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John Pershing est né dans la petite maison de ses parents près deLaclede dans leMissouri le. La famille Pershing était d'origine alsacienne[3] ; en effet, le premier Pershing venu s'installer en Amérique était Frederick Pfoerschin, émigré d'Alsace en 1724. Le nom de famille s'est alors modifié en Pershin puis est devenu Pershing.
Le père de John, John Fletcher Pershing avait émigré dePennsylvanie pendant sa jeunesse. Sa mère, originaire duKentucky, se nommait Ann Elizabeth Thompson. John fait partie d'une fratrie de neuf enfants.
Jusqu'en 1873, John Pershing est allé à l'école tout en travaillant à la ferme de son père. Il travaille également très rapidement en tant qu'enseignant dans une école pour Noirs : le salaire versé lui permit d'intégrer laNormal School Kirksville d'où il sort diplômé d'une licence d'art en1880.
En1882, une annonce de concours pour entrer à l'Académie militaire de West Point attire son attention. Bien que peu enclin à s'engager dans une carrière militaire, il se décide cependant pour celle-ci car West Point lui offre la chance de bénéficier d'une formation de grande qualité.
Soutenu par sa sœur, John réussit le concours d'entrée à West Point. Il n'y brille pas par ses résultats scolaires mais ses qualités de meneur d'hommes le font nommer en1886 au grade de capitaine des cadets qui était la plus importante distinction à West Point. Ses qualités d'organisateur, alliant rigueur, discipline et une bonne psychologie font dire au généralMerritt, alors directeur de West Point, que les qualités démontrées par le jeune Pershing le promettent à une grande carrière d'officier. Malgré cela, John Pershing ne voyait toujours pas son avenir dans l'armée.
Après lescampagnes indiennes, le lieutenant Pershing est envoyé, le, à l'université duNebraska en tant qu'instructeur sur les tactiques militaires.
Le, Pershing est prié de rejoindre son régiment aufort Assinniboine(en) dans leMontana et est nommé au grade de lieutenant dans le10e régiment de cavalerie(en). C'est un régiment noir de « Buffalo Soldiers ». Dans une armée américaineraciste etségrégationniste, cette affectation le suit toute sa vie. Cela lui vaut le surnom méprisant de « Nigger Jack » (« Jack le nègre ») que le temps transformera en un moins violent « Black Jack »[4].
En juin1897, John Pershing est envoyé comme instructeur à West Point, où sa cote de popularité auprès des cadets tombe au plus bas en raison de l'aspect trop strict de son enseignement. Il quitte son poste d'enseignant en1898 et rejoint son régiment àTampa, où il travaille à l'administration desPhilippines et dePorto Rico.
Le, Pershing est chargé d'une nouvelle division créée par le département de la Guerre et qui a pour but de gérer les nouvelles possessions insulaires que sontCuba, Porto Rico, les Philippines etGuam.
Le, Pershing est envoyé à Manille dans les Philippines pour pacifier lesîles de Mindanao etJolo. Ces régions, historiquement coloniesespagnoles, n'avaient jamais pu être pacifiées par les Européens qui avaient toujours été confrontés auxguerriers Moros. Après que les troupes américaines eurent chassé les Espagnols, les Moros continuèrent les combats contre leurs « libérateurs ».
Pershing gagne ses galons de capitaine et commence à apprendre la langue moro afin de mieux pouvoir converser avec ses adversaires. Il prend le commandement du Fort Padapatan, situé sur lelac Lanao, et tente une approche diplomatique du problème. Après un échec des pourparlers, Pershing lance ses troupes contre les Moros et prend le contrôle total de la zone du lac Lanao le. L'organisation et la conduite des expéditions contre les insurrections Moro sont remarquées et appréciées à Washington.
Le capitaine Pershing est rappelé à Washington en juin1903. Le présidentTheodore Roosevelt lui rend honneur en mentionnant ses états de service lors d'un discours auCongrès. Son retour est également marqué par sa rencontre avec Helen Warren, fille du sénateurFrancis E. Warren duWyoming. Tombant aussitôt amoureux, ils se marient le devant de prestigieux invités, dont les époux Roosevelt.
Après son mariage le capitaine est affecté à l'ambassade des États-Unis àTokyo en tant qu'attaché militaire. LeJapon était alors en guerre contre laRussie pour un différend sur la zone d'influence de laMandchourie. Pershing accompagne, en tant qu'observateur, l'armée dugénéral Kuroki lors de sa marche victorieuse sur la Mandchourie. Lors de cette expérience japonaise, Pershing est décoré des mains même duMikado de l'ordre du Trésor Sacré.
