite à l'armée du Nord avec Le Bas par arrêté du Comité de salut public du 3pluviôsean II (), il est de retour à Paris le 25pluviôse (13 février)[50].
Il est alors partie prenante en mars et avril 1794 de la chute desHébertistes, puis desDantonistes.
À la suite d'un arrêté du Comité de salut public du 10floréal (29 avril), il repart en mission dans l'armée du Nord avec Le Bas[50]. Partisan de l'offensive à outrance, il dirigede facto les opérations, au début de mai, et, en dépit des vives réserves de plusieurs généraux commeKléber ouMarceau, ordonne de lancer une offensive surCharleroi qui échoue[56]. Son action est en revanche couronnée par les victoires deCourtrai le 23prairial (11 juin) et deFleurus le 8messidor (26 juin). Se posant en spécialiste des questions militaires, du fait de ses diverses missions auprès des armées, il s'oppose à cette époque àCarnot[57].
Le Comité l'ayant rappelé par une lettre datée du 6prairial (25 mai), il rentre à Paris le 12 prairial (31 mai). Puis un arrêté du Comité en date du 18prairial (6 juin) le charge d'une mission auxarmées du Nord et de l'Est, « de la mer jusqu'auRhin ». Il est de retour dans la capitale le 11messidor (29 juin)[50].
Lors de lacrise de thermidor, il tente avecBarère de rétablir la concorde au sein des comités publics, organisant notamment la réunion du 5thermidor (23 juillet). À cette occasion, il est chargé de lire un rapport devant la Convention sur les heurts qui ont secoué le gouvernement révolutionnaire.
Mais le discours de Robespierre devant l'assemblée, le 8 thermidor (26 juillet) accélère le dénouement de la crise. Pris à partie dans la nuit parBillaud-Varenne etCollot d'Herbois, il réoriente son discours dans un sens plus critique à l'égard de ces deux hommes, indiquant au cinquième paragraphe : « quelqu'un cette nuit a flétri mon cœur ». Toutefois, bien loin de chercher à abattre ses ennemis, il espère, à travers cette intervention, rétablir l'entente parmi les membres du Comité de salut public. En conclusion, il propose à la Convention un décret affirmant que les institutions républicaines, alors en préparation,« présenteront les moyens que le gouvernement, sans rien perdre de son ressort révolutionnaire, ne puisse tendre à l'arbitraire, favoriser l'ambition, et opprimer ou usurper la représentation nationale ».
Le lendemain, alors qu'il commence son discours, il est interrompu parTallien et, plutôt que de se battre, se mure dans un énigmatique silence hautain ; il est décrété d'accusation. Libéré par l'insurrection de laCommune de Paris, il se laisse arrêter par les troupes fidèles à la Convention, le matin du 10 thermidor, et est guillotiné, à l'âge de vingt-six ans, avec les principaux partisans de Robespierre dans l'après-midi.
Le13ventôseanII (), devant la Convention nationale, il termine un discours par la phrase devenue célèbre« Le bonheur est une idée neuve en Europe. »[58],[59]
« On n'a point de vertus politiques sans orgueil, et on n'a point d'orgueil dans la détresse. »
« Un peuple n’a qu’un ennemi dangereux, c’est son gouvernement[60]. »
Une phrase, non référencée ni sourcée et qu'il n'a peut-être à ce titre jamais prononcée ni écrite, lui est attribuée :
« Pas de liberté pour les ennemis de la liberté. »
Organt, poème rédigé en 1787 – 1789, publié au printemps 1789[61]. À propos de cette œuvre, l’historienGérard Walter note : « Le livre, à son apparition, passa presque complètement inaperçu (il est inexact, comme le prétendBarère dans sesMémoires, qu’un ordre ministériel ordonna de rechercher l’auteur pour le mettre à la Bastille et que Saint-Just fut dénoncé et poursuivi en Picardie où il habitait). Le libraire que Saint-Just avait chargé de la publication de cet ouvrage, crut pouvoir faire une bonne affaire en le remettant en vente trois ans après, muni d’une nouvelle page de titre, et en l’intitulant, cette fois,poème lubrique[62].
