Si vous disposez d'ouvrages ou d'articles de référence ou si vous connaissez des sites web de qualité traitant du thème abordé ici, merci de compléter l'article en donnant lesréférences utiles à savérifiabilité et en les liant à la section « Notes et références ».
Né dans unefamille juive, Kaganovitch estcordonnier lorsqu'il rejoint lePOSDR en 1911 et devientbolchevik. En 1917, il dirige un soulèvement enBiélorussie durant larévolution d'Octobre. Très proche de Staline, il le soutient lors de son ascension au pouvoir suprême dans les années 1920. Il contribue à la théorisation dustalinisme. Il est premier secrétaire duParti communiste enUkraine de 1925 à 1928 puis en 1947. Il est membre titulaire duPolitburo sans interruption de 1930 à 1957. Au cours des années 1930, il estcommissaire du peuple aux chemins de fer, à l'industrie lourde et à l'industrie gazière. Après la mort de Staline en 1953, il devient vice-président duConseil des ministres de l'URSS jusqu’à sa mise à l’écart en 1957, due à son opposition à ladéstalinisation.
Kaganovitch a une responsabilité importante dans la mise en place de l'Holodomor, unefamine dans laquelle environ 5 millions d'Ukrainiens moururent. Après l'invasion soviétique de la Pologne, il est l'un des cosignataires du décret ordonnant en1940 lemassacre de Katyń, où environ 22 000 civils et officierspolonais furent exécutés par leNKVD, et 65 000 autres Polonaisdéportés.
Devenu le dernier survivant du cercle rapproché de Staline, il meurt en 1991 à l'âge de 97 ans, quelques mois seulement avant ladislocation de l’URSS. Il est enterré aucimetière de Novodevitchi.
Lazare Moïsseïevitch Kaganovitch est issu d'une famillejuive des environs deKiev[2]. Il travaille dès son enfance comme apprenti cordonnier[3] dans des fabriques de chaussures et, rejoignant son frère aîné Mikhaïl, adhère auParti ouvrier social-démocrate de Russie en 1911. Après avoir fait de l’agitation sous le pseudonyme de« Kosherovitch »[1], il se fait remarquer parLénine, puis est envoyé gouvernerNijni Novgorod en 1918[1]. En 1919, il pousse à la militarisation du Parti[1] et devientcommissaire politique dans l'Armée rouge pendant laguerre civile russe, sur le front Sud. En 1920, il est envoyé enAsie centrale où il ordonne aux géographes russes d'abandonner le nomTurkestan jusqu'alors utilisé pour désigner cette région, affirmant que« cette dénomination nationalistepan-turque devait être rayée au plus tôt de la terminologie soviétique ».
Faisant partie des proches de Staline, Kaganovitch connaît alors une rapide ascension : membre suppléant auComité central en 1923, il en est membre titulaire l'année suivante[2]. Il idolâtre Staline, qu’il appelle« notre père »[4], et participe à la théorisation du futurstalinisme. Premier secrétaire du Parti communiste ukrainien de 1925 à 1928, il dirige les opérations d'élimination des opposants et joue un rôle considérable dans la mise en œuvre despurges staliniennes des années 1930 dans cette république bouleversée par lacollectivisation. Il est ensuite envoyé écraser les jacqueries paysannes entreCaucase etSibérie occidentale, et fait fusiller à la mitrailleuse des villages entiers[5].
Élu suppléant auPolitburo, il en devient titulaire en 1930 et y demeure jusqu'en 1957, ayant par ailleurs été coopté dans lePræsidium du Soviet suprême en 1952. De 1930 à 1935, il est premier secrétaire de l'organisation du Parti à Moscou, où il se distingue pour la destruction de monuments historiques préalable aux constructions[5][6] et dans la réalisation et la décoration de lapremière ligne du métro de la capitale. Jusqu'en 1939, il est également l'un des trois secrétaires du Comité central, adjoint de Staline[3], supervisant notamment successivement l'industrie, l'agriculture et les transports, ainsi que la répression de rébellions, comme auKouban en 1932[7].
Kaganovitch joue un rôle de premier plan lors de l’Holodomor (extermination par la faim), l'une desfamines soviétiques, qui fait entre 2,6 et 5 millions de victimes en Ukraine. Le plan de réquisitions prévu par le gouvernement n’ayant pas été rempli, Kaganovitch et Molotov sont dépêchés en octobre 1932 dans le Caucase du nord et en Ukraine afin d’« accélérer les collectes » et empêcher à tout prix les paysans affamés de fuir vers les villes[8]. Indifférent à la désolation causée par la famine, Kaganovitch adresse critiques et réprimandes aux cadres en place pour leur« tiédeur » et leurs« scrupules bourgeois » dans la collecte[9].
