Couvrant2 770 hectares, la commune était peuplée en 2006 de 406 habitants. Servie par unréseau hydrographique dense, elle présente deux entités géographiques distinctes de part et d'autre des dômes gréseux des monts d'Arrée : au nord des pentes recouvertes de landes descendant vers lelac Saint-Michel, au sud des pentes en cultures ou boisées, aux sols plus propices à l'agriculture.
« L'église paroissiale, la chapelle de la Croix et le manoir du Rusquec demeurent des sites patrimoniaux importants, alors que la qualité et la variété des sites naturels, des chemins et des panoramas favorisent les activités liées au tourisme rural[1]. »
Loqueffret est situé au carrefour de deux axes départementaux secondaires : la D14, qui relieMorlaix àPleybenviaHuelgoat et la D36, qui traverse le centre Finistère du Nord (Morlaix) au Sud (Rosporden) dans le prolongement de la D785 (Morlaix-Quimper) dont elle se différencie au Nord de Brennilis, avant de traverser les monts. On trouve en outre deux grosses voies communales, dont l'une mène à Brasparts et l'autre ausite nucléaire de Brennilis.
Le sommet plan du Menez Keryéven, point culminant de Loqueffret (296 m).
Loqueffret est situé au niveau de la ligne de crête Sud desmonts d'Arrée, « vaste ensemble de collines degrès armoricain (Ménez), d'affleurements deschistes etquartzites de Plougastel (Roc'h), recouverts delandes (et localement de boisements derésineux), abritant sur les pentes, talwegs et fonds de vallée descomplexes tourbeux exceptionnels[3] ». Cela permet à la commune d'être composée de trois entités géographiques distinctes[4] : au Nord-Ouest, la dépression duYeun Elez, au Centre, les sommets des monts d'Arrée, ailleurs, leurs contreforts. On retrouve donc sur la commune tous les paysages traditionnels des monts d'Arrée.
Le Nord-Ouest de Loqueffret occupe le Sud-Est de la dépressionYeun Elez. Depuis les sommets, les monts d'Arrée descendent en pente d'abord assez marquée vers le Nord (50 m de dénivelé sur deux kilomètres) puis plus lentement vers leréservoir de Saint-Michel. Les pentes sont recouvertes de landes, tout comme la dépression elle-même, qui accueille également des tourbières (dont la principale au sud-est du lac) et quelques champs striés de haies (principalement autour de Forc'han et de Kerguéven). Plusieurs lacs et bassins témoignent de l'ancien passé marécageux de l'espace. Au Nord de la commune, l'Éllez la démarque deBrennilis, à l'Ouest la démarcation ne suit aucun tracé topographiquement remarquable.
Le reste de la commune prend pied sur les pentes Sud-Est des monts d'Arrée. L'orientation globale des sommets est Nord-Sud[5] et Ouest-Est[6]. Le relief est très heurté, avec des dénivelés parfois supérieurs à 100 mètres sur 300 mètres (gorges du Run Du, Rusquec), causés par un très fort encaissement des nombreuses vallées : à l'ouest, un affluent de laDouffine qui sert de limite communale avecBrasparts ; au Centre, un ruisseau aujourd'hui temporaire, qui se jette dans des affluents de laDouffine qui servent de limite communale avecLannédern etPlonévez-du-Faou ; au Sud-Est un sous-affluent du Stêr-Goann, qui sert de limite communale avec Plonévez-du-Faou ; à l'Est l'Elez qui, au sortir du Yeun Elez tombe de plus de 115 m au Rusquec. Ce réseau hydrographique dense est cependant composé majoritairement de petits ruisseaux, dont de nombreux sont temporaires.
Ce relief vallonné accueille deux paysages complémentaires : laforêt (bois de Rusquec et de Bodriec, bois au sud du Ménez-Du) et parfois quelques friches sur les pentes les plus fortes ; unbocage de densité variable, très altéré au Sud-Ouest, sur le reste du territoire.
La carrière du Rest représente une réserve d'eau potentielle de500 000 m³ qui pourrait, après la cessation d'exploitation prévue pour 2032. Cette carrière pourrait alors soutenir les débits de l'Aulne en période d'étiage[7].
Gué de Mardoul sur l'Éllez : cavités et rigoles, traces de rites sacrificiels d'une religion pré-chrétienne.Mardoul : l'ancien pont amont sur l'Éllez.
L'Éllez, en aval du lacRéservoir de Saint-Michel, sert de limite communale entre Loqueffret et Brennilis. Ce cours d'eau et ses affluents ont permis l'installation de moulins à Keryeven, Kerrannou, Mardoul, Kerprouet, Rusquec. Le moulin de Mardoul a été construit tardivement (après 1813) mais il était encore en activité en 1907[8].
L'Éllez, célèbre par le passé pour sa cascade deSaint-Herbot désormais disparue en raison des aménagements hydroélectriques effectués dans la décennie 1920 (barrage et petit lac de retenue), passe ensuite par le village deSaint-Herbot avant de confluer avec l'Aulne plus en aval.
Le chaos de Mardoul sur l'Éllez a été longtemps un lieu de passage privilégié pour franchir la rivière : deux très anciens ponts subsistent, à 200 mètres de distance l'un de l'autre, et le gué de Mardoul est facile à franchir en raison des roches multiples qui parsèment le lit du cours d'eau (le « chaos de Mardoul »). Les particularités du lieu expliquent les traces de très anciennes cérémonies religieuses d'une religion pré-chrétienne qui s'y voient encore (cavités circulaires taillées dans la pierre, rigoles sacrificielles).
Le climat de Loqueffret est soumis à une double influence[9]. Globalement, le Finistère, où se situe Loqueffret, « du fait de sa position péninsulaire sous une latitude moyenne, en façade occidentale de l'Europe, (...) jouit d'unclimat tempéré, venté et humide, n'excluant pas des périodes de sécheresse et d'ensoleillement selon les années et les saisons. » La pluie tombe assez régulièrement, avec cependant des mois d'été plus secs, et la période allant d'octobre à mars la plus humide (65 % des précipitations).
Si lebourg, situé sur une pente légère au sud du passage entre les Ménez Du et Kéryeven, concentre aujourd'hui la majeure partie de la population[11], Loqueffret compte de nombreux hameaux et lieux-dits encore habités, répartis d'une manière assez homogène sur les contreforts, mais inexistants sur les sommets (le dernier village qui y était situé, Norohou, a été déserté à la fin duXIXe siècle[12]) et à proximité du lac (l'insalubrité de l'ancien marais rendait l'installation problématique)[4]. Les principaux regroupements de population hors du bourg sont Bilirit, Poulfoan, Couzanet et Kermarc[4].
