| Nom de naissance | Kaija Anneli Laakkonen |
|---|---|
| Naissance | Helsinki, |
| Décès | (à 70 ans) Paris 8e, |
| Activité principale | Compositrice |
| Style | Musique contemporaine |
| Lieux d'activité | Paris |
| Années d'activité | Depuis1982 |
| Collaborations | Jean-Baptiste Barrière,Amin Maalouf,Peter Sellars,Anssi Karttunen,Camilla Hoitenga |
| Formation | Académie Sibelius (1976–1981),Université de musique de Fribourg, (1982–1983)IRCAM |
| Maîtres | Paavo Heininen,Brian Ferneyhough,Klaus Huber |
| Conjoint | Jean-Baptiste Barrière |
| Distinctions honorifiques | Prix Ars Electronica Prix Schock (2001) Grawemeyer Award (2003) Médaille Pro Finlandia |
| Site internet | http://www.saariaho.org/ |
Kaija Anneli Saariaho, néeLaakkonen le àHelsinki et morte le àParis, est unecompositricecontemporainefinlandaise. Installée en France en 1982, elle est influencée par lamusique spectrale et développe son propre style musical en employant des dispositifsélectroniques comme partie intégrante de ses compositions.
Elle travaille à l'IRCAM pendant plusieurs années et est reconnue pour ses ouvrages demusique de chambre autour duvioloncelle ainsi que pour sesopéras. D'envergure internationale, elle est élue à l'Académie des beaux-arts en 2022.
Née en àHelsinki, sous le nom de Kaija Laakkonen[1], Kaija Saariaho grandit dans une famille sans rapport avec la musique : son père a renoncé à un parcours artistique dans les arts visuels après avoir perdu un œil pendant laSeconde Guerre mondiale et a fondé une entreprise d'abris antiatomiques, et sa mère a quitté l'école à 14 ans, a passé un brevet depilote d'avion[2],[3], puis est devenue unefemme au foyer[1]. Elle commence à apprendre la musique à partir de l'âge de 6 ans à l'école, avec comme instruments leviolon, lepiano et l'orgue. En parallèle, elle découvre le monde de musique seule dans sa jeune dizaine d'années, en allant à des concerts de musique classique et achetant des disques[4]. Vers l'âge de treize ans, après avoir un peu exploré le piano, elle apprend la guitare. Elle s'oriente vers l'académie des beaux-arts d'Helsinki pour y étudier la peinture et le dessin, afin de respecter le choix de son père[5], tout en ayant la volonté de devenir compositrice[6]. Elle s'en va et se marie à l'âge de dix-huit ans avec un architecte qui lui donne le nom de Saariaho[4]. Ils se séparent au bout d'un an, mais elle conserve son nom[1].
Elle décide d'étudier sérieusement la musique en 1976, et entre à l'Académie Sibelius de Helsinki, dans la classe dePaavo Heininen. Son enseignement est rude, mais Kaija Saariaho le reconnaît comme essentiel, lui permettant notamment de lever un blocage sur son expression musicale[6]. Elle participe à des rencontres entre jeunes compositeurs : ils constituent un groupe qu'ils appellentKorvat auki (fi) (« oreilles ouvertes » enfinnois), qui comprend entre autresMagnus Lindberg,Jouni Kaipainen,Jukka Tiensuu etEsa-Pekka Salonen. Ce dernier la suivra par la suite tout en dirigeant de nombreux projets musicaux, conduisant beaucoup des premières des œuvres de la compositrice[7].
En 1980, Saariaho se rend àDarmstadt et y découvre l'école spectrale française, en particulier la musique deTristan Murail et deGérard Grisey, ce qui a été pour elle une vraie révélation[6]. Elle termine ses études à l'académie Sibelius en 1981. Elle quitte ensuite la Finlande pour étudier àFribourg-en-Brisgau, auprès deBrian Ferneyhough etKlaus Huber, pendant deux ans, puis à l'IRCAM àParis, pour se former à l'informatique musicale. Elle vit à Paris de 1982[8] jusqu'à sa mort.
À partir du milieu des années 1980, les travaux de Kaija Saariaho commencent à être reconnus et critiqués positivement en Europe et auxÉtats-Unis, ce qui lui permet d'obtenir des commandes régulières et importantes[9] :Lichtbogen, créée en 1986, est une commande duministère français de la Culture. Cet ouvrage marque un premier pivot dans l'évolution artistique de la compositrice. Inspirée par une aurore boréale, Kaija Saariaho explore l'effet de manière électronique l'effet que produit un archet sur un violoncelle, et collabore avec le violoncelliste finlandaisAnssi Karttunen[10].
Elle composeIo (1987), une commande de l'IRCAM, puisNymphéa, créée en 1987, une commande duLincoln Center, etStilleben (1987-88) est une commande de laFinnish Broadcasting Company[9]. Elle reçoit ensuite de nombreux prix :Prix Italia en 1988, le William Hansen Award en 1988 et lePrix Ars Electronica en 1989 notamment[9]. Ses succès lui permettent de continuer à bénéficier d'une allocation de l'État Finlandais jusqu'en 1992[9]. Elle est le sujet en 1999 d'un projet collaboratif paneuropéen dans la création d'un cédéromPrisma, centré autour de son œuvre.

