Pour les articles homonymes, voirLorrain (homonymie).
| Lorraine (région administrative) | 2 346 292 (2014)[1] |
|---|---|
| Population totale | incertaine |
| Régions d’origine | Duché de Lorraine |
|---|---|
| Langues | lorrain roman,francique lorrain,français de Lorraine,français standard |
| Religions | Catholicisme(majoritaire jusqu'auXXe siècle) |
| Ethnies liées | Médiomatriques,Leuques,Trévires |
LesLorrains sont les habitants de laLorraine et, sur le planmigratoire, unpeuple originaire de cette région historique et culturelle située dans le Nord-Est de laFrance, au sein duGrand Est. Ils sont une part dupeuple français depuis l'acquisition progressive par la France des divers territoires formant la Lorraine contemporaine.
La dernière estimation de population de laLorraine administrative est de 2 346 292 habitants en[2]. Concernant le nombre factuel des Lorrainsautochtones, en Lorraine et dans la France entière, il est difficile à déterminer car legouvernement français ne fait pas ce genre de statistiques.Selon une enquête deLH2 faite en 2014, 81 % des habitants de la Lorraine se déclarent attachés à leur région, une proportion supérieure de 8 points à la moyenne nationale[3].
Sur le planlinguistique, les individus lorrains se divisent traditionnellement en deux groupes principaux : lesLorrains romans, dits aussifrancophones et lesLorrains germanophones, dits aussiallemands[N 1] entre le Moyen Âge et leXIXe siècle. Sur le planreligieux, la plupart des Lorrains sontcatholiques et cela depuis plusieurs siècles, ils incluent également unecommunauté juive ainsi que quelquesprotestants. Par ailleurs, ils ont pourpatronsaint Nicolas depuis 1477, ainsi quesainte Oranne chez les germanophones[4].
Enlorrain roman :Lourrains[5]. Enfrancique lorrain :Lotrénger[6],Loutrénger[7],[8] (lb) ;Lottrénger[6],Lothrénger (fm) ;Lottrìnger,Lothrìnger[6] (frl). Enallemand :Lothringer[9].Formes anciennes, au pluriel :Lorreins[10],Loreins ; au singulier :Lorhier[11].
L'ethnonyme etgentiléLorrains, ne désigne à l'origine que les individus duduché de Lorraine, ce dit duché ne s'étendait pas sur la totalité de la Lorraine contemporaine. Il y avait alors d'un côté lesLorrains, d'un autre lesBarrois[12] alias lesBarisiens[13] (duché de Bar), ainsi que lesÉvêchois[14] (Trois-Évêchés) et lesLuxembourgeois de laprévôté de Thionville, etc.
Puis, à la suite des acquisitions successives de ces territoires par leroyaume de France, celui-ci ayant fini par les regrouper, en 1766, dans une seule entité dénomméeGrand-gouvernement de Lorraine-et-Barrois, le motLorrains a progressivement fini par désigner les habitants de cette dernière entité, supprimée et convertie en quatredépartements en 1790[N 2]. Ceux-ci étant laMeurthe, devenueMeurthe-et-Moselle en 1871 ; laMeuse ; laMoselle et lesVosges[15]. Depuis lors, les Lorrains se distinguent en quatrehyponymes : lesMeurthois[16], devenus lesMeurthe-et-Mosellans après 1871 ; lesMeusiens ; lesMosellans et lesVosgiens[N 3].
Concernant les Lorrains germanophones, ils sont historiquement connus sous le nom deLorrains-Allemands[17],[18], également écritLorrains allemands. Cette appellation était toujours utilisée dans les années 1850[19],[20] et 1860[21], mais après l'annexion de 1871-1918, elle est devenue ambiguë, voire problématique, cela à cause de ladite annexion et son usage a fini par disparaître ; contrairement à l'appellation deSuisses allemands qui, elle, est toujours usitée auXXIe siècle[22],[23]. Les dénominationsLorrains germanophones[24],[25] etLorrains franciques[26] apparaissent auXXe siècle ; elles sont depuis lors employées pour désigner les Lorrains concernés.
