Aux élections locales de mars 1920, les communistes obtiennent la majorité dans différentes villes, commeZagreb,Osijek,Slavonski Brod,Križevci etPodgorica. Le gouvernement, inquiet de ces succès, ne valide pas les victoires électorales et emprisonne des dirigeants du parti, qui entrent engrève de la faim. Les succès électoraux suscitent la naissance de nouveaux groupes communistes locaux, comme enSlovénie. De nouvelles victoires électorales sont remportées enSerbie et enMacédoine àBelgrade,Skopje etNiš. Le gouvernement refuse à nouveau de les reconnaître. Enfin, aux élections législatives du, les communistes obtiennent 12,36 % des voix, et 58 des419 sièges de l'assemblée constituante[6].
Le parti a entre-temps connu un conflit interne entre centristes et révolutionnaires : ces derniers, conduits par Filipović, l'emportent et, au deuxième congrès en, rebaptisent le parti du nom deParti communiste de Yougoslavie. Les centristes quittent le parti, dénonçant les tendances révolutionnaires et s'unissant aux sociaux-démocrates.
Dans la nuit du 29 au, soit un mois après le succès des communistes aux élections, le gouvernement interdit le parti communiste, officiellement jusqu'à l'adoption de la nouvelle constitution. Les possessions du parti sont saisies, et plusieurs dirigeants arrêtés. Le Parti communiste de Yougoslavie forme en juin 1921 une direction clandestine, pour continuer ses actions dans l'illégalité. Certains communistes réagissent en formant l'organisationterroristeCrvena Pravda (Vérité rouge), qui rate un attentat contre lePrince régent Alexandre, mais parvient à assassiner le ministre de l'intérieurMilorad Drašković, auteur de l'acte d'interdiction du parti. Le parlement émet aussitôt une loi interdisant de manière définitive le parti communiste. Tous les députés du parti sont arrêtés, de même qu'environ 70 000 militants.
Le parti continue d'exister illégalement, mais sa direction est divisée. En 1923, la tendance de gauche l'emporte etTriša Kaclerović devient le chef de la direction clandestine. Le parti développe la formation de ses cadres et infiltre des syndicats. L'internationale communiste demeure cependant opposée à un mouvement communiste yougoslave unitaire, préférant la séparation du pays et la création d'États croates, slovènes et macédoniens indépendants. La faction deBelgrade, dirigée parSima Marković, s'oppose au contraire à la dislocation de la Yougoslavie. Le conflit n'est toujours pas réglé en 1928 : le croateĐuro Đaković, soutenu par la faction deZagreb dirigée parJosip Broz etAndrija Hebrang, en appelle auKomintern, qui met en place une nouvelle direction, composée de Jovan Mališić et de Đaković.
Le, le roiAlexandreIer instaure un régime dictatorial. Les communistes tentent une insurrection armée, qui échoue. Une partie des dirigeants du mouvement, dont Đaković, sont tués. En, le comité central s'installe àVienne et perd le contact avec les communistes restés au pays.
À partir de 1932, le Parti communiste reconstitue son appareil, s'éloignant des directives duKomintern. À la fin 1934, la direction du parti renoue le contact avec les militants restés en Yougoslavie : le parti, toujours clandestin, compte environ 3 000 membres. En juin 1935, le Parti communiste abandonne son projet de séparation de la Yougoslavie, pour soutenir le droit à l'autodétermination des différentes nationalités yougoslaves. Mais le regain d'activité communiste entraine de nouvelles arrestations : en 1936, de nombreux cadres sont emprisonnés. Le Komintern nomme alors une nouvelle direction du parti :Milan Gorkić devient secrétaire général, tandis queJosip Broz est chargé de l'organisation. Les chefs du parti yougoslave demeurés àMoscou sont victimes desGrandes Purges deStaline. Josip Broz, qui utilise les pseudonymes deWalter et deTito, devient en mars 1939 le secrétaire général du parti et réorganise son appareil.
