Dans les années 1960, la seconde avant-garde russe soviétique non officielle et le postmodernisme russe ont vu le jour. En 1965-72, àLeningrad, existait le groupe de poésie et d'écriture avantgardiste absurde « Khelenkouts », qui comprenait entre autres Vladimir Erl et Aleksandr Mironov. Depuis les années 70, il existe des mouvements postmodernes non officiels tels que leconceptualisme moscovite, avec des éléments depoésie concrète.Arkadi Dragomochtchenko est considéré comme le principal représentant des poètes d'avant-garde dans la littérature russe.
La littérature vieux-russe se constitue de rares ouvrages écrits en vieux-russe comme l'anonymeDit de la campagne d'Igor (Слово о Полку Игореве). Lesbylines, épopées orales, ont mélangé les traditions païennes et chrétiennes, dans lesquelles l'influence de lalittérature byzantine se fait sentir. Lalittérature médiévale russe est écrite en slavon avec une très forte thématique religieuse. Le premier ouvrage en russe courant, l'autobiographie de l'archevêqueAvvakoum, ne voit le jour que vers le milieu duXVIIe siècle.
Son court règne (1598-1605) ouvre leTemps des troubles (смутное время), pendant lesquels desboyards se succèdent auKremlin. Le désordre politique s'accompagne d’une famine et d’unecrise économique sans précédent, mais du point de vue culturel, ce temps chaotique est riche. Sous l'impulsion de larépublique des Deux Nations (Pologne etLituanie), la Russie s'ouvre au monde extérieur.
L'incertitude (Fédor II,Faux Dimitri,Vassili IV Chouiski,Ladislas IV Vasa) s'achève en 1615, après l'élection d'untsar en 1613 :Michel III Romanov, premier représentant de la longue dynastieRomanov[4]. À la fin duXVIIe siècle, son filsAlexis, Алексей Михайлович « le très paisible », lui succède. Son long règne (1645-1676) est marqué par de nombreuses réformes et l'apparition duraskol (schisme religieux). Sa deuxième femme,Natalia Narychkina (1651-1694, mère dePierre le Grand (1672-1725)) s'intéresse beaucoup à ce qui se passe en Europe et exerce une grande influence sur son mari. Elle introduit en particulier lethéâtre occidental et met en place une troupe permanente.
Dans un pays en grande partieanalphabète, Pierre le Grand fonde le premier journal russe (gratuit), « Ведомости » (Les Nouvelles). Une réforme de l’alphabet simplifie les caractères cyrilliques, en s'inspirant de l'alphabet latin[5]. En outre, de nombreuses écoles et institutions sont créées : l’Académie de Marine, l’École du Génie, l’École de Médecine de Moscou, l’Académie des Sciences, ainsi que le premier musée de Russie : laKunstkamera, située à côté dupalais d'Hiver.
Cependant, Pierre le Grand ne nourrit pas un intérêt profond pour la littérature et l’art. C’est avant tout quelqu’un de pratique, comme l’attestent ses réformes sur les académies ou l’administration en général. De même, les premiers livres imprimés en caractères cybiles sont des guides pratiques concernant l’art militaire, ou encore un manuel de correspondance.
Sous Pierre le Grand, les chansons d’amour sont tolérées, ce qui est un changement essentiel. En effet, l’amour devient « autorisé », victime autrefois des désignations les plus dures. Ses chansons reprennent la tradition orale avec son système stylistique, ses images, et la poétique nouvelle dulyrisme européen.
On autorise également la littérature narrative : apparition de récits d’aventure, qui ne sont autres que des imitations de romans de chevalerie. Les « Повести » sont le plus souvent des adaptations au contexte russe de récits étrangers. On retrouve même des caractéristiques du conte populaire.