Le, la commission présidée par Kaganovitch adopte la résolution suivante :« À la suite de l’échec particulièrement honteux du plan de collecte des céréales, obliger les organisations locales du Parti à casser le sabotage organisé par les élémentskoulaks contre-révolutionnaires, anéantir la résistance des communistes ruraux et des présidents de kolkhozes qui ont pris la tête de ce sabotage »[10]. À partir de ce moment, les opérations« anti-sabotage » se multiplient et les victimes se compteront par dizaines de milliers, tandis que desvillages entiers sont déportés vers leGoulag.Nikita Khrouchtchev aussi s’illustre durant cette période de l'histoire de l'Ukraine : tout agent du pouvoir bolchevik qui ne surenchérissait pas dans la férocité, baptisée« vigilance révolutionnaire », passait aussitôt pour« tiède », risquant d'être accusé de« sabotage » et d'être par conséquent fusillé ou envoyé en Sibérie. Lescommissaires politiques duNKVD y veillaient. II a été calculé qu’au plus fort de la famine, jusqu’à 33 000 personnes mouraient de faim chaque jour dans cette région. Lecannibalisme y a sévi[11].
Après la mort de Staline, Kaganovitch réussit à conserver son influence : de à, il est ministre du Travail et des Salaires. En 1957, il remplaceNikita Khrouchtchev pour quelques mois au poste de premier secrétaire du Parti en Ukraine et contribue à la montée au pouvoir de ce dernier. Ensuite son influence décroît : avec ses collègues de la tendance conservatriceMolotov etVorochilov, il intrigue pour faire limoger son ancien protégé Khrouchtchev devenu entre-temps un détracteur des méthodes staliniennes. Khrouchtchev l'accuse d'avoir constitué un« groupe anti-parti » et c'est Kaganovitch qui est limogé du gouvernement, puis du Praesidium en, pour être nommé à la direction d'unecimenterie en province.
Violemment critiqué pour ses« excès de zèle » auXXIIe Congrès du PCUS qui adopte ladéstalinisation en, il finit par être exclu du Parti trois ans plus tard. Retraité, il vit discrètement et tranquillement les trente dernières années de sa vie, mais retrouve une certaine notoriété au début de laglasnost dans les années 1980, quand des journalistes obtiennent de lui l'aveu de l'intentionnalité, que l'URSS avait toujours niée, de certains crimes staliniens comme l'Holodomor et lemassacre de Katyń. Âgé de 97 ans, il meurt en 1991, cinq mois avant les évènements qui aboutissent à ladislocation de l'URSS : il était le dernier membre encore en vie du gouvernement de Staline et de son cercle rapproché[12].
Simon Sebag Montefiore le qualifie d’« “impétueux et viril”, grand et robuste avec des cheveux noirs, de longs cils et de “beaux yeux bruns” »[3]. C’était unbourreau de travail au fort accent juif, qui jouait sans cesse avec des objets et qui avait gardé de sacordonnerie l’habitude de regarder les chaussures de ses interlocuteurs, voire de les examiner à son bureau[3].
Lazare Kaganovitch a épousé une collègue rencontrée pendant ses missions de collectivisation : ils eurent ensemble une fille et adoptèrent un fils[13]. Il avait un frère,Mikhaïl Kaganovitch(en), lui aussi importantapparatchik dugouvernement soviétique, qui fut victime despurges staliniennes en juillet 1941, accusé d'avoir« saboté les défenses antiaériennes soviétiques » lors de l'invasion allemande, sans que Lazare puisse le défendre[14]. Mikhaïl se suicida pour éviter unprocès stalinien et protéger ainsi sa famille[15].
Le tempérament extraverti, dynamique, tenace, colérique et impitoyable de Lazare lui valut le surnom de« locomotive » : il frappait ses subordonnés au marteau ou les soulevait par le veston[3].Nikita Khrouchtchev, qui fut son protégé à ses débuts, dit que si« le Comité central lui avait mis une hache dans les mains, il aurait fait place nette comme un ouragan mais coupé les arbres sains en même temps que les pourris ». Staline le surnomma« l’homme de fer » ce qui le plaçait en seconde place après lui-même (« Staline » signifiant« l’homme d'acier »)[1].
Kaganovitch qui s'est toujours refusé à tutoyer Staline[16] se montra craintif et humble face au maître de l'URSS, allant jusqu'à se définir comme un« stalinien inconditionnel » au cours d’un repas chez Staline àZoubalovo, mais ce dernier réfuta alors ce qualificatif[17]. Cette attitude servile s'explique d'une part par la reconnaissance pour celui qui lui avait enseigné l’orthographe et la ponctuation[18], et d'autre part par le sort fait à son frère, qui lui rappelait que nul n'est à l'abri despurges[1].
↑Jacques Vallin, France Mesle, Serguei Adamets et Serhii Pyrozhkov, « A New Estimate of Ukrainian Population Losses During the Crises of the 1930s and 1940s »,Population Studies vol. 56, n° 3, nov. 2002, pp. 249-264.