Guitariste, chanteur et principal auteur des chansons ; il a composé nombre de titres devenus populaires après sa séparation du groupe en 1970. The Velvet Underground a eu une influence majeure sur plusieurs générations de compositeurs, malgré son manque de succès commercial dans lesannées 1960[10].
On attribue àBrian Eno[11] la remarque selon laquelle les quelques milliers de fans qui ont acheté le premier disque du Velvet Underground ont chacun créé un groupe. Lou Reed et The Velvet Underground, devenus icônes durock, restent en cela légendaires malgré la confidentialité de leurs débuts. La noirceur des textes et la musique de Lou Reed, au sommet dans l'albumBerlin, ont longtemps oblitéré tout succès commercial. La voix enparlé-chanté est une autre « marque de fabrique » de Lou Reed.
Lou Reed obtient en solo un réel succès commercial avec le titreWalk on the Wild Side.
Lewis Alan Reed naît dans le quartier deBrooklyn àNew York[12] dans une famillejuive[13]. Lou Reed est le fils de Sidney George Reed, un comptable effacé deManhattan qui a fait changer son nom,Rabinowitz, enReed, et de Toby Futterman Reed, une mère à la forte personnalité de Brooklyn. Tous deux juifs new-yorkais, ils vivent à Freeport,Long Island, dans la banlieue conformiste de New York[13]. Lou a une sœur cadette plus jeune de 5 ans, Margaret (Merrill) Reed Weiner. Lou Reed étudie le piano dès l’âge de cinq ans. Mais il se passionne pour lerock 'n' roll, ledoo-wop, lalittérature notamment lapoésie (celle deDelmore Schwartz, son maître)[14], lemodern jazz et lefree jazz en particulier (Don Cherry etOrnette Coleman, notamment) et préfère la guitare, qu'il apprend en copiant les disques de sa collection. En 1958, il coécrit et enregistre, en tant que guitariste, un 45 toursSo Blue dans le style doo-wop au sein d'un groupe initialement appeléThe Shades, rebaptiséThe Jades par la suite[15].
À 17 ans, il subit untraitement par électrochocs (proposé à ses parents par un psychiatre)[16]. Cette expérience dévastatrice sera évoquée dans la chansonKill Your Sons en 1974[17]. Il commence à consommer des médicaments le rendant très dépendant, et exprime son traumatisme par des textes d'une grande radicalité : violence, provocation, insolite, réalisme cru, modernité. Il fera souvent usage, tout au long de sa carrière, de ces termes crus, durs et choquants.
À l'université de Syracuse, il suit les cours d’écriture créative deDelmore Schwartz, poète et enseignant delittérature classique, qui l’encourage à écrire et l'influence beaucoup[18],[19]. Il y rencontre Shelley Albin, avec laquelle il aura une liaison de deux ans. Elle devient pour Lou Reed, qui l'idéalise, une grande source d'inspiration, même après leur séparation.
Après l'université, Lou Reed travaille, en 1964, pour les disquesPickwick en tant qu'auteur-compositeur, et parfois interprète. Il y produit des disques de rock imitant les différents styles à la mode pour descompilations à bas prix[20]. Il graveThe Ostrich, une «nouvelle danse» absurde sur deux accords, où il suggère de mettre sa tête au sol et de marcher dessus avec ses propres pieds[21]. La chanson sera à l'origine du terme «guitare Ostrich» qui désigne un accordage de guitare avec les cordes à vide sur la même note[22],[23]. Pour les besoins de la promotion, cherchant des musiciens compétents pour jouer sur scène, il engageJohn Cale, un bassiste et altistegallois de formation classique. Cale enregistre à la basseYou're Driving Me Insane etCycle Annie, chantés par Lou Reed sous le nom des Beachnuts et des Roughnecks pour la compilationSoundsville[20].
Photo du groupe de rock américain The Velvet Underground faisant la promotion de leur deuxième albumWhite Light/White Heat, 1968. De gauche à droite : Lou Reed,Sterling Morrison,John Cale etMaureen Tucker.
