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L'objet de lagéométrie (géométrie, dugrec ancien :γεωμετρία,gé : terre ;metron : mesure) concerne la connaissance des relations spatiales. Avec l'arithmétique (étude des nombres), elle constituait, dans l'Antiquité, l'un des deux domaines desmathématiques.
Lagéométrie classique, issue de celle d'Euclide, est basée sur des constructions obtenues à l'aide dedroites et decercles, c'est-à-dire élaborées « à la règle et au compas ». Avec la considération de figures plus complexes et la nécessité de la mesure, la barrière entre la géométrie et l'étude des nombres et de leurs relations (arithmétique,algèbre) s'est peu à peu estompée.
À l'époque moderne, les concepts géométriques ont été généralisés et portés à un plus haut degré d'abstraction, au point de perdre à proprement parler leur signification d'origine. Peu à peu abstraits ou soumis à l'usage de méthodes algébriques nouvelles, ils se sont pourrait-on dire dissous dans l'ensemble des mathématiques où ils sont aujourd'hui utilisés en tant qu'outils dans de très nombreuses branches.
Siles Grecs peuvent être considérés comme les fondateurs de lagéométrie en tant que science et discipline mathématique, de nombreuses connaissances en géométrie, nécessaires à latopographie, l'architecture, l'astronomie et l'agriculture, ont précédé la civilisation grecque. Les premières notions de géométrie reconnues remontent à 3000av. J.-C., du temps de l'Égypte ancienne, de l'ancienne civilisation hindoue, des babyloniens et peut-être (mais l'hypothèse reste controversée) au sein de peupladesmégalithiques deGrande-Bretagne et de Bretagne.

Les pyramides égyptiennes et les plans d'irrigation témoignent assez d'une connaissance au moins empirique des figures planes et solides.Les rares documents subsistant (papyrus de Moscou,papyrus Rhind,papyrus Kahun) montrent l'utilisation de règles pratiques pour résoudre des questions spécifiques faisant intervenir les notions de longueur, d'angle, d'aire et devolume.
La géométrie semble être apparue chez lesÉgyptiens à la suite de la nécessité à laquelle ils étaient confrontésd'arpenter chaque année des terrains transformés par les crues du Nil. Elle s'est ensuite développée pour les besoins de l'architecture, de l'agriculture et de l'astronomie.
LatabletteprébabylonienneYBC 7289 datant de -1700 ± 100 témoigne des premiers questionnements sur le calcul des longueurs et donne une bonne approximation de la longueur de la diagonale d'un carré de côté =a (elle égalea xracine carrée de 2).
Parmi les résultats de ces sciences Antiques, on peut citer des versions duthéorème de Pythagore[Note 1], développé par les Égyptiens et les Babyloniens 1 500 ans avant les Pythagoriciens, une table de trigonométrie chez les Babyloniens, ou encore la formule exacte du volume d'une pyramide carrée tronquée.
Lacivilisation de la vallée de l'Indus a utilisé des résultats de géométrie aussi développés que leurs contemporains en Mésopotamie et en Égypte.
La géométrie a été pratiquée en Inde depuis lors, et le mathématicien indien duVIIe siècleBrahmagupta, auquel on attribue l'invention duzéro, est aussi l'auteur d'un théorème qui porte son nom.Par ailleurs, la contribution indienne au développement de la trigonométrie est également tout à fait significative (voirHistoire des fonctions trigonométriques).

Les Neuf Chapitres sur l'art mathématique, texte fondamental des connaissances de la civilisation chinoise, offrent des calculs d'aires et de volumes, et une formulation du théorème de Pythagore. Ils ont été produits vers leIer ou leIIe siècle av. J.-C.

Pour lesmathématiciens de la Grèce antique, la géométrie était au cœur des sciences. Elle a atteint une richesse de méthodologie inégalée dans les autres domaines du savoir.
Par rapport à leurs prédécesseurs, les Grecs étudièrent de nouvelles figures, dont descourbes,surfaces etsolides ; ils reconnurent que les objets physiques peuvent n'être conçus que comme des approximations des formes étudiées en géométrie.
Mais surtout, ils innovèrent au niveau de la méthode, en réussissant à généraliser et à établir des lois à partir des nombreuses règles empiriques connues depuis longtemps.


