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Leo Brouwer

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Leo Brouwer
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Leo Brouwer (né le àLa Havane) est uncompositeur,guitariste etchef d'orchestrecubain. Il est un compositeur majeur de la deuxième moitié duXXe siècle pour laguitare classique, mais a aussi écrit des œuvres pour toute sorte d'instruments et pour de nombreuses formations, ainsi que desmusiques de film pour lecinéma cubain.

Naissance et épanouissement d'une vocation

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Leo Brouwer est né àLa Havane le. Il est le petit neveu d'Ernesto Lecuona. Le jeune Leo est rapidement attiré par la guitare, à laquelle son père, biologiste passionné deflamenco, l’initie :

« mon père était un amateur de très haut niveau qui jouait des chansons deCésar Portillo de la Luz, duflamenco, des danses deGranados, lesChôros de Villa-Lobos, ainsi que des pièces deFrancisco Tárrega et d’Isaac Albéniz. […] Il m’apprit à percuter les cordes avec la main droite plus qu’à pincer proprement, et à jouer enrasgueados. […] Au bout de quatre ou cinq mois, je jouais, uniquement d’oreille, des pièces de concert qu’il m’avait apprises, et, depuis, je les ai toujours jouées dans mes concerts sans jamais les avoir lues. »

Ce n’est cependant qu’à l’âge de 13 ans qu’il entreprend des études de guitare (il jouera également du violoncelle, du piano et des percussions). Sa rencontre avecIsaac Nicola (élève d’Emilio Pujol), qui sera son premier et unique professeur, s’avère capitale : il découvre les auteurs anciens tels queLuis de Milán,Luys de Narváez,Alonso Mudarra,Robert de Visée etFernando Sor… un nouveau monde de sonorités qui va inexorablement l’attirer. Travaillant d'arrache-pied, il se révèle vite comme un musicien exceptionnel, son premier examen prenant l’allure d’un « récital auquel il ne manquait que le public ».

Dans le même temps, il prend conscience des grands vides du répertoire pour guitare, qu’il se donnera pour but de combler :

« Alors, j'ai commencé à apprendre le soi-disant grand répertoire, [...] et je me suis rendu compte qu'il y avait des trous. Nous n'avions pas unQuintette deBrahms, nous n'avions pas l'Histoire du Soldat deStravinsky, nous n'avions pas de musique de chambre deHindemith, nous n'avions pas de sonates deBartók. Ainsi, alors que j'étais jeune et fou, je me suis dit que siBartók n'avait pas écrit de sonate, je pourrais le faire. Cela a été mes débuts pour la composition. »

De la composition et l’orchestration, il apprend tout, ou presque par lui-même, n’ayant « ni le temps ni l’argent » pour effectuer une formation académique complète. Dès 1954, il crée sa propre méthode de travail, passant des heures à analyser des partitions et à s’inventer des exercices d’écriture, dont certains deviendront des pièces célèbres, comme laFugueno 1 ou lesPièces sans titre pour guitare solo.

La musique à Cuba

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Pour un article plus général, voirMusique cubaine.