L'Esprit de la Révolution et de la Constitution de France, rédigé en 1790, publié par Beuvin en juin 1791 sous le nom de « Louis-Léon de Saint-Just »[3]. Saint-Just y expose ses réflexions sur laRévolution française. Soucieux de se faire mieux connaître en attendant d'être éligible, il y fait preuve d'une certaine modération en critiquant peuLouis XVI etMarie-Antoinette restant ainsi dans la ligne de pensée majoritaire, un an après laprise de la Bastille. On trouve dans cet ouvrage la base des idées constitutionnelles qu'il développera à partir de 1792. La lecture de cet ouvrage montre l'influence importante qu'ont eueMontesquieu etRousseau sur les penseurs révolutionnaires.
De la Nature, de l'état civil de la cité ou les règles de l'indépendance du gouvernement, texte inachevé, rédigé vraisemblablement entre et, publié à titre posthume parAlbert Soboul en 1951.
Les Fragments d'institutions républicaines, texte fragmentaire et inachevé rédigé entre l'automne 1793 et, publié à titre posthume chez Fayolle en 1800 (édition incomplète) avec une introduction anonyme de Gateau, ami de Saint-Just. Cette première édition est réimprimée en 1831 chez Techener à l'initiative deCharles Nodier, puis fait l'objet de nombreuses rééditions, y compris dans lesŒuvres complètes publiées en 1908 par Charles Vellay.Albert Soboul publie une première édition complète en 1948, puis une nouvelle version, recomposée en neuf fragments, chez Einaudi en 1952. Alain Liénard publie en 1976 sous le titre deThéorie politique une version qui suit scrupuleusement le texte et l'ordre des fragments et reproduit les passages biffés, en les signalant. En 1984, dans lesŒuvres complètes parues chez Gérard Lebovici, Michèle Duval propose un fragment extrait desPapiers inédits trouvés chez Robespierre, Saint-Just, Payan, etc., supprimés ou omis par Courtois (1828) et un autre duRapport Courtois fait au nom de la commission chargée de l'examen des papiers trouvés chez Robespierre et ses complices (nivôse an III), complétés par un fragment de l'édition de 1800 desInstitutions républicaines, la réédition des textes édités en 1949 dans lesAnnales historiques de la Révolution française par Albert Soboul et extraits d'un carton des Archives nationales consacré à Robespierre, enfin un fragment et le passage d'un bref récit romanesque issus du carnet de Saint-Just. L'édition de 2004 desŒuvres complètes reproduit l'état actuel du manuscrit, comme Alain Liénard, ajoutant à la fin et de manière distincte le texte du carnet et les fragments parus dans l'édition de 1800 qui ne figurent pas dans le manuscrit dans son état actuel[63].
Œuvres complètes, édition établie par Michèle Duval, volume relié, éd. Champ libre, Paris, 1984. Réédité par leséditions Ivrea, Paris, 2003.
On ne peut pas régner innocemment (Discours sur les Constitutions de la France), avec une postface de Joël Gayraud, éd. Mille et une Nuits, Paris, 1997.
Rendre le peuple heureux. Rapports et décrets de ventôse. Institutions républicaines, textes établis et présentés par Pierre-Yves Glasser et Anne Quennedey,La fabrique, Paris, 2013.