Thalès de Milet etPythagore passent pour être parmi les premiers à avoir développé un raisonnement hypothético-déductif et à s'être interrogés sur la valeur des raisonnements[réf. nécessaire].
On attribue généralement à Thalès l'égalité desangles opposés, l'égalité des angles à la base d'untriangle isocèle, l'étude desangles inscrits et bien sûr lethéorème de Thalès.
On attribue aux pythagoriciens la preuve duthéorème de Pythagore et lafiguration des nombres entiers.
On ne peut manquer, dans une revue de la géométrie antique, de rappeler l'importance de la recherche en géométrie pourPlaton et ses disciples, et de citer la formule célèbre (mais légendaire) qui résume cette importance au sein de sonAcadémie, « que nul n'entre ici, s'il n'est géomètre »[Note 2].
On a pu prêter à l'illustre philosophe l'introduction des cinqsolides platoniciens : letétraèdre, lecube, l'octaèdre, l'icosaèdre et ledodécaèdre régulier. Il est cependant plus vraisemblable que leur découverte n'ait pas été faite par un seul homme, et que le mathématicien Grec ayant identifié l'existence des seuls 5 polyèdres réguliers soitThéétète. Par ailleurs, Platon est crédité d'avoir introduit l'idée que toutes les figures géométriques puissent êtreconstruites à l'aide d'une règle et d'un compas. Les problèmes de latrisection de l'angle, de laduplication du cube, et de laquadrature du cercle qui résultent de cette hypothèse, ont hanté l'antiquité, les mathématiciens Arabes et les modernes jusqu'auXIXe siècle. Ce dernier problème incitaMénechme à introduire lesconiques.
Les proportions et l'incommensurabilité[Note 3] sont introduites parEudoxe de Cnide.

Mais le champion toutes catégories de la géométrie grecque est bien sûrEuclide. SesÉléments sont le premier ouvrage de géométrie qui nous soit parvenu pour ainsi dire intégralement. Euclide y expose de manière si précise et si rigoureuse les principaux travaux connus à son époque en géométrie, qu'on a pu le considérer comme l'inventeur même de la méthodeaxiomatique.
Il n'y a pas d'ouvrage mathématique plus illustre que celui d'Euclide, qui, en nombre d'éditions ne le cède qu'à laBible ou auCoran : Il fut tenu pour l'expression de la vérité absolue pendant plus de 2 000 ans.
LesÉléments d'Euclide déroulent l'ensemble des connaissances de géométrie de l'Antiquité à partir de 5 axiomes fondamentaux. Parmi ces axiomes,le cinquième présente l'aspect d'un simple théorème, en sorte que les générations successives de géomètres se sont efforcées de le démontrer, on le sait maintenant, en vain.
Il faut également signaler la contribution d'Archimède, qui introduisit leraisonnement par exhaustion, montra l'existence du nombrepi, et s'approcha des conceptions différentielles qu'il n'atteignit cependant pas (voir par exempleLa quadrature de la parabole,De la mesure du cercle,De la sphère et du cylindre,Des spirales, et l'aventure dupalimpseste.)
On mentionnera aussiApollonius, qui publia au tournant duIIe siècle av. J.-C. un traité sur lesconiques qui fit autorité jusqu'aux temps modernes.

Après ces géants des mathématiques, la géométrie marquera le pas dans l'Antiquité. Les innovations géométriques dePappus ou deProclus ne pouvant être tenues pour comparables, même de manière approchante.
En parallèle à la géométrie théorique, les anciens ont également développé une science plus directement orientée vers les applications pratiques. En particulier, les astronomesHipparque etPtolémée ont introduit des relations entre les côtés et les angles des triangles qui sont comme les prémisses de latrigonométrie.

La contribution de la civilisation arabe et perse duMoyen Âge au développement de la géométrie a été tout à fait significative.
Outre la traduction des textes antiques, à travers laquelle l'Europe reprendra connaissance de l'héritage grec, desmathématiciens arabes se ralliant à la tradition pragmatique ont développé la trigonométrie. On attribue l'introduction des fonctions trigonométriques àNasir ad-Din at-Tusi, mathématicien perse du Khorassan.
Al-Kashi, autre mathématicien perse, généralise le théorème de Pythagore (voirThéorème d'Al-Kashi).
Cela conduira à trouver des formulations équivalentes à l'axiome d'Euclide (Thabit ibn Qurra), à obtenir d'excellentes approximations deπ (Al Kashi), ou à développer des méthodes géométriques de résolution d'équations algébriques, etc.