Dès le début de la colonisation deCuba, la musique liturgique et savante européenne influence les premières musiques de l'île, avecMiguel Velasquez, premier musicien cubain et chanoine de la cathédrale de Santiago de Cuba. Les premiers peuples de l'île n’ont laissé aucune trace musicale avant cela. À partir de 1513, la présence d’esclaves à Cuba joue un rôle fondamental dans l'histoire de la musique cubaine. Ces esclaves sont en grande majorité desYoruba duNiger, desBantous duCongo, desArará duDahomey (actuelBénin), et desAbakuá. Ainsi les rythmes et les mélodies de ces peuples se mélangent peu à peu avec la musique folklorique cubaine.« Chants, danse, musique, allaient et venaient entre Cuba et l’Andalousie, l’Amérique et l’Afrique, et la Havane fut le centre où toutes fusionnèrent avec une chaleur plus vive et des irisations plus colorées. »En 1791, sur l'île deSaint-Domingue, à la suite des révoltes d’esclaves, certains Français se voient dans l’obligation de fuir et une partie se réfugie à Cuba. De ce fait sont adoptés sur l'île cubaine lemenuet, lagavotte, lepassepied et surtout lacontredanse française (de la contredanse à 2/4 viennent la danza, lahabanera et ledanzón, et de la contredanse à 6/8 viennent laclave, lacriolla et laguajira) qui sera transformée encontradanza cubana, qui deviendra elle-même le premier genre musical de l'île à être exporté. Les serviteurs noirs qui ont immigré sur l'île avec les Français, ont amené un élément rythmique fondamental : lecinquillo, qui va s’incorporer à de nombreux genres folkloriques cubains. Brouwer l'utilisera, de même que letresillo. Beaucoup de danses importées à Cuba en sont reparties modifiées par leur contact avec la population à l'exception duzapateo que l'on peut associer au patrimoine du paysan blanc. Leo Brouwer en a d’ailleurs écrit un dans ses arrangements d’airs populaires cubains. AuXIXe siècle, des changements s’opèrent : la musique classique prend son importance dans l'île. S’organisent des concerts privés et publics où se jouentMozart,Haydn,Pleyel,Gossec ou encorePergolèse. Le clavecin et diverses formations de musique de chambre deviennent à la mode. En 1814, l’enseignement se développe avec la création de la premièreAcadémie de Musique. L’accompagnement se modifie et on obtient laCanción cubana, dont on peut retrouver le caractère dans la berceuse Canción de Cuna extraite desDeux thèmes populaires cubains arrangés par Leo Brouwer.Ignacio Cervantes (1847-1905) contribue à cette évolution de la musique cubaine. Il est l’un des grands compositeurs de ce siècle. Pianiste, il compose dans un style mélangeant la musique européenne avec les rythmes cubains. En 1886, à la suite de l’abolition de l’esclavage, la musique ancestrale africaine, qui n’a jamais cessé de se transmettre, va se pratiquer dans les « confréries de secours mutuel » regroupant chaque ethnie. En 1923, à la suite de larévolution avortée des vétérans et patriotes, quelques artistes ont pris l’habitude de se réunir et forment ainsi leGrupo Minorista. LeMinorismo est devenu un état d’esprit qui établit des liens avec des intellectuels en Europe, ce qui va permettre de découvrir des artistes tels quePablo Picasso,Igor Stravinsky,James Joyce,Darius Milhaud, etc. En 1925,Amadeo Roldán inclut dans sa pièce symphonique Ouverture sur des thèmes cubains une section confiée uniquement à la batterie et utilise divers instruments afro-cubains. En 1942, à La Havane, se forme leGrupo de Renovación Musical sous la direction deJosé Ardévol, qui déclare :« Les principaux apports des compositeurs du Grupo sont l'incorporation à notre musique des grandes formes universelles et un traitement moins direct et typique des éléments stylistiques cubains qui ont primé chezAmadeo Roldán etAlejandro García Caturla, etc. » Brouwer s’inscrira naturellement dans la lignée de ce groupe.

Le guitariste

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Brouwer donne son premier concert au Lyceum de La Havane, à tout juste 16 ans. Il présente à cette occasion un panorama complet du répertoire pour guitare :Luis de Milán,Johann Sebastian Bach,Fernando Sor,Francisco Tárrega,Isaac Albéniz,Federico Moreno Torroba,Heitor Villa-Lobos… et termine par le prélude d’une suite qu’il a composée peu avant. Par la suite, il travaille avec la troupe de théâtre Los Juglares, accompagnant des chants deGarcía Lorca lors d’un spectacle en son hommage.

En 1956, Leo Brouwer etJesús Ortega, son ami, collègue et duettiste de toujours, deviennent membres du Cine Club Visión, association culturelle visant à promouvoir la musique, le théâtre (souvent engagé), l’art pictural et le cinéma. C’est l’occasion pour eux de se produire en solo et en duo. Ils interprètent aussi bien les œuvres des compositeurs les plus connus (leur premier concert est un brillant hommage àVilla-Lobos) que celles des compositeurs de musique populaire cubaine et en profitent pour jouer leurs propres pièces sous les noms de plume de Raoul Petit et Laurent Lichtemberg. En, Brouwer joue pour la première fois en concerto, celui du compositeur NicaraguayenLuis Abraham Delgadillo, puis se produit un an après avecOrtega, au Premier Festival d’Art National de la Liberté.