Enavril 1941, l'Allemagne nazie et ses alliésenvahissent la Yougoslavie et en démembrent le territoire. Le Parti communiste commence à s'organiser : après l'invasion de l'Union soviétique, ils passent à l'action.Tito forme le mouvement desPartisans qui affronte les occupants au cours d'une intense guerre de résistance, se battant également contre le mouvement monarchiste et serbe desTchetniks. Les communistes fondent avec d'autres partis politiques leFront de libération populaire, lequel se dote en novembre 1942 d'un organisme politique représentatif, leConseil antifasciste de libération nationale de Yougoslavie (Antifašističko V(ij)eće Narodnog Oslobođenja Jugoslavije, ou AVNOJ), qui se proclame parlement du pays. Fin novembre 1943, l'AVNOJ tient sa deuxième session àJajce et proclame lafédération démocratique de Yougoslavie, conçue comme un État fédéral respectueux des nationalités yougoslaves - au contraire du royaume de Yougoslavie, dominé par lesSerbes - mais visant à restaurer et maintenir l'unité du pays. Tito est proclamé chef du gouvernement provisoire, leComité national pour la libération de la Yougoslavie.
À partir de la fin 1943, les Partisans reçoivent le soutien militaire desAlliés et supplantent les Tchetniks comme force de résistance. Des pans entiers du territoire sont libérés et, en, les communistes contrôlent l'intégralité du territoire yougoslave.
Après-guerre, le Parti communiste interdit les partis formés avant la guerre. Huit des mouvements politiques autorisés forment avec lui leFront populaire de Yougoslavie (Narodna fronta Jugoslavije), qui remporte les élections de la fin 1945. La République est ensuite proclamée : Tito, toujours secrétaire général du parti, reste également chef du gouvernement. Le parti communiste devientparti unique, les seules activités politiques autorisées l'étant sous l'égide du Front populaire (rebaptisé ensuiteAlliance socialiste du peuple travailleur de Yougoslavie, également traduit parLigue socialiste du peuple travailleur de Yougoslavie[7]), qui supervise élections et activités syndicales. Le parti est organisé en branches locales (Serbe, Croate, Slovène, Monténégrine, Macédonienne, Bosniaque; la branche Serbe ayant comme subordonnées les branches autonome duKosovo et de laVoïvodine), de manière à respecter les identités nationales suivant le fédéralisme du nouveau régime.
Après avoir poursuivi une politique de répressionstalinienne dans l'immédiat après-guerre, le parti évolue à compter de larupture Tito-Staline qui voit son expulsion duKominform. Les« kominformiens », partisans réels ou supposés de Staline, sont soumis à des purges[8], Tito parvenant à se maintenir au pouvoir. Sous l'influence de réformateurs commeBoris Kidrič etMilovan Djilas, Tito se convertit à une forme originale de« socialisme », désignée sous le nom detitisme : l'économie abandonne progressivement la planification pour se convertir à une forme d'auto-gestion, avec des doses grandissantes d'économie de marché. Le parti relâche son emprise sur la société yougoslave, préférant au rôle de planificateur celui de guide idéologique : en 1952, durant son sixième congrès, le parti prend le nom deLigue des communistes de Yougoslavie (Savez komunista Jugoslavije), pour se distinguer des autres partis communistes européens demeurés fidèles à Staline[9]. Les branches locales du parti sont rebaptisées de la même manière.
Au fil des années, le Parti doit, comme le régime yougoslave, affronter le problème croissant des nationalismes. La chute du dirigeant conservateurAleksandar Ranković donne une nouvelle impulsion au mouvement des réformistes décentralisateurs. Durant leprintemps croate, une partie des dirigeants de la Ligue des communistes de Croatie adopte les revendications nationalistes, initialement réprimées et finalement adoptées dans la nouvelle constitution de 1974. Tito apparaît comme le principal garant de l'unité du parti et de l'État, tous deux de plus en plus décentralisés. À sa mort, en 1980, la Ligue et l'État adoptent un système de rotation, leurs présidences étant assurées à tour de rôle par les dirigeants locaux. Chaque parti suit bientôt sa propre ligne, à l'image de la Ligue des communistes de Serbie, dirigée parSlobodan Milošević.
Les dissensions entre membres de la fédération amènent à la fin de la Ligue des communistes : en décembre 1989, laSlovénie autorise le multipartisme, suivie en janvier 1990 par laCroatie. Le, la Ligue des communistes de Yougoslavie se réunit àBelgrade et annonce « la fin du socialisme autoritaire » et le passage à une économie mixte. Devant les désaccords entre les différentes composantes de la Ligue, le congrès est finalement ajournésine die trois jours plus tard. La Ligue des communistes de Yougoslavie cesse d'exister dans les faits, ses composantes locales adoptant toutes les unes après les autres les appellations departi socialiste ou departi social-démocrate.