D'une manière générale, le Moyen Âge constitue, en Europe occidentale, pour la géométrie comme pour bien d'autres sciences, une période de recul.
La géométrie est certes encore enseignée. Elle fait partie duquadrivium qui comprend en outre l'arithmétique, l'astronomie et lamusique. Le quadrivium est cependant plutôt moins prisé que letrivium (grammaire,rhétorique etdialectique) : c'est que ce dernier est probablement mieux adapté à une société dont le projet essentiel est la préparation à la vie post-terrestre.
Dans la longue période qui s'étend en gros duVe siècle auXVe siècle, les savants géomètres sont rares en Occident. On pourra mentionnerGerbert d'Aurillac qui devint pape sous le nom de Sylvestre II, et surtoutLéonard de Pise dit Fibonacci ; encore sont-ils plus connus pour leurs travaux d'arithmétique et l'ardeur qu'ils mirent à traduire les œuvres des savants arabes...
La Renaissance auxXVe et XVIe siècles voit un premier frémissement de nouveautés géométriques avec l'apparition de laperspective conique dont la théorie est attaquée par toute une série de savants, Italiens en majorité, et dont les plus connus sont probablementPiero della Francesca,Léonard de Vinci, etLuca Pacioli, les deux premiers devant d'ailleurs leur gloire sérieusement plus à leur génie artistique que mathématique.

LeXVIIe siècle voit une reprise énergique des travaux antiques et islamiques de géométrie.
Il s'y réalisetrois percées indépendantes mais très importantes pour l'approche collective de notre représentation de la réalité spatiale[Note 4].
La création de lagéométrie analytique est l'œuvre deDescartes, et à un titre moindre deFermat. Les idées de Descartes sont celles derepère et deprojection orthogonale. Cette théorie permet de concevoir l'espace géométrique comme une collection de points représentés chacun par trois nombres.
L'invention cartésienne (1637) constitue une véritable révolution dans le petit monde de la géométrie, puisque par le moyen de l'utilisation de ces repères, cette science se trouve en quelque sorte ramenée à des calculs sur des ensembles de deux ou trois nombres. La reine Antique des mathématiques qu'était la géométrie se voit ainsi ravir le trône au profit d'une science, somme toute assez nouvelle : l'algèbre.

Certaines méthodes de calcul d'Archimède recouraient à la division d'éléments en d'autres de plus en plus petits. Par exemple, pour approcher pi, Archimède calculait le périmètre du polygone circonscrit au cercle et celui du polygone inscrit. Il obtenait ainsi un encadrement de pi, et avait par cette méthode trouvé l'approximation de 22/7.
Au cours de la première moitié duXVIIe, un certain nombre de savants occidentaux tels Fermat, Pascal,Gregory,Barrow,Cavalieri, très familiers des raisonnements d'Archimède, avaient commencé à simplifier ses méthodes.
Vers les années 1670, les illustres savants anglais et allemand que sontNewton etLeibniz, explicitent enfin les méthodes de calcul permettant l'utilisation des infiniment petits. Cette découverte est l'une des plus importantes jamais faites en mathématiques. Elle provoqua d'ailleurs, entre les deux génies conscients chacun de l'importance de sa trouvaille, une querelle de priorité assez amère... (compte tenu des nettes différences d'approche de la question, il est aujourd'hui tenu pour hautement vraisemblable que les deux savants sont arrivés à la même découverte indépendamment. Au niveau strict du calendrier, la priorité de la découverte revient, au dire de ses collègues anglais, à Newton. Celle de la publication revient à Leibniz).
Ces méthodes permettent de ramener le calcul de certaines caractéristiques géométriques des figures courbes telles qu'angles entre les tangentes, surfaces, et volumes, à des calculs sur ce qu'on appelle les dérivées et intégrales (voir les articlesCalcul infinitésimal,Dérivée etIntégration (mathématiques)).Elles ramènent l'usage de la règle et du compas à celui d'instruments fort grossiers ne permettant de traiter que des figures bien particulières.