Quant aux Lorrains francophones, ils peuvent parfois être mentionnés, avant 1871, sous le nom deLorrains français, cela par rapport à la langue qu'ils parlent, ou pour les différencier des Lorrains dits allemands[21].
Pour la période allant de 1871 à 1918, le termeLorrains désigne deux choses : lesLorrains de laLorraine annexée par l'Empire allemand pour une part et lesLorrains de la Lorraine restéefrançaise[N 4] pour l'autre. Le gentiléAlsaciens-Lorrains est quant à lui relatif à l'Alsace-Lorraine dans son ensemble.
Les noms de famille issus de laLorraine romane sontromans, dontClaudel ;Demange,Grandemange,Petitdemange ;Grandidier ;Lorrain,Laurain, Lelorrain ;Mangin ;Pierrel,Pierrat ;Simonin ;Thirion,Thiriet ; etc.
Ceux originaires de laLorraine allemande sont généralementallemands[27], certains de ces patronymes proviennent d'immigrantsgermanophones ayant servi à repeupler la Lorraine dite allemande à la suite de laguerre de Trente Ans[28]. Parmi ceux qui évoquent une localité lorraine, il y a entre autres Brettnacher, signifiant « habitant deBrettnach »[28] et Rimlinger « habitant deRimling »[28],[N 5] ; noms également traduisibles par les gentilésfrançais de ces deux villages :Brettnachois etRimlingeois.
Les Lorrains sont voisins desBelges, desLuxembourgeois et desAllemands au Nord ; desAlsaciens à l'Est ; desFrancs-Comtois au Sud et desChampenois à l'Ouest.
Au début duXXIe siècle, l'Ouest du département des Vosges et la totalité de celui de la Meuse sont situés dans la « diagonale du vide », c'est-à-dire que ladensité de population y est faible ainsi qu'inférieure à la moyenne nationale.
Les quatre départements lorrains correspondent à une partie du Sud-Est de l'ancienneGaule belgique, cette partie était alors occupée par des peuplesceltes, soit entre autres lesMédiomatriques, lesLeuques et lesTrévires.
D'après les travaux d'Alain Simmer, les divers dialectes traditionnels des Lorrains germanophones, qui sont regroupés sous l'appellation récente de « francique lorrain »[N 6], sont issus des parlerscelto-germaniques de la Gaule belgique et non de lalangue de l'envahisseurFranc[29].
Les Lorrains sont cités en 1613 comme étant mêlés en matière de mœurs : ils tiennent un peu desFrançais et un peu desAllemands, ayant quelque peu la courtoisie et la civilité des Français. Quelquesgentilshommes vivent presque à l'allemande, les autres tâchent de former leurs actions à la française, surtout la Cour duduc de Lorraine qui s'efforce d'imiter en toute chosecelle de France[30]. La population lorraine a par ailleurs éprouvé de grandes pertes pendant leXVIIe siècle par l'effet des guerres, à la suite de quoi le territoire lorrain est repeuplé[31].
Au début duXVIIIe siècle,Henri de Boulainvilliers en fait le portrait suivant :« ils sont en général extrêmement attachés aux anciens usages, ils ne se peuvent pas résoudre à les changer s'ils n'y sont contraints par la force, mais la contrainte est chez eux sujette à de grands inconvénients, car ce peuple, naturellement pesant et patient, s'anime d'une férocité toute singulière quand il est une fois irrité[32]. »
Au milieu duXVIIIe siècle,Jean-Baptiste Ladvocat décrit les Lorrains comme étant vaillants, laborieux, très attachés à leur princes et à lareligion catholique ; fort propres aux arts et aux sciences, mais aimant mieux le métier de la guerre. D'autre part, ils ont fort peu de commerce avec les pays étrangers, trouvant chez eux ce qui leur est nécessaire, leur principal commerce consiste en grains, vins et toiles[33].
