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| La Meije | ||||
La Meije vue du nord, avec le Grand Pic au premier plan | ||||
| Géographie | ||||
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| Altitude | 3 983 m, Grand pic de la Meije[1] | |||
| Massif | Massif des Écrins (Alpes) | |||
| Coordonnées | 45° 00′ 17″ nord, 6° 18′ 31″ est[1] | |||
| Administration | ||||
| Pays | ||||
| Régions | Auvergne-Rhône-Alpes Provence-Alpes-Côte d'Azur | |||
| Départements | Isère Hautes-Alpes | |||
| Ascension | ||||
| Première | parE. Boileau de Castelnau avecP. Gaspard père et fils | |||
| Voie la plus facile | par le refuge et l'arête du Promontoire | |||
Géolocalisation sur la carte :France Géolocalisation sur la carte :Isère Géolocalisation sur la carte :Hautes-Alpes | ||||
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La Meije est une montagne du bassin de l'Oisans, en bordure nord-ouest dumassif des Écrins. Elle est située à la limite des départements desHautes-Alpes et de l'Isère.
La Meije a été attestée sous les formesRuppis Mediana (XVe siècle, latin) puisAiguille-du-Midi-de-la Grave (date inconnue, français)[2]. Enoccitan elle est appeléel'Agulha de la Meija[laɣˌyʎodelamˈɛjd͡ʒo][3] oul'Agulha de Mejorn[laɣˌyʎodemɛˈd͡ʒuɾ][2].
C'est le premier nom occitan,l'Agulha de la Meija, qui s'est imposé, avant d'êtrefrancisé puis simplifié pour donner le nom français actuel, la Meije. Le premier élément,agulha, signifie « aiguille » et est un nom commun désignant toute montagne particulièrement pointue[4], tandis que le deuxième élément,meija, signifie « demie, milieu, moitié »[3],[5]. Le village deLa Grave étant situé directement au nord de la Meije, du point de vue gravarot le soleil passe directement au-dessus de cette montagne àmidi ; elle est donc l'aiguille du milieu [de la journée][6].Ce nom occitan a été francisé pendant les révisions de1832 et1866[réf. nécessaire].
Le deuxième nom occitan « Agulha de Mejorn » était plus fréquent par le passé, souvent sous sa traduction française « aiguille du Midi ». Ce nom était la préférence du géographe et alpiniste grenobloisHenri Ferrand, qui voulut nommer la montagnel'Oeille de Medjour (une graphie personnelle, correspondant au nom occitan), forme plus proche du nom utilisé par les Gravarots selon lui. Malgré d'amples disputes, notamment avecWilliam Auguste Coolidge, la montagne a fini par garder le nom de la Meije car, selon Coolidge, s'il fallait écrire tous les noms de montagnes conformément« au son qui leur est donné par les paysans qui les ont inventés, il faudrait refaire la nomenclature alpine de fond en comble[7]. »
D'autres toponymes semblables peuvent être relevés : lepic du Midi à Bagnères-de-Bigorre (pic de Mieidia en occitan), lepic du Midi à Siguer (pic de Miègjorn en occitan), ou l'aiguille du Midi à Chamonix (agouelye de Mi-jorn en arpitan). De plus, Chamonix possède une deuxième pointe nommée en fonction de la position du soleil au cours de la journée : ledôme du Goûter[8].
ÀLa Bérarde, village situé au pied de la Meije, en versant sud, on l'appelle traditionnellementle Bec des Peignes[9], toponyme qui serait une référence au dieu celtique Penn[10] dont l’étymologie est issue du gaulois*penno- « tête, extrémité ».
En1712, la Meije était désignée sous la formepointe Malaval. Ce nom est resté pour désigner la vallée de laRomanche, en contrebas : c'est lacombe de Malaval, dominée de plus de 1 000 mètres par leplateau d'Emparis au nord, et de plus de 2 000 mètres par le Dôme de la Lauze au sud[11].
L'écrivainHenri Ferrand vouait un culte particulier à la Meije et insistait pour que le sommet soit orthographié avec un « d », en respectant le patois local[12].
La Meije est composée de trois principaux sommets : le point culminant, le Grand pic de la Meije à 3 983 mètres (deuxième sommet majeur des Écrins après labarre des Écrins qui culmine à 4 101 mètres), le Doigt de Dieu ou pic Central de la Meije (3 973 mètres) surplombant le versant Sud et la Meije orientale (3 891 mètres), gros épaulement neigeux.
Les glaciers de la Meije en septembre 1950 en aval ducol du Lautaret sur la route en direction deLa Grave. | Les glaciers de la Meije le 30 juillet 2012 depuis un angle de vue similaire : en hachuré rouge les parties disparues. |
La seconde photo est révélatrice de la phase actuelle de recul des glaciers alpins — comme ceux de la Meije — surtout en partie basse mais également en partie haute.Cette phase actuelle de régression peut être expliquée soit par le simple effet duréchauffement climatique soit par un ensemble complexe de causes[précision nécessaire].