Le héros traditionnel de ces ouvrages est généralement un noble russe entreprenant, courageux, audacieux, et attiré par l’Occident: idéal de l’homme nouveau, pour l’élite. Un exemple en est l’Histoire du marin russe Vassili Kariotsky et de la belle reine Iraklia de la terre Florentine. L’aventure se passe à l’étranger, dans le ton du merveilleux (il devient roi de la terre florentine et épouse la reine). Le choix d'un marin comme héros dénote une certaine modernité (la flotte russe existe depuis très peu).
C'est finalement cette solution qu'adopte Lomonossov en 1755 avec la premièreGrammaire russe. Il s’agit là de la première normalisation de la langue. La langue russe écrite emprunte par ailleurs à l'étranger de nombreux termes techniques. Le vocabulaire de la marine est ainsi emprunté aunéerlandais, le vocabulaire militaire à l'allemand, et les termes conceptuels proviennent souvent dufrançais.
Au tournant du siècle, l'historienNikolaï Karamzine (1766-1826), « leTite-Live de la Russie », créateur (avec Mikhaïl Mouraviov) de la prose russe moderne, écrit sonHistoire de l'État russe (depuis les temps les plus reculés jusqu’en 1611) (1816-1829).
On traduit par ailleurs de plus en plus de romans occidentaux qui suscitent réflexion, comme les romans de l'abbé Prévost (à l’origine du premier débat littéraire en Russie),Madame de Scudéry,Scarron ouLesage.
Le débat prend une dimension importante. Différentes sensibilités s'affirment :
Les conservateurs, qui l'emportent dans un premier temps le débat : le poèteAlexandre Soumarokov (Cyмapоков) explique que « lire des romans est une inutile et regrettable perte de temps ».Mikhaïl Kheraskov (Xepaсков) ajoute qu'« on ne tire pas profit de la lecture des romans ».
Les opposants : Porochine (traducteur de l’abbé Prévost entre autres) argumente que les romans à l’européenne jouent un rôle social. Le succès grandissant des traductions entraîne l'apparition de romans russes qui auront beaucoup de succès.
Fédor Emine(ru) (1735-1770) est le premier romancier en langue russe, bien que d'origine étrangère. Il combine les modèles d’intrigues les plus répandus en les russifiant, et use d'un style médiocre. Mais ses romans comblent l'attente du public russe naissant et rencontrent un réel succès. Ses romans, dont le plus connu est « La fortune inconstante » (1763), proposent une sorte de mélange fantastique/réel, des amours difficiles, les poncifs du roman d’aventure, mais aussi des tableaux réalistes des mœurs de l'époque. Le fait que ces romans aient été écrits directement en russe explique pour une part leur succès. L'auteur affirme également que certaines aventures lui sont arrivées personnellement, facilitant la réception du lecteur.
Mais l’exemple de l'écrivainMikhaïl Tchoulkov(ru) (1744-1792) reflète bien un certain paradoxe. Plutôt conservateur, il considère l’écriture de roman comme une activité insignifiante. Il est cependant intéressé par le fait que la langue d'Emine soit familière, et il écrit lui-même dans le parler contemporain de Moscou. Ce fait révèle le besoin d'élaborer une langue écrite adaptée à la réalité de la Russie contemporaine.
La littérature russe reste beaucoup influencée dès cette époque par la littérature occidentale, comme le démontreStefan Zweig dans sonessai :Trois maîtres,Dostoïevski,Balzac,Dickens[6] ainsi que Michel Cadot dansLa Russie entre Orient et Occident[7].La noblesse, la bourgeoisie et la classe élevée parlaient le français, comme une langue maternelle.
Après larévolution d'Octobre, de nombreux écrivains russes s'exilent, notamment àBerlin, puis àParis, où de nombreusesrevues littéraires en russe sont éditées (La Pensée russe). En 1921, Nikolaï Goumilev, mari d'Akhmatova, est exécuté pour activités pro-impériales.