Saint-Just s'est vu attribué divers surnoms. Michelet l'aurait surnommé "L'Archange de la Terreur"[64]. Antoine Boulant préfère "Archange de la révolution" pour le titre de son ouvrage[65]. Ces épithètes demeurent des créations posthumes participant de la création d'un "double mythe" héroïque et monstrueux selon l'intention du locuteur[66]. Ainsi, la pièce "Holocauste des coiffures germaniques strasbourgeoises au temple privé (?) des prêtres jacobins" met en scène des femmes qui se voyent dans l'obligation de déposer leur coiffe. Saint-Just les aurait interdit[67]. Plus largement, "Les thermidoriens ont amplement brodé sur le thème d’une prétendue lâcheté de Robespierre et de ses compagnons." qui frappe de plein fouet Saint-Just[68].
Dominique Jamet,Antoine et Maximilien ou la terreur sans la vertu, Paris, Denoël, 1986.
Christophe Bigot,L'Archange et le Procureur, sorti en 2008, édité par Gallimard.
Georg Büchner,La Mort de Danton, drame en quatre acte, 1835.
Michel Benoit, Saint-Just la liberté ou la mort éditée en 2017 Editions de Borée
Michel Benoit, : Théâtre " D'entre les morts " Pièce dramatique en 2 actes créée aux Forges royales de Guérigny dans le cadre du bicentenaire de la naissance de Saint-Just.
2009 : dans le documentaire britannique Terror ! Robespierre and the French Revolution, diffusé sur la chaîne BBC, son rôle est tenu par George Maguire.
2011 : dans le film d'animationLa Tragédie de l'homme deMarcell Jankovics, Saint-Just apparaît luttant contre Adam ayant pris les traits de Danton.
↑AntoineBoulant,Saint-Just : l'archange de la Révolution, Paris, Passés composés,, 349 p.(ISBN978-2-37933-030-8), §13.28
↑a etb« Saint-Just se nommait légalementLouis-Antoine, comme on l'a pu voir par son acte de naissance que nous avons mis sous les yeux du lecteur. Mais ce prénom d’Antoine ayant paru un peu commun et peu harmonieux dans la famille, on lui avait donné celui deLéon ». VoirErnest Hamel,Histoire de Saint-Just, député à la convention nationale, Paris, Poulet-Malassis et de Broise,(lire en ligne),p. 70.
↑Extrait duregistre des actes de baptême de la paroisse deDecize pour l'année1767 :Ce vingt cinquième août mil sept cent soixante-sept a été baptisé Louis Antoine, né ce jourd'hui, fils légitime de messire Louis-Jean de Saint Just de Richebourg, chevalier de l'ordre Royal et militaire de Saint-Louis, capitaine de cavalerie, ancien maréchal des logis de gendarmerie, compagnie d'ordonnance de monseigneur le duc de Berry, et de dame Jeanne Marie Robinot. Son parrain a été Messire Jean Antoine Robinot, curé de Verneuil, et sa marraine dame Françoise Ravard, qui ont signé avec nous. Signé : Saint-Just de Richebourg ; Robinot, curé de Verneuil ; femme Ravard ; Renault, maréchal des logis des gendarmes d'Orléans, et Robinot,Archives départementales de laNièvre.
↑Contesté comme calomnieux par plusieurs historiens, cet épisode est attesté par divers documents d'époque, notamment sonregistre d'écrou, présenté dans la collection permanente du musée de la Préfecture de Police (4 rue de la Montagne Sainte-Geneviève, Paris5e). Cf.Bernard Vinot - jeunesse (1985),p. 391.