La "Société des Kaolins du Finistère" a exploité un gisement dekaolin (la kaolinisation affecte largement les bordures dupluton granitique du Huelgoat) à Menez-Molvé enBerrien, et désormais en exploite un au Rest en Loqueffret[13].
La commune est située dans lebassin Loire-Bretagne. Elle est drainée par la rivière l'ellez, l'Ellez, le Stêr Goanez, le ruisseau de Roudoudour[14], le ruisseau hoaz-glaz[15] et divers autres petits cours d'eau[16],[Carte 1].
Plusieurs études ont été menées afin de caractériser les types climatiques auxquels est exposé le territoire national. Les zonages obtenus diffèrent selon les méthodes utilisées, la nature et le nombre des paramètres pris en compte, le maillage territorial des données et la période de référence. En 2010, le climat de la commune était ainsi de typeclimat océanique franc, selon une étude duCentre national de la recherche scientifique (CNRS) s'appuyant sur une méthode combinant données climatiques et facteurs de milieu (topographie, occupation des sols, etc.) et des données couvrant lapériode 1971-2000[21]. En 2020, le climat prédominant est classé Cfb, selon laclassification de Köppen-Geiger, pour la période 1988-2017, à savoir un climat tempéré à été frais sans saison sèche[22]. Par ailleursMétéo-France publie en 2020 une nouvelle typologie desclimats de la France métropolitaine dans laquelle la commune est exposée à unclimat océanique[23]. Parallèlement l'observatoire de l'environnement en Bretagne publie en 2020 un zonage climatique de la région Bretagne, s'appuyant sur des données de Météo-France de 2009. La commune est, selon ce zonage, dans la zone « Littoral doux », exposée à un climat venté avec des étés cléments[24]. Elle est en outre dans lazone H2a au titre de laréglementation environnementale 2020 des constructions neuves[25],[26].
Au, Loqueffret est catégorisée commune rurale à habitat très dispersé, selon la nouvelle grille communale de densité à7 niveaux définie par l'Insee en 2022[30].Elle est située hors unité urbaine[31]. Par ailleurs la commune fait partie de l'aire d'attraction de Pleyben - Châteaulin, dont elle est une commune de la couronne[Note 4],[31]. Cette aire, qui regroupe 18 communes, est catégorisée dans les aires de moins de 50 000 habitants[32],[33].
L'occupation des sols de la commune, telle qu'elle ressort de labase de donnéeseuropéenne d'occupationbiophysique des solsCorine Land Cover (CLC), est marquée par l'importance des territoires agricoles (52,7 % en 2018), en augmentation par rapport à 1990 (49,2 %). La répartition détaillée en 2018 est la suivante : zones agricoles hétérogènes (41,9 %), milieux à végétation arbustive et/ou herbacée (23,8 %), forêts (18,4 %),terres arables (7,9 %), eaux continentales[Note 5] (3,5 %), prairies (2,9 %), zones urbanisées (1,1 %), zones industrielles ou commerciales et réseaux de communication (0,6 %)[34]. L'évolution de l'occupation des sols de la commune et de ses infrastructures peut être observée sur les différentes représentations cartographiques du territoire : lacarte de Cassini (XVIIIe siècle), lacarte d'état-major (1820-1866) et les cartes ou photos aériennes de l'IGN pour la période actuelle (1950 à aujourd'hui)[Carte 2].
Carte des infrastructures et de l'occupation des sols de la commune en 2018 (CLC).
Le nom du lieu est attesté en 1368 sous la forme « Locqueuret » et « Locquirec » et comme faisant partie dePlebs Montis, la « paroisse de la montagne », nomlatin du village de Plouénez enBrennilis. On trouve les formes « Locquevret » en 1395, « Loquevret » en 1496, « Locqueffret » en 1516, et la forme actuelle « Loqueffret » en 1536[36].
Le toponyme est composé deloc,préfixe courant dans les toponymesbretons, dérivant du latinlocus, « lieu » et qualifiant des fondations religieuses, modestes à l'origine et postérieures auXIe siècle. Ce préfixe est complété par « queffret », dont la forme ancienne « quevret » renvoie à un saint Guevret[37].
En breton moderne, le nom de la commune estLokeored[36], prononcé « Lokèr'd ».
Du Moyen Âge à 1884,Brennilis a fait partie du territoire de Loqueffret.
La paroisse deSaint-Herbot est pour sa majeure partie située dans la commune actuelle dePlonévez-du-Faou (en particulier la chapelle), mais une partie notable du hameau est située en Loqueffret.
Avant les Celtes : une multitude de témoignages archéologiques
Le principal site archéologique de Loqueffret se situe au niveau de l'ancien village de Norohou, au Sud-Ouest du Ménez-Keryéven : l'exploration d'un champ de tumulus a permis d'y découvrir de nombreux fragments et pièces de poteries à anses plates, des morceaux d'armes et des coffres en pierre[39]. Un dolmen recouvert decupules, aujourd'hui détruit, a également été observé. Le site, entouré de roches schisteuses sur trois côtés, était facile à défendre et a été longtemps occupé.
Afin de protéger les plus grosses fermes des hameaux, des enceintes en terre quadrangulaires (Castellou douar, « Châteaux de terre ») sont élevées, notamment au Cosquer et au Castellic[47]. Unemotte castrale, la motte de Saint-Nicolas est édifiée au Sud-Sud-Est des Tourelles : sur une trentaine de mètres de diamètre, ses retranchements s'élèvent de trois mètres au-dessus du sol intérieur et de huit mètres au-dessus de la douve, remplie d'eau. Un bâtiment de huit mètres sur cinq s'élève en son centre et l'ensemble de la motte est lui-même entouré d'un mur de clôture.
Cependant, malgré les défrichements, le sol pauvre et peu propice au culture dans les landes, lesbruyères, les tourbières et les sommets des montagnes empêchent un fort développement de la région, et c'est une économie rurale pauvre qui se met en place : cultures de subsistance plutôt qu'élevage, utilisation de latourbe[48] pour chauffer les maisons, commelitière pour les bêtes et pour améliorer les terres, prépondérance des terres vaines et vagues (comme le marais du Yeun)[49].
Loqueffret (dont l'orthographe se fixe alors) est dominée de la fin du Moyen Âge à la Renaissance par une famille noble[52], apparue à la réformation de 1428 : les seigneurs du Rusquec, tout d'abord établis au nord-ouest de Lingaolou, puis auXVIe siècle en amont du chaos du Rusquec lors de la construction de leur second château[53] (seule construction loqueffretoise méritant le titre de manoir[54]). La seigneurie possède un droit de juridiction et dresse desfourches patibulaires au sommet de la colline la plus proche du château[55].
