L'organisation de la Ligue arabe repose sur quatre organismes principaux : le sommet deschefs d'État, le Conseil des ministres, les comités permanents et le Secrétariat général dirigé parAhmed Aboul Gheit depuis2016. De plus, divers organismes ont été créés en application de traités qui complètent le pacte de1945 et plusieurs agences spécialisées travaillent en étroite collaboration avec elle.
En1944, à la recherche d'unefédération des États arabes, le gouvernementégyptien met en place un groupe d'étude chargé d'élaborer un projet[1]. Avec l'aide desBritanniques, la conférence d'Alexandrie du se conclut par la rédaction du Protocole d'Alexandrie, déterminant les bases de la future association[2]. La Ligue arabe est créée le auCaire[3]. Les six membres fondateurs de la Ligue arabe sont : l'Égypte, l'Arabie saoudite, l'Irak, laJordanie, leLiban et laSyrie. LeYémen du Nord les rejoint le. L'association vise à affirmer l'unité de la « nation » arabe et l'indépendance de chacun de ses membres.
L'action de la Ligue est d'abord dirigée contre l'ingérence despuissances colonialeseuropéennes dans la région, en l'occurrence laFrance et leRoyaume-Uni. À partir de1948,Israël est également considéré comme une entité exogène aumonde arabe rendant son existence illégitime. Un grand nombre de sommets de la Ligue arabe ont été tenus à la suite d'évènements spécifiques duconflit israélo-palestinien et arabe. Les résolutions les plus importantes de l'institution concernent d'ailleurs laPalestine.
Après lacrise du canal de Suez, leroyaume d'Irak futrenversé, diminuant ainsi l'influencehachémite. L'Égypte, forte de son succès, représentait alors avec la Syrie l'axe nationaliste de la Ligue arabe qui s'opposait à l'axe monarchique et pro-occidental emmené principalement par l'Arabie saoudite et la Jordanie.
En novembre1973, après laguerre du Kippour et lepremier choc pétrolier déclenché par les pays arabes membres de l'OPEP, lesixième sommet des chefs d'État arabes réuni àAlger exige de l’Europe occidentale la fin du soutien militaire et économique à Israël. Il vote aussi une résolution appelant à développer lacoopération arabo-africaine, l'aide aux mouvements de libération, la rupture des relations diplomatiques, consulaires, culturelles et économiques (y compris un embargo pétrolier) avec les États qui demeurant colonialistes, à savoir lePortugal, laRhodésie et l’Afrique du sud, la création de laBanque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) et l'adoption de mesures spéciales afin de faciliter l’approvisionnement en pétrole des États africains touchés par la hausse spectaculaire des cours du pétrole brut[5].
Le, l'Égypte signa lesaccords de Camp David avecIsraël. Les ministres de la Ligue arabe se réunirent en1979 àBagdad pour décider des sanctionsdiplomatiques et économiques à infliger à l'Égypte. L'Irak, contrairement à ses voisins arabes, demanda l'adoption de sanctions économiques symboliques, ne touchant pas le peuple égyptien. L'Égypte fut alors exclue de la Ligue en1979 et le siège de l'organisation fut déplacé duCaire àTunis. La Ligue fut alors privée de son membre le plus puissant, écarté pendant plus de dix ans, qui fournissait une part importante du personnel. Cela entraîna une baisse de l'influence de l'organisation. Le, 12 des 21 membres de la Ligue arabe décidèrent le retour du siège auCaire et la réintégration de l'Égypte. Malgré les protestations des neuf absents, le changement eut lieu le. Un accord fut conclu le entre laFrance et la Ligue, accordant le statut diplomatique au Bureau de la Ligue arabe àParis, ouvert en1974, régissant ses privilèges et immunités sur le territoire français[6].
Cette unité politique est également mise à mal en1990 lors de laguerre du Golfe où l'Irak envahit un autre État membre, leKoweït, qui influa sur le retour en Égypte de l'organisation[7]..