Pershing revient au pays en1906 et son premier enfant, Helen Elizabeth, voit le jour. Cette expérience au Japon permet au capitaine de rencontrer beaucoup d'autres observateurs militaires européens, officiers, colonels ou généraux alors que lui, à présent âgé de plus de40 ans, n'était encore que capitaine. Jusqu'à présent, la nomination au grade de général que Pershing demandait et que le président Roosevelt, lors de son discours au Congrès trois années auparavant, avait exprimé le vœu de lui voir accorder, n'était obtenue qu'au titre de l'ancienneté. Accorder ce grade au capitaine Pershing, même avec les états de service qui avaient été les siens aux Philippines, dérangeait beaucoup d'officiers.
Le, le président Roosevelt fait parvenir auSénat sa décision de nommer le capitaine Pershing au grade de général de brigade, alors que862 officiers supérieurs (commandants et colonels) étaient en attente du même titre. Accusé de favoritisme, notamment par le statut privilégié dont bénéficiait Pershing, beau-fils du sénateur Francis E. Warren, président du comité du Sénat aux affaires militaires, Roosevelt déclare que « promouvoir un homme parce qu'il a épousé la fille d'un sénateur serait une infamie, refuser cette promotion pour la même raison serait également une infamie ».
Après sa promotion, le général Pershing demande à être affecté auxPhilippines. Il obtient le commandement du fort McKinley, près de Manille. Le voit la naissance d'Anne, second enfant des époux Pershing.
L'automne 1908 semble annoncer une guerre imminente dans lesBalkans. On demande à Pershing de se rendre àParis et, au cas où la guerre éclaterait, de jouer le rôle d'observateur militaire. Les Pershing s'établissent à Paris pendant deux mois puis retournent aux États-Unis, attendu que la situation dans les Balkans s'était calmée.
Pendant son absence, la situation avec les Moros de Mindanao et dans les îles de Sulu était redevenue houleuse. Le gouverneur des Philippines, Smith, réclame le retour d'urgence du général Pershing, mais ce dernier était atteint de complications résultant de lamalaria.
Le naît le seul fils de Pershing, Francis Warren, né àCheyenne (Wyoming). En octobre de cette même année, le général Pershing se trouve guéri de sa maladie. Il peut alors retourner aux Philippines afin de reprendre en main la province de Moro, en tant que gouverneur militaire.
Les Moros sont finalement défaits et Pershing raconte dans ses mémoires un des moyens employés :« Les attaques desjuramentado diminuèrent par l'usage d'une méthode que l'armée avait déjà adoptée, et que les musulmans tenaient pour abominable. Leurs corps étaient publiquement enterrés dans la même tombe qu'un porc mort. Prendre une telle mesure n'était pas plaisant, mais la perspective d'aller en enfer plutôt qu'au paradis dissuadait parfois les assassins potentiels[5]. » Son supérieur confirme et approuve cette action psychologique[6].
Le quatrième et dernier enfant, Mary Margaret, naît le. En1913, legénéral Huerta trahit le présidentmexicainMadero et prend le pouvoir. Les États-Unis refusent de reconnaître le nouveau gouvernement et les relations diplomatiques se détériorent rapidement. Dans l'hypothèse d'un conflit, le général Pershing reçoit l'ordre de rejoindre la8e brigade àSan Francisco.
Après que Huerta eut pris le pouvoir, un soulèvement s'effectue en partie sous les ordres dePancho Villa. Ce dernier se révèle être l'auteur de meurtres qui font pour victimes huit soldats américains. Le présidentWilson ne peut l'accepter. Il demande à Pershing de monter une expédition punitive afin de capturer Villa. Le gouvernement mexicain deCarranza refuse aux troupes américaines l'autorisation d'utiliser les voies de chemin de fer. Pershing mène 10 000 hommes (parmi lesquels le futur généralPatton, alors sous-lieutenant) en territoire mexicain, malgré une préparation logistique insuffisante.
Malgré tous les efforts déployés, Villa n'est pas capturé. Au début de1917, l'expédition est arrêtée.
Première Guerre mondiale : le corps expéditionnaire américain en France
Pershing débarquant en FrancePershing en octobre 1918
Dans le même temps, les événements se bousculent. Pershing est nommé au grade demajor général et les États-Unis déclarent la guerre le à l'Empire allemand deGuillaume II.
L'armée régulière américaine n'existe pas à proprement parler. Elle ne compte alors qu'environ 250 000 hommes. De plus, le généralFrederick Funston, commandant de l'AEF (American Expeditionary Force), meurt le, nécessitant de désigner de toute urgence un nouveau commandement et engager tout aussi rapidement une structuration de l'armée.