La compositrice collabore à plusieurs reprises avec la soprano américaineDawn Upshaw, à partir du moment où elle l'entend chanter dans une production deSaint François d'Assise d'Oliver Messiaen. Ainsi, elle compose pour Dawn Upshaw et sa voixChâteau de l'âme etLohn, créés en 1996 par la chanteuse. Kaija Saariaho lui fera également confiance pour le rôle de Clémence dans la création en 2000 de son opéraL'Amour de loin[7]. À partir de ce moment-là, la compositrice va régulièrement collaborer avec le librettiste de cet opéra, l'écrivain franco-libanaisAmin Maalouf, ainsi que son metteur en scène,Peter Sellars. Ce trio va créer plusieurs autres opéras de la compositrice dans les deux décennies qui suivent[7]. Cet opéra marque un tournant dans sa carrière de compositrice :L'Amour de loin est l'élément déclencheur mettant Kaija Saariaho sur le premier plan des compositeurs contemporain et permet à sa musique d'être jouée fréquemment à l'international[11].
Elle reçoit la même année une récompense pour son ouvrageLonh ainsi que lePrix de l'Académie Charles Cros pour son disquePrisma qui regroupe son œuvre jusqu'au tournant du millénaire. Durant les quelques années qui suivent, sa musique est jouée par des grands orchestres internationaux tels que l'Orchestre de Paris, leBoston Symphony ou leBBC Symphony, elle reçoit en 2003 unGrawemeyer Award pourL'Amour de loin et se voit très bien accueillie quand elle retourne dans son pays d'origine en recevant undoctorat honorifique par les Universités d'Helsinki et deTurku[12].
Elle est compositrice en résidence duconservatoire à rayonnement régional de Strasbourg et duFestival Musica en 2005.
En 2022, Kaija Saariaho est élue à l'Académie des Beaux-Arts, au titre de membre associé étranger (fauteuil II)[13]. A l'occasion de son70e anniversaire, la compositrice est l'invitée d'honneur dufestival Musica àStrasbourg en septembre de la même année[14].
Elle meurt le 2 juin 2023 des suites d'un cancer cérébral[15],[1],[16] à son domicile dans le8e arrondissement de Paris[17].
Une des spécificités de la musique de Kaija Saariaho est son emploi de l'électronique, qu'elle apprend pendant son cursus à l'IRCAM. Durant cette période, la compositrice explore de manière intensives les potentiels rapports entre musique et électronique et travaille abondamment avec des ordinateurs[18]. À des fins de modulation des sons, d'amplification ou résonance, la musique s'en trouve affectée ainsi que le rendu général. Elle travaille régulièrement avec son conjointJean-Baptiste Barrière, compositeur français spécialiste de l'informatique musicale, qui met au point avec elle les dispositifs nécessaires au travail du son[19]. En 1988, Kaija Saariaho composeDu Cristal... qui correspond à sa première œuvre orchestrale majeure, ainsi qu'à un point culminant de sa recherche spécifique dutimbre en combinaison avec l'électronique[20].

Kaija Saariaho, jusqu'au moment son premier ouvrage du genre, intègre régulièrement des parties pour voix dans ses ouvrages. Que ce soit dansLohn ou dansOltra Mar, créé en 1999, le chant est partie intégrante de la partition et amène naturellement la compositrice vers la composition du genre lyrique[7]. Elle est l'autrice de cinqopéras :
Après le succès en 1996 deChâteau de l'âme au Festival de Salzbourg, son directeurGerard Mortier propose à la compositrice de composer un opéra ; celle-ci réfléchit justement depuis le début des années 1990 à écrire un ouvrage de ce genre[21].L'Amour de loin est créé en2000 àSalzbourg, écrit par lelibrettiste franco-libanais Amin Maalouf, avec le metteur en scène américain Peter Sellars et le chef d'orchestre finlandais Esa-Pekka Salonen. Cet opéra est considéré comme un grand succès pour la compositrice : il a été décrit parThe New York Times comme « Best New Work of the Year 2000 » (meilleure nouvelle œuvre de l'an 2000).
Adriana Mater, son second opéra, est créé en2006 à Paris, où la même équipe a collaboré.Émilie est créé en 2010, sur un livret d'Amin Maalouf et une mise en scène deFrançois Girard, par l'Opéra national de Lyon dirigé parKazushi Ōno[8].Only the sound remains, créé en 2016 à Amsterdam, est composé d'après deux pièces dethéâtre nô.Innocence, composé sur un livret deSofi Oksanen etAleksi Barrière, créé en 2021 au Festival d'Aix-en-Provence, est ressenti comme un choc et un chef-d'œuvre pour la critique[22],[23]. Il est également très apprécié par le public, aussi bien pour sa musique que pour la force de l'histoire qui est mise en scène[24],[25]. Elle reçoit pour cet opéra le prix« compositeur » desVictoires de la musique classique de l'année 2022[26].
