Enastronomie, laloi de Hubble-Lemaître (anciennementloi de Hubble[a]) énonce que lesgalaxies s'éloignent les unes des autres à unevitesse approximativement proportionnelle à leur distance. Autrement dit, plus une galaxie est loin de nous, plus elle semble s'éloigner rapidement. Cette loi ne concerne que la partie de l'Univers accessible aux observations. L'extrapolation de la loi de Hubble-Lemaître sur des distances plus grandes est possible, mais uniquement si l'Univers demeurehomogène etisotrope sur de plus grandes distances.
Il s'agit là d'un mouvement d'ensemble des galaxies de l'Univers dont le principe fut prédit parGeorges Lemaître en 1927. À celui-ci se superposent lesmouvements propres acquis par les galaxies du fait de leurs interactionsgravitationnelles avec leurs voisines. Par exemple, laVoie lactée forme un système gravitationnellement lié avec lagalaxie d'Andromède qui ont toutes deux une orbiteelliptique très allongée qui fait qu'actuellement, la galaxie d'Andromède s'approche de nous. De même, la Voie lactée et la galaxie d'Andromède se rapprochent peu à peu dusuperamas de la Vierge. Néanmoins, au-delà d'une certaine distance, le mouvement général d'expansion l'emporte sur les mouvements propres, et toutes les galaxies lointaines s'éloignent de nous.
La loi de Hubble-Lemaître tire son nom de l'astronomeaméricainEdwin Hubble qui la publia en1929. Elle fut la première preuve de l'expansion de l'Univers, un phénomène générique prédit par larelativité générale, et duBig Bang, lemodèle cosmologique qui en résulte le plus naturellement. Hubble découvrit cette loi en observant undécalage vers le rouge presque systématique dans lesgalaxies dont il avait découvert auparavant la nature exacte à l'aide de l'observation d'un certain type d'étoiles variables, lescéphéides. Ces étoiles sont sujettes à des variations de luminosité dont lapériode est reliée à la luminosité absolue suivant une loi établie par l'astronomeHenrietta Leavitt au début duXXe siècle. L'observation de la période de variation des céphéides dans une autre galaxie permettait ainsi de déduire leur distance relative. La vitesse de fuite de ces mêmes galaxies était, elle, mesurée par l'observation d'undécalage vers le rouge de leurspectre, effet interprété comme étant dû à leur mouvement de fuite (voireffet Doppler-Fizeau).
C'est en comparant ce décalage à la distance de ces galaxies, qu'il trouva une relation linéaire entre les deux, annoncée en1929[2]. Pour cette raison, la paternité de la loi de Hubble-Lemaître est généralement attribuée à Edwin Hubble. Cependant, deux ans plus tôt,Georges Lemaître avait prédit l'existence de cette loi en étudiant un type de modèle issu de la relativité générale. Dans son article écrit en français et publié dans lesAnnales de la société scientifique de Bruxelles, il indique clairement que cette loi qu'il a prédite est vérifiée par les observations dont il dispose (pour la plupart œuvres de Hubble etGustaf Strömberg)[3]. Étant publié en français, et publié en anglais seulement en1931 parArthur Eddington, soit après la publication des résultats de Hubble, ce résultat de Lemaître est resté inaperçu, d'autant que la traduction anglaise de son article publiée par Eddington est étrangement amputée de la phrase clé qui énonce la relation[4]. Il a cependant été prouvé depuis, parMario Livio, que Lemaître avait traduit lui-même sa publication en anglais, et s'était donc auto-censuré pour éviter une polémique liée à cette découverte, en laissant donc l'honneur de la découverte à Hubble[5].
En, les membres de l'Union astronomique internationale approuvent la résolution recommandant d'appeler loi de Hubble-Lemaître la loi décrivant l'expansion de l'univers, en rappel du rôle joué par Georges Lemaître dans la découverte de cette loi[6].
