Ambassadeur de France aux États-Unis | |
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Conjoint | Elise Richards Jusserand(d) ![]() |
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Jean-Jules Jusserand, né le àLyon (Rhône) et mort le dans le8e arrondissement de Paris, est undiplomate ethistorienfrançais.
Il fut notammentambassadeur de France auxÉtats-Unis de 1902 à 1924.
Son père, Jean Jusserand (1798-1871),avocat, est issu d'une vieille et riche famille lyonnaise d'artisans[2]. Il perdit sa première femme d'origineroannaise et le seul fils qu'il eut d'elle.Veuf, il se remaria quelque temps après avec Adrienne Tissot (1826-1896), de 27 ans sa cadette. De ce second mariage naquirent quatre enfants en l'espace de quatre ans : Jean-Jules (1855-1932), Étienne (1856-1932), Jeanne (1857-1939) et Françoise (1860-1942)[2],[3].
Jean-Jules Jusserand futbaptisé le 1855 en l'église Saint-François-de-Sales de Lyon dans le2e arrondissement de Lyon. À cette époque, son père estpropriétaire du 7rue des Marronniers près de laplace Bellecour à Lyon.
De 1865 à juin 1872, il fait sesétudes secondaires à l'Institution des Chartreux, un établissement prestigieux de Lyon où il a commeprofesseur derhétorique l'abbé Jérôme Déchelette[2],[4]. Il termine ses études avec un bon bilan scolaire. Grâce à ses excellentes notes, Jean-Jules Jusserand obtient différents prix avec un palmarès assez riche. Au total, il fut nommé 10 fois, ce qui est un record à l'époque. Lors de sonbaccalauréat, il confirme les mêmes appréciations mais avec un palmarès toutefois moins riche. Il ne fut nommé que deux fois pour deux seconds accessits (philosophie etlittérature)[5].
De 1872 à 1876, il fréquente laFaculté de lettres de Lyon pour perfectionner ses fortes connaissances en langueslatine etanglaise. De plus, il obtient undoctorat ès lettres (diplôme peu commun à cette époque). Dans ce cadre, il soutient deux thèses, une enfrançais et une en latin. Sa thèse principale intituléeLe Théâtre en Angleterre, depuis la conquête jusqu'aux prédécesseurs immédiats deShakespeare, d’un style alerte et clair, a été validée par lerecteurAntoine Dareste de La Chavanne, qui lui a permis de l'imprimer le. Elle a été communiquée aux facultés extérieures et lui a valu les flatteuses appréciations de l’illustreHippolyte Taine, historien etcritique littéraire. Sa deuxième thèse a aussi été soutenue devant la Faculté de lettres de Lyon[5].
À la fin de sesétudes supérieures, Jean-Jules Jusserand alla àParis pour préparer leconcours national desaffaires étrangères, il étudia ledroit, l’histoire, leslangues, le latin, lapaléographie et lesarts mais regretta de ne pas faire aussi un peu demédecine[2]. En juillet 1878, il se présenta au concours où il fut reçu premier à l’âge de 23 ans.
Jean-Jules Jusserand est alors nommé élève-consul àLondres. Pendant cette période, il consacre ses recherches à l'Angleterre duXIVe siècle et écrit la première ébauche de ce qui sera son livre le plus souvent traduit et réédité :English wayfaring life in the 14th century (La vie nomade et les routes en Angleterre auXIVe siècle)[2]. Il devient rapidement aide-consul sous la direction deM. Langlet, qui le félicite pour son travail remarquable.
De 1881 à 1887, il est chargé d'une mission enTunisie parLéon Gambetta où il y avait des rivalités et des troubles. À son retour, il fut remarqué pour ses rapports et son action puis il fut placé à la tête d’un bureau des affaires tunisiennes, auxquelles furent ajoutés de nombreuxprotectorats français (Madagascar,Congo,Annam, etc.)[2].
De 1887 à 1890, Jean-Jules Jusserand est conseiller d'ambassade à Londres[6]. Il se créa des relations dans les milieux littéraires, artistiques et politiques du Tout-Londres.
De 1890 à 1898, il est sous-directeur des affaires politiques au ministère des affaires étrangères. Jean-Jules Jusserand mena àParis une vie studieuse etmondaine. Le 14 octobre 1895, il se marie dans le16e arrondissement de Paris avec Elise Richards (1862-1948),Américaine née à Paris, dont le père George Richards étaitfondé de pouvoir d’unebanque américaine en France.
De 1898 à 1902, Jean-Jules Jusserand estambassadeur de France auDanemark. Il voyagea dans l'Empire russe où il accompagna leprésident de la RépubliqueÉmile Loubet lors de ses visites.
En 1902, Jean-Jules Jusserand est nomméambassadeur de France aux États-Unis. Il succède ainsi àJules Cambon (frère dePaul Cambon) qui est nomméambassadeur de France en Espagne.
Il rejoint son poste le[5].
