Un hypocrite à 2 visages: la régenteCixi (1835-1908) de Chine.
L'hypocrisie est l'attitude morale par laquelle on exprime des sentiments, des opinions que l'on n'a pas ou que l'on n'approuve pas[1], ou plus simplement l'acte dementir consciemment pour s'attirer des faveurs sociales.
LeVocabulaire de théologie biblique deXavier Léon-Dufour dit des hypocrites qu'ils sont« ceux dont les conduites n'expriment pas les pensées du cœur »[2]. Plus qu'un manque desincérité, c'est un manque deloyauté et de droiture. Si le menteur ment contre les faits, l'hypocrite ment contre ses sentiments.
Le langage populaire a des équivalents. Outre le terme de « comédien », dont l'origine étymologique se rapporte à l'idée de jouer un personnage que l'on n'est pas vraiment, on trouve aussi desjurons comme « jésuite », « faux-derche », « faux-cul », « faux-jeton », « entubeur », « bluffeur », qui montrent bien une utilisation savante ou réfléchie de l'apparence. Le personnage deTartuffe (Molière) est un symbole du détournement de la vérité, tandis que l'expression « faire prendre des vessies pour des lanternes » met ce trait en valeur. On peut aussi considérer l'hypocrisie comme la duplicité typique de ceux « qui se posent en parangons devertu alors que leur vie n'est quescandales »[3].
L'accusation d'hypocrisie, souvent latente chez les anciens, (par exemple chezJuvénal ou dans le « Contre les sophistes » dePolycarpe[4]), ou encore dans lesévangiles sont particulièrement vécues comme scandaleuses en ce qu'elles constituent une atteinte à l'ordre de la vérité, à l'ordre du monde et deDieu, et très profondément à la vie sociale.
Par son côté particulièrement proche dumensonge, l'hypocrisie est le contraire de lasincérité qui revient à exprimer fidèlement et avec bonne foi des sentiments ou pensées, à ne pas confondre avec l’honnêteté qui est au sens strict du terme la tendance à exprimer sans dissimulation tous ses sentiments ou pensées.
Le mothypocrisie vient dugrecὑπόκρισις /hupókrisis, « action de jouer un rôle » et « feinte, faux-semblant »[5]. Le mothypocrite est également dérivé du mot grecὑποκριτής /hupokritḗs, « acteur, comédien » et « fourbe, hypocrite »[6].
D'un autre côté, le mot peut également se voir comme une fusion entre le préfixe grechypo- signifiant « sous » et le verbekrinein qui signifie « tamiser » ou « décider ». Ainsi, la signification originale impliquait une déficience dans la capacité de tamiser ou de décider. Cette déficience, en tant qu'elle se rapporte à ses propres croyances et sentiments, nous renseigne sur le sens actuel du mot.[Interprétation personnelle ?][réf. nécessaire]
Alors quehypokrisis s'appliquait à toutes les formes de représentations publiques (y compris l'art de larhétorique), le mothypokritēs était un terme technique utilisé par les acteurs et n'était pas approprié pour désigner une personnalité publique. ÀAthènes, auIVe siècle av. J.-C., par exemple, le grand orateurDémosthène ridiculisait son adversaireEschine, qui avait été un brillant acteur avant de se lancer en politique, en le taxant d'hypocrite car son habileté à incarner des personnages sur scène faisait de lui un politicien peu digne de confiance. Cette vision négative des hypocrites, peut-être combinée au mépris romain pour les acteurs, a considérablement assombri le sens du mot hypocrisie qui à l'origine était plutôt neutre. C'est le sens originel de l'hypokrisis, celui de « jouer un rôle », c'est-à-dire la supposition d'une personne contrefaite, qui donne au mot moderne « hypocrisie » sa connotation négative.
↑Vocabulaire de théologie biblique, Cerf, 1962, art. « Hypocrite », de Xavier Léon Dufour.
↑Louis Richard,« Juvénal et les galles de Cybèle »,Revue de l'histoire des religions, 1966, vol. 169, n°1, p. 51-67 ; plus particulièrement p. 56 et note 4.