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Kojiki

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Kojiki
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LeKojiki(古事記?,litt.Chronique des faits anciens aussi prononcéFurukoto fumi) est un recueil de mythes concernant l’origine des îles formant leJapon et deskamis, divinités dushintoïsme. Avec leNihon shoki, les légendes contenues dans leKojiki ont inspiré beaucoup de pratiques et de croyances dushintoïsme. LeKojiki (712) et leNihon shoki (720) sont souvent comparés et analysés ensemble, sous l’appellationKiki. Leur ressemblance vient de leur but commun : légitimer la lignée impériale. LeNihon shoki permet aussi de remanier aux limites duKojiki[1]. LeKojiki est toutefois généralement considéré comme le plus ancien écrit japonais existant encore de nos jours et est entièrement écrit enlangue japonaise[2],[3], encaractères chinois.

Édition française duKojiki.

LeKojiki est une compilation des récits du conteurHieda no Are par le chroniqueurŌ no Yasumaro, sur l’ordre de l’impératriceGenmei. Il lui fut offert en712.

Contexte historique et politique

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AppeléYamato par ses habitants, le nord duKyūshū et l'est duHonshū composent, à partir duVIe siècle, un ensemble de territoires dirigés par des familles (maison ouuji) réunies autour d'un monarque appeléōkimi, appellation transcrite à l'aide de lettres chinoises qui signifient « grand roi » ou « grand souverain », et installé dans la région duKinki. Cette monarchie, le Yamato, est en réalité placée sous la domination des dynasties chinoisesSui etTang qu'ils appellent péjorativement le pays des « Wa »[4].

Cependant, l'arrivée de colons et de marchands venus de la péninsule coréenne (Kikajin) eux-mêmes porteurs de nouveaux schémas culturels et politiqueschinois poussent lesōkimi, pris dans d'incessantes luttes intérieures minant progressivement leur autorité, à adopter progressivement le modèle de gouvernement plus stable deChang'an[4]. Ainsi leVIIe siècle voit se déclencher plusieurs réformes qui visent à structurer le royaume de manière plus centralisée : les réformes deShōtoku Taishi et de la reineSuiko en, puis laréforme de Taika menée parTenji en et les changements plus radicaux deTenmu (règne de à) poursuivis ensuite par sa veuveJitō (règne de à). Ces deux derniers personnages dotent également le pays d'un arsenal juridique complet compilé en et directement inspiré du système chinois : lecode de Taihō. Ils structurent le Yamoto autour d'une administration étatique complexe mais stable et le soustraient à la dépendance chinoise[5],[6].

En outre, Tenmu, tout en favorisant l’essor dubouddhisme, duconfucianisme et dutaoïsme, rapproche davantage l'image du monarque des divinités locales : il se désigne lui-même comme « manifestation vivante de la divinité » (現神 (akitsukami?)) et confirme sa filiation avec ladéesse du soleilAmaterasu (même si les souverains ōkimi le précédant se réclamaient déjà de la déesse). Il envoie régulièrement une vestale ausanctuaire d'Ise (sanctuaire d'Amaterasu) et inaugure la coutume qui consiste à en reconstruire le temple central tous les vingt ans. Dans cette optique, il renomme le Yamato enJapon — Nihon ouNippon(日本?) étymologiquement « origine (本,hon) du Soleil (日,ni) » — et devient l’empereur du « pays où le soleil se lève » face à la Chine, le « pays où le soleil se couche ». Il prend également le titre deTennō[Note 1] et proclame ainsi l'équivalence de sa position avec celle des empereurs chinois. Parallèlement à cela, il ordonne en la confection d'une chronique officielle, leKokushi ou leJōko no shoji, qui fixe « l'histoire officielle de la monarchie et des grands faits anciens ». Ce texte, aujourd'hui disparu, a fort probablement servi de base d'inspiration à la rédaction des chroniques impériales de, leKojiki et de, leNihon shoki[8],[6].

