La Goutte de lait désigne une organisation destinée à distribuer du laitstérilisé aux mères qui ne peuvent pas allaiter leur enfant, à dispenser une consultation des nourrissons et à proposer une éducation maternelle enpuériculture ethygiène. Elle a été créée dans la communefrançaise deFécamp en 1894, à l'initiative du docteurLéon Dufour.
La mortalité infantile est trop importante[N 1], et devient, pour nombre de médecins une priorité.
La premièreGoutte de lait est fondée historiquement en 1894[1], àFécamp, par le docteurLéon Dufour[2] (1856-1928).
En cette même année 1894, l'association de bienfaisance du dispensaire de Belleville fondée en 1892 àParis (19e) sous l'impulsion du docteurGaston Variot[3] (1855-1930) et dont les préoccupations sont similaires, adhère à l'idée et adopte le complément de nomLa Goutte de lait. Son dispensaire, inauguré en 1892 au 126,boulevard de Belleville, également renommé, a pour but d'accueillir les familles pauvres de Belleville et de leur offrir, en faveur de leurs nourrissons et jeunes enfants de moins de deux ans, des services entièrement gratuits tels que conseils aux mères, consultations pédiatriques régulières, remise de médicaments prescrites et fourniture de lait stérilisé gratuite (ou à prix réduit) si la mère ne peut pas allaiter[4]. L'œuvre est financée par des initiatives privées. Depuis sa fondation, elle est placée sous le haut patronage de personnalités influentes[4],[N 2]. L'établissement est reconnu d'utilité publique en 1909[4].
En janvier 1899, le docteur Caron organise la Goutte de lait duHavre, qui fera l'admiration des congressistes de 1905 (voir ci-dessous) ; la même année, le docteur Lourier crée l'œuvre d'Elbeuf[5] ;
En 1899 est créée l'œuvre de la Goutte de lait deVersailles dont le bâtiment (1910), au 9 rue Richaud, est devenu une crèche et sert de relais d'assistantes maternelles[6] ;
La même année est créée La Goutte de lait deTours par le docteur Paul Grasset (1864-1934), médecin de l'hôpital pour enfants de Clocheville et secrétaire du premier congrès international des Gouttes de lait deBruxelles en 1906.
En 1900, l'œuvre de la Goutte de lait deRennes est fondée par la Commission administrative du bureau de bienfaisance de la ville, sur la proposition du docteur Henry Leray ; l'inauguration a lieu au début du mois de janvier de l'année suivante[7] ;
en février 1904, La Goutte de Lait deRoubaix commence à fonctionner grâce à la fondation, quelque temps auparavant, sous l'impulsion de Monsieur Charles Deschodt, ducomité roubaisien de Protection de l'enfance et à la donation d'un industriel roubaisien émigré aux Etats-Unis. Elle a été désaffectée en 1959. Ses bâtiments, construits au 31, boulevard du Général-Leclerc sur les plans de l'architecteAlbert Bouvy et inaugurés en 1912 ont été préservés[10].
Le peintreJean Geoffroy immortaliseLa consultation - La Goutte de Lait de Belleville en 1901 et réalise un triptyque en 1903 :L’œuvre de la Goutte-de-Lait.
À la veille de laPremière Guerre mondiale, près de 200 établissements ont déjà ouvert leurs portes[11] et l'action du docteur Dufour est reconnue et distinguée puisque ce dernier est élevé au grade de chevalier de laLégion d'honneur[12] le.
Les résultats de l'action de la Goutte de lait sur la mortalité infantile - en particulier due aux affections du tube digestif ou pargastro-entérite - sont réels et significatifs[13].
De nombreuses actions ayant pour but la récolte d'argent sont réalisés chaque année. Ainsi des kermesses ou appel au don sensibilisent la population locale sur l'utilité et la nécessité de cette institution. Une réplique célèbre deMarilyn Monroe dans le filmCertains l'aiment chaud (1959) se réfère à son action pour la Goutte de lait[14].
Progressivement, l'aide sera apportée à la mère pendant la grossesse, pendant et après l'accouchement, et l'enfant sera suivi pendant les deux premières années de sa vie.
Lachapelle - L'œuvre des gouttes de lait à Montréal, 1910
Fort du succès national, l'institution s'est exportée auMaghreb (àCasablanca, àAlger…), comme enBelgique (àLeval-Trahegnies…) également auQuébec au début des années 1900 où ces endroits étaient désignésles dispensaires de la Goutte de lait[15],[16].
Dispensaire de la goutte de lait de l’hôpital Sainte-Justine vers 1912.
Plusieurs Canadiens-français ont contribué au développement de ces cliniques dont entre autresSéverin Lachapelle,Irma LeVasseur, Georges-Marie LePailleur, curé à l'église Nativité-de-la-Sainte-Vierge-d'Hochelaga; ce dernier avait voyagé en France, avait étudier et travaillé avec le docteur Variot à Belleville. À son retour au Québec en 1910, avec l'aide de médecins hygiénistes, Il avait ouvert un dispensaire permanent dans sa paroisse dans la crypte de l’église. Des médecins hygiénistes venait à l'occasion donner des conférences devant 600 ou 700 femmes[17]. Plus tard, ces cliniques étaient dispersées à plusieurs endroits, auCentre hospitalier universitaire Sainte-Justine et plus tard dans de nombreuses paroisses afin de rejoindre le plus de familles possibles. À Québec, l'organisation portait le nom de l'Association Québécoise de la Goutte de Lait[18]. Le dispensaire pour l'assistance maternelle est « La Goutte de lait » àTrois-Rivières, ouvert en mai 1923.
La Goutte de lait deSoissons, devenue relais des assistantes maternelles.
Les dissolutions s'étalent dans le temps selon les nécessités réelles de chaque municipalité :Roubaix en 1959 (créée en 1904),Beaune en 1979 (créée en 1923) ouNice en 1998 (créée en 1904).
De nos jours, si l'institution n'existe plus, les structures d'accueil se sont reconverties et l'on retrouve ainsi des crèches, des centres dePMI, des centres d'information familiale[19], ou autres cabinets de soin comme àRoubaix[20],Vernon[21] ouMeurchin[22].
La collectionLa Goutte de lait au musée des Pêcheries de Fécamp
Dans les derniers vers de l’œuvre d'Alfred de Musset,Sur la naissance du comte de Paris[23], on y retrouve :
« Ce n'est qu'un fils de plus que le ciel t'a donné France, ouvre-lui tes bras sans peur, sans flatterie Soulève doucement ta mamelle meurtrie, Et verse en souriant, vieille mère patrie, Une goutte de lait à l'enfant nouveau-né. »
↑Fécamp. Musées municipaux. Seine-Maritime,Les Biberons du docteur Dufour : [exposition], Musées municipaux de Fécamp, 1997, Fécamp, Musées de Fécamp,, 232 p.(ISBN2-908858-19-3), page 83, Manuelle Sautereau, "L’œuvre de la Goutte de lait de Fécamp"