↑Miguel Abensour,Bio-chronologie, in Oeuvres complètes, Paris, Gallimard, Folio Histoire,, 1248 p.(ISBN978-2-07-042275-3), p. 103 §2
↑Miguel Abensour,Bio-chronologie, in Oeuvres complètes, Paris, Gallimard, Folio Histoire,, 1248 p.(ISBN978-2-07-042275-3), p. 103, §2
↑Louise-Ampilova Tuil, « La bibliothèque de Saint-Just : catalogue et essai d’interprétation critique »,Annales Historiques de la Révolution Française,no 379(1),,p. 203-222(lire en ligne[PDF])
↑ab etcMiguel Abensour,Bio-chronologie, in Oeuvres complètes, Paris, Gallimard, Folio Histoire,, 1248 p.(ISBN978-2-07-042275-3), p. 104, §4
↑Miguel Abensour,Lire Saint-Just, in Oeuvres complètes, Paris, Gallimard, Folio Histoire,, 1248 p.(ISBN978-2-07-042275-3), p. 14, §1
↑a etbAnne Quenneday, « Saint-Just amateur de théâtre d’après un poème inconnu, les vers à M. Dorfeuille »,Annales Historiques de la Révolution Française,no 400(2),,p. 31-50(lire en ligne[PDF])
↑MathiasBoussemart, « Trois lettres inédites de Saint-Just sur l’Esprit de la Révolution (1791) »,La Révolution française. Cahiers de l’Institut d’histoire de la Révolution française,no 26,, par. 6(ISSN2105-2557,lire en ligne, consulté le)
↑Le scrutin de 1791 étant à deux degrés. Saint-Just est élu au premier degré en juin, dans son canton de Blérancourt, après avoir travesti son âge. Mais il est démis de ses fonctions d'« électeur » en septembre, avant la désignation des députés (le second degré).VoirVinot 1985, Guy Marival,La Révolution vue de l'Aisne en 200 documents, Archives départementales de l'Aisne , 1990, p. 129 et Claudine Vidal, Marc Le Pape,Des provinciaux en révolution: le district de Vervins, Association pour la commémoration de la Révolution française dans le « district » de Vervins, 1990, p. 47.
↑« Les grands Révolutionnaires de l'Aisne et leurs pays natals - Saint-Just »,Mémoires de la Fédération des sociétés d'histoire et d'archéologie de l'Aisne,t. 14,(lire en ligne[PDF], consulté le).
↑Saint-Just,Discours et rapports : Préface et commentaires parAlbert Soboul, Paris, Les Éditions sociales,, 222 p.,p. 131.
↑Bernard Vinot,« L'Angleterre », dansSaint-Just, Fayard,(lire en ligne).
↑Annotations deGérard Walter pour l’édition dans laBibliothèque de la Pléiade de l’Histoire de la Révolution française deJules Michelet, tome II,p. 1035. Ouvrage reproduit en facsimile dans la collection Folio Histoire, même pagination. Selon Michelet lui-même, l’Organt serait imité dela Pucelle de Voltaire ; l’historien estime en effet : « [Saint-Just] croyait imiter Voltaire, ne sachant pas quela Pucelle est une satire politique plus encore que libertine, relevée par l'audace et le péril. […] L’Organt n’est pas en général un poème libertin, ni obscène ; il y a seulement trois ou quatre passages d’une obscénité brutale. Ce qui est partout, et ce qui ennuie et fatigue, c’est l’imitation laborieuse des esprits les plus faciles qui aient jamais été, de Voltaire et del'Arioste. L’auteur semble viser à la légèreté de la jeune noblesse, et sans doute il compte sur son livre pour s’y enrôler. Cette œuvre, d’un cynisme calculé, témoigne peut-être moins de libertinage que d’ambition. » (op. cit., tome II,p. 76.
Robert Badinter (éd.),Grandes figures de la Révolution française en Picardie (actes du colloque de Blérancourt. 17-18 juin 1989, Chauny, Association pour la sauvegarde de la maison de Saint-Just,, 258 p.
Geneviève Boucher, « Sociocritique et prose d’idées. Fonctions et modulations de l’amitié dans le « roman » de la Terreur de Saint-Just », dans Patrick Maurus (dir.),Actualité de la sociocritique, Paris, L’Harmattan, 2013,p. 59-71(ISBN9782343003085)
BernardVinot, « La révolution au village, avec Saint-Just, d'après le registre des délibérations communales de Blérancourt »,Annales historiques de la Révolution française,no 335,,p. 97-110(lire en ligne).