Rédaction

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L'empereurTenmu aurait ordonné àHieda no Are de compiler les traditions et généalogies de l’époque. Hieda no Are se serait inspiré duTeiki et duKyūji[9]. À la mort de Tenmu, le projet fut repris par l’impératriceGenmei, qui ordonna à Ō no Yasumaro de mettre par écrit ce qu’avait recueilli Hieda no Are. Il mit quatre mois à le faire et remit le résultat final à Genmei le. Cependant, faute de versions intermédiaires, on ignore ce que Ō no Yasumaro y a ajouté. Même si aujourd’hui leKojiki est catégorisé comme une histoire mythique, à l’époque de sa rédaction, son récit faisait partie intégrante de l’histoire du Japon[10].

L’écriture duKojiki avait comme but de légitimer la lignée impériale du Japon, puisque celle-ci descendait des Kamis représentés dans le récit. LeKojiki représente donc un monde unifié auquel aspire le Japon de l’époque. Sa compilation n’arrête tout de même pas les autres clans japonais de tenir tête à la lignée impériale[10]. De plus, en raison du but premier de sa rédaction, le récit ne constitue pas les convictions de l’ensemble de la population japonaise de l’époque[11].

Malgré la présence du bouddhisme dans le pays au moment de la rédaction, on n’y observe pas de mention dans leKojiki[12]. Toutefois, on note une certaine influence du confucianisme chinois dans le récit[13]. De plus, même si le livre permet une compréhension de la religion shintoïste, il n’y a aucune présence du terme « shinto » dans le récit. La présence de ce terme se trouve pour la première fois dans leNihon shoki[10].

Contenu

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Page d’une version manuscrite de 1371 à 1372.

LeKojiki contient de nombreuses chansons et poèmes, ce qui est commun dans les autres écrits japonais de l’époque[14]. Alors que les récits historiques et les mythes sont écrits sous une forme de chinois mélangé avec un nombre important d’éléments linguistiques japonais, les chansons sont écrites avec des caractères chinois employés pour transmettre les sons seulement. Cette utilisation spéciale des caractères chinois s’appelleman'yōgana ; une connaissance de la chose est essentielle pour comprendre ces chansons. De plus, elles ont été écrites dans un dialecte de la région deYamato duVIIe auVIIIe siècle environ appeléJōdai nihongo(上代日本語?,litt. « japonais de l’âge supérieur »).

LeKojiki est divisé en troisvolumen : leKamitsumaki(上巻?,litt. « Rouleau précédent »), leNakatsumaki(中巻?,litt. « Rouleau intermédiaire ») et leShimotsumaki(下巻?,litt. « Dernier rouleau »). Il s’agit de la numérotation chinoise des volumes d’un livre[15]. Même s’il est divisé en trois parties, il n’y a pas de structure précise dans le récit. Il n’y a pas non plus d’histoire, de thème ou encore de rôle principal. Le tout rend sa lecture plus difficile. Il y a donc certaines incohérences[14].

LeKamitsumaki inclut la préface et se concentre sur les divinités de la création et sur la naissance de diverses autres déités et de leurs aventures fantastiques. La plus célèbre de ces aventures est celle d’Amaterasu, la déesse du soleil, qui envoya sur terre son petit-filsNinigi pour fonder les prémices de la lignée impériale.

LeNakatsumaki débute avec l’histoire du premier empereur, Iwarehiko (ou son nom posthume :Jinmu), de la défense de ses terres natales d’Izumo àKyūshū jusqu’à sa conquête duJapon et se termine avec le15e empereur,Ōjin.Plusieurs de ces histoires sont de l’ordre du mythe et le contenu historique allégué est hautement suspect.[réf. nécessaire] Par ailleurs, pour des raisons inconnues, le2e et le9e empereurs japonais sont cités, mais leurs accomplissements sont en grande partie oubliés.Certains historiens pensent que ces empereurs furent inventés afin de créer une illusion de vraisemblance dans les dates.[réf. nécessaire]

Une des principales histoires de ce volume est celle deYamato Takeru.