À cause de la prévalence de la souveraineté étatique sur l'intérêtpanarabe, la Ligue n'a jamais fait ses preuves. Soixante ans après sa création, ni la question de la périodicité des sommets arabes n'a été tranchée ni celles de la procédure des votes, du caractère contraignant des décisions ou encore du recouvrement des cotisations. En2002, après une proposition du prince d'Arabie saouditeAbdallah ben Abdelaziz Al Saoud, la Ligue arabe élabore l'initiative de paix arabe, fondée sur l'idée d'une paix globale auMoyen-Orient : en échange d'une normalisation des relations entre Israël et chacun des pays de la Ligue arabe, l'État hébreu se retirerait de laCisjordanie, de labande de Gaza et duplateau du Golan[8]. En2007, au sommet deRiyad, cette proposition est relancée par une résolution nommée « réactivation de l'initiative de paix arabe ». Israël a jusqu'ici refusé de considérer cette initiative[9].
La plus grave crise connue par la Ligue arabe fut le refus de celle-ci d'exécuter le mandat d'arrêt international rédigé par laCour pénale internationale en 2009 à l'encontre du président soudanaisOmar el-Bechir (en visite dans des pays de la Ligue), accusé de génocide et de crimes de guerre. Pour nombre de pays occidentaux, ce fut un aveu de corruption et de non-respect des lois et libertés internationales.[réf. nécessaire]
En 2011, lors de laguerre civile syrienne, la Ligue arabe exclut laSyrie de ses rangs[10] et, en 2013, l'opposition anti-Assad occupe le siège de la Syrie lors d'un sommet de la Ligue arabe à Doha au Qatar[11]. Depuis, en raison des divisions provoquées par cette guerre, la Ligue arabe est jugée par le journalisteSylvain Cypel comme une« organisation quasi moribonde »[12].
Cependant elle continue à se réunir et, dans le cadre duconflit yéménite, elle réagit. Ainsi, en, elle condamne les tirs de missiles balistiques du par lesHouthis du groupe « Ansar Allah » en direction deLa Mecque et deDjeddah[13],[14].
En mai 2023, la Ligue arabe réintègre la Syrie après plus de 11 ans d'exclusion. Cette décision, sous l'impulsion de l'Algérie, pourrait faciliter une nouvelle unité au sein de l'organisation[15].
Le 17 février 2024, au 134e jour du conflit qui oppose Israël auHamas, la Ligue arabe décide de qualifier 60 organisations israéliennes et groupuscules de colons extrémistes d'entités terroristes en raison de leur participation avérée à des opérations d'incursion violentes dans l'enceinte de lamosquée Al-Aqsa ainsi qu'enCisjordanie. Dans le même temps, elle publie une liste de 22 personnalités politiques israéliennes soupçonnées d'inciter au génocide du peuple palestinien, ouvrant ainsi la voie à de probables poursuites auprès des instances internationales compétentes.
L'actuelle Ligue arabe aurait pu s'appeler la « Coalition arabe » suivant la proposition de la Syrie ou encore l'« Union arabe » comme le souhaitait l'Irak. La délégation égyptienne a quant à elle proposé l'appellation de « Ligue arabe » ; selon elle le concept est plus approprié aussi bien sur le plan linguistique que politique.
Les participants ont fini par trouver un terrain d'entente et l'ont appelé la « Ligue des États arabes ».