Il gagna très rapidement l'amitié deTheodore Roosevelt et la sympathie de ses successeurs. Ainsi, pendant 22 ans, Jean-Jules Jusserand est le porte-parole de la politique française auprès de cinq présidents des États-Unis : Theodore Roosevelt,William Howard Taft,Woodrow Wilson,Warren G. Harding etCalvin Coolidge[2],[7],[8].
En, lors de lacrise de Tanger entre la France et l’Empire allemand pour la domination duMaroc, qui faillit conduire à la guerre, Jean-Jules Jusserand utilisa son influence sur Theodore Roosevelt pour jouer un rôle efficace dans les négociations de laConférence d'Algésiras. L'appui accordé par les États-Unis et leRoyaume-Uni à la France ouvrit à la France les portes de l'Empire chérifien (maintenant leroyaume du Maroc). Cette négociation fut efficace, et plusieurs personnalités, américaines comme françaises, jugèrent que l’ambassadeur français avait« sauvé la paix ».
Pendant les dix premières années de son poste àWashington, Jean-Jules Jusserand a énormément voyagé dans le pays. Il inaugura la statue duscientifique lyonnaisAndré-Marie Ampère àNew York. Le 27 avril 1906 àAnnapolis (Maryland), il prononça un discours pour l'inauguration d'un monument à la mémoire dessoldats etmarins français morts au service des États-Unis pendant laguerre d'indépendance[9].
Il joua un rôle important dans l’entrée en guerre des États-Unis puisque, dès 1914, il milita pour l'entrée en guerre auprès de la France. Ce fut une période difficile pour lui, l'opinion publique américaine étant très divisée. Il fallut plus de trois ans pour que le pays entre en guerre, à la suite de laguerre sous-marine à outrance lancée par l’Allemagne et letélégramme Zimmerman dans lequel l'Allemagne offrait auMexique des territoires américains s'il rejoignait la guerre aux côtés de laTriple alliance.
En 1915, il inaugure lastatue équestre de Jeanne d'Arc à New York.
Le, laChambre des représentants autorise à faire armer lesnavires de commerce. À la suite de l'attaque de deux bateaux américains par desU-Boots allemands, leprésident des États-Unis constate le que l'État de guerre existe avec l'Allemagne et que les États-Unis ne peuvent limiter leurs dispositions défensives au seul domaine naval. Le, il annonce auCongrès qu’il souhaite l'entrée en guerre des États-Unis aux côtés de laTriple-Entente, qui se traduit par l'envoi de troupes pour combattre sur le sol français, prenant ainsi une part directe au conflit[7]. LeSénat des États-Unis approuve cette résolution par 182 voix contre 6. Le, lesÉtats-Unis sont officiellement en guerre.
Il accueille la délégation de lamission Viviani-Joffre, le, avec quelques officiels américain dont le vice-secrétaire de la Marine,Franklin Delano Roosevelt. Il accompagnera l'ancien président du Conseil RenéViviani et le maréchalJoffre dans leur mission de mettre en place l'armée américaine. Le maréchal Joffre et l'ambassadeur Jusserand sympathisèrent et ce sentiment persista après la guerre. Ils se retrouveront en 1922, lors du retour du voyage du maréchal Joffre en Extrême-Orient.
Le, la1re division d'infanterie américaine débarque sur le sol français àSaint-Nazaire. Jean-Jules Jusserand déclare à cette occasion :« Pour la première fois, une nation neutre s’est décidée à entrer dans le conflit sans marchandage préalable, sans avoir posé de condition. »
Le, leprésident du conseil français,Georges Clemenceau, lui envoie un câble (télégramme) pour le féliciter de son action :« Tout ce que vous avez dit est excellent ». Le, les États-Unis d'Amérique participent à une première offensive contre l'Allemagne. Le, alors que les Américains sont sur le point de remporter unevictoire, l'armistice est déclaré et la guerre est terminée.
Après la guerre, il continue de se battre pour conserver lapaix, obtenue avec tant d’efforts et de sacrifices.
Le, àParis, commence laConférence de paix. Dans le cadre des négociations, le président Woodrow Wilson se fait accompagner en France par Jean-Jules Jusserand en qui il a toute confiance. Wilson est le premier président américain en exercice à venir enEurope. Cette conférence aboutit à la signature dutraité de Versailles le 1919. Les conditions de sortie de la guerre sont dictées, et la paix définitive semble établie.
Peu de gens ne pensaient alors que cette période de paix ne durerait qu'une vingtaine d'années avant l'avènement de laSeconde Guerre mondiale.
Pendant laguerre polono-ukrainienne, lorsque l'armée polonaise a envahi l'Ukraine, une contre-offensive russe a atteintVarsovie, où un mouvement révolutionnaire fit surface. Jean-Jules Jusserand fut alors envoyé à la tête d'unemission diplomatique et militaire par la France pour sauver laPologne.
En 1923, il préside et délivre un discours lors de la cérémonie d'inauguration du monument aux morts des États-Unis.
