| 500 000 ans av. J.-C. | Paléolithique |
|---|---|
| 9 000 ans av. J.-C. | Mésolithique |
| 4 000 ans av. J.-C. | Néolithique |
| 1700 ans av. J.-C. | Âge du bronze |
|---|---|
| 750 av. J.-C. | Âge du fer |
| IIIe siècle av. J.-C. | Belges : peupleGaulois |
| -54 av. J.-C. | La conquête romaine |
|---|---|
| IIIe – Ve siècles | Les invasions barbares |
| 481-754 | Royaume des Francs |
|---|---|
| 754-843 | Empire carolingien |
| 843-1792 | Francie occidentalepuisroyaume de France |
| 1337-1453 | Laguerre de Cent Ans |
| 1520-1659 | Les invasions espagnoles |
|---|---|
| 1562-1598 | Lesguerres de religion |
| 1789-1799 | Révolution française |
L'histoire sur le territoire de la future Picardie, créée à la fin duXVe siècle, remonte auPaléolithique, époque où les hommes de laPréhistoire s'installèrent sur lesterrasses alluviales de la vallée de la Somme. Elle se poursuivit auNéolithique, époque où l'on se sédentarisa et cultiva la terre. À l'âge du fer (La Tène), les Celtes vinrent s'installer dans cette région puis ce fut la conquête romaine et l'entrée de ce territoire dans l'histoire écrite. Avec lesinvasions barbares duVe siècle, une nouvelle période commença, leMoyen Âge, mais ce n'est qu'à la fin duXIe siècle que le mot « Picard » apparut pour la première fois dans un texte : Guillaume le Picard mourut au cours de lapremière croisade, en 1098[1]. « Picard » désigna des hommes avant de désigner un territoire. AuXIIIe siècle, il y avait une « nation picarde » à l'université de Paris.
La Picardie n'est reconnue par le biais d'une entité officielle qu'à la fin du Moyen Âge (fin duXVe siècle), lorsqu'elle devint la marche frontière entre lesPays-Bas bourguignons et le royaume de France. Un gouvernement général militaire de Picardie fut alors créé, qui disparut à laRévolution française, ces gouvernements militaires laissant place aux départements. Ce n'est que dans les années 1960 que la Picardie redevint une entité administrative à travers un territoire plus adéquat avec les descriptions que l'on peut trouver de cette province (Hesseln,Nolin ouMichelet), le gouvernement militaire de Picardie, dont les frontières avaient varié de nombreuses fois, étant devenu, en 1789, bien plus maigre que ne l'est la province de Picardie proprement dite.
Terre d'invasion et de passage, la Picardie a une histoire qui fut souvent tragique, indissociable de celle de la France. Comme l'écrivitJules Michelet :« L'histoire de l'antique France semble entassée en Picardie. », « Tableau de la France »,Histoire de France, livre III, Paris, 1833.




Le nomPicardie peut désigner :




Cet article combine, autant que faire se peut, l'histoire de ces deux premières entités (le bassin de la Somme et l'ex-province administrative) depuis l’apparition des premièresindustries lithiques bien que depuis 2016 il convient d'utiliser le nom de la nouvelle régionHauts-de-France afin notamment d'éviter désormais toute confusion avec la Picardie historique d'avant 1789.
C'est àBoucher de Perthes, qui dans son ouvrage paru en 1847,Antiquités celtiques et antédiluviennes que l'on doit la naissance d'une discipline nouvelle, lapréhistoire.Les fouilles archéologiques entreprises auXIXe siècle sur les terrasses alluviales et les tourbières de la vallée de laSomme ont permis de mettre au jour dans les dépôts de limon, sables et graviers des ossements d'animaux disparus (éléphants, rhinocéros...) et des silex taillés par l'homme datant de 500 000 ans. Une régression marine liée à une période de glaciation, a laissé trace d'une station préhistorique sous-marine au large de la falaise d'Ault. La présence de l'homme est également attestée dans les vallées de l'Oise et de l'Aisne[2].

Albert Gaudry,Gabriel de Mortillet etVictor Commont comptent parmi les principaux préhistoriens ayant étudié le gisement préhistorique de Saint-Acheul àAmiens. Gabriel de Mortillet donna le nom d'Acheuléen à la civilisation duPaléolithique ancien caractérisée par les silex taillés identiques à ceux trouvés dans le quartier Saint-Acheul. Des gisements acheuléens ont été retrouvés près de la Ferme de Grâce près de Montières (quartier d'Amiens), dans plusieurs sites de la vallées de la Somme et de ses affluents ainsi que sur les plateaux limoneux des départements de l'Oise et de la Somme. On retrouve cette civilisation en Europe et en Asie. L'abbéHenri Breuil donna le nom d'Abbevilien aux plus anciens silex taillés grossièrement trouvés à Abbeville[2].