Le manoir est situé sur une colline en bordure de la rivièreÉllez (du lac de retenue du barrage de Saint-Herbot désormais). C'est un manoir constitué de trois enclos : le potager, le logis et ses dépendances, le verger ; le logis et l'enceinte ne subsistent qu'à l'état de vestiges. Ils étaient probablement l'œuvre d'Anceau du Rusquec qui épousa en 1480 François de Rosnyvinen, décédé en 1522 et de son fils Anne Jehan, décédé en 1536. Jacques du Rusquec est tué le par des Royaux (partisans d'Henri IV) àPlestin alors qu'il allait soutenir leduc de Mercœur pendant lesGuerres de la Ligue. Le corps de logis actuel date duXVIIe siècle et a été construit par d'Alan de Kerlech du Chastel, marié à Renée de Lannion en 1637[56].
De 1634 à 1734, le titre de baron de Rusquec est porté par les De Kerlech du Chastel, à la suite du mariage de Jeanne du Rusquec, fille unique de Maurice du Rusquec, décédé en 1625, avec René de Kerlech du Castel en 1604. Leur fils Alain I, baron de Kerlech épouse en 1637 Renée de Lannion, fille unique du baron du Vieux-Chastel[57]. En 1653 le château est agrandi avec les pierres du manoir de Kerranou[58]. À cette date, les seigneurs possèdent, outre le manoir et son moulin, deux manoirs, deux moulins, sixconvenants, huit villages, 21 hameaux, une métairie noble, une autre seigneurie, la montagne du Ménez Du et des terres en Cléden Poher[59] et ils financent l'entretien de l'église paroissiale comme celui de l'église tréviale de Brennilis, dont ils restaurent la sacristie auXVIIe siècle[60]. À partir du décès d'Alain de Kerlech en 1734, le manoir du Rusquec cesse d'être habité par ses seigneurs, et est abandonné à desmétayers, il se dégradé alors rapidement ; le titre de seigneur revient aux de Kerouatz, qui en restent propriétaires jusqu'à laRévolution. Il faut attendre la fin duXXe siècle pour qu'un nouveau propriétaire en entreprenne la restauration.
Du côté des paysans et fermiers, on remarque peu d'évolution : l'agriculture reste assez pauvre, tout comme l'élevage, et la tourbe reste le produit de base. L'aridité des sols ne permettant pas aux cultivateurs de subvenir complètement aux besoins de leurs familles, des activités d'appoints sont développées dans letissage[49]. Les paysans de ces terres sont très pieux (le territoire de Loqueffret compte dès leXVIe siècle, outre l'église trévialeSainte-Geneviève, les chapelles de pèlerinage de Brennilis[61] et de la Croix, à Bodriec) et fidèles à leur seigneur : lors desguerres de la Ligue, tout à la fin duXVIe siècle, la dame douairière du Rusquec[62] obtient le une sauvegarde duduc de Mercœur[63] et une autre, selonSourdéac, en1597 deGuy Éder de La Fontenelle, soldat brigand etligueur[64] ; la destruction du manoir du Rusquec est à mettre à l'actif de pillards ne venant pas du village, le Rusquec est l'un des rares manoirs desmonts d'Arrée à être épargné par les populations locales, grâce à la grande popularité d'Alain du Chastel de Kerlech[65].
Un fragment d'un compte du seigneur du Rusquec qui nous est parvenu montre toutefois la dévastation de la région :« Le quatorzième octobre mil cinq cent quatre-vingt dix sept. Montant sauf erreur de calcul à la somme de troys centz cinquante sept livres deux soulz, six deniers tournoy.., Demande ledit comptable estre excusé de susdites charges des rentes et revenus en enthier des terres et seigneuries, des convenents, moulins en despandant, appartenant audit Seigneur du RUSQUEC demandeur en compte, d'autant que les meteiérs [métayers], colons et serviteurs de ces ditctes terres avoient pour la plupart quitté et abandonné les dixtes terres et convenants, sestant retirés du pays- La plus grande partie autres morts de famine, peste autres férocités des loups ; autres devenus insolvables et rendus en telle extrémité de pauvreté qu'ils n'avoient la pouvoir de païer aucune chose tant par les malheurs des guerres civiles que maladies contagieuses qui ont dû courir du temps durant ladite charge et de... non seulement en ses quartiers mais par toute la province, tellement que les terres et convenant de cet évesché auroient esté pour la plus grande partie entièrement laissés en friche et sans aucune culture, voire mesme plus de quatre ans après l'institution de la dite charge. Chose si notoire que personne ne peut ignorer[66]. »
Loqueffret est peu concernée par la révolte des Bonnets rouges qui ensanglante les paroisses voisines situées plus au sud commePlouyé,Collorec,Landeleau, etc. , l'ensemble duPoher et une bonne partie de laCornouaille.
Lors de la Révolution, le prêtre et le vicaire de Loqueffret, toujours trève de Plonévez-du-Faou, refusent de prêter serment à laconstitution civile du clergé. Si les biens des Kerouatz (dont le manoir du Rusquec), sont vendus en 1794, les nouveaux acquéreurs les leur restituent assez rapidement : Loqueffret reste une terre loyaliste, attachée à ses seigneurs[58]. Avec la Révolution, les communs sont partagés : chacun reçoit une portion de tourbière en fonction de la taille de sa famille ; « Le marais tourbeux du Yeun Elez ressemblait ainsi à un grand damier que les rigoles, coupées à angle droit, divisaient sur des kilomètres[49] ». C'est le premier changement d'un siècle qui en compte de nombreux.
Tout d'abord, le statut administratif de Loqueffret évolue assez fortement : la trève dePlonévez-du-Faou est une commune du canton révolutionnaire deBrasparts de l'An III à l'An VIII (sous le nom « Loquescret »), avant d'être rattaché aucanton de Pleyben en 1801 puis érigée en paroisse en 1802 ; le 9 mai 1849, Brennilis (jusque-làsuccursale de Loqueffret) est également érigée en paroisse puis en 1884 en commune, divisant en deux Loqueffret[75],[76].
En1848, lors de l'ouragan qui sévit la nuit du 24 au 25 décembre, la foudre tombe sur le clocher de Loqueffret et « y a exercé les ravages les plus déplorables : le bedeau, sonnant les cloches à l'occasion de la messe de Noël (cérémonie de nuit) a été pulvérisé ; quatre autres personnes ont été atteintes plus ou moins grièvement par le fluide électrique. Une foule d'individus ont été blessés, mais moins dangereusement. L'église a beaucoup souffert : les vitres brisées, le pavé déplacé ou fendu, les fonts baptismaux bouleversés, le toit enlevé en grande partie, le clocher sillonné ; enfin le temple n'offre plus ni abri ni sécurité aux fidèles qui voudraient le fréquenter. Le prêtre officiant à l'autel a eu les cheveux entièrement brûlés[77] ».