John Cale, Britannique venu avec une bourse étudier aux États-Unis, évolue dans le milieu de l'avant-garde new-yorkaise et joue alors de l'alto auTheater of Eternal Music deLa Monte Young. Il ne prend Lou Reed au sérieux que lorsque celui-ci lui fait découvrir les paroles de ses titres personnels, comme celles d'Heroin. Le guitaristeSterling Morrison, un ami d'université de Lou, les rejoint. Devenus les Warlocks, ils jouent dans les rues avec la chanteuse Daryl, puis forment, en 1965, le Velvet Underground avecAngus MacLise auxtablas. Ils jouent souvent derrière l'écran où sont projetés des films d'avant-garde à la Cinémathèque de Jonas Mekas, et contribuent à la bande-son de plusieurs films amateurs. En décembre,Maureen Tucker remplace MacLise pour un premier concert payé et organisé parAl Aronowicz.
LeVelvet Underground est repéré au Café Bizarre, où ils se produisent souvent, par Brigid Polk, une cinéaste marginale qui fréquente laFactory d'Andy Warhol, un dessinateur publicitaire devenu peintre. Warhol, homosexuel timide etintroverti, connaît alors une grande notoriété avec ses toiles et cherche à se diversifier. Il se rend au Café Bizarre et, avec son associé cinéaste et homme d'affairesPaul Morrissey, décide de devenir le manager duVelvet Underground, qui, fin décembre, vient répéter à laFactory. Le local est fréquenté par les artistes et les marginaux de l'époque. Warhol leur impose la chanteuseNico, un mannequin allemand qui, après quelques films commeLa dolce vita deFellini ouStrip-Tease, et quelques disques[24] a rejoint la Factory.
Warhol finance la production et l'enregistrement de quelques titres du Velvet dans un petit studio de New York. Il organise ensuite des spectacles multimédias où il reprend le principe de jouer devant un écran de cinéma, en y projetant ses propres films ; l'actriceEdie Sedgwick et le poèteGerard Malanga, un fouet de cuir à la main, dansent sur la scène. Le technicien « lumières » invente littéralement le principe dulight-show pour les besoins de l'Exploding Plastic Inevitable, qui après une série de spectacles controversés au Dom de Saint Mark's Place àManhattan, part jouer au Trip deLos Angeles, qui sera fermé définitivement par leshérif pour « pornographie » en raison des thèmes sulfureux évoqués par le Velvet Underground : homosexualité, drogue, transidentité, mort. LesDoors, venus les voir jouer, sont impressionnés par leur prestation.
Warhol finance de nouveaux enregistrements. Le producteur deBob Dylan,Tom Wilson assure la réalisation artistique et publie l'album sous le label de jazzVerve Records dont il est directeur artistique.
Un deuxième album paraît en,White Light/White Heat, également ignoré à sa sortie, sauf d’une poignée de fans. Le groupe atteint un des sommets de sa créativité débridée dansSister Ray, réalisé en une seule prise de dix-sept minutes. John Cale et Lou Reed ne s'entendent plus, et Cale quitte le groupe, remplacé parDoug Yule. Ce dernier participera aux deux albums suivants du groupe :The Velvet Underground (1969) etLoaded (1970).
Avant même la sortie deLoaded, Lou Reed quitte le Velvet et la musique pour se retirer chez ses parents jusqu’à la fin1971.
Le producteur Richard Robinson et sa femme Lisa (Lisa Says) persuadent Lou Reed de reprendre la musique et d’enregistrer, en Grande-Bretagne, un album, auquel participent deux musiciens du groupeYes,Steve Howe etRick Wakeman. L'album,Lou Reed, paraît en1972 chezRCA. Malgré la qualité des reprises deI Can't Stand It et d'Ocean composées à l’époque du Velvet Underground, et des nouvelles compositionsGoing Down etBerlin, l’album déçoit et ne rencontre pas le succès escompté.
Mais la même année, grâce au soutien et à la production deDavid Bowie etMick Ronson, l’albumTransformer, propulse Lou Reed au firmament des stars du rock[28]. Et le morceauWalk on the Wild Side où Reed décrit l’itinéraire de personnages new-yorkais, travestis, prostitués, connus à l'époque de la Factory, qui plongent dans la déchéance, devient rapidement un tube aux États-Unis et en Europe. En produisant cet album,David Bowie rend hommage à Lou Reed, son idole depuis les années Velvet. Suit une tournée qui passe à Paris auBataclan où Reed retrouve Nico et John Cale pour un concert intimiste[29]. Avec Reed à la guitare acoustique, Cale au piano et à l'alto, le trio revisite quelques titres du Velvet et quelques nouvelles chansons.
