Pour les articles homonymes, voirJacques Chevalier etChevalier.
| Ministre français de l'Éducation nationale | |
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| Professeur associé(en) |
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| Décès | (à 80 ans) Cérilly |
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| Époque | Époque contemporaine |
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| Lieu de détention | Centre de Séjour Surveillé(d) |
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Histoire de la Pensée (4 t.) •Les Maîtres de la pensée française (Pascal, Descartes, Bergson) •Cadences (2 t.) |
Jacques Chevalier, né àCérilly (Allier) le et mort le dans la même ville, est unphilosophecatholiquefrançais.
Agrégé de philosophie, normalien, Jacques Chevalier a été professeur de philosophie à l’Université de Grenoble. Son œuvre majeure est l’Histoire de la Pensée. En philosophie, il est le disciple d'Henri Bergson.
Pétainiste, il a été secrétaire d'État à l'Instruction publique, puis à la Famille en 1940-1941, dans les gouvernementsFlandin etDarlan durégime de Vichy. Il soutient laMilice française (collaborationniste), et dénonce desrésistants, ce qui entraîne l'exécution de plusieurs d'entre eux. Après laLibération, il est condamné à vingt ans de prison et à l'indignité nationale (gracié en 1947 pour raisons de santé).
Son père, legénéral Chevalier, est directeur du Génie au ministère de la Guerre, de 1910 à 1917. Il se lie alors au futur maréchalPhilippe Pétain[2].Après des études en province d'abord, puis auxLycée Hoche etLycée Henri-IV, Jacques Chevalier est reçu à l'École normale supérieure en 1900 dans la promotion d'Eugène Albertini, dePierre-Maurice Masson, dePaul Hazard et deMaurice Legendre. En 1903, il est reçu second à l'agrégation de philosophie. Il passe alors deux années à Oxford après ses études auprès du professeur de cristallographieHenry Alexander Miers, et il y rencontre pour la première foisLord Halifax, futur secrétaire d'État auForeign Office. Chevalier effectue de nombreux séjour chezLord Halifax père, qu'il a connu par lePère Portal. Il s'adonne à des recherches religieuses surNewman,Pusey et leMouvement d'Oxford puis sur les églises non conformistes et les réveils religieux[3].
De 1905 à 1908, il est pensionnaire de laFondation Thiers et travaille sous la direction d'Émile Boutroux. Cette institution, qui dépend de l'Institut de France, est destinée, selon le vœu testamentaire d'Adolphe Thiers, aux jeunes chercheurs brillants pour mener leurs travaux à bien. Chevalier participe aux séances sous la direction de Portal d'études pour l'union des églises avec son amiMaurice Legendre.
Friedrich von Hügel visita Chevalier à la Fondation et l'introduisit au directeur Émile Boutroux, puis ils échangèrent une longue correspondance soit 23 lettres en 1907, plus qu'aucun autre moderniste français exceptéAlfred Loisy[4]. qui dira de lui dans ses mémoires :« Des catholiques tels que Jacques Chevalier avaient mieux compris que Sabatier et même que von Hügel la position que j'avais prise dans mes derniers livres »[5]. Jacques Chevalier commence alors une thèse sur les réveils religieux auPays de Galles, d’après des documents inconnus avec lesquels il eut contact lors de son séjour à Oxford. Pour l'année scolaire 1908-1909, il prend une année sabbatique pour achever le travail de thèse. Il en retire une connaissance approfondie et plus intérieure de laforêt de Tronçais.
Il rencontre le pèreGeorge Tyrrell, jésuite irlandais, qui sera excommunié pour des soupçons demodernisme. Il fut ensuite nommé professeur de philosophie au lycée deChâteauroux en, il y restera trois ans. André Bridoux (futur inspecteur général de philosophie) fut son élève et participa aux groupes de travail avec lePère Pouget. Jacques Chevalier enseigne la philosophie à Lyon, aulycée Ampère et au fameuxLycée du Parc (l’un des grands lycées de France).
