Les canaux Ak-Yap et Sertchali traversent la ville.
La ville de Khiva compte 95 246 habitants[5] soit un peu plus de la moitié de la population du district dont elle est le chef-lieu. Sa superficie est de883 hectares.
À partir de 994, Khiva appartient à la principauté indépendante duKhwarezm et, vers 1001, le médecin et philosopheIbn Sina — connu en Occident sous le nom d'Avicenne — décide de s'y installer après avoir quittéBoukhara[7].
La situation politique et militaire de la région (de l'Asie centrale auMoyen-Orient) est instable. À cette époque, les dynasties d'origine turque et celles d'origine perse sont en conflit permanent, faisant chuter les capitales. Avicenne doit fuir à nouveau, car il ne souhaite pas servir sous lesTurcs, ennemis des Persans[7].
Itchan Kala (« Cité intérieure », en turc), qui couvre26 hectares, est la ville intérieure de Khiva, retranchée derrière des murailles de brique hautes d'une dizaine de mètres, faisant partie de l'ancienne oasis, qui était l'ultime étape des caravaniers avant la traversée du désert en direction de lamer Caspienne et de laPerse[10].
En 1717, les quatre mille soldats russes duprince Bekovitch-Tcherkasski, qui entendent libérer les esclaves russes de Khiva, sont massacrés aux portes de la ville[8].
Bien qu'ayant conservé peu de monuments très anciens, Itchan Kala constitue un exemple cohérent et bien préservé d'architecture musulmane d'Asie centrale avec des constructions remarquables, comme la mosquée Djouma, les mausolées et lesmédersas, ainsi que les deux magnifiques palais édifiés au début duXIXe siècle par lekhan Alla-Kouli.
La plupart des organisations et des administrations publiques, y compris le khokimiat (mairie), les tchaïkhana (maisons de thé), les hôtels, les banques ou encore les bureaux de poste, se trouvent dans les rues Najmiddin Koubro, Amir Temour ou Ferouz. Les établissements médicaux comme l’hôpital central, la maternité, la polyclinique pédiatrique, le collège de médecine sont situés à l’ouest de la ville.
La fabrique detapis, l’usine des produits decéramique, la fabrique de confection, la fabrique des articles de souvenir y fonctionnent. Douze écoles secondaires, cinq centres d’art d’enfants, théâtre de marionnettes, stades, parcs sont ouverts pour accueillir les enfants.
9 villages de territoire de45 773 hectares appartiennent à la région de Khiva dont la population atteint 116 249 habitants. La surface agricole cultivée occupe14 321 hectares de ce territoire. Dans le domaine agricole du Khorezm, c'est surtout la culture ducoton et dublé qui y est développée. Le canal Palvan, qui provient de l'Amou-Daria, a une grande importance quant à l’irrigation des terres de cette région.
Khiva est aussi une ville d'artisanat. L’association des artisans du Khorezm maintient et développe l’artisanat de lasculpture sur bois et de la céramique. La particularité de l’artisanat de la sculpture sur bois de Khiva est la garniture des portes, colonnes, meubles. Les maîtres sculpteurs utilisent le bois d’orme et d’autres arbres locaux. Pour la conservation de la surface, on emploie l’huile de coton etde lin. La peinture d’art de Khiva est aussi développée. Les maîtres de ce type d’art prennent part aux travaux de restauration desmonuments historiques[Lesquels ?] et à la décoration des immeubles modernes.
Ses monuments permettent évidemment uneactivité touristique importante, faisant de Khiva l'une des destinations les plus visitées du pays.
Kunya Ark (vieille forteresse) a été utilisée comme l’une des résidences des khans de Khiva jusqu’en 1919. La construction de Kunya Ark a débuté en 1686-1688 sous Arang Khan, fils d'Anoucha Khan. Le palais actuel a pris sa structure actuelle à partir du règne d’Altuzar Khan (1804-1806). On distingue tout particulièrement[12]:
Lamosquée d’été (1838) se caractérise par uniwan imposant, avec six colonnes, dont le plafond est très coloré et les parois recouvertes de céramiques bleues et blanches représentant des motifs géométriques ou végétaux réalisées en particulier par Abdoullah Djin. L’iwan étant orienté vers le nord pour favoriser la fraîcheur, lemihrab est orienté vers le sud et non en direction deLa Mecque, comme le veut pourtant la règle habituelle. La mosquée est dédiée àAbou Bakr, deuxièmecalife et compagnon deMahomet.
Laprison (Zindan) se situe à l’extérieur de l’entrée à principale, sur la gauche. Elle comprend aujourd’hui deux salles. Les conditions de détention sont restituées par des mannequins et la première salle présente des outils de torture et d’exécution.