Quatre semaines après l'entrée en guerre des États-Unis, Pershing reçoit un télégramme de son beau-père, le sénateur Warren, lui demandant comment il parlait le français. John répond qu'il le « parlait couramment ». Quelques jours plus tard, il reçoit une lettre du sénateur. Celui-ci l'informe que le secrétaire à la Guerre,Newton D. Baker, l'avait consulté au sujet du général qui devrait être envoyé en France. Un nouveau télégramme du major généralHugh L. Scott convoque Pershing à Washington où ce dernier apprend sa nomination au commandement de l'AEF.
Toute liberté est donnée à Pershing pour la conduite des troupes américaines sur le sol français. La seule contrainte évoquée par le présidentWilson était que les États-Unis devaient conserver toute liberté d'action sur leurs hommes et, surtout, ne pas se mettre dans une position de dépendance face aux Alliés. Le général Pershing et quelques hommes s'embarquent secrètement deNew York le et arrivent àLiverpool le. Pershing est reçu par le roiGeorge V àBuckingham.
Un premier contingent de l'AEF, qui comptait à présent environ 1 500 000 hommes, arrive en France par le port deBoulogne-sur-Mer le puis, rendu à Paris, reçoit une ovation de la part du peuple français. Le général Pershing s'installe dans l'hôtel particulier situé au 49rue Pierre-Charron qui devint ultérieurement le siège de l'American Legion et fut transformé en hôtel nommé en son honneur lePershing Hall.La grande difficulté, pour Pershing, était de composer entre le manque total de préparation d'une armée encore à l'état d'embryon et la pression importante de la France et de la Grande-Bretagne, qui n'attendaient pas une armée américaine opérationnelle mais plutôt des renforts en hommes de troupe. On attribue souvent à tort la fameuse phrase : « Lafayette, nous voici ! » au général Pershing quand il arriva en haut de la côte de Picardie, entre Versailles et Sèvres (même si un monument est toujours visible à cet emplacement), elle fut en réalité prononcée le jour anniversaire de l'indépendance américaine, le par lecolonel Stanton, sur la tombe de La Fayette aucimetière de Picpus à Paris[7].Il reste cependant un doute sur l'attribution de cette phrase au colonel Stanton, car s'il est exact que ce dernier, membre de l'état-major de Pershing, avait été désigné par le général pour parler en son nom, Painlevé et l'ambassadeur américain à Paris, Sharp, présents lors de la cérémonie, ont demandé à Pershing de prononcer également une allocution. Pershing avoue avoir « improvisé un speech »[8] :« je n'eus pas de peine à trouver quelques mots. C'est à cette occasion et devant ce tombeau que furent prononcés les mots mémorables qu'on ne pouvait trouver que sous le coup d'une profonde émotion, des mots qui vivront longtemps dans l'histoire : Lafayette, nous voici ! » Pershing ajoute dans ses mémoires qu'il n'a pas personnellement le souvenir« d'avoir dit quelque chose d'aussi beau » et croit devoir laisser« l'honneur d'une phrase si heureuse et si bien frappée » à son vieux compagnon d'armes, Stanton.
Pendant des mois, Pershing doit s'opposer aux Français et Britanniques pour résoudre de simples problèmes de dépôts d'approvisionnement, de bâtiments ou de lignes téléphoniques afin que les premières troupes américaines puissent enfin commencer à arriver en France. Pershing choisitChaumont enHaute-Marne, important nœud ferroviaire, pour son implantation. Les éléments précurseurs arrivent en septembre dans la région. En juin/juillet1917, 14 000 GI avaient débarqué àBoulogne-sur-Mer. À la fin des hostilités, en, les forces américaines s'élèveront jusqu'à 1 790 623 combattants. La première division américaine opérationnelle le fut àBourmont (Haute-Marne) : il s'agissait de ladeuxième division d'infanterie US composée d'une brigade demarines et d'une brigade d'infanterie.
Le haut commandement allié avait initialement pensé que les effectifs américains pourraient être incorporés au sein de ses troupes. Mais ce n'était pas l'avis de Pershing qui s'opposa vivement à cette idée. Pershing obtient même que les États-Unis soient associés au Commandement suprême que formaient alors la France et la Grande-Bretagne.
Cette polémique connaît un coup d'arrêt en mars1918. Une contre-attaque allemande met sérieusement en péril la ligne de front des Alliés et risque même de provoquer leur défaite. Pershing, reconnaissant le danger de la situation, accepte de placer les troupes américaines sous la responsabilité du commandant suprême des forces alliées, lemaréchalFoch.Winston Churchill déclara que cette décision était à la hauteur de la gravité de la situation et qu'elle permit tout simplement de repousser l'offensive deLudendorff.