La thèse galloise sur les réveils religieux en Pays de Galles, terminée en 1911, est refusée parFerdinand Lot historien du Moyen Âge, archiviste paléographe à la Sorbonne, très renommé et influent, car « il estimait que les textes sur lesquels repose la partie historique de la thèse ne sont pas authentiques[6]». Cette thèse sera publiée dans lesAnnales de l'université de Lyon (Lyon-Paris, 1923). Jacques Chevalier changera de sujet de thèse et adaptera son mémoire de fin d'étude pour en faire une thèse.
Chevalier est en même temps un hispaniste distingué. Il entretient une correspondance suivie avec le philosophe espagnolMiguel de Unamuno, de 1911 à la mort de ce dernier en 1936, sur des sujets tels que le mystère de l'Annonciation ou la pensée deBlaise Pascal. En 1914, Unamuno autorise Chevalier à faire publier dansLe Temps une lettre exprimant sa méfiance envers lepangermanisme et sa sympathie pour la cause desAlliés[7].
Chevalier est reçu docteur ès lettres en 1914 avec mention très honorable[8]; sa thèse principale porte surLa notion du nécessaire chez Aristote et chez ses prédécesseurs, particulièrement chez Platon ; sa thèse complémentaire était intitulée :Étude critique du dialogue pseudo-platonicien l'« Axiochos », sur la mort et l'immortalité de l'âme. Il soutient ses thèses à Lyon, avecEdmond Goblot. Le, il reçoit un ordre d'appel dans le service auxiliaire ; il sera interprète auprès de l’armée anglaise.
En 1919, il est nommé professeur de philosophie à lafaculté des lettres de Grenoble. Le, il est élu doyen de lafaculté des lettres de Grenoble à 49 ans. Il le demeurera jusqu'en 1944.
Henry Bordeaux, romancier catholique, membre de l’Académie française, écrit que Jacques Chevalier« a réussi à faire de sa petite chaire de faculté locale une chaire mondiale »[9].
Par l'intermédiaire de Antoine Sévat natif d'Isle-et-Bardais (Allier), lazariste qui deviendra missionnaire de Madagascar, il rencontre le Père Pouget en 1901, ce sera le début d'une longue amitié. Il y amènera de nombreux intellectuels chrétiens de sa génération ou d'une autre génération (Jean Guitton,Emmanuel Mounier,Gabriel Marcel), mais aussiErnesto Buonaiuti, professeur d'histoire au séminaire romain destitué en 1906 pour modernisme et qui correspondait secrètement avec Pouget par l'intermédiaire de Chevalier[10].
Il visite, parfois quotidiennement, la célèbre cellule 104 duPère Pouget[11] (Guillaume Pouget), à la maison-mère deslazaristes, 95rue de Sèvres, à Paris. Il est beaucoup question aussi du Père Pouget dans le livre de Jacques Chevalier,Cadences – mouvement d'idées, disciplines d'action, aspects de la vie morale : l'ordre, l'amour, l'apparence[12].Gonzague Truc décrit l'influence de ce religieux sur Jacques Chevalier à qui celui-ci doit l'approfondissement d'une foi« où l'on voit l'intelligence féconder les dogmes »[13].
Il est le disciple et l'ami deHenri Bergson et l'un de ses exécuteurs testamentaires[14]. Lors de la condamnation du modernisme, la plupart des catholiques se détournent dubergsonisme,« à l'exception de certains d'entre eux proches de Maurice Blondel » note Hervé Serry[15]. Parmi ceux-ci, Jacques Chevalier, qui restera fidèle à Bergson jusqu'au-delà de la mort. Par ailleurs, il fut un proche deMaurice Blondel comme l'atteste sa correspondance[16].
Son Bergson, publié chez Plon[17], avec une première édition parue en 1926, est d'un intérêt tout particulier car relu et corrigé de la main même de Bergson. Les verbatims de leurs nombreux entretiens et leur abondante correspondance témoignent d'une proximité sans égale[18].
