Lord Kelvin, s'inspirant sans doute des écrits deGuillaume Amontons introduisant en 1702 la notion d'un « zéro absolu », définit cette dernière comme correspondant à l'absence absolue d'agitation thermique et de pression d'un gaz, dont il avait remarqué les variations liées selon un rapport linéaire. Il a laissé son nom à l'échelle de température, dite absolue, ou température « thermodynamique », mesurée enkelvins.
Ces mêmes études lui permirent d'étudier la conduction électrique descâbles sous-marins : il est promoteur de la grande construction du premiercâble transatlantique.En revanche, il se heurta aux études deMaxwell sur l'éther : il se refusait à l'idée d'une propagation « transverse », sans propagation « longitudinale », dans ce milieu.Son étude de l'influence de la température sur la conduction électrique lui permit également de découvrir l'effet Thomson, ainsi que la relation entre l'effet Peltier et l'effet Seebeck, à la base de lathermoélectricité.
Il est également l'inventeur d'un mécanisme simple et bon marché de production d'électricité statique par influence, nommé lereplenisher[1].
Entre 1870 et 1890, la théorie de l’atome vortex, qui prétendait qu’un atome était un vortex dans l’éther, fut populaire parmi les physiciens et les mathématiciens britanniques. Thomson a été le pionnier de cette théorie, qui se distinguait de la théorie des vortex du XVIIe siècle deRené Descartes car Thomson pensait en termes de théorie du continuum unitaire, tandis que Descartes pensait en termes de trois types de matière différents, chacun se rapportant respectivement à l’émission, à la transmission et à la réflexion de la lumière[2]. Près de 60 articles scientifiques ont été rédigés par environ 25 scientifiques. Les hypothèses de l'éther et de l'atome vortex ont été abandonnées au début du XXe siècle, mais suivant l’exemple de Thomson et Tait[3], la branche de la topologie appeléethéorie des nœuds, qui est toujours très active, a été développée en lien avec ces hypothèses[4].
On retrouve sa trace dans nombre de théorèmes dits de Thomson, où lethéorème de Stokes intervient. Ses mémoires contribueront beaucoup à l'épuration de la théorie desvortex, dont sortira, comme un joyau, l'analyse vectorielle deGibbs (1839-1903) : les vecteurs sont si familiers de nos jours que cela est un peu occulté.
Atomiste, il eut une vision originale de la théorie des atomes à base denœuds, vortex etquaternions, théorie remarquable, mais sans issue.
Il a aussi construit un des premiers calculateurs analogiques, un prédicteur de marées mécanique appliquant les principes de l'analyse harmonique[5].
Parmi les travaux de Thomson ayant suscité le plus de controverses figurent ceux qu'il a consacrés à l'étude de l'âge de la Terre et du Soleil.
En 1862, il publie une théorie et des calculs relatifs à l'âge du Soleil et à celui la Terre qui l'amènent à estimer que l'âge du Soleil est de 100 à 400 millions d'années[N 1], celui de la Terre lui étant inférieur. Il revoit ensuite à la baisse l'estimation de l'âge de la Terre en la ramenant à quelques dizaines de millions d'années. Même si ces résultats sont très supérieurs aux estimations basées sur les textes religieux[N 2], ils sont très inférieurs à ceux suggérés par les travaux du géologueCharles Lyell (1797-1875), fondateur des « couches géologiques », qui considère que la Terre a été façonnée sur une très longue période de temps par des forces toujours existantes. Ils sont également très inférieurs à ceux queCharles Darwin envisage, en 1859, dans sathéorie de l'évolution des espèces. Thomson publie en 1868 un nouvel article sur le sujet, dans lequel il met ouvertement en cause les méthodes et résultats des géologues, ce qui déclenche une polémique qui s'étendra sur plusieurs décennies, polémique nourrie notamment par les personnalités, scientifiques ou non, critiquant les théories de Darwin[6].
Il est aujourd'hui établi que l'âge de la Terre est de l'ordre de 4,5 milliards d'années[7]. Les calculs de Kelvin étaient mathématiquement exacts, mais fondés sur plusieurs hypothèses erronées, notamment quant au mécanisme de refroidissement de la Terre, qui est plus parconvection interne que par diffusion externe, et à la composition du globe terrestre. C'est un de ses anciens élèves, John Perry, qui relèvera ces erreurs à partir de 1895[8], et démontrera, sans convaincre Thomson, que leur correction rend possible un âge de la Terre de l'ordre du milliard d'années[N 3].
↑Lors de son calcul initial de l'âge du Soleil, Kelvin émet l'hypothèse de l'existence possible d'une « source (d'énergie) inconnue à ce jour » qui infirmerait ses calculs, ce qui fait dire à certains historiens que Thomson aurait prédit la radioactivité. Dans ses écrits ultérieurs, Thomson ne reprendra pas ces précautions méthodologiques.
↑Les estimations fondées sur des textes religieux donnaient, à cette époque, un âge de la Terre de quelques milliers d'années.
↑En outre Kelvin n'avait pas pu intégrer dans ses calculs les effets de ladésintégration radioactive, alors totalement inconnue : ce n'est qu'au début duXXe siècle que les découvertes d'Henri Becquerel puis celles d'Ernest Rutherford la mettront en évidence, ouvrant la voie à son utilisation pour la datation de la matière, et à une explication plus précise du fonctionnement et de l'âge du Soleil. Cette erreur, bien compréhensible, n'avait pas d'influence notable sur le calcul direct de l'âge de la Terre, erroné pour d'autres raisons. En revanche, elle avait une influence directe sur le calcul de celui du Soleil, estimé par Thomson à moins de 400 millions d'années. Et comme la Terre ne pouvait être plus âgée que le Soleil, son âge ne pouvait excéder cette estimation.