Ensuite, l'économie rurale est modifiée par le fort développement du colportage de chiffons, initié à la fin du siècle précédent : entre les périodes de grands travaux agricoles, lespilhou (« chiffes ») étaient ramassés en échange de vaisselle enfaïence dans toute laBasse-Bretagne par les paysans du Yeun Elez (lespilhaouerien), qui mettaient à profit leur situation centrale, puis revendus aux marchands de chiffons en gros dans les villes (principalementChâteaulin)[49]. La très grande adaptabilité de ces chiffonniers aux contraintes du marché (qui passe notamment par l'apprentissage dufrançais) leur permet de développer un commerce lucratif qui aida grandement au développement du village, et ce jusqu'au début duXXe siècle[49]. Ainsi, en 1846, le territoire actuel de Loqueffret compte 32 ménages où lechef de famille est chiffonnier, pour un total communal de 89 chiffonniers, sans compter les habitants qui déclaraient « cultivateur » comme activité principale[78].
Ces changements permettent àAlphonse Marteville décrivant Loqueffret en 1843 d'écrire : « Ce territoire est triste et désolé : la terre ne peut guère produire que du seigle, et les habitants sont forcés d'acheter le blé sur les marchés voisins. Cependant il y a une certaine aisance provenant d'une extrême industrie ; les deux tiers de la population sont toujours en voyage, et exercent avec persévérance et adresse le pénible métier de colporteur. Ils achètent surtout et vendent des chiffons. (...) Le bois de charpente manque, et à peine on y voir quelques arbres fruitiers[79]. »
Mari Kastellin (Marie de Chateaulin), une vendeuse de chansons populaires (née à Loqueffret en 1845), vers 1900
Malgré ces changements, le Yeun Elez garde encore auprès des citadins finistériens une image de terre arriérée et reculée comme en témoigne en 1896 M. Le Rumeur, faisant le compte-rendu de l'exploration du champ de tumulus de Norohou dans leBulletin de la société archéologique du Finistère : « Les habitants actuels de ce lieu sauvage sont bien les descendants de ceux dont nous venons de troubler les sépultures. Surpris dans nos travaux par une violente tempête de neige, nous dûmes nous réfugier dans une cahute (…). Quel ne fut pas notre étonnement, quand nous y eûmes pénétré, de nous trouver dans une habitation de l'époque de la pierre (…) le lit est fait de grandes pierres, (…) la table est un dolmen, (…) l'armoire un coffre adossé au lit, fait de trois pierres, (…) une vache couche dans le même logis que les gens. La femme, à laquelle nous donnâmes quelques fruits, n'en mangeait pas, et l'un des enfants ne voulut pas manger de viande. L'existence des habitants actuels du plateau de Norohou ne doit pas très sensiblement différer de celle des populations préhistoriques qui y ont laissé leurs monuments[81]. »
Si le coup d'État du 2 décembre 1851 semble plutôt bien accueilli[82], l'arrivée de la République n'est l'occasion d'aucune manifestation de défiance. C'est d'ailleurs en 1872, après près de 17 années de discussions, la première école (mixte) est ouverte[83], celle de garçons peut accueillir les 70 garçons en âge scolaire que compte la commune[84], pendant qu'une école de filles est également ouverte dans des logements loués et non adaptés. En 1898 l'école, trop petite est affectée aux 53 filles, qui ont alors un bâtiment officiel, tandis qu'une nouvelle école de garçons (entamée en septembre 1897) est ouverte afin d'accueillir les 71 élèves[85] et leur professeur.
Les années 1900 sont encore assez fastes pour Loqueffret, qui gagne près de 150 habitants, et poursuit le développement entamé au siècle précédent : en 1900 une deuxième classe est ouverte à l'école de garçons, en 1907, une nouvelle école de filles est construite, si grande qu'en 1909 les deux écoles intervertissent leurs classes, les effectifs scolarisés de garçons restant plus nombreux, malgré les progrès de la scolarisation et la présence de deux institutrices pour un seul instituteur[86] ; à partir de 1912 la lignePlouescat-Rosporden, arrivant de Brennilis, s'arrête à la gare de « Loqueffret / St Herbot », au Nord du Bourg, et rejoint Brasparts par le bois de Bodriec[42].
En réponse à une enquête épiscopale organisée en 1902 parMgr Dubillard,évêque de Quimper et de Léon en raison de la politique alors menée par le gouvernement d'Émile Combes contre l'utilisation dubreton par les membres du clergé, lerecteur de Loqueffret, l'abbé Corbel, écrit : « Les enfants de neuf ans ne peuvent venir [aucatéchisme] à cause des mauvais chemins et des distances très fortes ». La même année, le sous-préfet deChâteaulin, dans une lettre datée du, soutient que « la population presque entière » comprend le français[89].
Le, Corbel, curé de Loqueffret, fait partie des 31 prêtres dudiocèse de Quimper dont les traitements[90] sont retenus par décision du gouvernementCombes « tant qu'ils ne feront pas emploi de la langue française dans leurs instructions et l'enseignement ducatéchisme » car ils utilisaient lebreton[91].
Unloup qui n'avait plus que trois pattes aurait été observé en 1906 entreLandeleau et Loqueffret ; ce serait le dernier loup vu dans la région[92].
La centrale électrique de Brennilis vue depuis le Menez Keryéven.
Dès le premier après-guerre, la commune entre en déclin démographique. Si la commune a payé un assez lourd tribut à la guerre[94] cette baisse est avant tout liée au déclin économique : le papier n'est plus produit à partir de chiffon et lespilhaouerien disparaissent, la modernisation de la Bretagne se fait au détriment des structures traditionnelles (liées à l'Église, l'agriculture et le breton) ce qui pousse les jeunes désireux d'épouser celle-là à rejeter celles-ci, et donc à quitter le village.
Au début des années 1930, malgré la fermeture de la ligne de chemin de fer, trop lente face à la route[42], Loqueffret entre en relative stagnation : la population ne baisse presque plus entre les recensements de 1931 et 1946, l'ouverture de la centrale hydroélectrique de Saint-Herbot facilite l'électrification de la commune, et le tissu de commerces reste très dense avec six épiciers-débitants, trois boulangers, trois marchands de nouveauté, deux maréchaux-ferrants, deux charpentiers, deux cordonniers, un charcutier, un charron, un sellier, un buraliste, un vendeur de vin et un marchand d'engrais[95].
Le monument aux morts de Loqueffret porte les noms de 9 personnes originaires de la commune mortes pour la France pendant laSeconde Guerre mondiale[93]. Parmi elles, François Gressus, matelot électricien à bord duPluton, un croiseur reconverti en mouilleur de mines, fut victime de l'explosion de son bateau le dans le port deCasablanca (Maroc).