LeShimotsumaki couvre du16e empereur,Nintoku, au33e empereur,Suiko et, à la différence des volumes précédents, fait référence de façon très limitée aux déités qui sont pourtant si présentes dans le premier et deuxième volume. Toutefois, peu de renseignements sur le24e et du33e empereur sont donnés. Les derniers chapitres sont purement chronologiques.

Intérêt historique duKojiki

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LeKojiki est basé sur des légendes populaires datant duIVe auVIe siècle (avant l’arrivée dubouddhisme au Japon) et n’est donc pas considéré comme une source historique fiable. Cependant, c’est une œuvre essentielle pour comprendre la pensée shintoïste[9].

Longtemps oublié, leKojiki a vu sa popularité revenir durant l’époque edo, grâce à l’arrivée de l’imprimerie au Japon. Avant que les livres anciens ne soient imprimés, seuls les plus haut placés pouvaient lire ceux-ci, c'est-à-dire l’aristocratie japonaise ou encore les prêtres[16]. La compilation duKojiki visait entre autres la cour de Yamato[13]. Néanmoins, avec l’imprimerie de masse, une plus grande portion de la population a eu accès aux livres anciens, dont leKojiki[17].

Une école de pensée s’est particulièrement intéressée au Kojiki, celle dukokugaku. Lekokugaku, qui signifie écoles des études nationales, débuta durant la période d’edo, autour du XVIIIe siècle[18]. Leur intérêt d’études se centrait sur le besoin de revenir au Japon traditionnel. En effet, selon ses membres, le Japon était impur en raison de la présence extérieure, par exemple de la Chine et du confucianisme. Pour chasser cette impureté, il était donc impératif d’apprendre les textes anciens[18]. Lekokugaku visait donc l’étude de la littérature de la religion japonaise (le shintoïsme), de l’histoire du Japon, de la société ancienne du Japon ou encore de l’ethnologie au Japon[19]. Cinq penseurs ont été particulièrement attachés à cette vision : Keichuu[20], Kada no Azumamaro, Kamo no Mabuchi, Hirata Atsutane et Motoori Norinaga[18].

Motoori Norinaga (1730-1801) s’attardera énormément auKojiki durant sa vie[21]. Durant la deuxième moitié du XVIIIe siècle, Norinaga écrivit leKojiki-den (qui signifie commentaires duKojiki) répartit en 44 tomes[22]. Le commentaire duKojiki de Motoori Norinaga souhaitait analyser leKojiki comme un texte sacré d’un Japon idéal vivant en harmonie[22].

Motoori Norinaga avait choisi d’étudier leKojiki et non leNihon shoki puisque selon lui, leKojiki se rapprochait le plus de la langue japonaise tandis que leNihon shoki avait une plus grande influence chinoise dans son texte au niveau de la langue que leKojiki[23].

Après avoir lui-même été disciple de Kamo no Mabuchi[20], Motoori Norinaga a créé une école sur la pensée nationale, qui étudiait et discutait des idées dukokugaku et donc de la littérature japonaise. Cette école se nommait Suzuno Ya, débuta autour de 1773 et sera ouverte jusqu’à sa mort, en 1801[24].

Grâce à l'œuvre de Motoori Norinaga, leKojiki a vu sa popularité augmenter en raison de ses commentaires sur le shintoïsme présent dans le récit ancien. Ensuite, la montée du nationalisme japonais durant le XIXe et les XXe siècles porte aussi une influence sur l’étude duKojiki durant cette époque[14].

Le livre n’était presque plus étudié dans l’après-guerre, étant jugé complètement non historique. Néanmoins, à partir des années 1960, les historiens ont commencé à penser que certains éléments duKojiki pouvaient être basés sur des faits réels. De plus, il s’agit d’une des seules sources indigènes sur le Japon de cette époque. Son récit permet d’observer une vision de la culture et des croyances japonaises originelles, ce qui rend son étude aujourd’hui importante pour l’histoire du Japon[14].