Le, les deux brigades de laSeconde Division sont devenues opérationnelles. Le major général O. Bundy en prend le commandement et la division est affectée auXe Corps de la2e Armée française et se déplace au sud-ouest deVerdun. Elle s'installe en position défensive à Ranzière, dans le secteur deSaint-Mihiel. Ce saillant dans le dispositif français, tenu par les Allemands depuis trois ans, est une menace permanente pour les Alliés à l'est deVerdun. Début avril, l'ennemi tenant les hauteurs dominantMontsec, les unités de la division lancent des raids d'entraînement au-delà de Seicheprey et dans le bois de Remière qui vont jusqu'au corps à corps.
Plus tard, en juillet, quand les divisions américaines contribuaient à repousser les forces allemandes,Foch déclara à Pershing que le temps était venu de rassembler l'ensemble de ses forces, actuellement dispersées dans les armées françaises et britanniques, pour former une armée indépendante sous son propre commandement. Des préparatifs débutèrent alors pour préparer la première offensive américaine. Celle-ci devait s'effectuer en septembre dans le but de réduire lesaillant de Saint-Mihiel (Meuse). Le, laIre armée américaine voit le jour.
Comme prévu, le, Pershing, à la tête de 300 000 hommes de l'AEF et appuyé par 110 000 Français, engage l'offensive. Il remporte la bataille du saillant de Saint-Mihiel le. Planifié et exécuté à la perfection, cet épisode marque la première victoire de l'armée américaine dans une opération totalement dirigée par les États-Unis.
Immédiatement après Saint-Mihiel, 400 000 hommes durent rejoindre l'Argonne pour participer à une offensive (offensive Meuse-Argonne) programmée parFoch pour le. Le rôle principal était une nouvelle fois dévolu aux troupes américaines de Pershing.
Cette bataille fut la plus importante pour les troupes de l'AEF. 345chars et 480 avions américains participèrent à l'offensive dirigée par Pershing. La progression des alliés fut très difficile et extrêmement lente ; elle fut stoppée le pour reprendre le. Les Allemands résistèrent jusqu'au 4 avant d'entreprendre une retraite.
Après l'armistice, Pershing continue son projet de structuration de l'armée. En 1919, leCongrès lui décerne le titre deGeneral of the Armies des États-Unis. Il reste à ce jour l'officier le plus haut gradé qui ait jamais servi dans l'armée des États-Unis. Les seuls autres détenteurs de ce titre sontWashington etUlysses S. Grant, qui l'ont reçu de façon posthume, respectivement en 1976 et en 2022, soit après Pershing.
Un comité se créa pour qu'il se présente à l'élection présidentielle de 1920 mais Pershing déclina la proposition. En 1921, il fut nomméchef d'état-major de l'United States Army, poste qu'il occupa 3 ans. En1924, âgé de64 ans, il se retira du service actif. Tenu en estime par ses collègues, Pershing, en dépit de sa retraite, continua à être consulté sur les questions militaires.
Il devient le premier président de l'American Battle Monuments Commission (ABMC) créée en 1923 pour construire et gérer les monuments et cimetières militaires américains aux États-Unis et à l'étranger. Sous sa présidence, plusieurs monuments dédiés aux soldats américains morts durant la Première Guerre mondiale seront construits en France. Il reste à la tête de l'ABMC jusqu'à sa mort.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, alors qu'il était au crépuscule de sa vie, le général Pershing restait l'officier de plus haut rang dans l'armée. Le titre deGeneral of the Army à cinq étoiles, créé par le Congrès en et qui avait été décerné aux générauxGeorge Marshall,Douglas MacArthur,Dwight D. Eisenhower etHenry Arnold restait inférieur à celui de Pershing. Lors de sa visite aux États-Unis enjuillet 1944, le généralde Gaulle passa le voir. Pershing, dont la lucidité déclinait, lui demanda comment allait son vieil ami, lemaréchal Pétain. De Gaulle répondit diplomatiquement qu'il « ne l'avait pas vu depuis fort longtemps ».
↑À l’occasion du bicentenaire de la Déclaration d’Indépendance (1976), George Washington fut élevé de façon posthume au grade deGeneral of the Armies par une résolution duCongrès des États-Unis approuvée par le président de l’époqueGerald Ford.
↑Idem, en note, extrait d'une lettre du Maj. Gen. J. Franklin Bell envoyée à John Pershing :« Je comprends que cela est en usage depuis assez longtemps, d'enterrer (les insurgés) avec des porcs quand ils tuent des Américains. Je crois que c'est un bon plan, car si quelque chose peut les décourager, c'est la perspective d'aller en enfer plutôt qu'au paradis. Vous pouvez compter sur moi pour soutenir avec vous cet usage. C'est la seule chose qui peut décourager ces fanatiques fous. »