François Salaün, 22 ans, né à Loqueffret, réfractaire auSTO,maquisard, est capturé le par les Allemands dans le bois de Bodriec en Loqueffret (où un groupe de résistantsFTPF se cachaient parfois, même si leurs cachettes principales trouvaient dans le bois du Nivot, ainsi que dans la grotte de Toul an Diaoul, enLopérec) ainsi que Jean Cavalloc, deLopérec et François Toullec, de Brennilis ; après avoir été atrocement torturés àLampaul-Guimiliau, puis àGuiclan et enfin dans la cave de la chapelle de l'école Saint-Louis àChâteaulin où ils décèdent dans la nuit du 9 au[96].
Les années 1950 voient le début des travaux de modernisation de la commune, avec la destruction de l'enclos paroissial[97], cependant, de 1946 à 1962, la population diminue de 25 % : dès cette époque, hormis les 11 bistrots, cafés et restaurant, les commerces se font de plus en plus rares[98]. Si la construction de lacentrale nucléaire de Brennilis semble ralentir cette décroissance dans les années 1960[99], celle-ci reprend ensuite fortement jusqu'en 1990[100], où le village ne compte plus que 428 habitants, assez âgés, soit une baisse de 56 % de la population en 44 ans.
La place de la mairie en 2008.
La construction d'un nouvel ensemble administratif (accueillant mairie, communauté de communes et poste) et d'une petite place centrale avec fontaine au début des années 1990 sur les friches laissées par la destruction de l'enclos paroissial change la physionomie du bourg. Durant la décennie 1990 la commune connaît sa première hausse de population depuis 1911, due avant tout à un solde migratoire assez fort[101], avec notamment 75 immigrants entre janvier 1998 et mars 1999, lorsque s'est ouverte la deuxième phase du démantèlement de la centrale, qui a nécessité l'embauche de 120 à 140 personnes[102]. Cependant, depuis 1999, la population s'est remise à baisser, malgré un solde migratoire toujours positif (poursuite des travaux à l'ancienne centrale, installation d'anglais). Une nouvelle école publique est bâtie en 2002, sous l'impulsion du maire précédent, Raymond Rannou. En 2018, le conseil municipal décide de donner son nom à l'école[103].
L'évolution du nombre d'habitants est connue à travers lesrecensements de la population effectués dans la commune depuis 1793. Pour les communes de moins de 10 000 habitants, une enquête de recensement portant sur toute la population est réalisée tous les cinq ans, les populations de référence des années intermédiaires étant quant à elles estimées par interpolation ou extrapolation[104]. Pour la commune, le premier recensement exhaustif entrant dans le cadre du nouveau dispositif a été réalisé en 2005[105].
En 2022, la commune comptait 338 habitants[Note 6], en évolution de −5,85 % par rapport à 2016 (Finistère : +2,16 %,France horsMayotte : +2,11 %).
Évolution de la population si Brennilis n'avait pas été séparé de Loqueffret.
Commentaire: si l'on ne prend en compte que les lieux-dits appartenant au Loqueffret contemporain, la population de la commune a depuis 1793 crû régulièrement jusqu'en 1911 (1316 hab.), notamment grâce au succès économique despilhaouerien[107]. Elle a subi une sévère saignée pendant la guerre (1157 hab. en 1921) avant de décroître lentement jusqu'en 1946 (958 hab.), à la suite de l'émigration de travail. La modernisation de la Bretagne à partir des années 1950 lui a été fatale : en 36 ans, la population est divisée par deux (482 hab. en 1982), elle continue depuis à décroître (416 hab. au recensement partiel de 2006). Le ralentissement de la décroissance des années 1960 peut s'expliquer par la construction de lacentrale nucléaire des Monts d'Arrée, en bordure communale Nord de Loqueffret, la hausse de population des années 1990 par la deuxième phase de son démantèlement.
En 2006, la population de Loqueffret était de 406 habitants[108], soit 14,8 hab/km², chiffre très inférieur à la moyenne départementale (131,1[109]). Sur la période 1999-2006, le taux de natalité, 8 ‰, est inférieur de 3,5 ‰ à la cette moyenne tandis que celui de mortalité, 14,9 ‰ lui supérieur de 4 ‰[108]. Cesolde naturel négatif[110] depuis longtemps explique la diminution sur le long terme de la population, même si unsolde migratoire plus fort entre 1990 et 1999, dû principalement à l'arrivée d'une population travaillant à l'extérieur de la commune[111], lui a permis de connaître de sa première hausse de population depuis 1911[108]. Le renouvellement de la population est assez élevé (24 % des habitants de 2006 n'y vivaient pas en 2001[108]) mais peu d'habitants restent vivre à Loqueffret (seuls 14 % y habitaient depuis cinq à neuf ans et la durée moyenne d'occupation d'un logement est de vingt ans[112]). Avec 33 % de plus de 60 ans contre 27 % de 15-44 ans, Loqueffret est donc un village âgé : les jeunes quittent le village après le collège et seuls des actifs déjà âgés, mais généralement avec une famille, s'y installent[108].
Cette structure de la population, avec une sur-représentation des retraités à petits revenus et un faible taux d'activité, induit une certaine pauvreté du village : en 2006 seuls 36,7 % des foyers fiscaux sont imposables, contre 52 % dans le département, et ces rares foyers imposables payent unimpôt sur le revenu moyen de 741 € contre 1 678 € dans le département[113].
Le nombre de logements augmente régulièrement depuis 1962 (308 en 2006), mais sur ces logements, seuls 194 sont des résidences principales (contre 231 en 1968) : Loqueffret est une ville de résidences secondaires et de logements occasionnels, avec 37 % d'habitations de ce type[114]. Plus qu'un tourisme d'importance, cela montre la désaffection des logements, guère plus utilisés que l'été par des familles en visite : 49 % des résidences principales ont été construites avant 1949, 82 % des résidences secondaires[115].
Peu industrialisée, Loqueffret reste une commune rurale offrant un éventail restreint de service. Le village a cependant la particularité d'accueillir l'une des principales centrales hydroélectriques bretonnes.
Loqueffret compte en 2006 147 actifs (dont 16 chômeurs), soit 36,2 % de la population et a un taux d'activité de 67,1 %[116]. Seuls 33 % des actifs ayant un emploi travaillent sur la commune, proportion en baisse de 25 % par rapport à 1990, ce qui montre la disparition d'un grand nombre d'activités au cours des années 1990[117]. Ces actifs sont peu qualifiés : la part de titulaire d'un diplôme de niveau bac+2 est de 13,3 % contre 21,2 % dans le Finistère[118].
Loqueffret offrait en 2006 64 emplois répartis entre dix-huit établissements non agricoles, neuf exploitations agricoles professionnelles et la fonction publique (école, mairie, communauté de communes)[119]
Les services et le commerce[120] sont représentés en 2008[121] par un magasin d'alimentation générale, une boucherie-charcuterie, un café-tabacs-journaux, un garage de réparations de véhicules automobiles, un assureur, deux électriciens-plombiers-chauffagistes et un carreleur. La Poste assure une permanence bi-hebdomadaire et il y a quelques services publics[122]. Cet équipement correspond à celui d'un village rural français de cette taille. L'industrie et la construction[123] sont notamment représentés par lachaudronnerie industrielle (deux établissements).
