Enfant naturel, de condition modeste, de formation rudimentaire, il devient mécanicien de précision et militant syndical dès l’âge de 17 ans. Il adhère au mouvement communiste clandestin en 1931. Emprisonné, il monte dans la hiérarchie du parti et fait preuve d’un talent certain d’organisateur. En 1943, il est membre duComité central qui décide de transformer leParti des communistes de Hongrie en parti de la paix, prenant à la lettre la dissolution duKomintern.
En 1945, Kádár est un des espoirs du parti hongrois et occupe des postes de haute responsabilité : membre dubureau politique, secrétaire général adjoint, ministre de l’Intérieur, chef de lapolice secrèteAVH (1948-1951).
Au sein duParti des travailleurs hongrois, il sert la politiquestalinienne deMátyás Rákosi et ne critique pas l’inculpation, le procès et l’exécution de son camarade et amiLászló Rajk, qui l'avait précédé au ministère de l'Intérieur[1]. Actif durant la politique de répression, il assiste personnellement à certains interrogatoires[2]. Victime d’une purge, suspecté detitisme, il est lui-même emprisonné à cause de sa participation au comité central de 1943 et de sa décision de dissolution (1951-1953).
Libéré en 1954 parImre Nagy, Premier ministre d’un courant réformateur, il hésite à prendre parti entre les réformateurs et les staliniens. Pendant l’insurrection de Budapest du, Kádár est d’abord favorable aux insurgés puis forme un contre-gouvernement qui soutient l’intervention soviétique. Il passe en Union soviétique puis y forme un « gouvernement ouvrier-paysan » qui fait appel, officiellement à l'aide de l'Armée rouge pour y rétablir le pouvoir socialiste. Le slogan qu'il utilise est « Qui n'est pas contre nous est avec nous ». L'ambassadeur soviétique à Budapest,Iouri Andropov, téléguide l'opération. La répression fait environ 2 500 morts. Imre Nagy et son ministre de la Défense,Pál Maléter, seront sommairement exécutés[3]. Kádár est nommé chef du gouvernement après l’écrasement du mouvement national (1956-1958, 1961-1965).
Il dirige de 1956 à 1988 le parti, reconstitué sous le nom deParti socialiste ouvrier hongrois (premier secrétaire et membre du praesidium de 1956 à 1985, secrétaire général en 1985). S'il ne remet pas en cause la dictature du parti unique et le suivi de la politique étrangère soviétique (il participe à l'occupation de laTchécoslovaquie en 1968), il s'emploie, tirant profit de la résignation des Hongrois après la dure répression de l'insurrection de 1956, à libéraliser le régime dans la limite du régime socialiste : ainsi, il atténue la répression anti-religieuse, diminue la censure et tolère une dissidence politique[4]. La Hongrie ne suit pas Moscou dans tous les domaines comme le montre sa volonté à l'adhésion auFonds monétaire international et la prise de contact avec laRépublique fédérale d'Allemagne en 1967[5]. Les passeports sont délivrés avec beaucoup de liberté et l’homosexualité dépénalisée en 1961[6]. Des anciens dissidents reviennent en Hongrie et reçoivent des responsabilités importantes : le gouverneur de la banque centrale, nommé à la fin des années 1970, avait passé 15 ans en Australie. Kádár refuse d'appliquer une politique antisémite comme dans de nombreux pays de l'est, malgré l'antisémitisme de la société révélé par le« procès Rajk » tenu par son prédécesseurMátyás Rákosi quelques années auparavant[7],[8]. En 1968, il introduit certains mécanismes du marché dans l'économie et au début des années 1980, il laisse se développer des activités économiques privées. En 1986, le Primat de Hongrie, le cardinalLekai, est même sollicité pour devenir député, poste qu'il refusera à la suite d'un veto formel deJean-Paul II. Pour désigner cette période de leur histoire où ils jouissaient d'une toute relative liberté, les Hongrois parlaient alors de leur pays comme de « la baraque la plus gaie du camp socialiste »[9].
Cet allègement de la collectivisation a pour conséquence une augmentation du niveau de vie, au prix néanmoins d'un fort endettement public et d'une balance commerciale déficitaire[10],[11].
Malade, sombrant progressivement dans lasénilité[12], il est écarté du secrétariat général du Parti socialiste ouvrier hongrois (PSOH) en et son successeurKároly Grósz ne peut se maintenir longtemps au pouvoir, tant Kádár est allé loin dans les concessions. Le Parti renonce de lui-même à son rôle dirigeant au début de l'année 1989, ce qui ouvre la voie à l'effondrement du régime. Dès le mois de, lafrontière avec l'Autriche est ouverte, ce qui provoque la ruée de réfugiés est-allemands et la chute dumur de Berlin, le.
János Kádár est mort le, le jour même où laCour suprême de Hongrie réhabilitait solennellementImre Nagy et ses compagnons, que Kádár avait fait exécuter en 1958, en déclarant nulle et non avenue leur condamnation, c’est-à-dire en détruisant la thèse politique de laquelle le régime de Kádár avait tiré sa légitimité.
Il a donné son nom auKádár-kocka, modèle d'habitation standard construite massivement des années 1960 aux années 1980 dans la campagne hongroise.
Selon un sondage publié fin 2006, 65 % des Hongrois jugent que Kádár a joué un rôle positif dans l'histoire du pays[13].
La tombe de Kádár dans lecimetière Kerepesi àBudapest a été profanée le. Près de la tombe se trouvait une inscription disant qu'« un assassin et un traître ne peut reposer dans un sol sacré ». La plupart des ossements de Kádár, dont son crâne, ont été volés[14]. L'urne contenant les cendres de sa femme a également disparu[15].