La décrue s'est amorcée dès le milieu duXIXe siècle, avec la sortie dupetit âge glaciaire, a connu une brutale phase de recul entre 1943 et 1952, après une série d'étés caniculaires, recul qui a repris de plus belle depuis le milieu des années 1980[réf. nécessaire]. Au début duXXe siècle, les glaciers du Lautaret, du Tabuchet et celui de la Meije ont des langues terminales très aplaties dont le front se rétracte haut en altitude.
Le Grand pic est un des sommets les plus difficiles des Alpes car il s'atteint par une traversée et du fait qu'il n'existe pas d'itinéraire « facile ».

Dans l'histoire de l'alpinisme, la Meije occupe une place particulière : ce fut le dernier sommet majeur des Alpes à être gravi, après dix-sept tentatives menées entre 1870 et 1877[13], et cette première ascension fut réalisée par un Français alors que la plupart des autres grandes premières dans les Alpes furent réalisées par des alpinistes britanniques :Whymper,Coolidge etc.
Pour ces raisons et aussi grâce à l'esthétique de sa silhouette remarquable (qualifiée de « parfaitement dissymétrique » par le compositeurOlivier Messiaen), la Meije occupe une place de choix dans l'imaginaire des alpinistes. D'ailleurs, on l'appelle parfois « La Reine Meije » ou « Sa Meijesté ».
La face nord du pic Central de la Meije (aussi nommé Doigt de Dieu) est gravie pour la première fois le 28 juin 1870 par les alpinistesMeta Brevoort etWilliam Auguste Coolidge et leurs guidesChristian Almer,Ulrich Almer et Ch. Gertsch[14].
La première ascension du Grand pic fut effectuée le parEmmanuel Boileau de Castelnau avecPierre Gaspard et fils[15] après plusieurs essais infructueux ; elle suit l'arête du promontoire en face sud, c'est-à-dire la voie « normale ». Ils descendirent par la voie de montée, abandonnant des cordes sur certains passages (la technique durappel ne fut inventée que plus tard).
Le 21 août 1878,Henry Duhamel, Giraud-Lézin et F. Gonnet réalisent la première ascension de l'arête nord-est de la Meije orientale[14].
La première ascensionsans guide, en1879, est au crédit deFrederick Gardiner en compagnie de Charles Pilkington et Lawrence Pilkington.
La première ascension sans bivouac et en moins de vingt-quatre heures a été réalisée en 1883 par les pyrénéistesHenri Brulle,Jean Bazillac etCélestin Passet, accompagnés dupère Gaspard et de son fils Maximin.

La première traversée des arêtes de la Meije a été faite dans le sens est-ouest (du Doigt de Dieu au Grand pic) le parLudwig Purtscheller, Otto etEmil Zsigmondy. Il descendirent en rappel et en plantant des pitons de la première dent à la brêche au pied du Grand pic (aujourd'hui appelées dent et brèche Zsigmondy). Ils redescendirent par l’arête du Promontoire, en empruntant ladalle des Autrichiens, qui est la seule modification de l'itinéraire aujourd'hui utilisé par rapport à celui de Gaspard et Castelnau. Emil Zsigmondy chuta et se tua quelques jours plus tard, lors d'une tentative en face sud des arêtes, après avoir emprunté la grande bande de neige qui traverse cette face (banquette des Autrichiens). Il est enterré au cimetière deSaint-Christophe-en-Oisans, à côté d'Ernest Thorant.
En1891, J.-H. Gibson,Ulrich Almer et F. Boss firent la première traversée des arêtes (dans le sens ouest-est), qui est devenu l'itinéraire classique, et considéré comme l'un des plus beaux des Alpes[16]. Elle fait partie des100 plus belles courses dans le massif des Écrins[17].
Le 24 septembre 1898 voit la première ascension du couloir Gravelotte, par C., D. et M. Gaspard, E. Gravelotte et J. Turc[14].
La face nord de la Meije par le couloir du Z (voie du Z) a été gravie par Maurice Fourastier et Casimir Rodier le 13 août1933[14]. Une variante avec le couloir Tobey, dans la face nord du Grand pic de la Meije, sera gravie pour la première fois le 3 août 1947, par Gilbert Robino et Albert Tobey[14],[18]. Une autre variante, la « voie directe à la face nord », est ouverte en 1976 par P. Roux et J. Saadi[14].
En1935,Pierre Allain etRaymond Leininger tracent ladirectissime à la face sud du Grand pic. Une autre face sud, celle du Doigt de Dieu, est gravie pour la première fois par Victor Chaud et Jean Walden le.