L'usine hydroélectrique de Saint-Herbot[125] se situe sur le territoire de Loqueffret[126]. Dès 1910, la création d'une « station électrique » est évoquée dans le cadre de l'électrification des campagnes de la Bretagne intérieure[127]. Au début des années 1920, la décision est prise. Alexandre Kerautret, Désiré Livinec et Jean et Armand Tréanton créent alors la "Société hydro-électrique des Monts d'Arrée" afin de procéder à deux aménagements d'importance[127] : la régularisation du cours de l'Ellez, qui a eu pour conséquence la création d'abord du barrage de Saint-Herbot dans la décennie 1920 qui entraîne la création du petit lac artificiel de Saint-Herbot, puis du barrage de Nestavel qui entraîne la création d'un lac artificiel de500ha dénomméRéservoir de Saint-Michel[128] en amont du conduit d'alimentation via un barrage de 9 mètres de hauteur, dont la construction a conduit à l'assèchement de la cascade de Saint-Herbot, « la plus belle de Bretagne[129] », « magnifique[130] » curiosité touristique locale qui, jusqu'à sa disparition, dévalait sur 200 mètres de longueur et 70 de hauteur unchaosgranitique imposant, lequel est aujourd'hui toujours visible. Installée au pied du chaos, à l'orée du Bois du Rusquec, la centrale ouvre en 1928. Contestés par une partie de la population locale concernée par les expropriations, ces projets seront approuvés par les Chambres de commerce de Brest et de Morlaix et la Commission départementale des sites et des Monuments. Le bâtiment de l'usine hydroélectrique est construit en 1922 par l'architecteCharles Chaussepied.
Laconduite forcée, de 336 mètres de longueur de 2,2 de diamètre, crée une chute de 118 mètres qui alimente troisturbines Francis de 3, 2 et 1mégawatts. La plus ancienne des sept usines hydroélectriques bretonnes fournit chaque année environ 13 millions dekilowattheures, soit de quoi alimenter environ 3 500 habitants[131]. Cette mini-centrale est surnommée localement par dérision la « pissotière ». Elle est exploitée par la SHEMA (Société hydraulique d'études et de missions d'assistance), filiale à 100 % d'EDF via l'EDEV, dont elle est l'aménagement le plus important[132]. La concession a été renouvelée pour 45 ans en août 2006[132].
Il convient de signaler que lacentrale nucléaire dite de Brennilis est située principalement sur le territoire de Loqueffret, mais à quelques kilomètres du centre bourg. Elle est plus proche du centre de Brennilis. La commune de Loqueffret en a retiré pendant longtemps des avantages pécuniaires.
L'école de Loqueffret, accueillant des CM1 et CM2, en 2007.
Loqueffret dispose des équipements publics habituels d'unecommune française de 400 habitants (mairie, école, quelques équipements sportifs), ainsi que du siège deMonts d'Arrée Communauté.
Les services administratifs communaux sont regroupés au sein d'un bâtiment construit à la fin des années 1980 place de la mairie : on y trouve la mairie, la Poste et le siège de Monts d'Arrée Communauté.
À la suite de la baisse du nombre d'élèves dans leurs écoles primaires, Brennilis et Loqueffret ont décidé d'opérer unregroupement pédagogique intercommunal du primaire public, afin d'avoir des classes plus homogènes. Loqueffret accueille depuis la rentrée 2004 les maternelles de la commune et lesCM1 etCM2 des deux communes dans un bâtiment construit pour l'occasion. À partir de la rentrée 2008, lesCP y sont également regroupés[138]. Unregroupement pédagogique intercommunal (RPI) est créé pour la rentrée 2010 entre les trois communes deLa Feuillée,Brennilis et Loqueffret.
Loqueffret dispose d'un boulodrome et de deux terrains de tennis extérieurs sur ciment. La salle polyvalente sert avant tout aux particuliers et aux associations.
Le patrimoine bâti de Loqueffret est avant tout marqué par l'héritage religieux (calvaires,église,chapelles) et féodal (manoirs), les sites archéologiques et les forges ne subsistant plus qu'à l'état de traces. Le patrimoine culturel est marqué par les chiffonniers, et de nouveau la religion (pardon). Le patrimoine naturel, lui, est lié à la localisation de Loqueffret dans lesmonts d'Arrée.
L'église Sainte-Geneviève, au centre du bourg de Loqueffret, a été construite à partir de la fin duXVe siècle[140]. En forme deTau, bâtie en granit, de style gothique, elle possède deux grandes entrées : son portail Ouest pleincintre et leporche Sud, aux niches intérieures comprenant autrefois les statues des douze apôtres. Son toit est enardoise. Sonclocher, plusieurs fois reconstruit, a été achevé dans sa forme actuelle en 1771, saflèche en 1850.
Son calvaire, construit à la fin duXVe siècle, qui a pour socle unetable d'offrandes[142] et unbénitier, porte au premier croisillon uneVierge etJean, au second des larrons qui ont disparu, alors que la croix, le largetitulus et le crucifix existent encore[143]. Le cimetière, situé légèrement à l'Est, agrandi lors du transfert du cimetière de l'église, possède deux calvaires, l'un de la fin duXVe siècle, portant des personnages[144], l'autre daté de 1647, pourvu de deux croisillons et d'une croix fleuronnée[143].
Le doyen des 9ifs qui entourent l'église (il a 3,15 mètres de circonférence à 1,30 mètre du sol) est peut-être contemporain du calvaire qui date de 1573[145].
Située dans le bois de Bodriec, à l'extrême sud-ouest de Loqueffret, la chapelle de la Croix, bâti pour la famille de La Marche, propriétaire du manoir de Bodriec[146], est une chapelle duXVIe siècle (1522), « conforme au type général des chapelles rurales de Bretagne : destyle gothique, elle présente un plan rectangulaire sanstransept, terminé par un chevet à trois pans[147] ». Unclocheton à dôme a été rajouté en façade en 1697, époque à laquelle le chevet a été remanié. Elle fait l'objet d'un pardon annuel. Le, elle a été profanée et incendiée[148]. Les travaux de restauration se sont achevés en 2009.
Un calvaire à trois degrés de 1576 jouxte la chapelle. Il porte sur le premier croisillon des statues géminéesMarie-Madeleine etPierre, au centre, uneVierge de la Pitié, le second croisillon portaient unbon et unmauvais larron, seul le dernier est aujourd'hui conservé. La croix a disparu[143]. L'ensemble de la chapelle compte également une fontaine de dévotion duXVIIIe siècle[149].