Le rayonnement de Jacques Chevalier lui vaut des disciples de qualité : Guitton, Mounier,Husson,Garrone, etc. En 1921, il rencontre Jean Guitton, âgé de vingt ans, qu'il incite à faire de la philosophie. C'est Guitton qui est introduit par Chevalier auprès du père Pouget.
Il anime l'Union nationale des membres de l'enseignement public. L'association avait été très active pour défendre les intérêts des catholiques qui s'estimaient brimés dans leur carrière dans l'Éducation nationale à cause de leur appartenance religieuse.
En 1931,Marcel Mauss a été nommé auCollège de France contre Chevalier, à une voix de majorité. Six mois plus tôt, Mauss et Chevalier avaient eu le même nombre de voix.Gilson qui avait voulu se présenter s'était retiré après le premier tour.
Dans son édition des œuvres dePascal (Œuvres complètes, Bibliothèque de la Pléiade, 1936), il propose une présentation desPensées en reconstituant le plan projeté par l'auteur d'aprèsle discours sur les Pensées de M. Pascal rapporté parNicolas Filleau de La Chaise lors d'une conférence où Pascal aurait présenté à Port-Royal en 1658 le "dessein" de son œuvre[19],[20]. Après guerre, il publie en 1955 une monumentaleHistoire de la Pensée[21].
Il a été dès sa jeunesse l'ami deJoseph Malègue et il rédigera la préface de son roman inachevé réédité en 1958,Pierres noires. Les classes moyennes du Salut.
Louis Lavelle a souligné le fait qu'il est un« bergsonien catholique, et qui s'accorde avecMaurice Blondel pour penser que la philosophie, au lieu de rendre la révélation inutile, en prépare les voies »[22]. C'est à propos de l'ouvrage de réflexions personnellesCadences (tome I, Paris, Plon, 1939 ; tome II, Paris, Plon, 1951) que Lavelle s’exprime ainsi. Jacques Chevalier présentait la philosophie comme l'alliance d'une sagesse et d'un« effort pour parvenir à la représentation vraie des choses »[23].
La fondation du Groupe est décidée après un peu plus d'un an de gestation par circulaire du. Il est établi entreGrenoble et àLyon autour du philosophe Jacques Chevalier ; mais son titre délibérément neutre – Groupe de travail en commun – n’apparaît qu’en novembre 1922 dans une deuxième circulaire. Sur ces fondements succincts se développe une activité soutenue dont l'essentiel consiste en l'envoi aux membres du Groupe de documents polycopiés qui se veulent de simples instruments de réflexion non destinés à la publication. Ils y échangent notes et entretiens.
Le groupe connaîtra plusieurs secrétaires, poste occupé successivement par Belmont, par Husson et surtout parJean Guitton, et enfinVictor Carlhian en 1931. Il repose tout entier sur cette « croyance rationnelle en la Vérité » qui unit étroitement la raison humaine à la foi chrétienne, en désaccord d'un point de vue intellectuel, avec lethomisme « antimoderne » deJacques Maritain ; sur une « métaphysique positive » qui s'oppose frontalement au rationalisme laïque d'unLéon Brunschvicg, alors hégémonique enSorbonne. Chevalier s'opposait à l'orthodoxie rigide du catholicisme conservateur et cherchait plutôt une philosophie moderne au sein de la communauté catholique[24].
Le Groupe est complètement étranger à l'Action française deCharles Maurras. Il compte même dans ses rangs, en la personne deJoseph Vialatoux, l'un de ses plus rudes adversaires. Pour Véronique Auzépy-Chavagnac, dans son livre surJean de Fabrègues, préfacé parRené Rémond, Jacques Chevalier constitue, dans le monde catholique, un groupe situé entre Maritain et Blondel[25].