Une autre contribution originale duXVIIe siècle, due surtout àDesargues, et à un titre moindre àPascal, se trouve inspirée par le développement des travaux de géométrie relatifs à l'étude de laperspective conique. La principale innovation consiste en l'introduction depoints à l'infini dans des raisonnements de géométrie autres que ceux effectués pour la justification des constructions de vue en perspective.
Parmi les propriétés mises à jour dans ce cadre, on citera lethéorème de Desargues et lethéorème de Pascal dont la postérité a été rehaussée parD. Hilbert.
Cette contribution passera plutôt inaperçue et son importance ne se révèlera qu'auXIXe siècle.

Les deux plus grands mathématiciens du siècle,Euler etLagrange sont de remarquables géomètres, et contribuent également au développement de la géométrie d'Euclide (voir par exempleangles d'Euler,droite d'Euler,cercle d'Euler...).
Cependant, les développements majeurs de la géométrie auXVIIIe siècle sont liés à ceux de la mécanique et sont relatifs à la géométrie différentielle. Ils constituent des raffinements des idées de Leibnitz et Newton.Clairaut (Recherches sur les courbes à double courbure - 1732) étudie les équations des courbes de l'espace qu'on appelle maintenantcourbes gauches. En 1760, Euler publie sesRecherches sur la courbure des surfaces, œuvre dans laquelle il montre l'existence des deuxcourbures principales et démontre ce qu'on appelle maintenant lethéorème d'Euler. Des savants respectables commeMeusnier ouDupin contribuent également par quelques apports intéressants aux travaux fondamentaux d'Euler sur la géométrie des surfaces. Les notions importantes delongueur d'un arc d'une courbe, decercle osculateur sont découvertes. Les expressions différentielles de lacourbure et de latorsion d'une courbe gauche seront données parCauchy au début duXIXe siècle.
Par ailleurs,Legendre publie en 1794 desÉléments de géométrie qui constituent un des derniers grands traités degéométrie euclidienne. Malheureusement pour lui, ce savant croit à la démontrabilité du cinquième axiome d'Euclide, et en donne plusieurs démonstrations toutes fausses, bien évidemment, quoique d'une intelligence remarquable... Les fondements de la géométrie, et notamment le5e axiome d'Euclide, continuent à inspirer certains mathématiciens, commeLambert ouSaccheri.
Vers la fin du siècle,Monge crée une branche spécifique de la géométrie appeléegéométrie descriptive, qui vise à assister l'ingénieur dans les représentations des machines. Les règles élaborées par Monge seront très utilisées durant tout leXIXe siècle et une large partie duXXe. Elles constitueront le fondement théorique de la pratique dudessin industriel.
À l'issue des travaux desXVIIe et XVIIIe siècles, la géométrie euclidienne a atteint son plus grand développement, mais les fameux problèmes de géométrie hérités de l'Antiquité ne sont toujours pas résolus, même s'il est à peu près clair pour la plupart des savants qu'ils constituent des problèmes impossibles, au point qu'à partir de 1775, l'Académie des sciences décide de refuser d'examiner les propositions de quadrature du cercle qui lui sont adressées.
À la fin duXVIIIe, on distingue de plus en plus de deux géométries différentes : la géométrie d'Euclide qui raisonne sur des figures est appeléegéométrie synthétique. La géométrie raisonnant à la manière de Descartes sur des nombres et des fonctions de nombres est appelée géométrie analytique. On ne doute guère, cependant de l'identité des matières, même si les méthodes sont différentes.
On a pu qualifier leXIXe siècle de « siècle d'or de la géométrie ». C'est en tous cas au cours de ce siècle que la pensée géométrique a évolué le plus profondément, en empruntant tout d'abord les trois voies découvertes auXVIIe, et en en ouvrant d'autres. Au terme de ce siècle les grands problèmes antiques du5e axiome d'Euclide, de la duplication du cube, trisection de l'angle et quadrature du cercle sont enfin éclaircis.
L'inventeur de lagéométrie projective estJean-Victor Poncelet. La démarche qu'il suit, et qui part des travaux de Monge, est de pure géométrie synthétique.
En remettant à jour la question des points à l'infini et en autorisant même la considération de pointsimaginaires, Poncelet et ses continuateurs (Chasles,Gergonne en France,Möbius,Plücker etvon Staudt enAllemagne) modernisent la géométrie d'Euclide et mettent à jour des méthodes de démonstration fulgurantes pour des séries de problèmes liés aux alignements de points et autres considérations générales portant sur les figures, mais à l'exception des égalités de longueur (propriétésmétriques). La notion debirapport est mise en avant ; les grandeurs géométriques (angles, longueurs, surfaces) deviennent des grandeurs orientées, etc.
Les méthodes de la géométrie projective font d'abord l'objet d'une certaine méfiance de la part des mathématiciens plus algébristes commeCauchy, mais au fil des années, elles trouvent petit à petit droit de cité et finiront par s'imposer comme « l'une des manières de pratiquer la géométrie ».
Dans la seconde moitié du siècle, le FrançaisLaguerre, et surtout l'AnglaisCayley resituent la position de la géométrie Euclidienne : elle n'est qu'un cas particulier de la géométrie projective (parfois appelée géométrie supérieure à cette époque).
La contribution de Cayley va même plus loin puisqu'elle prouve que, dans le plan, lesgéométries non euclidiennes elliptiques et hyperboliques sont des géométries projectives.