Fort du succès deTransformer, Lou Reed, avec le tout jeune producteur canadienBob Ezrin, enregistreBerlin[30], unalbum-concept ambitieux sur la déchéance d'un couple de junkies à Berlin qui fait écho dans sa vie personnelle au naufrage de son premier mariage et sa replongée dans les drogues dures et l'alcool[31]. L'album sort en1973, mais déroute ses nouveaux fans. Reed repart en tournée européenne et américaine avec les musiciens deTransformer et deBerlin, mais, consommant toujours plus de drogues diverses, faisant mine sur scène de se shooter, certains de ses concerts tournent à l'émeute. De ces concertslive viennent les albumsRock 'n' Roll Animal, paru en1974 et encore considéré par certains comme un de ses meilleurs, qui le réconcilie avec son public, etLou Reed Live en1975. Reed, dans ces tournées, où il laisse la guitare àDick Wagner et àSteve Hunter, danse sur scène mais apparaît très amaigri. Il innove un style vestimentaire « glam », ongles laqués de noir, cheveux coupés et teints en blond[32], il ira même par provocation jusqu'à y raser une forme de croix de fer[33],[14].
Lou Reed en 1977.
Reed casse le succès de ses derniers albums, en 1975, avec le double albumMetal Machine Music, un projet expérimental précurseur de lamusique industrielle, et de lanoise, qui déconcerte, exaspère[34].
En1989, Lou Reed refait surface avec un album très réussi :New York. Dans cet album au son brut et dépouillé, dédié à sa ville, Lou Reed soutenu par le guitaristeMike Rathke adopte leparlé-chanté sur des textes engagés traitant par exemple du SIDA,The Halloween Parade, et de l’exclusion sociale,Dirty Boulevard. Il y décrit les bas-fonds new-yorkais sur une musique incisive[36].
En1990, la mort d'Andy Warhol est pour lui l'occasion de renouer avecJohn Cale, son ancien complice duVelvet Underground ; ils composent et chantent ensembleSongs for Drella, en hommage à celui qui fut leur mentor. Le groupe légendaire se reforme, avec Sterling Morrisson et Moe Tucker, le temps d’un concert inopiné lors d’une rétrospective Warhol à la Fondation Cartier deJouy-en-Josas le[37], et d'une série de concerts en1993.
Lou Reed réalise ensuite deux albums qui sont de grandes réussites artistiques :Magic and Loss (1992), qui traite de la perte des proches, etSet the Twilight Reeling (1996), dans lequel il rappelle son attachement à New York. DansLive in London de 1998, il chante des versions très intéressantes de ses premiers titres, telI'll Be Your Mirror, chanté par Nico dans le premier album du Velvet, des morceaux commeSex With Your Parents traitant de l'hypocrisie de certains politiques américains. Lou Reed est accompagné dans ce concert par le guitaristeMike Rathke. Enfin, l'albumEcstacy, à la langueur hypnotique, voit le jour en 2000[38].
En 2003 paraîtThe Raven, référence décadente et post-punk àEdgar Allan Poe[39]. Il y reprend deux titres anciens (The Bed etPerfect Day), avecDavid Bowie chantantHop Frog et récitant le poèmeThe Raven (Le corbeau), d'Edgar Allan Poe. Cet album original reste très éloigné du grand public, qu'il a du mal à convaincre.
Le, à l'occasion de la publication de l'intégrale des paroles de ses chansons,Traverser le feu, Lou Reed donne une simple lecture sans musique, au104 à Paris, de plusieurs de ses textes, et participe en public à une entrevue, filmée par la chaîneArte et enregistrée parFrance Culture[40].
En, il participe aufestival des Vieilles Charrues[42], auxNuits de Fourvière[43] et dédie la chansonFemme Fatale àAmy Winehouse, morte quelques jours auparavant[44]. La même année, il enregistre l'albumLulu avec le groupeMetallica, édité au mois d'octobre, qui sera la dernière réalisation de sa carrière[45]. Il se produit sur scène, très diminué par son cancer du foie, jusqu'en, après quarante-huit années d'activité.