Depuis plusieurs siècles, un grand nombre dejuifs allemands étaient venus successivement s'établir en Lorraine, où ils furent tolérés indéfiniment jusqu'en 1721. À cette date, leduc Léopold ordonna aux familles dont l'établissement ne remontant pas à 40 ans de s'en éloigner. Cet ordre fut ensuite mitigé, et, en 1733, 180 familles furent admises à jouir du droit de protection, moyennant untribut particulier de10 000 livres de Lorraine ; elles s'organisèrent alors en communauté, sous la direction d'unrabbin et de plusieurssyndics[31]. Vers 1763, Hans Caspar Hirzel indique que les villages de la Lorraine germanophone sont peuplés de jeunes gens grands, bienfaits et de la constitution la plus robuste[34].
En 1778, selonNicolas Durival, les Lorrains vivent bien avec leurs voisinsAlsaciens,Allemands etComtois. Par contre, ils ne sont pas aimés desBarrois et encore moins desMessins, cela à cause des guerres du passé[35],[N 7]. Sur le plan artistique, ils se sont distingués dans la peinture, le dessin, la gravure, la sculpture : les édifices, qui sont en grand nombre dans la Lorraine duXVIIIe siècle, attestent leurs succès dans l'architecture[35].
En 1804, lepréfet de laMeurthe désigne les habitants du Nord-Est de ce département comme étant de« race allemande », il ajoute que les mœurs comme les usages y ont conservé dans toute sa force l'empreinte de cette origine, tout cela étant rédigé dans un mémoire statistique destiné auMinistère de l'intérieur[31].
Dans les années 1830, d'aprèsÉmile Bégin, les Lorrains présentent une nuance intermédiaire entre la vivacité française et le flegme allemand. Ils sont laborieux, braves, économes et attachés au sol qui les a vus naître, ils ont une taille svelte et aisée qui varie entre 1,62 m et 1,79 m, pour une taille moyenne de 1,68 m. Concernant les rives de laSarre et certainescommunes autour deMirecourt, l'auteur parle d'« une race haute, forte, et communément de belle carnation ; elle dégénère dans les vignobles »[36].
Vers 1835, on rencontre parfois dans les environs deMontmédy, deVerdun et deStenay, des bandes nomades colportant le produit des faïenceries et des verreries du département de la Moselle. Ce sont des familles bohémiennes fixées dans les cantons boisés deBitche et deForbach. Elles ont choisi pour moyen d'existence un genre d'industrie qui décèle leur ancien attachement à l'indépendance et la vie errante. Ces familles voyagent emportant leurs ustensiles de ménage et suivies d'animaux domestiques qu'elles élèvent dans leurs courses ; elles campent, couchent et font leur cuisine en plein air. Les Bohémiens lorrains paraissent différer des Bohémiens duLanguedoc et duRoussillon. Le mariage est ignoré de ce peuple singulier, femmes et enfants, tout vit en commun et le chef exerce un pouvoir suprême[37].
Au milieu duXIXe siècle, selonM.Lagneau, les habitants de laLorraine germanophone présenteraient assez exactement la même conformation que ceux de laLorraine francophone, la population occupant anciennement la région aurait donc conservé son typeanthropologique[38]. Le descriptif physique des Lorrains non germanisés étant le suivant : généralement de petite taille, leurs cheveux sont ordinairement châtains, fréquemment noirs ; leurs yeux sont de couleur foncée, leur crâne estbrachycéphale et globuleux supérieurement, leur tête paraît sphérique, leur front est arrondi, un peu fuyant vers les tempes ; leurs os malaires sont quelque peu saillants latéralement et leurs organes thoraciques sont plus développés que leurs organes abdominaux[38]. Le descriptif deM. Lagneau reprend une étude ethnologique publiée en 1862 parDominique Alexandre Godron, étude dans laquelleM. Godron cherche à démontrer que« les Lorrains sont essentiellement Gaulois d'origine »[39].
En 2006, Jean-Louis Kieffer indique que le Lorrain germanophone est plus rigoureux, plus respectueux de l'ordre, plus religieux et plusintroverti que le Lorrain roman[28]. C'estgrosso modo ce que disait déjà Colette Méchin en 1999[40].