Son unité n'est pas d’ordre confessionnel, bien que ses membres soient des catholiques déclarés. Tous entendent résolument se placer sur le seul terrain de l'intelligence en quête de vérité, au moyen d’une démarche inductive à partir des questions humaines, et non d'une démarche déductive à partir du dogme[26]. Malgré la forte présence d'historiens et de géographes (Pierre Deffontaines,André Fugier,André Latreille,Maurice Legendre,Henri Terrasse ouJacques Zeiller), et celle de quelques juristes et économistes (André Rouast, professeur à l'Université de Grenoble, ouHenri Guitton, amené par son frère Jean), lesphilosophes et laphilosophie dominent largement au sein du Groupe. Les plus âgés sont ses camarades de la rue d'Ulm, Émile Genty ou Maurice Legendre. Il y a aussi André Bridoux son élève à Châteauroux ; André Fugier, André Latreille,Henri Gouhier et Léon Husson ses élèves à Lyon ;Jean Anglès d'Auriac,Paul Belmont, Paul Belmont, Louis Bourgey, Louis Garrone,Jean Lacroix et bien sûrEmmanuel Mounier ses premiers étudiants à Grenoble[27]. Signalons par ailleurs la présence deJules Monchanin et de son confrère de GrenobleGabriel Garonne, futur cardinal, amené par son frère Louis.
Chevalier fait partager au Groupe ses connivences intellectuelles du moment, qui contribuent à en définir positivement l'esprit, par-delà le double refus de Brunschvicg et de Maritain. Le vieux lazariste Guillaume Pouget reste jusqu'à sa mort en 1933 une référence théologique pour le Groupe.
Parallèlement, intervient la tentative d'Emmanuel Mounier pour faire endosser par le Groupe (devenu Groupement) la création de sa revue. On en veut pour preuve sa circulaire confidentielle du, à en-tête du Groupement. Sûrs y écrit-il, de l’appui de Jacques Chevalier - acquis dès avril 1931 - et de Jacques Maritain« nous pensons organiser une forte équipe de prospection qui ne laissera passer aucun événement, aucun livre important, sans nous en envoyer la substance. Le groupe est tout désigné, par sa diversité, par son esprit, à former le noyau résistant de cette équipe ». Et le manifeste imprimé de fait figurer pas moins de 10 membres du Groupement parmi les futurs collaborateurs de la revue. Pourtant, cette tentative de rapprochement échoue. Jacques Chevalier et Jean Guitton s’opposeront à la dimension révolutionnaire de la revue après avoir adhéré à l’exigence intellectuelle et politique d’Esprit à ses débuts. Seul Jean Lacroix suit Mounier, au point de devenir le pilier du groupeEsprit de Lyon.
Le Groupe, puis Groupement, de travail en commun est mort des inconvénients qui constituaient l'envers de ses avantages. Réseau souple fédérant autour de Chevalier de jeunes intellectuels catholiques des années 1920, hors de tout dogmatisme et dans une perspective spiritualiste, il ne résiste pas aux tempêtes socio-politiques des années 1930. Malgré cela le Groupe a permis à de jeunes universitaires catholiques de concilier leur engagement professionnel et leur engagement spirituel[28].
La ligne éditoriale d'Esprit rencontre rapidement l’hostilité de Jacques Chevalier. Mounier n’est pas indifférent à la pensée de Marx, alors que Chevalier combat le « matérialisme allemand » dont, pour lui, le marxisme serait issu. Mounier se range du côté du Front populaire, cependant que Chevalier anime l’Union nationale des membres de l’enseignement public qu'il avait créé en 1925 afin de regrouper des enseignants catholiques qui s’estimaient persécutés en raison de leur foi, et qui l'estimeront l'être plus encore dès lors que le gouvernement de Front populaire sera au pouvoir. Chevalier soutient en Espagne la révolution franquiste alors que Mounier en dénonce l’ADN fasciste[29].
En 1937, Chevalier accepte une mission de réorganisation de l'enseignement espagnol auprès du général putschisteFranco, dans une Espagne alors en pleineguerre civile. Comme il n'avait pas prévenu le gouvernement, ainsi qu'il était coutume de le faire,Jean Zay, alors secrétaire d'État à l'Éducation nationale, signe une circulaire prescrivant« qu'aucun universitaire français ne pourrait accepter une mission officielle d'un gouvernement étranger sans l'autorisation de son ministre » de tutelle[30].