Depuis sa jeunesse, Lou Reed pratique laphotographie[60]. Son premier livre de photos,Emotion in Action, paraît en 2003. En 2012, il publieRimes Rhymes, un livre présentant 300 de ses clichés accompagnés d'un texte de l’écrivain suisseBernard Comment[61],[62].
Lou Reed rencontre Bettye Kronstad en 1968 et l'épouse en 1973 pour divorcer en 1978[63]. Il vit quelques années avecRachel Humphreys, une femme transgenre, puis se marie, en 1980, à Sylvia Morales, unestripteaseuse qui devient son manager jusqu'à leur divorce en 1994[64]. Le, leNew York Post révèle le mariage secret de Lou Reed avec l'artiste expérimentaleLaurie Anderson, sa compagne depuis 1995. Le mariage a lieu le 12 avril dans leColorado. Installés à New-York[65], ils restent unis jusqu'à sa mort en 2013. Lou Reed n'a pas eu d'enfants[64].
La possiblebisexualité de Lou Red a fait l'objet de discussions, et été confirmée par 2 de ses biographes. Ayant des« penchants homosexuels » dans son enfance, ses parents le forcent àsubir des électrochocs ; il évoque ce sujet des années plus tard dans sa chansonKill your sons[66],[67]. Dans sa vie d'adulte, il se marie plusieurs fois avec des femmes, dont Sylvia Morales.
Howard Sounes(en), un de ses biographes, affirme que Lou Reed est« fondamentalement bisexuel » et, qu'ayant grandi dans lesannées 1940 et1950, il a cherché à cacher sa sexualité à plusieurs moments de son existence[68]. Chris Roberts, un autre biographe, confirme lui aussi la bisexualité de Lou Reed[66].
Pour autant, Reed a toujours été lui-même assez évasif sur le sujet[66] ; si en 1972 une de ses chansons contient les paroles« We’re coming out, out of our closets, out on the streets » (« Nous sortons du placard, nous sortons dans les rues »), l'année d'après, Lou Reed dément de cette bisexualité, qu'elle ait été perçue comme ouverte ou implicite[69]. Uncritique musical avance en 1973 que Reed est« sorti du placard, pour ensuite y retourner »[67]. Quoi qu'il en soit,Slate rapporte que pour beaucoup de ses fans, la bisexualité de Lou Reed est tenue comme acquise[66]. Certains journaux mentionnent également que l'expression« premièrerock star bisexuelle » a été accolée à Lou Reed[66],[67].
En, Lou Reed, atteint d'unecirrhose due à une longue période d'abus d'alcool, subit une opération d'urgence qui le contraint à annuler plusieurs dates de sa tournée. Le, à la suite de complications dues à cette greffe du foie, il meurt àSouthampton,Long Island (New York) à l'âge de 71 ans[12],[71],[72]. Incinéré, ses cendres sont rendues à la famille[73].
Les hommages sont nombreux. Lecardinal Gianfranco Ravasi, ministre de la culture duVatican, rend un hommage inattendu au fondateur du Velvet Underground[74].Aurélie Filippeti, ministre française de la Culture déclare :« À l'avant-garde du rock, Lou Reed nous laisse un patrimoine musical exceptionnel qui a définitivement marqué l'histoire de la musique »[65].
Par ailleurs, David Bowie - fan de Lou Reed dès ses débuts[79], qui a aussi repris ses musiques du Velvet - le décrit comme étant« sans aucun doute le plus grand poète du rock moderne.[réf. nécessaire]Non par rapport à ce qu'il faisait, mais plutôt par rapport à la direction qu'il prenait. »[pas clair]
Traverser le feu, intégrale des chansons, coll. Fiction & Cie, Seuil, 2008, édition bilingue. Réédition en deux tomes bilingues :Chansons, l'intégrale, Tome 1 (1967-1980) et Tome 2 (1982-2000), Points, 2014.
Le Corbeau, [The Raven], traduction Claro, ill. de Lorenzo Mattotti, Seuil, 2009, édition bilingue.
Lou Reed (illustr.), Bernard Comment (textes),Rimes - Rhymes, Arles, France, Éditions Photosynthèses,2012, 350 p.(ISBN978-2-36398-004-5)
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Bruno Blum,Lou Reed - Electric Dandy - biographie, Paris, Le Serpent à Plumes, 2001 (mise à jour : Hors Collection 2007 ; édition revue et augmentée :Le Castor astral, 2014)