De retour des États-Unis, Brouwer mène une intense carrière de concertiste : en 1962, il crée à Cuba sesTrois danses concertantes pour guitare et orchestre à cordes, puis offre sa première tournée internationale en Finlande et en URSS. Il joue en 1965leConcerto d'Aranjuez, et passe à la télévision cubaine en 1968, accompagné de son épouse, la chanteuse Yolanda Brito. À partir de 1970, il réalise de nombreux enregistrements, pour les plus grandes maisons d’édition telles queDeutsche Grammophon ouErato. Son disque 12 sonates de Scarlatti par Leo Brouwer est sélectionné parmi les meilleurs enregistrements de l’année 1977 en Angleterre.Brouwer promeut le mélange des genres à travers ses concerts : lors de sa tournée en Italie en 1972, il établit une correspondance judicieuse entre les auteurs anciens et modernes (cf. programme ci-contre), présente l’année suivante avec le GESI le concert à succès Brasil-Cuba, donne en 1976 un récital intituléDe Bach aux Beatles, joue en quatuor avecJohn Williams,Alirio Diaz etRodrigo Riera… En 1979, lors d’une tournée en Europe de l’Est, il donne àEsztergom (où est également crééeAcerca del cielo, el aire y la sonrisa) un récital au cours duquel la durée desbis égale celle du programme. Il joue en 1982 sonConcerto de Liège lors de la première édition du Festival International de Guitare de La Havane dont il est le fondateur, puis se produit à La Martinique, à Paris où il participe à un concert en hommage àSegovia, qui, dit-on, « lui réserva tous ses applaudissements », et enfin à Puerto Rico. Un accident de voiture blessant une de ses mains met fin à sa carrière de concertiste[1]. Il aura donné près de 600 concerts, dans toute l’Europe et l’Amérique ainsi qu’au Japon.

Le chef d'orchestre

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Bien avant que ne s’interrompe sa carrière de guitariste, Brouwer avait déjà dirigé les plus grands orchestres du monde. Tout commença en 1960, où il reçut ses premiers cours de direction orchestrale à laJuilliard School of Music de New York, comme complément à ses études de composition. De retour à Cuba, il ne put cependant diriger aucun des orchestres, qui étaient à l’époque en restructuration ou en formation. La situation évolua à la fin des années 1960, Brouwer dirigea en particulier un groupe instrumental au Théâtre García Lorca de La Havane. En 1970, il dirigea ses propres œuvresExaedros Iet II avec deux formations prestigieuses : leScottish National Symphony Orchestra et lePhilharmonique de Berlin. Il allait par la suite diriger des formations parmi les plus importantes au monde, à Mexico, Londres, Toronto, Liège, Istanbul… En 1981, il fut nommé directeur général de l'Orchestre Symphonique National de Paris ainsi que de celui de Cuba. En 1992, il devint chef titulaire de l'Orchestre de Cordoue où il résida à mi-temps et avec lequel il se produisit régulièrement jusqu'en 2001. Aux programmes : Brouwer, bien sûr, mais aussiBeethoven,Mendelssohn,Tchaïkovski,Chostakovitch,Bartók,Britten,Copland,Joaquín Rodrigo… Le maestro affirme :« Jouer, c'est communiquer avec le public. J'ai effectué une sorte de transposition et la direction m'a permis de conserver cette possibilité de communiquer de manière indirecte ». Brouwer a également réalisé de nombreux enregistrements en tant que chef d'orchestre, parmi lesquels plusieurs de ses concerti pour guitare, avec pour solistesJulian Bream,Costas Cotsiolis,Rey Guerra etMaria Esther Guzman. Il a été nommé en 1987 membre d'honneur de l'UNESCO en tant qu’interprète, compositeur, et pionnier en termes d’innovation musicale, distinction accordée à un nombre restreint d'artistes internationaux dont font partieAram Khatchaturian,Pierre Boulez,Yehudi Menuhin,Ravi Shankar,Isaac Stern