L'article 1 de la charte de la Ligue dispose que chaque État arabe indépendant a le droit d'adhérer à l'organisation. L'État candidat doit pour cela déposer une demande au niveau du Secrétariat général permanent ; la demande sera alors étudiée par le Conseil. Il y a donc deux sortes de membres : ceux qui ont entériné la charte de la Ligue, au nombre de 7, et ceux qui demandent leur adhésion. Ces derniers doivent réunir certaines conditions pour pouvoir adhérer à l'organisation : l’État candidat doit être arabe etindépendant. L'adhésion de laSomalie et deDjibouti à la Ligue avait suscité une polémique au sein de l'organisation du fait que l'arabe n'est pas lalangue officielle des deux candidats. Toutefois le Conseil de la Ligue a fini par accepter leurs candidatures eu égard à « leurs origines arabes ». L'Irak s'est opposé en 1961 à l'adhésion du Koweït sous prétexte que ce pays faisait partie de ses territoires ; le délégué irakien a même quitté le Conseil pour manifester son refus. La candidature du Koweït a finalement été acceptée par le Conseil qui ne pouvait faire autrement, puisque l'article 7 de la charte dispose que les décisions adoptées à l'unanimité doivent être appliquées par les États membres.
Chaque État membre de la Ligue a le droit de se retirer à condition de déposer un préavis d'un an. Le conseil n'exige pas d'explications des pays qui se retirent ; toutefois, il tente de comprendre les raisons qui les ont amenés à se retirer pour les convaincre de revenir sur leur décision. Si la Ligue venait à amender sa charte, un États membre pourrait se retirer s'il n'approuve pas les nouveaux amendements. La charte de la Ligue prévoit l'exclusion de tout pays membre qui ne respecterait pas ses engagements ; toutefois, elle doit être prononcée à l'unanimité. Néanmoins, le, la Ligue a suspendu la participation de laSyrie à lamajorité qualifiée et non à l'unanimité des22 pays arabes[16]. Ce statut n'est cependant pas irréversible puisque le membre exclu peut présenter une seconde candidature. Un État peut perdre sa qualité de membre s'il perd son identité juridique, comme cela s'est produit en1958 lorsque l'Égypte et laSyrie ont décidé d'unir leurs États respectifs pour devenir la « République arabe unie » et en1990 avec l'union dusud et dunord du Yémen qui a donné naissance à laRépublique arabe yéménite unie. Cependant un pays qui perd sa souveraineté reste membre à part entière. Lorsque leKoweït a étéenvahi en1990 par l'Irak, cela ne l'a pas empêché d'être représenté au sein de la Ligue.
Le 17 août 1988, la Ligue arabe fonde l'Agence arabe de l'énergie atomique, une agence autonome dont le siège est basé à Tunis[17], et dont le but est de développer et coordonner parmi les États membres les activités liées à des applications pacifiques de l'énergie atomique, dans un but de développement économique et social (par exemple applications pour production d'énergie, à des fins médicales ou de recherche)[18].
Un objectif de l'agence est la mise en place d'une réglementation harmonisée dans les pays membres sur la radioprotection, la sûreté, la sécurité nucléaires et la manipulation sûre des matières radioactives et le développement d'un système d'intervention d'urgence[17].
L'agence encourage aussi le suivi des progrès scientifiques et techniques mondiaux dans le domaine nucléaire, travaille à créer un saut scientifique et technique qualitatif et une prise de conscience parmi les citoyens arabes concernant la science nucléaire et ses utilisations pacifiques par le renforcement des capacités et le transfert d'informations scientifiques (formations, conférences régionales, bourses pour formations et conférences hors de la région). L'effort de vulgarisation est appuyé par la publication de documents scientifiques et la traduction de règles et réglementations[17].
↑Arthur Eyffinger et Arthur Witteveen,La Cour internationale de Justice, 1946-1996, La Haye/Londres/Boston, Martinus Nijhoff Publishers,, 428 p.(ISBN90-411-0468-2,lire en ligne),p. 228.
↑Académie de Droit International de la Haye,Recueil Des Cours, Volume 137 (1972/III), Martinus Nijhoff Publishers,, 938 p.(ISBN90-286-0244-5,lire en ligne),p. 15.
↑René-Jean Dupuy, Académie de droit international de la Haye,Manuel sur les organisations internationales, Martinus Nijhoff Publishers,, 967 p.(ISBN90-411-1119-0,lire en ligne),p. 37.