L'idée de démontrer l'axiome d'Euclide par l'absurde, c'est-à-dire de le supposer faux pour arriver à découvrir une contradiction n'était pas neuve.
Il fallait en revanche être un Russe à demi-fou originaire du lointaingouvernement de Kazan, pour tenter le contraire et oser publier une découverte aussi incroyable que celle d'une méthode de raisonnement géométrique basée sur une hypothèse différente de celle d'Euclide : C'est ce que fitLobatchevski dès le début des années 1820. La parution de son livre écrit en russe et diffusé par un éditeur confidentiel eut cependant peu d'écho international. Un traitement à peine plus chaleureux fut réservé à une publication du même genre par le HongroisBolyai, quelques années plus tard.
Gauss, qui connaissait ces résultats et dont certaines recherches allaient dans la même voie, n'osa jamais publier dans ce sens « par crainte des cris des Béotiens », comme il l'écrivit lui-même[1]. En revanche, la situation changea très vite à la mort du savant allemand à l'examen des papiers qu'il n'avait pas voulu publier de son vivant. L'idée d'une géométrie non-euclidienne était née, et la dernière des grandes interrogations de la géométrie antique était enfin éclaircie : Lepostulat d'Euclide était peut être vrai ou faux ; il revenait toutefois à une science expérimentale d'en décider, car il n'était pas démontrable par les seules mathématiques.
Riemann, ancien élève de Gauss, invente peu après un autre type de géométrie non euclidienne liée cette fois à la géométrie différentielle (voir plus bas).
Dans la seconde moitié duXIXe siècle, le sujet devient à la mode, et un certain nombre de travaux célèbres (Beltrami,Christoffel...) voient le jour. On s'aperçoit que l'on peut essentiellement définir, dans le plan, deux types de géométries non euclidiennes : lagéométrie hyperbolique et lagéométrie elliptique. Lasomme des angles d'un triangle est inférieure à deux angles droits en géométrie hyperbolique ; elle est supérieure en géométrie elliptique.