Le compositeur

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Les musicologues divisent généralement l'œuvre de Brouwer en trois grandes périodes stylistiques :

Première période

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Brouwer commence à composer en 1954. Il écrit cette année-là quatre pièces pour guitare : deux suites,Amalgama etRecitativo. Dans le même temps, il apprend l'écriture en autodidacte, en se plongeant dans des traités d'instrumentation, dans les œuvres des grands compositeurs et en écoutant une certaine quantité de musique, ce qui le conduira en particulier à écrire dès 1958Trois danses concertantes pour guitare et orchestre à cordes. Cela explique également que le jeune Brouwer utilise des formes musicales et des techniques d'écriture traditionnelles comme lasuite baroque, lasonate, lethème varié ou lafugue. Au-delà de la forme, Brouwer reste très influencé par le folklore afro-cubain et le côté rythmique de cette musique. Même s'il n'a pas grandi dans le milieu populaire et s'il se défend d'écrire de la musique populaire comme en avait écrit son grand-oncleErnesto Lecuona, on retrouve dans toutes ses œuvres, et en particulier dans ses pièces pour guitare, des éléments de racine populaire. Ainsi, une partie duPrélude (1956) fait référence au luth cubain et au tres, laFugueno 1 (1959) se fonde sur la rythmique du tresillo et laPièce sans titreno 1 (1956) présente des éléments populaires sur le plan harmonique (pentaphonies…), rythmique, et mélodique : la mélodie va vers le grave, ce qui est typique de la musique africaine. Certaines pièces d'essence populaire sont « avouées » comme telles à travers leur titre :Prélude en conga,Danse Caractéristique (1956). Brouwer arrange également des airs et thèmes populaires cubains dans le courant de l'année 1957 et écrit cette année-là laPièce sans titreno 2 (la troisième paraîtra en 1962). LaFugueno 1 est l'une de ses premières œuvres[2]. Il s'agit d'une pièce assez courte (2 minutes 50 environ), composée vers 1959 alors qu'il était encore assez jeune. Lafugue est écrite pourguitare, et Brouwer y puise dans « les modèles classiques européens » (Ricardo Cobo), ainsi que dans lamusique traditionnelle, comme pour la plupart de ses premières compositions.

Brouwer est également influencé par la musique européenne duXXe siècle. SesMicropiezas (1957), pour deux guitares, sont des pièces polytonales en hommage à Darius Milhaud, dans lesquelles on reconnaît néanmoins des thèmes cubains comme Quítate de la acera. LesTres Apuntes (Trois Sketches) pour guitare datant de 1959 sont des hommages respectifs àDe Falla,Stravinsky, etBartók, à qui Brouwer emprunte des techniques de composition.

En, Brouwer obtient une bourse pour étudier la composition à laJuilliard School of Music de New York, avecVincent Persichetti. Ayant déjà appris l'orchestration par lui-même, cela lui permet néanmoins d'effectuer une « révision a posteriori », mais surtout d'accéder à de grandes bibliothèques de partitions et d'assister à des conférences deLeonard Bernstein,Lukas Foss etPaul Hindemith. Il écrit en particulier sonTrio pour deux violons et alto qui remportera le deuxième prix au concours de composition pour musique de chambre Amadeo Roldán à son retour à Cuba. Il conclut en 1961 les deux premières séries d'Études simples, qui font aujourd'hui partie du répertoire « obligé » de tout jeune guitariste et qui sont d'un apport pédagogique considérable. Citons également (entre autres) :Fuga Cervantina (1960), sa première pièce pour piano,Sonate pour Violoncelle seul (1960),Quatuor à cordesno 1 (1961),Sonate pour Flûte (1961),Trois pièces latino-américaines (1962) pour guitare,Variantes pour un percussionniste (1963)… et enfinÉloge de la danse (1964) pour guitare, composé et créé à La Havane sur une chorégraphie moderne, dont les thèmes abandonnent une certaine forme de tonalité et annoncent une évolution dans le style Brouwerien.

