Evgueni Maksimovitch Primakov, parfois orthographiéIevgueni Primakov (enrusse :Евгений Максимович Примаков), né le àKiev et mort le àMoscou, est unhomme d'Étatsoviétique et russe[1].
Ancien haut responsable duKGB à l'époque soviétique[2], il a été ministre des Affaires étrangères russe de à, et président du gouvernement de lafédération de Russie du 11 septembre 1998 au[1].
Fin connaisseur dumonde arabe, il était un émissaire actif duKremlin auProche-Orient. Il fut surnommé le « Kissinger russe » en raison de sa politique étrangère prudente[3].
Primakov est né àKiev, enRSS d'Ukraine et a grandi àTbilissi, enRSS de Géorgie. Son père a disparu dans leGoulag en 1937[4]. Sa mère née Anna Yakovlevna Primakova (1896-1972) étaitgynécologue et cousine duphysiologisteYakov Kirchenblat(ru). Sa grand-mère maternelle étaitjuive de naissance et épousa contre la volonté de son père (propriétaire d'un moulin) un simple ouvrier russe orthodoxe du nom de Primakov. Ils se sont installés ensuite àTiflis (aujourd'hui Tbilissi) et son mari est devenu petit entrepreneur dans la construction de routes[5].
Primakov dans les années 1970.
Evgueni Primakov étudie d'abord comme cadet de la marine en 1944 à l'École de la marine militaire deBakou, mais il interrompt ses études en 1946 à cause d'un début detuberculose et termine ses études secondaires à Tbilissi. Il étudie au département d'arabe de l'Institut d'État d'études orientales de Moscou, où il devient l'ami deJulian Semenov. Il en sort diplômé en 1953. Il effectue ensuite des travaux à l'université d'État de Moscou à la faculté d'économie.
Il commence sa carrière à l'Institut d'économie mondiale et des relations internationales de l'Académie des sciences (qui porte son nom aujourd'hui). De 1956 à 1970, il a été journaliste pour la radio soviétique et correspondant auMoyen-Orient pour laPravda. Il effectue son premier voyage à l'étranger en 1957 sur une croisière enMéditerranée orientale. Il habite de 1965 à 1970 auCaire comme correspondant de laPravda. C'est à cette époque qu'il fait la connaissance deGaafar Nimeiry. En 1969, il se rend àBagdad où il fait la connaissance deSaddam Hussein et plus tard deTarek Aziz (à l'époque rédacteur-en-chef du journalAl-Thawra), dont il deviendra proche. Il se rend aussi à plusieurs reprises chezMassoud Barzani. De 1970 à 1977, il est directeur adjoint de l'Institut d'économie et de relations internationales de l'Académie des sciences. Parlant couramment l'arabe, il est directeur de l'Institut d'études orientales de l'Académie des sciences de 1977 à 1985. Durant cette période, il a dirigé la rédaction de nombreuses thèses universitaires, dont celle deMahmoud Abbas (président de l'Autorité palestinienne depuis 2005). De 1985 à 1989, il retourne à l'Institut d'économie et de relations internationales en tant que directeur[6].
Il entame une carrière politique en 1989, en tant que président duSoviet de l'Union, l'une des deux chambres du Parlement soviétique. De 1990 à 1991, il est membre du Conseil présidentiel deMikhaïl Gorbatchev. Il est l'envoyé spécial de ce dernier enIrak et s'entretient avecSaddam Hussein, alors que laguerre du Golfe se prépare[7].
De janvier1996 jusqu'à septembre1998, il occupe le poste deministre des Affaires étrangères. Il y jouit d'une certaine estime en tant que défenseur farouche des intérêts de la Russie, et en tant qu'opposant à l'expansion de l'OTAN dans l'ancienBloc soviétique, bien que le, après cinq mois de négociations avec le secrétaire général de l'OTANJavier Solana, la Russie signe l'Acte fondateur qui marque la fin des hostilités de laGuerre froide[9].