On trouve également au Rusquec un calvaire supportant un groupe formé des trois croix, de laPietà et des Saintes femmes, s'élevant au-dessus d'un fût en forme de tronc d'arbre avec base polygonale[153], classé en 1927. « Ensemble exceptionnel dans ce secteur du Finistère et à l'échelle de ce secteur des monts d'Arrée », il a « un statut patrimonial majeur[154] ».
Charles Le Goffic a écrit au sujet du Rusquec : « Le Rusquec est justement au beau milieu d'un (...) chaos, entre la cascade de Saint-Herbot et les landes désolées de Loqueffret, sur un grandkeep boisé où des ormes, des chênes et des hêtres qui ont vu les croisades et la chevalerie entretiennent une humidité perpétuelle : si l'on est point céans dans un tombeau, on y fait du moins l'apprentissage de l'Au-Delà[155]. » La légende, quant à elle, dit que la propriété était habitée par le géant Guévrel[129].
« Tou à coup le manoir se dresse dans toute sa robuste structure, coiffé de lierre et de mousse. C'est un bâtiment ancien qui a dû voir des révolutions et des siècles ; la guerre et le temps ont quand même fait quelques brèches au mur percé de meurtrières et vraiment le donjon qui subsiste encore est bien dans son cadre. (...) Une magistrale porte est encastrée dans une ogive de pierre où court un reste de frise. (...) Une vasque de pierre où le cheval de Troie, s'il avait été de chair et d'os, eût aisément pu s'abreuver,(...) attire son attention. Elle a trois longueurs d'hommes dans son diamètre et sa hauteur dépasse cinq pieds. Un énorme chêne y trempe ses dernières feuilles, cuivrées et desséchées. C'est le seul arbre du Rusquec, mais ses branches couvriraient toute une génération tant elles sont étendues. Sur l'aile gauche de la bâtisse une poivrière donne comme un secret. On a du s'en servir autrefois comme oubliette car aucune ouverture n'y est apparente. Un lierre nerveux l'entoure de se sreplis et de ses touffes épaisses. (...) À gauche encore, un mur croule au pied d'un bouleau naissant (...)[156]. »
Un ancien pont en dalles monumentales degranit sur l'Éllez, reliant Kermarc, lieu-dit du Nord de Loqueffret, à Cosforn, lieu-dit du Sud deBrennilis au gué de Mardoul[158]. Cet ouvrage « intéressant et rare », « difficile à dater », est en très mauvais état, bien qu'appartenant à la commune. Les différents tumulus sont pour la plupart détruits ou très dégradés ; les « manoirs », délaissés, revendus, « tombèrent en ruine au cours des siècles » (tels ceux de Bodriec et Quistillic)[80].
Un ancien pavillon de chasse situé au lieu-ditManoir de Kerguéven et construit au début duXXe siècle[159].
Le monument aux morts taillé dans la pierre de Kersanton, simple et modeste, de forme pyramidale, il est surmonté d'une croix. Il fut inauguré en juillet 1921[160].
Grâce à son inscription dans lesmonts d'Arrée (plus vaste ensemble delandes atlantiques de France[3]), et plus précisément dans leYeun Elez (plus grand complexe detourbières de Bretagne, plus grand peuplement decastors et deloutres breton[3]), espaces originaux et diversifiés, le patrimoine naturel de Loqueffret est assez fortement protégé : la commune appartient auparc naturel régional d'Armorique, dont elle accueille deux musées[161], ainsi qu'à l'espaceNatura 2000 « Monts d'Arrée Centre et Est[3] ».
Le gué de Mardoul, ancien lieu préféré de baignade des Loqueffretois, possède également un petit chaos, dont certaines pierres gardent des traces de leur passé de rocher sacrificiel[163]. Le pic et la gorge de Run Du, entre Brasparts et Loqueffret, offrent un autre beau paysage[164].
La vie culturelle de Loqueffret est limitée aux fêtes, concerts et repas organisés par les associations (Bazhvalan, anciens combattants, Pilhaouriens, amicale des chasseurs, Troisième âge, etc.), généralement desfestoù-noz[165] ou unloto, tous événements qui prennent place dans la salle polyvalente. Le bourg accueille unfest-noz annuel grâce à l'association Bazhvalan. Lepardon de lachapelle de la Croix[166] a lieu annuellement, et est le dernier reste du fort ancrage de la religion catholique dans la région.
Un critérium cycliste ouverts aux professionnels, le Circuit des Pilhaouers, eut lieu à Loqueffret au moins de 1951 à 1969, et de grands noms du cyclisme breton figurent à son palmarès.Joseph Thomin détient le record des victoires: quatre, en 1951, 1954, 1955 et 1966[167],[168].Guy Daffniet l'emporta en 1956[169], chaque fois devantJean Bourlès, qui triompha les deux années suivantes[170],[168]. La course fut ensuite courue par les indépendants, d'anciens professionnels redevenus amateurs, puis par des amateurs hors-catégories, quand celle des indépendants fut supprimée, en 1965[171]. Parmi les vainqueurs figurent aussiGuy Ignolin (1967)[172] etFrançois Le Bihan (1969)[173]. La course, réservée aux amateurs, se déroula irrégulièrement jusque dans les années 1980.
Le collecteurLa Villemarqué a trouvé à Loqueffret une pièce de son recueil leBarzaz Breiz, comme le rappelle l'historienJoël Cornette: "En juillet 1835, il prend ainsi, à Loqueffret, sous la dictée d'une vieille femme de quatre-vingt-trois ans, habitante des bois du Rusquec, une version de lagwerz du marquis de Guerrand"[174].Vers 1860, le curé de Loqueffret, Toussaint Bodeur[175], écrit une chanson qui deviendra célèbre:Son ar pilhaouer (Le chant du pilhaouer), dans laquelle il donne de cette profession une vision peu flatteuse, répandue à l'époque:Marivonig zo dimezet / Gant ur flaerius pilhaouaer (bis) / E Lokeored ez eo ganet / E koumanant Toull-al-Laer. (Marivonig est mariée / A un chiffonier malodorant / C'est à Loqueffret qu'il est né / Au domaine congéable de Toull-a-Laer).Toull-al-Laer signifieLe Trou du Voleur, hameau qui n'existe pas à Loqueffret, mais ce toponyme fictif déprécie évidemment l'image du chiffonier. L'écrivainKerlann donna une version moins péjorative de ce chant:Me zo Laouik va ano / ‘Kreiz ar menez on ganet (bis) / Tu bennak ‘kostez ar C'hozhkêr /E parrezig Lokeored (Mon nom est Laouik / Je suis né au milieu de la montagne / Quelque part près du vieux village / Dans la petite paroisse de Loqueffret[176].