Lasalle du trône (1804-1806) proprement dite est constituée d’une grande salle donnant sur uniwan. Elle servait au khan pour ses audiences publiques. Le trône était disposé dans une niche située à droite en entrant dans la salle[13]. Le plafond est décoré de motifs géométriques colorés[14].
L'aïvan est soutenu par deux colonnes dont les bases sont en marbre gravé. Le plafond est revêtu de panneaux de bois peint, où les teintes jaunes et rouge dominent. Les parois sont décorées de majoliques où les couleurs bleue et blanche sont prédominantes, à l’époque de Alla Kouli Khan. Les portes donnant accès à la salle du trône sont finement travaillées. L’iwan est orienté vers le nord pour préserver la salle du trône d’une chaleur excessive durant l’été.
Les audiences avaient également lieu, durant l’hiver, dans uneyourte installée sur la plateforme circulaire au milieu de la cour intérieure.
La cour est entourée de bâtiments dont certains présentent une loggia.
LeTach Khavli, oupalais de pierre (1830-1838), est situé dans la partie Est d'Itchan Kala. Il a été construit par Alla Kouli Khan. Il est resté un lieu de résidence des Khans jusqu'en 1880, quand Mohammed Rahim Khan II revint à Kunya Ark. Il comprend plus de 260 pièces. La décoration a reçu le concours du céramiste Abdoullah Djinn.
Les différentes parties de l’édifice sont construites selon leur fonction et constituent un ensemble compact regroupé autour de trois cours correspondant aux trois fonctions principales : le harem (1830-1832) recouvrant la moitié nord du palais, la salle de réception ouIchrat Khaouli (1832-1834), située dans le quart sud-est, et la Cour de Justice ouArz Khaouli (1837-1838) recouvrant approximativement le quart sud-ouest. Ces trois unités sont caractérisées par les principes de la cour àiwan et de l’iwan à une colonne, utilisé isolément ou de manière groupée comme dans la cour du harem.
Dans la partie sud de la cour du harem sont construits cinq iwans : quatre étaient destinés à chacune des épouses légitimes du khan, le cinquième, à gauche, légèrement plus haut et plus large, plus richement décoré, était celui du khan. Chaque iwan est séparé de celui qui lui est adjacent soit par une paroi pleine, soit par une construction comportant une entrée surmontée d’une fenêtre. Chaque iwan comporte une colonne en bois finement sculpté posée sur un socle en marbre. Un disque de feutre a été placé entre le socle en marbre et la colonne de bois pour préserver des effets des tremblements de terre. La partie nord du harem est réservée aux servantes et aux concubines et présente, en étage, une alternance de loggias et de parties pleines. La décoration de l’ensemble se caractérise essentiellement par des carreaux de faïence à motifs géométriques et floraux de tonalités bleue et blanche. Les parois sont incrustées de petits éléments de couleur vert jade qui rappellent un symbole zoroastrien.
Vue depuis la cour du harem de Tach Khaouli.
Les iwans vus depuis la cour du harem.
L'iwan réservé au khan.
Vue sur les pièces réservées aux concubines et aux servantes
La salle de réception, ouIchrat Khaouli, autour d’une cour carrée, présente un iwan sur le côté sud, décoré de majoliques. La partie Est de la cour comporte deux plateformes circulaires destinées à installer des tentes pour recevoir les invités qui y séjournent.
La Cour de Justice, ouArz Khaouli, était le lieu où le khan tranchait les litiges et rendait justice. Les murs sont eux aussi décorés de revêtements defaïence. Deux escaliers latéraux permettent l’accès à la plateforme surélevée de l’iwan au fond duquel se trouvent trois portes. Une plateforme destinée à installer une yourte est disposée dans la cour, dans le prolongement de la colonne de l’iwan, en parfaite symétrie.
Lamédersa Mohammed Rahim Khan (1871) est une anciennemédersa (ou madrassa) construite par lekhan de Khiva,Mohammed Rahim Khan II (1845-1910), qui composait des poèmes sous le nom de plume de Ferouz. Devant la façade principale à deux étages, elle offre une avant-cour entourée de bâtiments à coupoles d’un étage. On accède à la cour principale par un portail (pishtak) imposant.
Portail principal de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Façade sur deux niveaux dans l'avant-cour de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Un des trois côtés à un seul niveau dans l'avant-cour de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Une cellule de l'avant-cour sur la façade à deux niveaux de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Détail des bandes verticales entre chaque série de cellules de l'avant-cour (façade à deux niveaux) de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
La cour principale possède quatreiwans avec quatre petites tours aux angles. Il y avait 76 cellules (hujra). Les iwans comportent en hauteur une frise avec des inscriptions en stylenastaliq. Les quatre coins de la cour permettent chacun l'accès à trois cellules. La structure extérieure des cellules suit un modèle classique : niche avec une porte en bois sculpté, une barre transversale, et au-dessus une fenêtre en forme de grille géométrique de couleur blanc cassé. Dans le milieu de la cour principale se trouve un jardin carré, près d'une fontaine.