Il se fait l'avocat dumultilatéralisme, en tant qu'alternative, après l'effondrement de l'URSS, à l'hégémonie mondiale des États-Unis. Il défend une politique étrangère fondée sur des médiations peu coûteuses et l'expansion au Moyen-Orient ainsi que dans les anciennes républiques soviétiques. Il soutient le « triangle » stratégiqueRussie,Chine,Inde pour contrebalancer l'influence américaine[10]. Selon l'universitaireRichard Sakwa, il est« le premier dirigeant à donner son pays le statut de puissance résistante »,« [remet] en circulation la notion demultipolarité », et« [s'inspire] de la doctrine de lacoexistence pacifique deNikita Khrouchtchev, ancien premier secrétaire du Comité central du Parti communiste de l'Union soviétique, selon laquelle des systèmes sociaux et politiques peuvent être concurrents sans nécessairement entrer en conflit »[11].
Primakov élabore également une doctrine géopolitique qui porte son nom : ladoctrine Primakov. Cette dernière s'articule autour de trois idées forces : premièrement, la Russie ne peut être réduite à une puissance européenne moyenne, deuxièmement le monde post-guerre froide sera multipolaire et non pas dominé par les seuls États-Unis, et en troisième lieu la Russie a un droit de regard privilégié sur les anciennesRSS qualifiées d'« étranger proche ».
La tentative échouée pour reconduireViktor Tchernomyrdine comme président du gouvernement (laDouma s'y opposa en septembre1998) conduit Eltsine à se tourner vers Primakov, susceptible de réaliser le compromis. Primakov met en œuvre des réformes difficiles, mais réussies pour la plupart (réforme fiscale notamment)[12]. Son opposition à l'unilatéralisme américain lui vaut une grande popularité en Russie, notamment lors de laguerre du Kosovo. Il fait sensation le lorsqu'il ordonne en plein vol au commandant de bord de son avion, en route pourWashington, de rentrer immédiatement à Moscou en signe de protestation, alors que les premièresbombes de l'OTAN s'abattent surBelgrade[13].
Alors que leParti communiste de la fédération de Russie prépare une procédure de destitution du président Eltsine, Primakov refuse de renvoyer les ministres communistes du gouvernement. Le, il est congédié par Eltsine et remplacé parSergueï Stepachine.
Avec le soutien du parti La Patrie/Toute la Russie, Primakov s'oppose àVladimir Poutine et au Parti de l'Unité russe. Lesélections législatives de décembre 1999 donnent finalement l'avantage à ce dernier, et dans un message télévisé du, Primakov abandonne la campagne présidentielle et finit par se rallier à Poutine. Il est l'émissaire de la Russie auprès de Saddam Hussein en mars2003, pour tenter d'empêcher l'invasion de l'Irak par les Anglo-Américains.
De décembre 2001 à 2011, Evgueni Primakov préside la Chambre de commerce et d'industrie de la fédération de Russie. Il a obtenu en 2006 le limogeage des ministres des Finances et du Commerce extérieur et imposé une rupture avec les dogmesultra-libéraux[14].
Sous son influence, le Fonds de stabilisation abondé par les exportations de gaz et de pétrole a été affecté au développement du territoire et à la relance de la consommation intérieure, au risque de provoquer une poussée inflationniste.
Il quitte ses fonctions en2011 et se retire de la vie publique[1]. Il meurt en 2015.
Il épouse en 1951 Laura Vassilievna Kharadzé (1930-1987), étudiante à l'Institut polytechnique de Tbilissi, dont il a deux enfants :
Alexandre (1954-1981), aspirant au doctorat à l'Institut des études orientales de Moscou ; souffrant demyocardite, il meurt d'une crise cardiaque.
Evgueni (né en 1976), journaliste sous lepseudonyme d'Evgueni Sandro, orientaliste[15] et présentateur à la télévision sur la chaîneRossiya 24 de l'émissionRevue internationale. Père de quatre enfants.
Nana (née en 1962), épouse le fils de l'académicien spécialiste d'immunologie Bakhoutachvili, dont elle a deux filles: Alexandra (née en 1982) et Maria (née en 1997).
Après son veuvage, il épouse en secondes noces Irina Borissovna Bokareva (née en 1952).