Deuxième période

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Le festival d’automne de Varsovie en 1961 où Brouwer a été mis en contact avec des œuvres dePenderecki,Karlheinz Stockhausen,Ligeti,Xenakis va lui faire découvrir le monde de la musique contemporaine. Mais tout en adoptant de nouvelles techniques, il va aller dans le sens de la fusion, sans abandonner totalement ce qu’il a fait avant. Il sera un pionnier en ce qui concerne la musique « d’avant-garde » à Cuba. En 1963, il écrit la première pièce cubaine incluant des éléments aléatoires,Sonograma I, pour piano préparé. C’est le premier d’une série de quatreSonogramas, le dernier étant écrit pour deux orchestres, dirigés par deux chefs différents ! En 1966, Brouwer composeConmutaciones, pièce dans laquelle les trois solistes circulent sur vingt-trois instruments de percussion, puisTropos (1967) etLa tradición se rompe… pero cuesta trabajo (1969) pour orchestre symphonique. Il écrit également de la musique électronique (Exaedros I, pour six instruments et bande magnétophonique, 1969,Al asalto del cielo, pour bande magnétophonique, 1970…), de la musique sérielle dodécaphonique (Second Trio, pour basson, clarinette et hautbois, 1964,Epigramas, pour violoncelle et piano, 1968…), et accorde une grande part à l’aléatoire (Sonata Pian e forte, pour piano, 1970…).

C’est au cours de cette période que se forme le GESI, Groupe d’Expérimentation Sonore de l’ICAIC (voir paragraphe sur la musique de film), que Brouwer et Guevarra, président de l’ICAIC, prennent en main entre 1969 et 1973. Ce groupe, formé de jeunes artistes, vise à élaborer un langage musical nouveau, en accord avec les idées révolutionnaires et à créer une production musicale destinée à alimenter le cinéma cubain. Brouwer et son équipe apportent alors aux jeunes une somme de connaissances musicales qui doit leur permettre de développer et concrétiser leurs idées. Les membres du GESI se livrent à des discussions passionnées autour d’écoutes musicales en tous genres (classique, contemporain, jazz, musique populaire cubaine et celle d'autres pays et continents, variété internationale, rock) et produisent des compositions collectives.

Dans le même temps, Brouwer écrit quatre pièces majeures du répertoire pour guitare solo, qui sont dédiées à des grands interprètes à l’échelle internationale :Canticum (1968), (dontEmilio Pujol dira :« Depuis l’Hommage à Debussy, de Manuel de Falla, je n’avais pas entendu une œuvre pour guitare comme le Canticum »),La espiral eterna (1970),Parábola (1973) etTarantos (1974), pièce se fondant sur la structure llamada-falseta du flamenco et qui laisse à l’interprète le choix de l’ordre d’exécution des différentes phrases musicales. Il écrit égalementPer suonare a tre (1970) pour flûte, alto et guitare,Concerto pour guitare et orchestre réduit (1972),Per suonare a due (1973) pour deux guitares dont l’une peut être préenregistrée, et travaille avec le compositeur allemandHans Werner Henze, dont il arrange en 1970 une pièce sous le nom deEl Cimarrón, pour guitare avec utilisation d’un archet. Dans ces œuvres, on retrouve les caractéristiques des pièces sans guitare : motifs laissant un libre choix à l’interprète, écriture cellulaire, nouveaux systèmes d’écriture qui nécessitent un mode d’emploi, en particulier pour quantifier vitesses et durées…