Mais avec le démarrage de laNEP, une relative liberté est accordée aux écrivains, et certains exilés choisissent de revenir en Russie (Victor Chklovski,Andreï Biély, et plus tard,Maxime Gorki).
La vie littéraire reprend tant bien que mal, malgré les tracasseries du pouvoir et la précarité de l'économie. Des groupes tels que lesFrères Sérapion ou le mouvement de l'Oberiou essaient de renouveler l'esthétique du roman ou de la poésie. Une certaine critique de la société trouve même droit de cité, comme dans les romans satiriques deIlf et Pétrov ouL’Envie deIouri Olecha (1927).Mikhaïl Cholokhov publieLe Don paisible qui lui vaudra leprix Nobel de littérature en1965.
L'arrivée au pouvoir suprême deJoseph Staline en 1930 marque la fin de la relative liberté accordée aux écrivains russes par le pouvoir bolchévique. Une esthétique officielle se met en place : leréalisme socialiste. Cette doctrine littéraire est simple, il s'agit d'utiliser le talent des écrivains pour vanter les mérites et les réussites du régime ainsi que pour expliquer la propagande officielle. Le régime s'occupe d'organiser la vie littéraire et l'orientation des thèmes via l'Union des écrivains soviétiques qui relève directement du commissaire politiqueAndreï Jdanov. Toutefois laLiteratournaïa gazeta (Gazette littéraire) garde une relative indépendance d'esprit.
Dans l'URSS d'après Staline, le socialisme réel reste le seul style littéraire autorisé mais les auteurs publiant sous samizdat ont plus de libertés. Surtout les auteurs peuvent vivre de leur travail et craignent moins la répression et l'internement. Les premiers récits concernant legoulag commencent à circuler en samizdat, tels ceux du prix NobelAlexandre Soljenitsyne ou deVarlam Chalamov.Venedikt Erofeïev continue son travail de publication par samizdat.
Dans la période de déclin de l'Union soviétique, les Russes émigrés reçoivent en Occident une reconnaissance assez forte tels le prix NobelJoseph Brodsky ou lenouvellisteSergueï Dovlatov. Leur œuvre n'est alors connue en URSS que parsamizdat.
Il faut attendre la politique deperestroïka entamée à la fin du desannées 1980 pour que des écrivains dissidents soient officiellement publiés en Russie.
L'écrivainVladimir Nabokov représente un cas à part : Russe de Saint-Pétersbourg, il devient Américain par la suite. Il commence sa carrière en exil à Berlin et écrit en russe, puis en anglais.
La poule aux œufs d'or de l'édition russe est, comme partout ailleurs, la littérature policière. Les polars empreints d'ironie deDaria Dontsova (1952-) connaissent un grand succès. Les 50 romans policiers qu'elle a pour l'instant écrits se sont vendus à des millions d'exemplaires et sont traduits dans plusieurs pays européens.
Un certain nombre d'écrivains russes sont désormais populaires en Europe occidentale et en Amérique du Nord, tellesTatiana Tolstaïa (1951-) ouLioudmila Oulitskaïa (1943-). Les polars deBoris Akounine (1956-) avec son personnage féticheEraste Pétrovitch Fandorine sont publiés en Europe et en Amérique du Nord.Alexandra Marinina (1957-), la plus grande écrivain de romans policiers enRussie a réussi à exporter ses livres en Europe et a bénéficié d'un grand succès enAllemagne.
La littérature plus traditionnelle trouve aussi un nouvel essor avec des auteurs venus de régions éloignées commeNina Gorlanova (1947-) dePerm avec ses histoires sur les difficultés quotidiennes et les joies de l'intelligentsia provinciale ou encoreYouri Rytkhéou (1930-2008) de laTchoukotka qui raconte les problèmes identitaires desTchouktches.
Des auteurs tels queDmitri Gloukhovski (1979-) ouSergueï Loukianenko (1968-) connaissent un succès avec leurs romans de science-fiction qui ont même été adaptés en films ou jeux vidéo.