La présence d'hommesHomo heidelbergensis vraisemblablement, il y a 450 à 300 000 ans, est attestée dans laSomme grâce à des fouilles archéologiques réalisées àAbbeville,Amiens (Jardin archéologique de Saint-Acheul) et àCagny, village voisin.
AuPaléolithique moyen, entre 90 000 et 35 000, l'Homme de Néandertal s'installa dans la région y apportant la civilisation dite duMoustérien. On a retrouvé des siteslevaloisiens dans l'Oise (Cantigny et Bracheux), dans la Somme àAult,Rollot etVillers-Bocage[2].
Vers 35 000, l'Homo sapiens arriva auPaléolithique supérieur. On a retrouvé des sites d'occupation humaine et de débitage de silex duMagdalénien et duPérigordien dans les vallées de l'Oise et de la Somme.
À Amiens, dans le quartier de Renancourt, ont été mises au jour, de juillet 2014 à juillet 2019, dans les vestiges d'un campement, quinze statuettes féminines aux attributs sexuels très prononcés, datant duGravettien (environ 23 000 ans avant notre ère). La première « vénus » haute d'une quinzaine de centimètres a été retrouvée en partie[3]. LesVénus de Renancourt, en pierre calcaire, sont comparables aux 244Vénus paléolithiques retrouvées à ce jour, en Europe et jusqu'en Sibérie. Seule la statuette découverte en 2019, haute de 4 cm est entière[4].
Remontant à plus de 14 à 15 000 ans, un campement saisonnier de chasseurs derennes, des hommes modernes dits deCro-Magnon, a été découvert àVerberie, à proximité deCompiègne (Oise).
LeMésolithique est une période de transition entre lePaléolithique et leNéolithique. Après la dernière glaciation vers 8 à 9 000 avant notre ère, la forêt gagna du terrain. On a retrouvé des sites duTardenoisien dans le département de l'Aisne àFère-en-Tardenois,Villeneuve-sur-Fère,Coincy.

Vers 4 000 avant notre ère, Lacivilisation danubienne pénétra dans la région apportant avec elle, élevage du bétail, culture des céréales, fabrication de poterie et tombes individuelles. L'homme cessa d'être uniquement prédateur pour devenir également producteur. Au Néolithique, débutèrent les premiers défrichement de forêts. La civilisation duChasséen se développa et nous a laissé des vestiges de villages parfois fortifiés, avec de grandes maisons rectangulaires. Sur le territoire de la commune deCuiry-lès-Chaudardes (Aisne), des fouilles archéologiques ont mis au jour un village datant de lacivilisation rubanée : une trentaine de maisons quadrangulaires en terre et en bois, pouvant atteindre45 mètres de long.
ÀVillers-Carbonnel (Somme) près de Péronne, en 2011, fut mise au jour, lors des fouilles archéologiques sur le chantier du canal Seine-Nord, une statuette féminine laDame de Villers-Carbonnel appartenant à la civilisation duChasséen[5]. Elle a été datée duIVe ouIIIe millénaires avant notre ère[6].
Civilisation Seine-Oise-Marne s'étendit entre 2 400 et 1 600 ans avant notre ère. La sépulturemégalithique collective deLa Chaussée-Tirancourt (Somme), constituée de grandes dalles de grès, accueille en plusieurs siècles d'utilisation près de 350 défunts et constitue l'un des vestiges de cette nature les plus importants d'Europe. On retrouve des sépultures mégalithiques àFeigneux, àDameraucourt et àBoury-en-Vexin dans l'Oise, àCierges,Marchais dans l'Aisne. Il subsiste des menhirs dans la Somme àBavelincourt,Doingt,Eppeville, dans l'Oise àBorest, dans l'Aisne àHaramont,Orgeval,Pargny-les-Bois[2].
AuChalcolithique, les objets de cuivre font leur apparition dans les vallées de la Somme et de l'Aisne mais l'outillage lithique subsiste. La présence de silex blonds duGrand-Pressigny et de la roche verte de Pléven provenant duFinistère démontre la présence d'importants courants commerciaux. Ces pierres servaient à la fabrication des lames[2].