Troisième période

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Un changement stylistique s'amorce chez Brouwer en 1978, avec laToccata pour quatre guitares, initialement écrite pour un ballet, et laCanción de Gesta pour orchestre de vents, harpe, piano et percussions. Brouwer en parle lui-même : « Au bout d'un moment, j'ai été saturé par le langage de soi-disant avant-garde, cette musique contemporaine tout le monde avait faite et toujours créée par de nombreux compositeurs ». Son style évolue vers ce qu'il nomme « nouvelle simplicité » et qui, comme il le dit, « englobe les éléments essentiels de la musique populaire, de la musique classique et de la musique d'avant-garde elle-même, ce qui [l']aide à donner du contraste aux grandes tensions ». On note un retour à des formes plus classiques et à des harmonies plus accessibles, débouchant dans quelques pièces sur une forme de néo-romantisme, comme c'est le cas dans leConcerto de Liège (1980). Ce concerto pour guitare est le deuxième d'une longue série qui se prolongera en particulier par leConcerto Elegíaco (1986) et leConcerto de Toronto (1987), respectivement dédiés àJulian Bream etJohn Williams. Ces concerti sont souvent commandés par des festivals. Citons égalementRetratos Catalanes (1984) pour guitare et orchestre réduit, leDouble Concerto (1995) pour violon et guitare ainsi que leConcerto-cantate (1996) pour guitare, chœur et orchestre, exemple unique dans l'histoire de la musique à l'exception près de celui deCastelnuovo Tedesco.

Dans ses pièces pour guitare, Brouwer utilise le principe de la guitare-harpe qui consiste à laisser résonner toutes les notes, ainsi que des artifices tels les glissandi type « blues » ou l'utilisation d'un bottle-neck, comme dansAcerca del cielo, el aire y la sonrisa (1979) pour quatre ensembles de guitares. Brouwer a également été influencé par le courant minimaliste, ce qui se manifeste dans ses œuvres par une simplification des matériaux thématiques : « Quatre stupides notes me donnent un prétexte pour composer une œuvre de grande dimension ». Ce concept devient évident dans des œuvres comme leDecameron Negro (1981), pièce tripartite pour guitare inspirée d'une légende africaine. Les racines africaines restent bien présentes (Rito de los Orishas, 1993, pour guitare) ainsi que l'apport folklorique cubain, comme c'est le cas dans les nombreux Paysages Cubains composés par Brouwer. Parmi les autres œuvres majeures pour guitare solo de cette période, mentionnons la troisième et la quatrième série desÉtudes simples (1981), laSonate (1991), qui est l'une des pièces dans lesquelles Brouwer utilise la citation de phrases musicales de compositeurs à qui il rend hommage, etHika (mot japonais signifiant « élégie »), écrite en 1996 à la mémoire du compositeurToru Takemitsu, dont il a été l'ami.

Pour Brouwer, il n'existe pas de frontière entre musique savante et musiques populaires. Comme il le rappelle, « Bach et Mozart composaient de la musique populaire ». Ainsi Brouwer écrit-il aussi bien uneMozartiana (1990, pour deux flûtes, timbales et cordes) ou uneWagneriana (1992, pour cordes) qu'une pièce pour guitare et orchestre à cordes sur des thèmes des Beatles (1986).

Le compositeur de musiques pour le cinéma

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La participation active de Brouwer aux activités du Cine Club Visión, à partir de 1956 lui permit de découvrir le7e art. Ce fut pour lui l’occasion« d’élargir l’horizon de ses idées en termes de culture artistique, et d’avoir des amis qui vivaient non seulement dans la sphère de la musique mais aussi dans celle du théâtre, du cinéma et de la peinture ». Ainsi, lors de la création de l’Institut Cubain d’Art et d’Industrie Cinématographique (ICAIC), en, de nombreux membres du Cine Club Visión, dont Brouwer etOrtega, se mirent à travailler pour cette institution. Dès, Brouwer composa pour l’ICAIC la musique deSanta Clara, troisième partie du long métrageHistorias de la Revolución, pour laquelle il utilisa deux violons, un violoncelle, une contrebasse, une flûte, un hautbois, une clarinette, deux trompettes et des percussions. Il avait auparavant déjà écrit de la musique scénique pour le Théâtre Guignol de La Havane, juste avant de partir pour les États-Unis.Brouwer composera par la suite les musiques de plus d’une centaine de productions cinématographiques en tous genres, en grande partie commandées par l’ICAIC, dont il sera directeur du département musical de 1960 à 1962. Il écrira :

  • des musiques pour les documentaires :Una escuela en el campoet La montaña nos une (1961), dont il concevra les bandes sonores avec Ortega, à partir d’improvisations sur des thèmes folkloriques cubains,Cocodrilo (1966),Lenin 100 (1969)… entre autres.
  • des musiques de dessins animés :El Cofre (1964),Dibujos Humoristicos (1965),La Lechuza (1967).
  • Il composera en particulier les musiques des films suivants :

Papeles son papeles de Fausto Canel (1965), où l’utilisation d’un trio de Jazz accompagne le scénario de cette comédie ayant pour thème le trafic de dollars par les contre-révolutionnaires au début de la révolution cubaine.

