Le présidentAbraham Lincoln le décrivit comme un « fanatique ». L'activisme sanglant de John Brown, son raid sur Harpers Ferry et sa fin tragique sont parmi les causes de laguerre de Sécession. Personnalité historique très controversée, John Brown est ainsi décrit à la fois comme un martyr ou unterroriste, un visionnaire ou un fanatique, un zélote ou un humaniste.
John Brown est le fils de Owen Brown, untanneur, et de Ruth Mills Brown, couple de confessioncalviniste. Il est amené à l'âge de douze ans à parcourir leMichigan où il séjournera chez un homme qui possédait un esclave noir. Les scènes de violences que l'on fait subir à l'esclave sous ses yeux fondent son engagement au même titre que les convictions transmises par son père qui était membre du comité d’administration de l’université d’Oberlin, centre du mouvement abolitionniste. En 1837, après l'assassinat d'un de ses amis directeur d'un journal abolitionniste, Brown se donne pour mission d'éradiquer l'esclavage[1],[2],[3],[4],[5],[6],[7].
John Brown est un ardent calviniste, il admire l’œuvre du théologienJonathan Edwards, il est fier de dire que sa famille a des racines dans lepuritanisme de laNouvelle Angleterre. Lui même se compare àOliver Cromwell, comme le feront également ses admirateurs après sa mort. D'après ses dires, il pratique le terrorisme par fidélité à sa foi puritaine[3],[8].
Brown esttanneur de métier, mais il rencontre de grosses difficultés professionnelles et fait faillite plus de vingt fois dans six États différents. Il est criblé de dettes mais pense être l'envoyé de Dieu sur Terre[4],[5],[9].
En1847, il rencontreFrederick Douglass, ancien esclave noir devenu orateur et futur homme politique (sa colistièreWoodhull le brigua contre son gré à la vice-présidence des États-Unis en 1872). Il s'installe en1849 dans une communauté noire de l'État de New York[3],[4],[5],[11],[6]
Son action devient plus violente à partir de1855 : aidé de cinq de ses fils, il part dans leKansas alors que l'acte Kansas-Nebraska vient de rouvrir la question de l'esclavage[12]. Il est aidé pour cela, financièrement, par de nombreux abolitionnistes. Il rencontre lephilosopheHenry David Thoreau qui lui voue, par la suite, une admiration sans bornes et qui prend une part active contre l'esclavage, par le biais de nombreuses conférences et d'aide auxfugitifs. Il va être l'un des protagonistes des confrontations entre pro-esclavagistes et abolitionnistes, qui seront appeléesBleeding Kansas[3],[4],[5],[6].
En1856, àPottawatomie Creek, lui et ses hommes tuentcinq colons esclavagistes à coups de sabre au motif qu'ils font partie des « légions de Satan ». Il s'agit pour lui de répondre au massacre du Kansas de 1856, où des groupes organisés parDavid Atchison, le sénateur esclavagiste du Michigan, ont harcelé des colons non esclavagistes puis mis à sac la ville deLawrence.
En 1859, avec l'aide de dix-huit hommes, il s’empare d’unarsenal fédéral àHarpers Ferry, enVirginie pour lancer l’insurrection (). Leraid de John Brown contre Harpers Ferry tourne au désastre : aucun esclave ne le rejoint, Brown est grièvement blessé de plusieurs balles et deux de ses fils sont tués[3],[4].
Il est jugé àCharleston pour meurtre et trahison envers l'État de Virginie ; condamné à mort, il est exécuté par pendaison le. Avant son exécution, il affirme que « Si j'avais fait ce que j'ai fait pour les Blancs, ou pour les riches, personne ne me l'aurait reproché »[2],[3],[4],[6],[15].
En 1820, John Brown épouse Dianthe Lusk, la fille de sagouvernante, le couple donne naissance à sept enfants dont cinq atteindront l'âge adulte. En 1832, Dianthe Lusk Brown meurt en couche[2],[3],[4].
En 1833, John Brown épouse en secondes noces Mary Ann Day, la fille d'unforgeron de New York, six de leurs 13 enfants atteindront l'âge adulte. Si Mary Ann Brown partage les convictions abolitionniste et calvinistes de son époux, en revanche, elle n'est pas d’accord avec son activisme. Après la mort de John Brown, elle, ses trois filles et son fils survivant prennent le train pour la Californie. Elle s'installe àRed Bluff où elle gagne sa vie comme infirmière. Elle meurt en 1884 àSan Francisco[2],[3],[4].
Victor Hugo, depuis son exil àGuernesey, tentera d’obtenir sa grâce : il adressera une lettre ouverte qui paraîtra dans la presse européenne et américaine[16],[17]. Ce texte, qui annonce comme une prémonition laguerre civile, vaudra au poète bien des critiques aux États-Unis.
« […] Au point de vue politique, le meurtre de Brown serait une faute irréparable. Il ferait à l’Union une fissure latente qui finirait par la disloquer. Il serait possible que le supplice de Brown consolidât l’esclavage enVirginie, mais il est certain qu’il ébranlerait toute ladémocratie américaine. Vous sauvez votre honte, mais vous tuez votre gloire.
Au point de vue moral, il semble qu'une partie de la lumière humaine s’éclipserait, que la notion même du juste et de l’injuste s’obscurcirait, le jour où l’on verrait se consommer l’assassinat de la Délivrance par la Liberté. […]
Oui, que l'Amérique le sache et y songe, il y a quelque chose de plus effrayant queCaïn tuantAbel, c’est Washington tuantSpartacus. »
— Victor Hugo, Hauteville-House, 2 décembre 1859
L'édition des œuvres complètes de Victor Hugo parue chezJean-Jacques Pauvert indique que cette lettre n'arriva toutefois à destination qu'après l'exécution de John Brown.
Le futur présidentAbraham Lincoln, dans un contexte tendu (le pays est alors au bord de la guerre de Sécession), quoique abolitionniste comme Brown, ne s’opposera pas à l’exécution et prendra même ses distances avec l’action de ce dernier, dont il condamnera la violence.
La condamnation à mort de John Brown fournit à la cause abolitionniste unmartyr auquel se rallier. Dorénavant, celui-ci deviendra la référence de son combat, et inspirera une chanson qui deviendra l'hymne de la cause chez tous les abolitionnistes de l'Union :
John Brown's body lies a-mold'ring in the grave
His soul goes marching on
(Le corps de John Brown gît dans la tombe.
Son âme, elle, marche parmi nous.)
Lesmarines attaquant l'arsenal tenu par John Brown lors de son raid à Harper's Ferry, gravure publié dans leHarper's Weekly en.
Pourfendeur de nuages (Cloudsplitter) est un roman historique américain deRussell Banks, paru en 1998, qui traite de l'histoire de l'abolitionniste John Brown.
La bataille d'Osawatomie lui vaudra une statue dans la ville, dont le nom sera repris par leWeather Underground dans les années 1970 pour le titre deson journal.
L'Oiseau du Bon Dieu (The Good Lord Bird) est un roman deJames McBride paru en 2013 racontant l'action armée de John Brown des débuts au Kansas jusqu'à sa pendaison, vue par un jeune esclave libéré.
Le troisième tome de la bande dessinéePinkerton, publié en 2015, consacre un long passage au siège d'Harpers Ferry et à la condamnation de John Brown.
Dans le 4e opus de la sérieSplinter cell (Double agent), le groupe terroriste infiltré par Sam Fisher se nomme la John Brown's Army (JBA), en hommage à John Brown.