L'âge du bronze débute dans la région vers 1700-1600av. J.-C., introduit par des migrants. Les vallées de la Somme et de l'Oise furent les axes commerciaux de première importance par lesquels transitaient l'or d'Irlande et l'étain de Cornouailles. On a retrouvé de nombreux objets de cette époque: haches, bracelets, poignards, épingles... Les haches à talon sont particulièrement nombreuses près du littoral.
Des vestiges de laculture des champs d'urnes (vers 1100-1200av. J.-C.) venue de l'Est, ont été retrouvés dans l'Oise et l'Aisne.
Pendant la période de l'Hallstatt (~750 / 700 av. J.C.), la production de sel à l'embouchure de laCanche s'effectuait par chauffage dans des « barquettes » de terre cuite. Des objets archéologiques mis au jour montrent que la région est en contact avec la civilisation grecque : l'étain était acheminé par la Somme jusqu'à l'oppidum deVix (Côte-d'Or) et, de là, jusqu'à la Méditerranée. ÀThiverny près de Creil, on a retrouvé des poteries peintes de type vixien. Vers 500 av. J.C., cette voie commerciale fut délaissée au profit de la voie maritime[2].
La période deLa Tène, l'usage du fer se généralise, on a retrouvé un peu partout y compris dans des fermes isolées, des bas-fourneaux. ÀPernant, près deVic-sur-Aisne, a été mise au jour, en 1961, dans une ballastière, unetombe à char, indiquant la présence de guerriers puissants[2].
AuIIIe siècle avant notre ère, le territoire de l'actuelle Picardie est occupé par un peuple gaulois, lesBelges, divisé en plusieurs tribus :Ambiens,Bellovaques,Suessions etViromanduens. Ces populations exploitent densément le territoire, avec l'implantation d'un réseau de fermes. À partir duIIe siècle av J.-C., des oppidums sont fondés :Pommiers,Variscourt,Vermand,Villeneuve-Saint-Germain,Gournay-sur-Aronde,Vendeuil-Caply,Liercourt,L'Étoile,La Chaussée-Tirancourt,Méricourt-sur-Somme, etc.
Les Ambiens ont frappé des monnaies s'inspirant desstatères deTarente, enGrande Grèce, ce qui tend à prouver la prospérité de cette tribu et ses liens économiques avec la Méditerranée. Le monnayage ambien servit de modèle auxParisii et aux Bellovaques[7].
C'est auxBelges, installés sur le territoire desArmoricains vaincus, que l'on attribue l'aménagement du trophée et dusanctuaire de Ribemont-sur-Ancre (Somme) où s'entassent des milliers d'ossements humains. Un autreenclos sacré a été mis au jour àGournay-sur-Aronde (Oise).

Jules César passa un hiver avec ses légions sur le territoire des Ambiens dans un lieu qu'il désigne sous le nom de Samarobriva dans son ouvrageDe Bello Gallico (La guerre des Gaules).
Il y explique qu'après sa première tentative de conquête de la Bretagne (l'actuelle Grande-Bretagne) il a pris ses quartiers d'hiver àSamarobriva de l'automne54 av. J.-C. au printemps53 av. J.-C.. Il y a convoqué deux fois unconcilium Galliae (un conseil de représentants de tribus gauloises)
« [...] Quand il eut fait mettre les navires à sec et tenu à Samarobriva l'assemblée de la Gaule, comme la récolte de cette année avait été peu abondante à cause de la sécheresse, il fut obligé d'établir les quartiers d'hiver de l'armée autrement que les années précédentes, et de distribuer les légions dans diverses contrées[8]. »
« [...] César renvoyaFabius dans ses quartiers avec sa légion, et résolut d'hiverner lui-même aux environs de Samarobriva avec trois légions dont il forma trois quartiers. Les grands mouvements qui avaient eu lieu dans la Gaule le déterminèrent à rester tout l'hiver près de l'armée[9]. »
César établit donc un camp militaire à Samarobriva qui perdura jusqu'aux premières années du règne d'Auguste. Selon toute vraisemblance, aux abords du ou des camps successifs, se développèrent des habitats civils gaulois, descanabae, ce qui incita sûrement les Romains à établir en ces lieux la capitale de la cité des Ambiens[10].