Une salle abrite un musée de l'histoire des khans de Khiva. Un spectacle de funambules, accompagné de musiciens, est régulièrement organisé dans la cour principale.
Cour principale de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Cellules (côté cour principale) de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Une cellule (côté cour principale) de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Détail dans la cour principale de la médersa Mohammed Rahim Khan à Khiva.
Portrait de Mohammed Rahim Khan II exposé dans le musée de la médersa.
Lamédersa Islam Khodja et sonminaret datent respectivement de 1908 et 1910.Islam Khodja était le beau-père et le grand vizir du khanIsfandiar Khan. Les deux monuments témoignent des dernières architectures islamiques notables en Asie centrale. Le minaret, haut de 45 mètres, est le plus haut de Khiva. Son diamètre diminue au fur et à mesure qu’il prend de la hauteur. Des bandes de céramiques bleues et blanches alternent avec des briques de couleur ocre.
La médersa comprend 42 cellules. Elle abrite aujourd’hui le Musée des Arts appliqués. Le côté ouest (côté entrée) comprend des arcatures aveugles. Au sud de cette entrée se trouve l'immense coupole de la salle principale.[15]
Autre vue extérieure du mausolée de Pakhlavan Mahmoud.
Détail de la salle principale.
Détail de la salle où se trouve la tombe de Pakhlavan Mahmoud.
Portail d'accès à la salle principale, donnant sur la cour intérieure.
Puits de la cour intérieure.
L’entrée du complexe s’ouvre sur une cour entourée de cellules sur la gauche, d’un khanaqah et de mausolées en face, d’une mosquée d’été et d’un puits sur la droite (où viennent boire les jeunes couples qui souhaitent un enfant). Le bâtiment central comprend une salle carrée surmontée d’une haute coupole couverte de carreaux bleu vernissés. La tombe de Pakhlavan Mahmoud se trouve dans la pièce située à gauche de la grande salle. La décoration intérieure du bâtiment a été réalisée par Abdoullah Djinn.
Tombe de Pakhlavan Mahmoud.
Détail de la salle où se trouve la tombe de Pakhlavan Mahmoud.
coupole de la salle où se trouve la tombe de Pakhlavan Mahmoud.
Ensemble de trois tombes réservées à Isfandyar, son fils et sa mère.
En 1913, on a construit un bâtiment à un étage dans la cour, destiné à abriter les tombes de la mère et d’un fils, Timour, d’Isfandyar Khan et également, initialement, la tombe de ce dernier[17].
D'autres tombes sont présentes à l'intérieur et à proximité du mausolée.
Lamosquée Djouma (en prononciation francophone), littéralementmosquée du Vendredi, était autrefois la grande mosquée de la ville. C'est ici qu'étaient notamment lues les proclamations dukhan de Khiva lors desgrandes prières hebdomadaires[18].
Elle fut édifiée en 1788-1789, à l'initiative d'Abdurakhman,mikhtar du khan[19], sur une base plus ancienne, les travaux étant financés grâce à des revenus perçus àKoshkupyr etBekabad[20].
La salle de prière est une vaste piècehypostyle. Couvrant la charpente, letoit est percé de deux ouvertures rectangulaires laissant passer un peu de lumière et sous lesquelles étaient autrefois plantés desmûriers[20].
Le plafond charpenté est soutenu par deux-cent-dix-huit colonnes de bois réparties sur treize rangées, chacune espacées de 3,15 m[8]. Le plus souvent enorme, elles présentent des décors variés et reposent sur des socles de pierre avec, parfois de la laine non traité en intercalaire, ce matériau passant pour éloigner les insectesxylophages. Certaines de ces colonnes sont des ré-emplois d'édifices antérieurs, les quatre plus anciennes, datées duXe siècle, passent pour provenir d'un édifice disparu de la ville deBeruniy[18]. Beaucoup furent remplacées lors des campagnes de restauration successives, notamment en 1979-1983 et 1996-1997[20].
Lemihrab, simplement recouvert d'un enduit blanc, ne présente que peu de décor.
La porte d'entrée, en bois, de l'accès principal est ornée de gravures, dont une inscription encoufique, et de ferrures décoratives.
Également bâti au XVIIIe siècle, leminaret de briques mesure, à sa base, 6,2 m et s'élève à 32,5 m[20]. On accède à son sommet, couronné par une lanterne ornée demuquarnas en gravissant 81 marches[8].