La localisation exacte des évènements duKojiki (tout comme celle duYamato) n’est pas connue. Dans le texte, le Japon est appelé pays intermédiaire(葦原中つ国,Ashihara no Nakatsukuni?,litt. « le pays intermédiaire aux plaines de roseaux »). Le pays est dit intermédiaire car situé entre la plaine céleste(高天原,Takamagahara?) et le pays des morts(黄泉の国,Yomi no kuni?). Le pays intermédiaire est relié à la plaine céleste par le pont flottant du ciel(天の浮橋,ame no ukihashi?) et au pays des morts par la« pente vers le pays des ténèbres »(よもつ平坂,yomotsu hirasaka?).

En ce qui concerne les dates des évènements duKojiki, il n’y en a que très peu, environ quinze qui représentent en majeure partie les différents décès de la lignée impériale. De plus, la dernière personne citée de la lignée est l’impératrice Suiko, morte en 628, soit presque un siècle avant la compilation duKojiki[25].

Notes et références

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Notes

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  1. En ce sens, Tenmu est ainsi le premier souverain à porter le titre deTennō (empereur).Kōgō est l'équivalent de impératrice etŌji de prince[7].

Références

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  1. (en) MarkCartwright, « Kojiki », surWorld History Encyclopedia(consulté le)
  2. René Sieffert, « Kojiki », suruniversalis.fr,Encyclopædia Universalis(consulté le).
  3. Christopher Seeley,A History of Writing in Japan(lire en ligne).
  4. a etbSouyri 2010,p. 81-82.
  5. Souyri 2010,p. 81-82 et 121.
  6. a etbPhilippi 2015,p. 16.
  7. Souyri 2010,p. 118.
  8. Souyri 2010,p. 121-133.
  9. a etbShibatata et Shibata 1969.
  10. ab etcHardacre, H. (2016).Shinto : A History. Oxford University Press, 48.
  11. Hardacre, H. (2016).Shinto : A History. Oxford University Press, 47.
  12. Sieffert, R. (s.d). Kojiki. DansEncyclopædia Universalis. https://www.universalis-edu.com/encyclopedie/kojiki/2-le-contenu-du-kojiki/
  13. a etbIsomae, J., et Subramanian, M. (2014).Japanese mythology : Hermeneutics on scripture. Taylor & Francis Group, 20.
  14. abc etdCartwright, M. (2017, 12 mai).Kojiki. World History Encyclopedia. https://www.worldhistory.org/Kojiki/
  15. En chinois,, shàng signifie dessus, mais également précédent et premier,, xià signifie sous, mais également suivant et dernier.
  16. Hardacre, H. (2016).Shinto : A History. Oxford University Press, 325.
  17. Hardacre, H. (2016).Shinto : A History. Oxford University Press, 326.
  18. ab etcRubinger, R. (1982).Kokugaku Tokugawa Juku : Motoori Norinaga’s Suzu No Ya. Princeton University Press, 158.
  19. Kazuya, M. (1997). Motoori Norinaga.Ebisu,15 : 117. https://doi.org/10.3406/ebisu.1997.969.
  20. a etbKazuya, M. (1997). Motoori Norinaga.Ebisu,15 : 118. https://doi.org/10.3406/ebisu.1997.969.
  21. Hardacre, H. (2016).Shinto : A History. Oxford University Press, 327.
  22. a etbHardacre, H. (2016).Shinto : A History. Oxford University Press, 329.
  23. Kazuya, M. (1997). Motoori Norinaga.Ebisu,15 : 128. https://doi.org/10.3406/ebisu.1997.969.
  24. Rubinger, R. (1982).Kokugaku Tokugawa Juku : Motoori Norinaga’s Suzu No Ya. Princeton University Press,163.
  25. Macé, F. Le Kojiki, une Énéide longtemps oubliée ?.Ebisu 49 : 120. https://doi.org/10.4000/ebisu.801

Annexes

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Bibliographie

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Texte original

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Traductions et commentaires

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Bibliographie générale

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Articles connexes

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Liens externes

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