Chevalier restera très apprécié dans les universités espagnoles pendant la période de l'Espagne franquiste : il y est considéré comme « un grand hispaniste et un grand philosophe épris de l'Espagne[31] ». En 1943, bien que retiré du gouvernement vichyste, il fera pression sur les universitaires français établis en Espagne, notamment à travers son filsFrançois Chevalier, professeur à laCasa de Velázquez, pour s'opposer à leur ralliement à laFrance libre[32].
Sous legouvernement de Vichy, Chevalier est nommé Secrétaire général à l'Instruction publique[33] du au, Chevalier dénonce à Pétain l'intention qu'avait eu son prédécesseur au ministère,Georges Ripert, de consulter le secrétaire général duSyndicat national des instituteurs (SNI), André Delmas[34], et contribue à son renvoi, le.
Il le remplace alors au poste de secrétaire d'État à l'Instruction publique et à la Jeunesse. Il occupe ce poste du au.
Contre sa propre administration restée fidèle au principe delaïcité, il mène une action visant à réintroduire Dieu dans les programmes scolaires. Lors de la réforme des programmes entreprise par Georges Ripert en novembre 1940, Jacques Chevalier ajoute un paragraphe dans les programmes de Morale : « Entretiens familiers et lectures sur les principaux devoirs envers nous-mêmes, envers nos semblables (Famille et Patrie) et envers Dieu[35] ».Les devoirs envers Dieu avaient été inclus dans le plan d'études des écoles primaires élémentaires publié le, supprimés le et rétablis, discrètement, dans de nouvelles instructions signées deLéon Bérard ministre de l'instruction publique et datées du[36].
Il fait de l'instruction religieuse un enseignement à option par la loi du 6 janvier 1941[37]. L'article 4 du concordat négocié entre la République française et le Saint-Siège au premier semestre de 1940 prévoit cette mesure[38].
Chevalier alléguera après guerre, notamment à ses procès, avoir négocié des accords secrets entre Churchill et Pétain, mais de nombreuses mystifications ont obscurci la réalité[39] : Chevalier a transmis une note écrite deLord Halifax, ancien camarade d’Oxford. Churchill propose à Pétain de se replier en Afrique du Nord et d’y envoyer six divisions. Pétain lut la note et dit : « Nous ne l’avons pas reçue ». Elle resta sans réponse[40],[39].
Une contestation violente de la personne de Chevalier vient de la presse collaborationniste de Paris (L'Œuvre deMarcel Déat,Les Nouveaux Temps deJean Luchaire) pour son attitude au moment de la mort d'Henri Bergson, le 4 janvier 1941, où il avait présenté des condoléances officielles à la veuve du philosophe à la radio de Vichy, et pour sa politique cléricale. Son successeur,Jérôme Carcopino, a rapidement fait disparaître dans les programmes scolaires les devoirs envers Dieu, préférant des références à d'autres notions universelles comme les valeurs spirituelles ou les civilisations chrétiennes. L'enseignement "à option" de l'instruction religieuse devient facultatif dans les locaux scolaires, dispensé en dehors le plus souvent[41].
Chevalier interdit aux Juifs par circulaire du 10 la préparation des concours de l'agrégation[42],[43], en application du statut du 3 octobre qui interdit aux Juifs d'être fonctionnaire. Cependant, il refuse d'introduire lenumerus clausus pour les enfants juifs dans les lycées et collèges[44]. Il ne cède pas à la volonté de Claude Vacher de Lapouge, venu le solliciter en décembre 1940 pour la création au Collège de France d'une chaire destinée à l'enseignement des doctrines racistes[45]. En janvier 1941 pourtant, il destitue un professeur de l’université de Grenoble d’origine juive, ce qui lui vaut la rupture avec Emmanuel Mounier, son disciple[46]. A son procès le professeurLouis Halphen témoignera en sa faveur car, ayant été exclu comme juif de la fonction publique, Jacques Chevalier l’avait fait réintégrer, avant de l’accueillir dans sa faculté des lettres à Grenoble[47].