Lavitesse de récessionapparentev d'une galaxie étant déduite de laformule Doppler et sadistanced mesurée par les céphéides, la loi de Hubble-Lemaître s'écrit simplement
,
où est laconstante de Hubble, la lettreH étant bien sûr utilisée en l'honneur de Hubble. L'indice 0 est utilisé pour indiquer la valeur de la constante à l'instant présent. Celle-ci en effet n'est pas constante et diminue très rapidement dans le temps. Cependant, depuis quelques milliards d'années, le facteur d'échelle d augmente plus vite que H diminue, donc il y a accélération de l'expansion.
On peut le cas échéant remplacer lavitessev par sa valeur déduite du décalage vers le rougez et la vitesse de lalumièrec pour obtenir
.
Ces deux lois ne sont valables que pour de faibles valeurs de la vitesse, donc pour des distances relativement faibles. On sait de nos jours que l'interprétation du décalage vers le rouge en termes d'effet Doppler n'est pas correcte physiquement puisque l'augmentation de distance au cours du temps entre deux galaxies n'est pas due à la vitesse des galaxies dans un espace fixe mais plutôt à un étirement de l'espace lui-même, les galaxies restantfixes dans cet espace. Il faut donc faire une analyse différente. On trouvera plus loin des détails sur l'interprétation physique de la loi de Hubble-Lemaître et lesmodifications à la loi de Hubble-Lemaître qui en résultent.
Interprétation physique de la loi de Hubble-Lemaître
Si l'on se restreint à l'application de la loi de Hubble-Lemaître dans l'univers local (quelques centaines de millions d'années-lumière), alors il est tout à fait possible d'interpréter la loi de Hubble-Lemaître comme un mouvement des galaxiesdans l'espace. Néanmoins, la loi énonçant une vitesse de récession apparente proportionnelle à la distance, son extrapolation conduit à conclure que des galaxies suffisamment lointaines s'éloignent de nous à une vitesse plus grande que lavitesse de la lumière, en contradiction apparente avec larelativité restreinte. De fait, ce n'est pas dans le cadre de la relativité restreinte que l'on doit appliquer la loi de Hubble-Lemaître, mais celui de larelativité générale. Celle-ci stipule entre autres que le concept de vitesse relative entre deux objets (deux galaxies distantes, par exemple), est un concept purement local : on ne peut mesurer la différence de vitesse entre deux objets que si leurs trajectoires sont « suffisamment proches » l'une de l'autre. Il convient bien sûr de préciser ce dernier terme, qui en l'occurrence dit essentiellement que la notion de vitesse relative n'a de sens que dans une région de l'espace-temps qui peut être correctement décrite par unemétrique de Minkowski. Il est en effet possible de montrer (voirExpansion de l'Univers) que l'échelle de longueur au-delà de laquelle on ne peut plus décrire localement un espace en expansion par une métrique de Minkowski est précisément lerayon de Hubble, soit la distance au-delà de laquelle les vitesses de récession apparentes sont précisément relativistes.
L'interprétation en termes de mouvement dans l'espace décrit par la relativité restreinte devient donc précisément invalide au moment où surgit le paradoxe d'une vitesse de récession supérieure à la vitesse de la lumière. Ce paradoxe est résolu dans le cadre de la relativité générale qui permet d'interpréter la loi de Hubble-Lemaître non pas comme un mouvementdans l'espace, mais une expansionde l'espace lui-même. Dans ce cadre-là, le postulat d'impossibilité de dépassement de la vitesse de la lumière fréquemment (et improprement) employé en relativité restreinte se reformule de façon plus exacte en énonçant qu'aucun signal ne peut se déplacer à une vitesse supérieure à celle de la lumière, les vitesses étantlocalement mesurées par des observateurs dans des régions où l'espace peut être décrit par la relativité restreinte (soit à petite échelle).