Le travail de Kaija Saariaho est parcouru de travaux sur le chant et la voix ; ses premiers pas dans la composition sont des pièces vocales[18]. Hormis les opéras, la compositrice s'attache depuis très tôt dans sa carrière à rendre l'appareil vocal dans ses partitions.Lonh etOltra Mar, bien que des ouvrages préparatoires à l'opéraL'Amour de loin, sont témoins de l'exploration de ce médium dans sa musique.Lonh implique une voix soprano et un dispositif électronique qui enrobe la voix ; celle-ci est enveloppé au sein dans un espace musical électronique qui soutient la chanteuse. Ici, l'environnement sonore consiste en parties enregistrés et diffusés de poèmes lus en langueoccitane, français et anglais, avec des sons de cloches notamment. Cette spatialisation du son permise par l'électronique met en avant le chant, qui est de plus amplifié par un système d'enregistrement en direct[27].
En 2006, Kaija Saariaho compose unoratorio intituléLa Passion de Simone, qui raconte l'histoire deSimone Weil, philosophe française sous l'Occupation. Créé en 2007 à Vienne, l'ouvrage est repris à Londres, Helsinki et Stockholm[28].

Kaija Saariaho est très influencée par lamusique spectrale.Petals, pour violoncelle solo ou avec électronique, illustre parfaitement cette forme de musique travaillant sur la matière même du son. Nombre de ses pièces utilisent des ressources électroniques en plus des instruments traditionnels, à l'exemple deNymphéa (Jardin secret III, 1987), pour quatuor à cordes et électronique en direct.
Kaija Saariaho a beaucoup écrit pour levioloncelle, et l'utilise de manière novatrice, en jouant notamment sur la texture de l'instrument grâce à l'électronique et à des techniques de jeu inventives (variations de pression et d'inclinaison de l'archet...) comme dans son œuvre concertanteAmers, qui combine à la fois les modes de jeu du violoncelle et l'électronique autour d'un simple trille. Sa proximité avec le violoncelliste finlandaisAnssi Karttunen, qui a créé plusieurs de ses œuvres, a sans doute contribué au développement du travail de Kaija Saariaho sur le violoncelle.
Elle dit elle-même :
« Le violoncelle est mon instrument préféré, c'est du moins ce que je crois parce que j'y reviens régulièrement. Qu'il existe des violoncellistes remarquables qui ont toujours été prêts à coopérer avec moi n'a pu que contribuer à cet état de fait.Kaija Saariaho, Paris 2005 »
Le cinéma et la littérature sont également des sources d'inspiration pour Saariaho[29]. Le cinéma pour le travail sur le temps, les idées formelles et le traitement du matériau[29]. Elle cite en particulierAndrei Tarkovsky, pour son utilisation du noir et blanc, l'utilisation de poèmes et d'éléments naturels[30]. Le film qui l'a le plus inspirée estStalker[30],[31]. Elle insère dans sa compositionNymphéa le poème d'Arseni Tarkovski présent dans le film[30], et elle ira visiter en 2000 l'usine qui a servi au tournage àTallin[31]. Elle cite également le filmDans la ville blanche, du réalisateurAlain Tanner[31].
La littérature est plus une forme d'inspiration intuitive, dans laquelle elle ne puise pas d'idées formelles[29]. Plus généralement, la compositrice est souvent inspirée par une émotion ou un sentiment ressenti au contact d'une autre œuvre d'art, un effet visuel ou un parfum[32]. Pour son quatuorNymphéa, elle est inspirée parLes Nymphéas deClaude Monet, mais aussi par les images visuelles de la forme, de la couleur et de la symétrie de la plante et de ses déformations lors de ses déplacements sur l'eau[33].
Saariaho est claire sur le fait qu'elle ne souhaite pas que son sexe soit un sujet et encore moins que son travail soit considéré comme « féminin »[9]. Toutefois cela est systématiquement évoqué, en particulier au début de sa carrière, les commentaires relevant l'exception féminine dans un environnement très masculin[9]. Par ailleurs selon la chercheuse finlandaise Pirkko Moisala, son travail avec l'électronique serait moins pris au sérieux du fait qu'elle soit une femme[34].
Bien que la Finlande possède un système reconnu comme parmi les plus égalitaires[35],[36], il reste marqué par de grandes figures paternelles, commeJoonas Kokkonen pour la composition, ce qui rend l'identification difficile pour les femmes[36]. Saariaho attribue cela à l'influence de lamythologie finnoise et en particulier à l'identification à un héros masculin commeVäinämöinen[36][pertinence contestée].
Ces remarques auront tendance à disparaître avec la venue du succès et de la reconnaissance de ses compositions[36]. Toutefois, le chercheur Tim Howell s'étonne du temps qu'il aura fallu pour que cette reconnaissance devienne indépendante de son statut de femme compositrice finlandaise[37].
En 2024, son nom est donné à un salon de l'Opéra Bastille[43].
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