Chevalier devient ensuite secrétaire d'État à la Famille et à lasanté. dans ce poste qu'il occupe du au, il opère quelques réformes concernant la mise en place d’allocations de retraite aux vieux travailleurs et obtient une loi facilitant l'adoption[48]. Une extrême fatigue et sa déception devant les difficultés de l'action politique[49] contraignent Chevalier à se retirer en.
En, après un long temps de repos, il reprend sa charge de professeur et de doyen à Grenoble. Resté pétainiste, Chevalier inscrit néanmoins en Faculté, pour les protéger, plusieurs jeunes filles juives ainsi que deux jeunes républicains espagnols[50].
L'année 1944 est particulièrement agitée pour l'ancien ministre. Au cours d'une conférence tenue à Paris, il se permet de dénoncer la présence de l'occupant ; mais à la suite des offensives desForces françaises de l'intérieur dans la région bourbonnaise, dans des lettres adressées à divers responsables gouvernementaux de Vichy, il réclame des armes pour des« hommes sûrs » - afin de lutter contre la résistancecommuniste en ce printemps 1944[51]. Il approuve les exactions de laMilice française[52] et a même fait appel à elle contre les étudiantsrésistants de Grenoble, ce qui conduit à l'hécatombe de l'hiver 1944[53].
Un groupe deFFI, ayant intercepté un de ses appels téléphoniques au cabinet du Waffen-SSJoseph Darnand (il lui demandait d'intervenir contre lemaquis présent dans la forêt de Tronçais), arrête Chevalier le dans sa maison deCérilly. On le conduit dans un maquis-prison itinérant. Entretemps, sa demande d'intervention aura été suivie d'effet, avec pour effet du côté des résistants huit morts et quatre blessés[54]. Il sera retenu prisonnier dans laforêt de Tronçais, où il assiste à l’exécution, par un détachement de F.T.P., de familles de miliciens fuyant la Libération en train vers l’Allemagne[55]. Il est ensuite transféré aucentre pénitentiaire de Fresnes le.
Il témoigne au procès du maréchalPétain, le, au sujet des négociations franco-britanniques. Puis, pour raison de santé, il est mis en liberté le, jusqu'à ce que se tienne son procès le ;Marcel Héraud, son compatriote de Cérilly, sera son avocat, aux côtés deMarcel Poignard et de Roger-Adolphe Lacan[56].
Le, il est condamné à vingt ans de travaux forcés[57], à la dégradation nationale et à la confiscation de la moitié de ses biens. Cette condamnation découle du fait qu'il était « un fervent partisan de la répression contre les résistants et les maquisards de même qu'un chantre de "la dénonciation des étudiants communistes et gaullistes" »[58]. Il bénéficie d'une mesure de libération conditionnelle pour raisons de santé le, puis est gracié par décret le[52].
Il se retire alors à Cérilly pour se consacrer à la rédaction de ses travaux philosophiques, notamment sa monumentaleHistoire de la Pensée. Le tome 2 consacré à la pensée chrétienne n’a pas convaincu le médiévisteGeorges Duby par sa vision« sommaire » et« enfantine » du Moyen Âge, donc déformée; Georges Duby relève ainsi que selon Chevalier l’époque médiévale tardive est synonyme de confusion, c’est-à-dire« ce qu’aime la masse… lorsqu’elle n’est pas maintenue, éclairée et guidée par un chef »[59]. Le régime corporatif des artisans et commerçants est loué mais, là encore, déformé.
Chevalier fonde le 10 juillet 1954 la Société des Amis de la Forêt de Tronçais, à Cérilly[60], il en sera le président d'honneur etCamille Gagnon le président. La société est toujours active pour assurer la conservation des arbres, animaux, sites et monuments pittoresques de laforêt de Tronçais.
Jacques Chevalier est le père de l'universitaireFrançois Chevalier (1914-2012).
Les papiers personnels de Jacques Chevalier sont conservés auxArchives nationales sous la cote 684AP[61].
Partisan d'une certaine forme deréalisme, s'inscrivant dans la continuité duspiritualisme français, Jacques Chevalier écrit que« Toujours le réel nous échappe par quelque endroit »[62].
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