La formuleintérêt général (ouintérêt public) désigne la finalité d'actions ou d'institutions censées intéresser et servir unepopulation considérée dans son ensemble.
Formulée pour la première fois parAristote dans saPolitique[1], pour qui« le bien en politique, c’est la justice, c’est-à-dire l’intérêt général », elle est depuis l'objet de multiplescontroverses et depolémiques.
En 1791, le députéIsaac Le Chapelier, à l'origine dela loi supprimant les corporations et qui porte son nom, affirme :« Il n'y a plus de corporations dans l'État ; il n'y a plus que l'intérêt particulier de chaque individu et l'intérêt général »[2].
La distinction avec les notions voisines d'intérêt commun, d'intérêt public ou encore d'intérêt collectif, n'est pas évidente :
Dans le domaine de l'accélération de la production d'énergie renouvelable dans l'Union européenne, un règlement précise que
« 1) La planification, la construction et l'exploitation d'installations de production d'énergie à partir de sources renouvelables, le raccordement de ces installations au réseau, le réseau connexe proprement dit, ainsi que les actifs de stockage, sont présumés relever de l'intérêt public supérieur et de l'intérêt de lasanté publique et de lasécurité publique lors de la mise en balance des intérêts juridiques dans chaque cas, aux fins de l'article 6, paragraphe 4, et de l'article 16, paragraphe 1, point c), de la directive 92/43/CEE du Conseil (5), de l'article 4, paragraphe 7, de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil (6) et de l'article 9, paragraphe 1, point a), de la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil (7). Les États membres peuvent restreindre l'application de ces dispositions à certaines parties de leur territoire ainsi qu'à certains types de technologies ou de projets présentant certaines caractéristiques techniques, conformément aux priorités définies dans leurs plans nationaux intégrés en matière d'énergie et de climat.
2) Les États membres veillent, au moins pour les projets reconnus comme présentant un intérêt public supérieur, à ce que, dans le cadre du processus de planification et d'octroi des permis, la construction et l'exploitation d'installations de production d'énergie à partir de sources renouvelables et le développement de l'infrastructure du réseau connexe soient prioritaires lors de la mise en balance des intérêts juridiques dans chaque cas. En ce qui concerne la protection des espèces, la phrase précédente ne s'applique que si et dans la mesure où des mesures appropriées de conservation des espèces contribuant au maintien ou au rétablissement des populations d'espèces dans un état de conservation favorable sont prises et des ressources financières suffisantes ainsi que des espaces sont mis à disposition à cette fin »
Pour les doctrines politiques utilitaristes et dans les constitutions despays anglo-saxons, l'intérêt public est désigné commebien commun (common wealth) et consiste en la maximisation du bonheur individuel de tous les membres d’un groupe, d’une communauté ou d'un pays.
Historiquement, avec l'Union européenne, la notion d'intérêt public tend à être remplacée par la notion d'intérêt commun qui est défini comme la conciliation des intérêts particuliers exprimés par deslobbies.[réf. nécessaire] Pourtant, tandis que la notion d'intérêt général semble bien présente au cœur des processus législatifs et réglementaires européen, même si peu présente dans les textes eux-mêmes, la Commission en a tenté une définition en 2003, en publiant leLivre vert sur les services d’intérêt général[6]. Par ailleurs, le Ministère public et les différentes branches de l'Administration (Santé, Sécurité, Instruction publique, Culture, Justice, Environnement…) n'ont plus le monopole des actions publiques dans la mesure où des associations privées, voire desOrganisations non gouvernementales, ont maintenant la possibilité d'agir ou d'intervenir dans des actions en justice pour défendre des principes ou des biens d'intérêt public (nature, liberté, antiracisme, etc.). Recevoir le nom d'association reconnue d'utilité publique permet donc de bénéficier d'une aide de l’État.
Levier législatif et économique : en France laConférence permanente des coordinations associatives, plus importante coordination d'associations, invite les législateurs à définir la notion desubvention d'intérêt général et à réformer la relationcontractuelle entre associations etpouvoirs publics ; ce qui selon elle accroîtrait l'intérêt général[7].
En 1966,Jacques Ellul assimile le concept d'intérêt général à un moyen rhétorique utilisé par la classe bourgeoise pour imposer l'idéal duprogrès, quoiqu'il en coûte aux individus :
« L'intérêt général, c'est leprogrès technique ; même s'il n'a rien à voir avec l'intérêt des hommes, même si l'entreprise est extrêmement douteuse, même si on ignore en définitive les résultats de ce que l'on entreprend. Du moment que c'est un progrès technique, c'est l'intérêt général. Ne disons pas surtout : « le progrès technique s'effectuedans l'intérêt général ». Cette formule générale permettrait encore la discussion. Non ! dans l'esprit de nos contemporains, l'assimilation est entière : le progrès technique quel qu'il soit esten soi l'intérêt général »[8]
En 1986, le politiste François Rangeon assimile le concept à uneidéologie[9].
De même, un certain nombre demilitants écologistes estiment que la notion d'intérêt général - malgré les dispositions légales qui le justifient - peut servir essentiellement à des intérêts strictement privés et que - malgré les résultats d'enquêtes qui tendent à prouver le contraire - l'utilité des projets n'est pas systématiquement prouvée. Ils dénoncent alors ce qu'ils appellent les « grands travaux inutiles ». L'exemple le plus connu en France est celui duProjet d'aéroport à Notre Dame des Landes, au nord de Nantes, qu'ils réussissent à faire abandonner en 2018.
EnSuisse, laConstitution fédérale prévoit que« Le droit est la base et la limite de l’activité de l’État. L’activité de l’État doit répondre à un intérêt public et être proportionnée au but visé » (article 5)[10].
Le principe de l'intérêt public est également une des conditions pour restreindre lesdroits fondamentaux : « Toute restriction d’un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d’un droit fondamental d’autrui »[11].