La géométrie analytique continue de se développer. Les découvertes fondamentales du début du siècle sur larésolution des équations polynomiales (Galois-Abel), et ceux de Gauss portant sur la constructibilité de certains polygones à la règle et au compas éclaircissent considérablement la question et permettent àPierre-Laurent Wantzel d'énoncer en 1837 un théorème portant sur la non-constructibilité à la règle et au compas (théorème de Wantzel). L'impossibilité de la duplication du cube et celle de la trisection de l'angle en résultent.
Ce sont également des considérations algébriques qui permettront àLindemann de démontrer latranscendance du nombre pi, confirmant ainsi rigoureusement l'impossibilité de quarrer le cercle.
La géométrie différentielle va connaître auXIXe siècle un développement extraordinaire notamment sous l'impulsion des deux mathématiciensGauss etRiemann. La possibilité découverte et développée par Gauss, d'écrire les équations des surfaces sous forme de systèmes de deux équations à deux inconnues et non pas sous forme d'une seule équation à deux inconnues introduit l'idée decarte d'une surface. Elle permettra de développer unegéométrie intrinsèque aux surfaces, et les notions de formes fondamentales et decourbure de Gauss. La valeur de la courbure de Gauss ne dépend pas des fonctions utilisées pour paramétrer la surface : c'est le célèbretheorema egregium, c'est-à-dire théorème remarquable qui va inspirer Riemann et le conduire à introduire le concept devariété différentielle, en élargissant le concept de surface à des espaces mathématiques abstraits, lesvariétés, qui diffèrent des surfaces par leurdimension.
On notera que c'est la géométrie différentielle qui permettra àEinstein de développer sa théorie de larelativité générale.
Vers les années 1870, non seulement l'idée de vérité absolue pour le5e axiome était-elle tombée, mais on disposait de plusieurs notions nouvelles (géométrie des variétés différentielles - géométrie non euclidienne - géométrie projective). Cette soudaine abondance de « vérités » n'allait pas sans créer un certain malaise.
Leprogramme d'Erlangen, publié en 1872 sous le titreConsidérations comparatives sur les recherches géométriques modernes, est l'œuvre deFelix Klein (Elementarmathematik vom höheren Standpunkt).C'est un important travail de synthèse qui valide[Note 5] les géométries non euclidiennes et donne à la géométrie projective un rôle central.
Ce travail constitue une extension de l'approche de Riemann, et met en avant lanotion de groupe continu, qui sera développée notamment parSophus Lie. Selon la conception de Klein, la géométrie est l'étude des espaces de points sur lesquels opèrent desgroupes de transformations et des quantités et des propriétés qui sont invariantes pour ces groupes.
Dès la première moitié du siècleHamilton invente lesquaternions qui permettent pour la première fois d'algébriser l'espace. La notion d'espace vectoriel émerge petit à petit, notamment à partir des travaux deGrassmann. Cayley invente lesmatrices. Toutes ces notions sont au départ de pure géométrie.
La création de l'algèbre linéaire constituera l'un des développements majeurs des mathématiques de la finXIXe et du début duXXe siècle. Mais, lorsqu'on considère les chemins empruntés par cette théorie au cours de son développement, il faut cesser à un moment ou à un autre de parler de géométrie. À partir de quand ?
Il convient aujourd'hui, lorsqu'on utilise le mot « géométrie », de distinguer selon qu'on autorise ou non son utilisation au pluriel.
La géométrie, dans le sens que ce mot présente encore dans le langage commun, est appeléegéométrie euclidienne dès qu'on veut utiliser unlangage mathématique un tant soit peu soutenu. On considère cette partie des mathématiques comme essentiellement achevée pour ce qui est de sa théorie générale. Dans ce sens, les questions de géométrie relèvent éventuellement des mathématiques appliquées et n'ont d'ailleurs pas fait l'objet d'études profondes auXXe siècle. Il faut cependant en excepter les questions relevant des fondements de l'axiomatique de la géométrie Euclidienne.
D'autre part, suivant les conclusions du programme de Klein, le mot « géométrie » est par ailleurs couramment utilisé au pluriel dans les mathématiques actuelles. Dans ce sens, il ne recouvre pas véritablement une discipline spécifique mais imprègne par contre une très grande partie de l'ensemble des théories mathématiques modernes.
Après la découverte du caractère particulier de la géométrie d'Euclide, la reformulation des axiomes de la géométrie a fait l'objet de toute une série de travaux remarquables. On citera en particulier l'ouvrage deD. Hilbert sur les fondements de la géométrie.
Après Hilbert, la question des axiomes à retenir pour fonder la géométrie a été reprise notamment parBirkhoff avec en filigrane lathéorie ergodique, etTarski (espaces de Banach de dimension finie).
La multitude des méthodes d'axiomatisation de la géométrie d'Euclide, et l'incertitude quant à leur identité complète (paradoxe de Banach-Tarski par exemple) est l'un des mystères les plus fascinants des mathématiques actuelles.
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