En 1943 et 1944, dans l'objectif de protéger cet espace, une surface d'environ3 000 hectares est désignéesite classé selon la règlementation française[19],[20].
Pierre Girod et Robert Sandoz effectuent la première ascension du pilier nord-ouest du pic du Glacier Carré le 31 juillet 1956, puis la première du pilier diagonal à la brèche du Glacier Carré le[14]. Le 26 août 1961, M. et Mme Déchamp, Max Liotier, J. Véron réalisent la première ascension de la pente des Corridors ; la première descente à skis de cette dernière est effectuée par Christian Montaz et Bernard Puiseux en juillet 1977[14]. Les1er et 2 septembre 1962, c'est la « face nord directe » de la Meije qui est gravie pour la première fois, par Raymond Ginel etRaymond Renaud[14]. Le 18 août 1970,Pierre Chapoutot et Jean-Jacques Rolland font la première ascension du pilier nord-ouest du Grand Doigt de la Meije[14]. Le 4 juillet 1971, Jérôme Biju-Duval et Gilles Sourice réalisent la première face nord des arêtes (3e Dent)[14] ; le duo, complété par J.-M. Traynard, poursuit avec la première de la face nord directe de la Meije orientale le 6 juillet 1971[14]. Les 4 et 5 septembre 1971, le pilier nord-est (rive gauche du couloir Gravelotte) est gravi pour la première fois par Narcisse Candau et M. Debray[14].
Le, unbouquetin a été photographié à plus de 3 700 m d’altitude dans la face sud de la Meije[21],[22],[23]. Son cadre d'évolution est habituellement compris entre 500 et 3 300 m.
Un effondrement se produit le causé, d'après des spécialistes, par une forte dégradation dupergélisol présent derrière les tours. Les chaleurs du milieu d’été ont réchauffé cette zone et il n'y a eu que peu de températures négatives[24].
Par extension, on appelle « les vallons de la Meije » le domaine skiable original du village deLa Grave (1 400 mètres-3 560 mètres), dont les itinéraires de descente, situés intégralement en hors-piste et non sécurisés, passent au pied des glaciers de la Meije et duRâteau. Lestéléphériques des glaciers de la Meije, construits en1976-1977, permettent d'atteindre l'altitude de 3 200 mètres en bordure duglacier de la Girose. De là, untéléski permet de rejoindre, le Dôme de la Lauze (3 560 mètres) en passant par le glacier de la Girose. C'est ici que se trouvent les deux seules pistes damées et sécurisées du domaine skiable de La Grave, le plus haut de France.

La Meije est un objectif de choix pour les alpinistes et on y dénombre de multiples itinéraires dans des styles très variés[25].
L'ascension se fait généralement par l'arête Sud du Promontoire[26] (D-) et est généralement enchaînée avec la traversée des arêtes jusqu'au doigt de Dieu. À la suite de l'effondrement le de la brèche Zsigmondy, qui s'est alors abaissée de 20 m[27],[28], l'itinéraire est devenu plus difficile, et le contournement de la première dent (dent Zsigmondy) a été équipé en 1971 de câbles métalliques pour faciliter et sécuriser le passage. Depuis l'éboulement massif du à partir du haut de la rive droite du glacier Carré, cet itinéraire est compromis en été, du fait de la fonte du pergélisol[24].
La face Sud de la Meije est également le lieu de nombreuses voies rocheuses pour les amateurs d'escalade. On peut notamment citer :
ainsi que de nombreuses voies dites « modernes » équipées à l'aide depitons à expansion.
En face Nord, les voies sont généralement mixtes ou neigeuses :
Les autres sommets comme la Meije Orientale et le Doigt de Dieu sont plus faciles d'accès. Leur voie normale est sur le versant Nord et de niveau PD ; la Meije Orientale étant un itinéraire classique à ski.
Enfin, le tour de ce massif constitue certainement le raid à ski le plus parcouru du massif.
Deux refuges permettent d'accéder aux différents sommets de la Meije :
En 1911, paraît en feuilleton, dansLa Revue politique et littéraire, lanouvelleLe cas de Jean Bunant, du romancierÉdouard Estaunié — qui deviendra plus tard membre de l'Académie française : le récit se situe à La Grave et traite de la fascination croissante d'un homme venu de la ville pour la Meije[30],[31].
La Meije est une source d'inspiration ducompositeurOlivier Messiaen qui résidait fréquemment àLa Grave où se déroule depuis1998 lefestival international demusique contemporaineMessiaen au pays de la Meije[32].
La Meije est une source d'inspiration aussi pour de nombreux romans dont elle est le centre de l'intrigue. L'un des premiers estAccident à la Meije, un roman d'Étienne Bruhl, publié en et dont une partie de l'histoire se déroule sur l'arête sommitale de la Meije[33]. Cet ouvrage est souvent considéré comme le premier du genre « roman policier alpin »[34].
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