DansLa Légende de la mort chez les Bretons armoricains,Anatole Le Braz évoque "des êtres de stature et de puissance plus qu'humaines, comme ce Gewr, enseveli dans la montagne de Loqueffret, et qu'il fallut plier neuf fois sur lui-même pour l'y faire tenir tout entier[177]." Ce personnage a, de fait, donné son nom au rocher de Roc'h Begheor, qui se situe entre Loqueffret et Saint-Herbot, surplombant la vallée qui donne sur le bassin de Châteaulin, ainsi qu'au hameau de Blenguéor (Lein Gewr:colline de Gewr), situé en contrebas.
DansHerri Saoudua, poème bilingue publié dansManoir secret en 1964, Pierre-Jakez Hélias brosse le portrait d'unpilhaouer, un chiffonnier originaire de Loqueffret: "Sur le poil doré, le cul bien à l'aise, / Il trotte aujourd'hui de lune en soleil / Depuis Plougastel, où mûrit la fraise, / Jusqu'à Loqueffret, qui sent le méteil"[178].
Hervé Jaouen situe en partie l'action de son roman policierLa Mariée rouge à Loqueffret et Saint-Herbot: "Après Châteauneuf-du-Faou, ils prirent la route de Plonevez-du-Faou. Arrivés là, ils se dirigèrent vers Loqueffret. C'était le désert breton. Les maisons étaient rares, la circulation inexistante, hormis quelques tracteurs. [...] La Ford fit halte à Saint-Herbot, hameau de quelques maisons groupées, dans une anarchie typique d'un urbanisme révolu, autour d'une église insolite, au clocher carré, très anglican[179]". Un téléfilm dirigé parJean-Pierre Bastid a été tiré de ce roman en 1985[180].
En 1977, le dessinateurJean-Claude Fournier représente, à la p. 5 de l'albumL'Ankou, l'auberge de l'Elez, qui se situe à l'entrée de Saint-Herbot. L'action de cet épisode des aventures de Spirou et Fantasio se déroule à Brennilis et Loqueffret, les deux villages sur le territoire desquels a été installée une centrale nucléaire.
L'écrivainPascal Rannou y a vécu toute son enfance. Il est resté fortement imprégné de cet environnement, comme le montre son premier roman,Sentinelles de la mémoire.
Mari Kastellin (Marie de Chateaulin), de son vrai nom Marie-Anne Rolland, épouse de Jean Le Chalony, née à Loqueffret en 1845. C'est la plus connue des vendeuses de chansons. Elle habitait Quimperlé mais on la retrouvait dans tous les pardons, du pays bigouden au Trégor, chantant et vendant ses textes imprimés sur feuilles volantes, tractée par son attelage de chien.
↑Les moyennes interannuelles (écoulements mensuels) ont été calculées le 29/07/2024 à 02:06 TU à partir des 395 QmM (débits moyens mensuels) les plus valides du 01/08/1991 au 01/06/2024.
↑Les ruisseaux intermittents sont représentés en traits pointillés.
↑Les eaux continentales désignent toutes les eaux de surface, en général des eaux douces issues d'eau de pluie, qui se trouvent à l'intérieur des terres.
↑Population municipale de référence en vigueur au 1er janvier 2025, millésimée 2022, définie dans les limites territoriales en vigueur au 1er janvier 2024, date de référence statistique : 1er janvier 2022.
↑Ce qui n'a pas toujours été le cas : en 1846, huit lieux-dits comptaient entre 30 habitants et 50 habitants, et deux autour de 70, contre 80 pour le bourg.Clech et Penven 1996,p. 47-55
↑a etbDaniel Joly, Thierry Brossard, Hervé Cardot, Jean Cavailhes, Mohamed Hilal et Pierre Wavresky, « Les types de climats en France, une construction spatiale »,Cybergéo, revue européenne de géographie - European Journal of Geography,no 501,(DOI10.4000/cybergeo.23155).
↑Jacques Briard, Michel Le Goffic, Y. Onnée,Les Tumulus de l'Âge du Bronze des Monts d'Arrée, Institut culturel de Bretagne/Skol-Huel ar Vro. Laboratoire d'anthropologie-préhistoire (UPR CNRS 403) de l'université de Rennes I, 1994. Cité parClech et Penven 1996,p. 9
↑Bien que peu calorifère, ce combustible avait l'avantage d'être présent en grande quantité dans le grand marais duYeun Elez, et d'être facilement accessible aux paysans, étant localisé dans des terres vaines et vagues.
↑Chanoine Jean Moreau, "Histoire de ce qui s'est passé en Bretagne durant les guerres de la Ligue en Bretagne", consultablehttps://books.google.fr/books?id=5bsaAAAAYAAJ&printsec=frontcover&dq=Landeleau+histoire&source=bl&ots=BihIjQA9DA&sig=AWIpHydgqFXFNb0bTm50wTbz4CY&hl=fr&ei=bb-RTK6fF9jPjAf6tvSbBQ&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=4&ved=0CB0Q6AEwAziEAg#v=onepage&q=Landeleau&f=false
↑Lacarte de Cassini en signale un moyen à Bodriec et un petit au Rusquec.
↑a etbAdolphe-Laurent Joanne (dir.), « Loqueffret », dansDictionnaire géographique et administratif de la France et de ses colonies t. 4,Hachette, Paris, 1890, p. 2288
↑a etbCh. Delaveau, « Loqueffret », dansLa Grande Encyclopédie : inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts. Tome 22, Société anonyme deLa Grande Encyclopédie, Paris, 1885-1902, p. 544
↑Fanch Broudic, "L'interdiction du breton en 1902", Coop Breizh, 1997,(ISBN2-909924-78-5).
↑En vertu duConcordat, les prêtres étaient alors payés par l'État
↑Il n'y a plus que deux magasins d'alimentation, une boulangerie, une boucherie, un cordonnier et un charron mais un magasin de cycles a ouvert.Clech et Penven 1996,p. 67
↑Le solde migratoire redevient légèrement positif entre 1962 et 1968. Insee,Recensement de 1995
↑Solde migratoire très fortement négatif de 1968 à 1975, avec 137 départs, peut-être à la suite de l'arrêt de la construction de la centrale, puis assez fortement positif de 1975 à 1982, mais ne compensant pas le solde naturel très fortement négatif
↑Plus 48 habitants de 1990 à 1999, compensant les 41 décès
↑Adolphe-Laurent Joanne (dir.), « Saint-Herbot», dansDictionnaire géographique et administratif de la France et de ses colonies t. 6, Hachette, Paris, 1890, p. 4150-1
↑Qui n'a cependant pas eu lieu en 2008 à cause de l'incendie de la chapelle par des satanistes en juillet 2007. Anonyme, « Chapelle de la Croix : pas de pardon cette année - Loqueffret », dansOuest-France du 21 juillet 2008