La valeur de la constante de Hubble est aujourd'hui (2013) mesurée à 70 km s−1 Mpc−1 (70kilomètres parseconde et parmégaparsec), avec une incertitude d'environ 10 % (soit 7 km s−1 Mpc−1)[7],[8]. Ce résultat est obtenu de façon cohérente par de nombreuses méthodes :
la méthode historique de Hubble à l'aide de céphéides ;
l'étude des décalages des fluctuations de luminosité des images multiples desquasars dont plusieurs images sont produites par des effets delentille gravitationnelle.
Voir Article détailléSaul Perlmutter (Nobel de physique 2011)
Tant que l'on considère des galaxies dont la vitesse de récession est faible, leur distance à un observateur varie peu entre le moment où elles émettent leur lumière et le moment où celle-ci est reçue par l'observateur. De même, tant que le temps de propagation du signal lumineux est petit devant le temps caractéristique de l'expansion, letemps de Hubble, la vitesse de récession et le taux d'expansion varient peu sur cet intervalle. Ainsi, il n'y a pas d'ambiguïté dans la définition desquantitésv,, etd. À grande distance, il convient de préciser ce que l'on entend par distance, et vitesse de récession. De plus, rien ne garantita priori que la relation linéaire mentionnée plus haut reste valable. Il existe en fait des corrections à la loi de Hubble-Lemaître. Celles-ci jouent un rôle crucial en cosmologie car elles permettent en principe de reconstituer directement l'histoire récente de l'expansion.
Si l'on appelled la distance qui nous sépare actuellement de la galaxie observée, on peut montrer que pour des décalages vers le rouge modérés, ces deux quantités sont reliées par la formule[9]
où représente l'élément de longueur encoordonnées comobiles, par rapport auxquelles les galaxies ont un mouvement négligeable. Cette relation peut se réécrire en introduisant letemps conforme en :
.
Un photon est une particule de genre lumière, sa propagation se fait selon
,
ce qui s'écrit immédiatement :
,
c'est-à-dire que la distance en coordonnées comobile de la galaxie est exactement égale à l'intervalle en temps conforme. La distance physique se déduisant de la distance comobile par la formule
,
la distance de la galaxie peut s'écrire
,
où l'on précise que le facteur d'échelle aujourd'hui est évalué à la valeur actuelle du temps conforme,. De plus, le facteur d'échelleau moment de l'émission de la lumière de la galaxie est relié à la valeur actuelle et au redshift par la formule
,
mais cette formule correspond aussi à la valeur du facteur d'échelle à l'époque où le temps conforme valait. On a donc
.
Il suffit désormais d'effectuer un développement limité de cette expression. On pose
.
D'après la définition du temps conforme, les dérivée par rapport à celui-ci se relient à celles par rapport autemps cosmiquet par
En développant le terme de gauche enz et en ne gardant que les termes d'ordre 2 enz et end, on trouve finalement
Cette relation est importante car elle permet de mesurer le paramètre de décélération et par suite déduire la pression moyenne des différentes formes de matière qui composent l'univers.
En pratique, laquantitéd n'est pas mesurable directement. Ce que l'on mesure, c'est soit la distance obtenue en comparant la luminosité apparente d'un astre à sa luminosité intrinsèque supposée connue, (on parle alors dedistance de luminosité), soit la distance obtenue en mesurant sondiamètre apparent, sa taille réelle étant dans ce cas supposée connue,(on parle alors dedistance angulaire). Dans ce cas, on exprime généralement les distances en fonction duredshift et non le contraire, et les formules s'écrivent :
En l'absence decourbure spatiale, ces deux distances se déduisent ded par les formules
,
.
En remplaçantd par l'une ou l'autre de ces expressions dans la formule trouvée précédemment, on trouve immédiatement les résultats énoncés.
En pratique pour des objets lointains, on n'utilise pas les formules ci-dessus, qui ne sont valides que pour des petits décalages vers le rouge. Voir les articlesdistance angulaire etdistance de luminosité pour plus de détails.
↑L'appellation « loi de Hubble-Lemaître » est recommandée par l'Union astronomique internationale, mais elle est contestée sur des bases historiques, scientifiques et philosophiques[1].