Memorias del subdesarollo de Tomás Gutierrez Alea (1968), qui est le film Cubain le plus primé jusqu’à nos jours.

Un día de noviembre de Humberto Solás (1972), dont l’un des thèmes, initialement interprété par une flûte, une guitare, une basse, des clochettes et un triangle, a donné la pièce pour guitare du même nom, qui a rapidement fait le tour du monde.

Son… o no son de Julio García Espinoza (1980), film dans lequel Brouwer apparaît en tant qu’acteur, dirigeant un petit ensemble de cordes.

Pour Brouwer, la première qualité d’une musique de cinéma est de ne jamais « surpasser » le film pour lequel elle est écrite, comme il l'explique :« La musique pour le cinéma ne constitue ni un accompagnement ni une explication, elle n’a pas non plus pour but d’accompagner l’image ».

Brouwer a écrit en 1983La Guerra de las galaxias, suite symphonique sur les musiques deStar Wars, du compositeur américainJohn Williams.

Conclusion

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L'influence et la renommée de Leo Brouwer dans l'univers de la musique de notre temps va bien au-delà des frontières de la guitare, dont il a cependant radicalement renouvelé la vitalité, comme un très petit nombre de compositeurs ont pu le faire dans le siècle.

Son œuvre comprend plus de 300 opus, et plus de 400 enregistrements qui lui sont consacrés ont vu le jour à travers le monde, servis par les plus grands solistes et orchestres.

Actuellement (2009), Brouwer est invité à des festivals partout dans le monde où il dirige, donne des masterclasses, et préside des jurys. Ses dernières pièces s'inscrivent dans la continuité de la « troisième période » de composition :Tableaux d'une autre exposition (2002), pour violon, piano et trompette,Nouvelles études simples (2001) etLa cité des colonnes (2004) pour guitare,Gismontiana (2004) pour 4 guitares et orchestre, Concertono 11 « da requiem » (2006) pour guitare et orchestre,Cantilena de los bosques etPaysage cubain avec fête (2008) pour guitare…

Catalogue d'œuvres

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Guitare seule

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Plusieurs guitares

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Guitare et orchestre

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  • Tres danzas concertantes (1958)
  • Concierto para Guitarra (No. 1) (1973)
  • Concierto de Lieja (No.2) (1981)
  • Retrats Catalans (1983)
  • "From yesterday to Penny Lane" for guitar and orchestra (1985)
  • Concierto elegíaco (No. 3) (1986)
  • Concierto de Toronto (No. 4) (1987)
  • Concierto de Helsinki No. 5 (1991-2)
  • Concierto Omaggio a Paganini (1995), double concerto pour violon et guitare
  • Concierto de Volos (No. 6) (1997)
  • Concierto No. 7 "La Habana" (1998)
  • Concierto No. 8 "Concierto Cantata de Perugia" (1999)
  • Concierto No. 9 "de Benicassim" (2002)
  • Concierto No. 10 "Book of Signs" (2003-4), double concerto pour deux guitares

Autres instruments

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Filmographie

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Notes et références

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  1. Africa and the Americas: culture, politics, and history Par Richard M. Juang, volume 1, page 206
  2. (en)The Guitar Review,,p. 32.

Sources

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  • Leo Brouwer, Isabelle Hernández, Editora Musical de Cuba (2000)
  • La música, lo cubano y la innovación, Leo Brouwer, Editorial Letras Cubanas (1981)
  • Leo Brouwer, son œuvre pour guitare seule et son utilisation pédagogique, Marie-Madeleine Bobet-Doherty
  • Introduction de la partitionLeo Brouwer, Œuvres pour guitare, François Laurent, Eschig (2006)

Interviews

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Liens externes

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