En 51av. J.-C.,Corréos, chef des Bellovaques, prit la tête d’une coalition des tribus belges (Ambiens, Atrébates, Calètes, Veliocasses) et Aulerques contre Rome. Les Bellovaques pénétrèrent en territoire suession et se retranchèrent sur un terrain protégé par des marais et des bois. Jules César en fit le siège. Les Bellovaques, instruits par l’exemple d’Alésia, s'échappèrent de nuit et se réfugièrent dans un oppidum. César les poursuivit et la bataille qui s’engagea vit la défaite des Bellovaques et la mort de Corréos. Sa mort met fin à la rébellion. Des fouilles archéologiques ont permis de mettre au jour des vestiges de la position des troupes deJules César àClermont de l'Oise.

Le territoire de l'actuelle Picardie fut intégré par les Romains dans la province de laGaule belgique dont la capitale futDurocortorum (Reims), sous le règne d'Auguste.Dans le courant duIer siècle, les Romains fondèrent les premières villes :
et des agglomérations secondaires comme Noviomagus (Noyon), Rodium (Roiglise ouRoye). Le territoire de la Picardie actuelle était traversé par plusieurs voies romaines dont la plus importante laVia Agrippa de l'Océan reliaitLugdunum (Lyon) àGesoriacum (Boulogne-sur-Mer).
À partir du milieu duIIIe siècle, le nord de la Gaule subit des raids de marins saxons et francs. Des invasions de Francs et d'Alamans se produisirent en 275-276. Les élites municipales délaissèrent progressivement les villes et se réfugièrent dans leurvillae à la campagne. Les villes réduisirent leur taille et s'entourèrent de remparts comme à Amiens, Beauvais et Senlis. À la charnière desIIIe et IVe siècles les villes prirent le nom du peuple gaulois dont elles étaient le chef-lieu, ainsi Samarobriva devint Ambianorum, Caesaromagus devint Bellovacum etc.
En mai 346, à Ambianorum (Amiens), un légionnaire romain,Martin, partagea, aux portes de la ville, son manteau avec un pauvre, puis se convertit au christianisme. La région fut évangélisée à cette période et la tradition chrétienne fait deRieul de Senlis,Lucien de Beauvais,Firmin d'Amiens,Quentin,Crépin et Crépinien de Soissons,Fuscien,Victoric d'Amiens etGentien deSains-en-Amiénois (Somme) et de l’enfantJuste de Beauvais, les propagateurs de la foi nouvelle. Des diocèses furent créés, ainsi le premier évêque d'Amiens dont l'existence est historiquement attesté, en 346, futEuloge.
En 350, un général romain d'origine barbare,Magnence, né à Amiens en 303, se souleva contre les fils deConstantin,Constant etConstance II. Proclamé Auguste par la troupe, il fut reconnu empereur par la plupart des provinces occidentales de l'empire. Il créa à Amiens un atelier monétaire. Battu militairement, Magnence mourut à Lyon en 353.
En 367,Valentinien Ier s'installa à Amiens et y fit acclamer Auguste, son filsGratien[7].
À partir de 406, l'Empire romain est envahi par les peuples germaniques qui provoquèrent sa chute. Un dernier royaume romain ayant Soissons pour capitale résista. Il était dirigé par d'Ægidius puis son filsSyagrius. Ce dernier perdit face àClovis, la dernière bataille de Rome face aux barbares, la bataille de Soissons en 486.
Grégoire de Tours fit le récit de l'épisode célèbre du « Vase de Soissons », au livre II, chapitre 27 de sonHistoire des Francs qu'il situe juste après la prise de la ville par Clovis, en 486.
Clovis fit deTournai lacapitale duRegnum francorum, avant de l'installer à Soissons et finalement àParis. La ville de Soissons devint, par la suite, capitale du royaume deNeustrie.
AuVIe siècleMédard de Noyon devint évêque deVermand et deTournai et transféra le siège épiscopal de Vermand àNoyon.
AuVIIe siècle furent fondées les premières abbayes sous l'impulsion du monachisme irlandais :abbaye de Saint-Valery-sur-Somme,abbaye de Saint-Riquier,abbaye de Corbie,abbaye de Forest-Montiers,abbaye de Saint-Fuscien,abbaye du Mont Saint-Quentin,abbaye Notre-Dame d'Ourscamp,abbaye Saint-Lucien de Beauvais,abbaye Saint-Médard de Soissons,abbaye Saint-Vincent etSaint-Jean deLaon...
Éloi de Noyon, évêque de Noyon de 641 à 659 fut également grand argentier deClotaire II, puis trésorier deDagobert Ier.
