Koppa (capitale :Ϙ, minuscule :ϙ) forme épigraphique, comme numéral moderneϞ (ϟ en minuscule) ; (engrecϙόππα puisκόππα) est le nom ancien d’unelettre archaïque de l’alphabet grec servant à noter un type de /k/. La lettre utilisée avec cette fonction (« koppa littéral ») a disparu de l’alphabet classique mais a été conservée, sous une forme différente, dans lanumération pour noter le nombre 90 (« koppa numéral »).
Remarque : les deux fonctions et formes dukoppa sont distinguées parUnicode. Certaines polices de caractères, cependant, les confondent.
Note : les transcriptions phonétiques suivent l'alphabet phonétique international. Les lettres grecques citéesautonymiquement comme lettres ne sont pas mises en italique, au contraire des lettres latines.
On désigne ainsi le signe Ϙ (ϙ en minuscule, qui est une invention récente puisque la lettre, archaïque, ne s'est employée qu'à l'époque où le grec ne se traçait qu'encapitales) quand il sert à noter non pas unphonème mais unallophone du phonème /k/, à savoir [ḵ], c'est-à-dire un type de /k/ articulé en arrière de lazone vélaire, avant la consonne qu'on noterait [q]. Une telle distinction,non pertinente en grec, ne s'est pas conservée longtemps.
Lorsque les peuples grecs ont emprunté auVIIIe siècle avant l'ère chrétienne leslettres phéniciennes pour créer leurs alphabets (il a en effet existé de nombreuses moutures de l'alphabet grec avant quele modèle ionien de Milet ne s'impose à Athènes en -403), ils se sont servis de la lettreqōf (on peut trouver d'autres noms, ceux des lettres phéniciennes ne nous étant pas directement attestés mais étant reconstruits) pour transcrire l'allophonenon pertinent [ḵ] duphonème /k/, son qui, aux oreilles grecques, était le plus proche de la valeur phénicienne de la lettre, à savoir [q].
Cette distinction n'est pas utile en grec (alors que dans leslangues sémitiques [k] et [q] ne se confondent pas) : en effet, [ḵ] n'est qu'unevariante combinatoire de /k/ devant les voyelles /o/ et /u/ (directement ou non : une ou plusieurs consonnes peuvent s'intercaler entre [ḵ] et /o, u/) : le passage de [k] à [ḵ] est donc automatique et il n'est pas possible de trouver [k] devant /o/ et /u/ ou [ḵ] ailleurs que devant ces voyelles (de même qu'en français le /k/ decoup est articulé plus en arrière que celui dequi sans qu'on puisse opposer ces deux types de /k/, qui ne forment donc qu'un seul phonème). La lettre, nomméeϙόππα /ḵóppa, est cependant présente dans de nombreux alphabets grecs anciens. On la trouve par exemple dans ceux deThéra, deCrète, deNaxos, d’Athènes, deMilet et d’Arcadie, entre autres.
Le tracé de la lettre, depuis le phénicien, a évolué de diverses manières selon les alphabets ; on la représente maintenant sous une forme standardisée Ϙ, proche de notreQlatin (qui en est tiré). D’autres formes sont cependant attestées, mais rarement utilisées dans les éditions modernes de textes grecs, dont une semblable à l’œil phénicien,.
L'existence dukoppa littéral intéresse surtout lepaléographe et l'épigraphiste : la consonne ne notant pas un phonème distinct, il est rare, hormis dans l'étude de l'écriture grecque elle-même, qu'on l'utilise. Quand il convient de représenter fidèlement un texte archaïque, cependant, lekoppa retrouve son intérêt.
Par exemple, l'ouvrage deMichel Lejeune cité en bibliographie, abordant le cas dukoppa au paragraphe 24, cite les mots suivants (en minuscules ; on a préféré ici lescapitales pour bien marquer le caractère épigraphique des termes) : ΛΕϘΥΘΟΣ (λήκυθος « petit vase »), ΚΑϘΟΝ (ionien-attique : κακόν « mauvais »neutre), ΛΕϘΤΟΙΣ (λεκτοῖς « choisis »datifpluriel), ϘΟΡΕH (κόρῃ « jeune fille »datifsingulier), etc.
Entre-temps, les Romains, empruntant les lettres étrusques pourleur propre alphabet, ont hérité ces trois lettres pour un même son. Si le destin deK etC (qui a donné ensuiteG) n'importe pas ici, il convient de noter qu'ils ont conservé lekoppa, devenuQ dans la graphiequadrata, laquelle s'est continuée jusqu'à nous. À la manière des Étrusques, ils ont gardé auQ son rôle de graphème allophonique de /k/ devant /o/ et /u/ et l'ont étendu à la notation du phonème indépendant /kʷ/ (comme dans « quadrupède ») en considérant qu'il s'agissait d'un /k/ devant un /u/ consonne (écrit doncQV), ce qui est inexact puisque /k/ et /kʷ/ sont, en latin, deux phonèmes différents : on trouve ainsi, dans les inscriptions archaïques,CENSOR (« censeur »),KAPVT (caput, « tête ») maisQOMES (comes, « chevelure »,QVRA (cura, « soin ») etAQVA (« eau »). Rapidement,Q a été limité audigrammeQV notant /kʷ/,C prévalant dans les autres cas.
Bien que maintenant inusité en tant que lettre (sauf dans les ouvrages didactiques, cf.supra), lekoppa continue d'être employé comme signe de lanumération alphabétique grecque avec la valeur 90. Sonœil n'est cependant plus celui de la lettre ancienne mais celui dit « en éclair » ou « enZ ». C'est le seul utilisé dans les documents légaux grecs : lekoppa ancien utilisé comme nombre ne se rencontre que dans les éditions actuelles de textes anciens. L'utilisation de la forme onciale ouverte (Ҁ), que l'on rencontre dans certaines des éditions de textes anciens, n'est pas pertinente : en effet, la lettre pourrait être confondue avec ledigamma /stigma (Ϛ).
Cette modification d'aspect s'explique historiquement ; comme la lettre n'était plus comprise ni utilisée, si ce n'est dans la numération, elle a subi une simplification du tracé :
tout d'abord, la boucle s'est ouverte dans la graphieonciale : Ϙ → Ҁ (graphie conservée encyrillique) ;
la boucle est réduite tandis que le jambage est étendu : Ҁ → (graphie conservée dans l'alphabet gotique) ;
le tracé arrondi est brisé en trois segments ne reprenant que l'allure générale duductus : → Ϟ.
Les lettreskoppa sont codées parUnicode aux emplacements suivants :
Nomination lettre
Représentation
Code
UTF-8
UTF-8, représentation octale
entité numérique décimale HTML
koppa littéral (ou Qoppa) en capitale
Ϙ
U+03D8
00xCF 0x98
\317\230
Ϙ
koppa littéral (ou Qoppa) en minuscule
ϙ
U+03D9
0xCF 0x99
\317\231
ϙ
koppa numéral en capitale
Ϟ
U+03DE
00xCF 0x9E
\317\236
Ϟ
koppa numéral en minuscule
ϟ
U+03DF
0xCF 0x9F
\317\237
ϟ
Les deuxkoppas n'ont été distingués l'un de l'autre qu'à partir de la version 3.2 d'Unicode, ce qui explique que des polices anciennes les confondent et affichent l'un des tracés pour l'autre.