Il reste ambassadeur de France aux États-Unis cinq ans de plus jusqu'en 1924.
Pendant ces années, il publie une dizaine d’ouvrages en français et en anglais sur des sujets variés.
Plus tard, il prit des congés en France, où il fit un séjour avec son épouse dans leur propriété àSaint-Haon-le-Châtel dans leForez.
À 70 ans, il prend sa retraite. C'estÉmile Daeschner qui lui succède en 1924, etHenry Bérenger prend sa place le[10].
Le, un banquet d’adieu lui est offert par le gouvernement américain pour montrer son estime et sa gratitude. Cette cérémonie réunit les plus hautes personnalités politiques, scientifiques et culturelles des États-Unis. Une médaille d'or lui est aussi offerte.
En 1930, il publie un dernier ouvrage :L’évolution du sentiment américain pendant la guerre.
C’est en 1932 que Jean Jules Jusserand meurt à Paris, à 77 ans[10]. Ses funérailles nationales se font à laCathédrale Notre-Dame de Paris, et son corps est déposé dans le caveau de famille àSaint-Haon-le-Châtel.
Jean Jules Jusserand a participé à la fondation de l'Alliance française. Cette alliance fut créée le à l'initiative dePaul Cambon, lui-même ambassadeur. Son comité se compose dePhilippe Berthelot, Jean-Jules Jusserand,Ferdinand de Lesseps,Louis Pasteur,Ernest Renan,Jules Verne,Félix Charmetant et Armand Colin. Son nom est inspiré de l’Alliance israélite universelle, et son objectif est de défendre et de promouvoir la culture et la langue française, notamment après la défaite de 1870-1871 contre l'Allemagne.
Cette association n'est soumise à aucune influence politique ou encore religieuse. Elle compte en effet parmi ses fondateurs des personnalités de toutes religions.
La Fondation de l'Alliance française est « la référence morale et juridique » des Alliances françaises. Elle reconnaît les nouvelles Alliances françaises en approuvant leur statut. Elle accompagne les Alliances dans la formation du personnel et les conseille dans l'extension de leurs activités ou encore lorsqu'elles traversent des difficultés.
L'Alliance française possède des établissements partout dans le monde et est la plus grandeorganisation non gouvernementale (ONG) culturelle du monde, avec près de 1000 établissements dans plus de 136 pays différents.
À Lyon, l'Alliance française a été mise en place en 1984 et a obtenu de nombreux labels depuis sa création. Elle est la1re école de langues de Lyon ainsi que la3e Alliance française en France. Elle a une équipe multiculturelle de 40 personnes. Elle accueille 2 500 élèves par an avec 130 nationalités différentes dans 2 500 m2 de locaux modernes avec 17 salles de classe spacieuses et climatisées dédiées à l'apprentissage des langues. Elle perpétue encore l'esprit des fondateurs comme Jean-Jules Jusserand.
Parmi les lieux qui ont marqué sa vie, le Forez, ou, plus précisément, la bourgade deSaint-Haon-le-Châtel, tient une place toute particulière. En effet, c'est là que le futur ambassadeur de France aux États-Unis passait ses vacances dans sa maison secondaire. Il avait ses habitudes dans ce village médiéval dans lequel il aimait tant passer du temps.
Il effectuait le trajet vers Saint-Haon depuis Lyon par le train. Il partait pour cela de la gare Saint-Paul. Cette gare, qui date de 1876, se situe à l'Ouest du centre de Lyon, au pied des pentes de la colline de Fourvière, au niveau de la place des Terreaux. On peut admirer sa façade sur la photographie ci-dessous. C'est ainsi que, via la ville de Roanne, il gagnait son cher village.
Il reste encore des traces à Saint-Haon du passage de ce grand homme. En effet, une rue et une des tours du château de cette bourgade médiévale portent son nom. Il y possédait sa résidence préférée.
Jean Jules Jusserand reçoit le premier prix Pulitzer d'histoire en 1917 pour la publication de son recueil d'études historiques : « With Americans of Past and Present Days ». Il reçoit également la Grande Croix de la Légion d'Honneur et crée la Société américaine de la Légion d'Honneur.
Plusieurs monuments en France et aux États-Unis commémorent encore son rôle diplomatique.
À sa mort, le président Roosevelt a souhaité garder la mémoire de Jusserand en disant qu'il a représenté les « normes les plus strictes d'éthique diplomatique ». En 1935, un banc, construit en granit et en marbre, a été érigé pour commémorer les liens d'amitié qui l'unissaient à Roosevelt. Ce banc marque l'endroit où les deux hommes s'asseyaient lors de leurs promenades au Rock Creek Park, à Washington[13].
La tour Jusserand l, àSaint-Haon-le-Châtel, constitue un monument érigé à sa mémoire puisqu'il s'y était retiré. Elle est l’œuvre deJoanny Durand et fut inaugurée en[10].
Une avenue portant son nom a été ouverte à Lyon à peu près en 1990, dans le3e arrondissement, près de l'avenue Félix-Faure.