Concernant lesmigrations duXVIIIe siècle, un certain nombre de Lorrains se sont dirigés vers leBanat et laBatschka[41], dans leroyaume de Hongrie. 2 500 à 3 000 colons de langue française originaires des environs deMetz, deNancy, deLunéville et deSarrebourg[42] fonderont notamment vers 1770 les villages de Charleville, de Saint-Hubert et de Seul(e)tour[43]. Ces trois villages se trouvent enSerbie auXXIe siècle et portent le nom commun deBanatsko Veliko Selo (« Grand village de Banat »)[44],[45]. Dans les années 1830, l'homme politique françaisCharles Lemercier de Longpré, qui visita l'Europe centrale, écrira à propos de ces Lorrains : « Je me suis détourné de ma route pour voir quelques villages habités par des Français dont les pères avaient été attirés et fixés là par l'impératrice Marie-Thérèse. Ces villages sont situés dans un pays marécageux, arrosé et souvent inondé par leMoros et laBega, et dont la fécondité paraît compenser l'insalubrité. Mes compatriotes n'ont pas semblé me tenir compte de la peine que j'avais prise pour venir les visiter. C'est tout au plus s'ils se souvenaient de leur origine, dont la tradition ne s'accompagne d'aucune sympathie. La langue française, déjà tout altérée et dégénérée en patois mêlé d'allemand et de slave, cessera d'être parlée chez la génération qui remplacera celle existante. »[46].
En 1773, douze familles de colons lorrains, presque toutes originaires de laLorraine allemande, sont installés enCorse, près deBastia et de l'étang de Biguglia ; ces familles sont rapidement décimées par lamalaria et en 1780, elles sont réduites à trois[47].
Durant leXIXe siècle, une partie notable de la population lorraine (en particulier les germanophones), a migré vers plusieurs destinations, soit principalement : laPologne russe, laBavière rhénane, lesÉtats-Unis[N 8], leBrésil et la ville deParis[48],[49],[50]. À la suite dutraité de Francfort de 1871, un certain nombre de personnes lorraines ayantopté pour lanationalité française, ont migré vers l'Algérie[51].
Il existe diverses versions du costume traditionnel lorrain, qu'il soit féminin ou masculin.
L'ancien costume des campagnards de la Meurthe, est resté longtemps sans subir aucun changement. Il ressemblait, avant laRévolution française, au costume de ville du temps deLouis XIV, ou mieux encore à celui des paysans de théâtre. Letricorne de feutre à bords rabattus, l'habit à basques longues et carrées, la veste ou gilet à poches, d'étoffe pareille à l'habit, laculotte courte à brayette, les bas de laine à coins, couvrant le genou, et les gros souliers à boucles, tel était ce costume[37].
Après la Révolution, il a disparu de presque tous lescantons où l'habillement des paysans a suivi les variations de celui des artisans habitant les villes. Cependant on le trouve encore dans quelques villages reculés en 1835. Il est toujours en gros drap de couleur verte, violette ou brune. Les fréquentes variations de l'atmosphère rendent l'usage habituel des vêtements de draps presque nécessaire dans le département[37].
L'ajustement des femmes offre une espèce de chapeau de paille jaune, entouré de galon de velours noir, dont elles couvrent et garantissent leurs coiffes de toile et qu'elles attachent sous le menton avec des rubans de couleur noire. Autrefois les paysans de tous les cantons portaient presque toujours des sabots ; vers 1835 cette chaussure n'est guère en usage que près des Vosges ; ailleurs, seuls les domestiques en portent[37].
Vers 1835 le costume des paysans des Vosges est simple et commode, les hommes portent les cheveux longs et se couvrent la tête avec un chapeau à larges bords légèrement relevés ; ils ont un habit carré à larges basques et dessous une veste très ample, des culottes courtes, des bas de laine, de petites guêtres qui leur montent jusqu'à mi-jambes ; ils portent généralement des souliers, bien qu'il se fabrique dans le pays des sabots estimés[37].
Le costume des femmes est composé d'étoffes à couleurs vives, soit de laine, de fil ou de coton. Leurs longs cheveux, partagés sur le front et formant deux bandeaux plats, sont relevés en chignons et contenus sous un petit bonnet que desbarbes rattachent sous le menton. La coiffure des femmes deSaint-Maurice, dans lavallée de la Moselle, est gracieuse, et offre l'image assez fidèle d'un petit turban à côtes cannelées[37].