Jean Teulé naît àSaint-Lô, où son père,charpentiercommuniste originaire d'Agen, a été envoyé par son entreprise après laSeconde Guerre mondiale pour participer à la reconstruction de la préfecture[2]. Ce dernier rencontre celle qui va devenir sa femme, une Bretonne, serveuse dans le café qu'il fréquente chaque jour. Le couple vit deux ans dans une baraque puis, privé d'emploi en raison de ses opinions politiques communistes, regagneParis. La famille Teulé, avec Jean et sa sœur, s'installe àArcueil. Son père devientmenuisier et sa mèreconcierge à la mairie puisfemme de ménage dans les écoles[2],[3].
Il indique en 1996 continuer de se rendre régulièrement à laFête de l'Humanité « non par attachement au communisme, mais pour mes parents, pour y retrouver mon enfance[4]. »
Jean Teulé est le compagnon de l'actriceMiou-Miou de 1998 jusqu'à sa mort[5].
En CM1, à l'école communale Jules-Ferry d'Arcueil, Jean Teulé est le camarade de classe deJean-Paul Gaultier[3], qui dessine déjà des costumes. Tous deux restent en contact avec leur ancienne institutrice, qui enseigne aussi la lecture àBernard Fixot[6].
Alors qu'en raison de ses mauvais résultats scolaires, Jean Teulé est destiné à sa sortie de troisième à une orientation enmécanique auto, son professeur de dessin l'incite et l'aide à se présenter au concours d'une école de dessin. Il est reçu à l'école de l'art de larue Madame dans le6e arrondissement de Paris (aujourd'hui lycéeMaximilien-Vox)[2].André Barbe, auteur de bande dessinée en vogue à l'époque, remarque ses illustrations chez la papetière d'Arcueil, à côté de lagare de Laplace, et le fait entrer àL'Écho des savanes[7],[3].
Entré àL'Écho des savanes au numéro 44 de, Jean Teulé en devient rapidement un pilier, y apparaissant sans discontinuer jusqu'au numéro 81, et figurant au sommaire du numéro 84, le dernier de la formule historique. Il s'inscrit dans la mouvance des auteurs qui travaillent à partir dephotographies retravaillées, telsJean-Claude Claeys ou les membres duGroupe Bazooka. Ses premiers récits sont publiés en collaboration avecJean Rouzaud, puis il les réalise seul, faisant cependant figurer dans les crédits la coloriste Zazou. Fin 1981, le journal connaît des difficultés financières croissantes et il disparaît en. Lorsqu'il est repris puis relancé par les éditions Albin Michel à la fin de la même année[8], Teulé ne travaille pas pour la nouvelle formule[réf. souhaitée].
Teulé avait alors débuté l'adaptation du roman deJean Vautrin,Bloody Mary, dont les premières pages étaient parues dans le dernier numéro de l’Écho. Publié parGlénat en,l'album rencontre le succès critique[réf. souhaitée] et obtient lors dufestival d'Angoulême 1984 un prix remis par la presse spécialisée, lequel prend le nom deprix Bloody Mary[9]. À la fin de l'année 1983, Teulé entre àCircus, l'un des mensuels de la maison d'édition, et en reste un collaborateur régulier jusqu'en 1986. De 1984 à 1986, il publie également trois nouveaux albums aux éditions Glénat. Arrivé très rapidement à maturité, Teulé sent poindre le risque du système[10], et décide de changer d'approche.
En, il publie dansZéro le premier de ses reportages en bande dessinée, où il présente des personnages loufoques, des originaux, à la manière de l'émissionStrip-tease, apparue l'année précédente sur la chaîne de télévision belgeRTBF1[3]. Quelques mois plus tard, ces histoires sont publiées dans(À suivre), le mensuel de bande dessinée des éditionsCasterman. Cette collaboration cesse en 1989 et débouche sur deux albums,Gens de France en 1988 etGens d'ailleurs en 1990. Le premier obtient l'Alph-Art du meilleur album français[11]. En 2005, les éditionsego comme X publient une intégrale augmentée de ces récits.
Jean Teulé meurt à l'âge de 69 ans le à son domicileparisien[14], d'unarrêt cardiaque[15] à la suite d'uneintoxication alimentaire lors d'un repas dans un restaurant parisien du quartier du Marais, spécialisé dans la nourriture crue[16]. Après une enquête ouverte pour déterminer les circonstances de sa mort[17], ses obsèques ont lieu dans la plus stricte intimité le, en présence de sa dernière compagneMiou-Miou[18].
Pour Dominique Warfa, Jean Teulé défend un « art de la distance »[10], une bande dessinée difficile, au graphisme travaillé sans être esthétisant et au propos complexe. En effet, Jean Teulé construit ses bandes dessinées à partir de photographies retravaillées par divers moyens (hachures, lavage, gommage, tramage, froissage, etc.) sur lesquelles il dessine et peint[19]. Chez lui, la photographie ne sert donc pas à assurer un plus grand réalisme au dessin, comme chez de nombreux auteursréalistes classiques ; elle est à la base de sa pratique artistique. Cette pratique, commune à la fin des années 1970, peut conduire à des œuvres rigides, figées, comme chezJean-Claude Claeys. Chez Teulé, l'image est en permanence mise en mouvement, dynamisée par les multiples altérations et modifications que son auteur lui fait subir.
Alors que les limites techniques deL'Écho des savanes l'avaient conduit à ne travailler initialement qu'ennoir et blanc, Jean Teulé a ensuite pu commencer à intégrer progressivement la couleur dans son œuvre[10]. AvecBloody Mary, il peut l'utiliser sur un album entier. Là encore, la couleur ne sert pas à améliorer la lisibilité, à accroître l'effet de réel, mais sert le propos en augmentant la distance, le malaise.
Au réalisme tourmenté des images répond une interrogation du réel permanente et tourmentée[10]. Celle-ci est d'abord interrogation sur la représentation-même, sur la fiction et l'image. L'œuvre de Teulé ne se limite pour autant pas à l'interrogation méta-textuelle : il se fait le portraitiste amer de la banlieue oppressante des années 1980. Il n'hésite pas à se renouveler, adaptantJean Vautrin pour sa première œuvre ambitieuse, ou tirant vers l'onirisme avecFilles de nuit.
Cette œuvre exigeante, au-delà des adhésions, génère aussi des incompréhensions. Ainsi,Wolinski, rédacteur en chef deCharlie Mensuel, juge les bandes dessinées de Teulé « trop compliquées»[10].
2013 - 2014 :Mangez le si vous voulez, pièce d'aprèsson roman éponyme, adapté au théâtre parJean-Christophe Dollé et Clotilde Morgiève, création au festival off d'Avignon 2013 ; reprise au théâtre Tristan Bernard à Paris, du au.
2016 - 2017 :Le Magasin des Suicides, pièce d'après son roman, adapté et mise en scène au théâtre par Franck Regnier pour la Compagnie Nandi. En tournée depuis 2016 (Festival OFF d'Avignon en 2017 et 2018)
2022 :Le Montespan, adaptée par Salomé Villiers et mise en scène par Étienne Launay au Théâtre de la Huchette. Molière de la révélation féminine, Salomé Villiers. Reprise au Théâtre du Gymnase Marie Bell à Paris à partir du 7 octobre 2022
↑Pauline Conradsson, « « Il en avait écrit la moitié » : « l’Histoire du roi qui ne voulait pas mourir », le livre posthume de Jean Teulé »,Le Parisien,no 24619 bis,,p. 36(lire en ligne)