Lamédersa Mohammed Amin Khan (1852-1855) a été construite parMohammed Amin Khan (règne : 1843-1855), l’un des khans les plus célèbres de Khiva. C’était la plus grandemédersa (ou madrassa) de Khiva, avec une capacité d’accueil d’environ 250 étudiants dans le cadre de sa fonction initiale. La madrassa est aujourd'hui utilisée comme hôtel de tourisme. La cour intérieure est entourée de deux étages de cellules (houjra). À l’extérieur, le portail (pichtaq) est impressionnant et comprend un balcon de bois. La madrassa est bornée à chacun des quatre coins par quatre tours d’angle (guldasta).
Vue duKalta Minor et de l'extérieur de la médersa Mohammed Amin Khan depuis la porte Est.
Positionnements respectifs du Kalta Minor et de la médersa Mohammed Amin Khan.
La construction duminaret Kalta Minor (« le minaret court », 1852-1855) a été interrompue avant d’avoir atteint la moitié de sa hauteur prévue (70 mètres) à la suite de la mort du commanditaire, le khan de Khiva, Mohammed Amin. Un escalier intérieur permet l’accès au sommet. Il jouxte lamédersa Mohammed Amin Khan[12].
Lamédersa Koutloug Mourad Inak tient son nom du premier des khans restaurant la dynastie de la tribu Koungrat en 1804. La médersa a été construite entre 1804 et 1812[22].
Il s’agit de la première médersa de Khiva à posséder deux niveaux de cellules. La façade extérieure comprend deux niveaux de cellules de chaque côté du portail. L'intérieur de la médersa a peu de décoration. Les façades sur cour ont deux étages et comportent chacune un iwan donnant pour trois d’entre elles, à chaque niveau, sur deux cellules. Les quatre coins sont biseautés et comportent chacun trois entrées de cellules à chaque niveau. Depuis la cour intérieure, on accède à une réserve souterraine d’eau (sardoba) surmontée d’un dôme visible dans la cour.
Lamédersa Alla Kouli Khan (1834) s’ouvre sur un portail (pishtak) décoré de manière classique, de couleurs dominantes bleu et blanc. Il s’agirait du plus haut portail de la ville. À l’intérieur, les cellules se répartissent sur deux étages dans une cour de 30 x 34 mètres, comprenant quatre iwans. Les quatre coins intérieurs sont biseautés et permettent l’accès à trois cellules sur chacun des niveaux.[23]
Cettemédersa a été construite dans le cadre d’un vaste plan de reconstruction de cette partie de la ville sous le règne d’Alla Kouli Khan. Elle est située en face de la médersa Koutloug Mourad Inak.
Vue générale de l'extérieur de la médersa Alla Kouli Khan.
Lecaravansérail Alla Kouli Khan (1832), construit sous le règne d'Alla Kouli Khan, est situé non loin de la Porte Est ; les remparts qui se situaient à cet endroit ont été démolis lors de sa construction.
Lepalais de Nouroullah Baï (1912) est situé, lui, dans la ville extérieure (Dishan Kala). C’est un mélange de style russe (avec, par exemple, les poêles décorés de porcelaine venant deSaint-Pétersbourg) et de style traditionnel local. Il comprend notamment une vaste salle de bal, une pièce de réception, une pièce de repos, une pièce réservée à la musique, etc.
Entrée et façade du palais Nouroullah Baï.
Intérieur du palais Nouroullah Baï.
Intérieur du palais Nouroullah Baï : détail.
Un des poêles à l'intérieur du palais Nouroullah Baï.
Une gare, conçue pour accueillir jusqu'à 200 passagers, a été inaugurée en novembre 2018 par le PrésidentMirziyojev[24]. Située à l'est d'Itchan Kala, elle accueille le train à grande vitesse Afrosiyab qui la relie àBoukhara,Samarcande etTachkent.
↑Seule une copie est aujourd’hui visible : l’original est aumusée de l’Ermitage deSaint-Pétersbourg. Il n’a pas, à ce jour, été transféré aux nouvelles autorités ouzbèkes, malgré les démarches entreprises.
↑Seule la mère d' Isfandyar y est enterrée. Les deux autres n'étant pas morts à Itchan Kala, ils ne pouvaient pas, selon une règle établie, y être inhumés.
Jean-Paul Loubes,« La mémoire de l’architecture nomade dans la maison d’Asie centrale », in Roselyne de Villanova, Geneviève Vermès,Le Métissage interculturel - Créativité dans les relations inégalitaires, éd. L’Harmattan, 2005,(ISBN978-2-7475-9339-7).