Leduché de Dentelin, située en partie dans la future Normandie et s'étendant sur tout ou partie de la Picardie et des Flandres actuelles, forma, sous les Mérovingiens, auxVIe et VIIe siècles, un vaste territoire qui appartint d'abord aux rois de Neustrie ; mais qui en l'an 600, à la suite de la bataille de Dormelles, fut cédé par Clotaire, par le traité de paix de Compiègne, à Thibert II, roi d'Austrasie. En 612, Clotaire le récupéra après sa victoire sur les Austrasiens. Depuis cette époque, le duché de Dentelin resta uni à la Neustrie. Les seules sources relatives au duché de Dentelin sont deux passages de laChronique de Frédégaire.
En juin 687, se déroula, près dePéronne (Somme), laBataille de Tertry qui vit la victoire dePépin de Herstal, roi d'Austrasie, sur laNeustrie. Selon l'historienFerdinand Lot, cette bataille marqua un tournant dans le conflit qui opposait la Neustrie à l'Austrasie. La victoire changea de camp, depuis Tertry, l'Austrasie ne fut plus jamais vaincue. La victoire de Pépin de Herstal prépara l'avènement des Carolingiens.
Sur le territoire de la commune deJuvincourt-et-Damary (Aisne), au lieu-dit le « Gué de Mauchamp », des fouilles archéologiques ont permis de mettre au jour l'un des rares habitats mérovingiens qui aient fait l'objet d'une fouille presque complète. Un important chantier de reconstitution de ce site a été réalisé auMusée des Temps barbares àMarle, sous le nom de « village franc ».

En 752,Pépin le Bref fut proclamé et sacré roi àSoissons.Charlemagne fut sacré roi des Francs àNoyon en 768.
Sous Charlemagne, les abbayes devinrent un lieu de contrôle du territoire, de diffusion du christianisme et de diffusion de la culture latine pendant larenaissance carolingienne. C'est à l'abbaye de Corbie que fut, pour partie, mise au point l'écritureminuscule caroline.
En 877, le roiCharles le Chauve, avant de partir pour une expédition militaire en Italie, réunit une assemblée de barons àQuierzy-sur-Oise et y fit approuver lecapitulaire qui fixait légalement le principe de l'hérédité de la fonction de comte et de la transmission des bénéfices à la veuve et à ses enfants.
AuIXe siècle lesinvasions vikings ravagèrent les abbayes et les villes de la région comme àSaint-Riquier en 845 et 881. Au printemps 859, les Vikings de Weland remontèrent la Somme, pillèrent Saint-Valery et Amiens mais furent mis en échec devant Corbie en juillet-août de la même année et se replièrent.
Le 3 août 881, Les roisLouis III etCarloman II remportèrent une importante victoire sur les Vikings à laBataille de Saucourt-en-Vimeu. Cependant, en 882, l'abbaye Saint-Vincent de Laon fut pillée, en 883 Saint-Quentin fut brûlée et en 885, l'abbaye Saint-Médard de Soissons fut incendiée lors de raids vikings. En 891, ce fut au tour deBalâtre,Roye,Roiglise etNoyon d'être incendiés.
Sous lesCarolingiens,Corbeny (Aisne) était une résidence royale.Pépin le Bref,Charlemagne etCharles le Simple y résidèrent. Lors des invasions vikings, en 900, le roi Charles le Simple accorda asile, à Corbeny, aux religieux de Nanteuil (près deCoutances en Normandie), qui fuyaient avec les reliques desaint Marcoult (ou Marculf), saint guérisseur desécrouelles. Un prieuré fut, par la suite, construit à Corbeny, pour abriter les reliques de saint Marcoult. Au lendemain de leursacre à Reims, les rois de France venaient se recueillir devant ces saintes reliques qui leur conféraient un pouvoirthaumaturge.
AuXe siècle, l'affaiblissement du pouvoir royal entraîna la révolte des barons mécontents. En 920, lors d'une assemblée à Soissons les barons détrônèrent le roiCharles le Simple. Ses vassaux dirigés par le comte de Paris, Robert, s'emparèrent de Laon. Le 30 juin 922,RobertIer était sacré roi à Reims. Charles le Simple n'accepta pas cette destitution et leva une armée qui affronta l'armée de Robert à Soissons, le 15 juin 923. Robert fut tué mais les pertes ayant été nombreuses, Charles le Simple ne put poursuivre l'armée défaite et dut se réfugier en Lorraine. Profitant de ce repli, le 13 juillet 923 les barons révoltés proclamèrent roi, le duc de BourgogneRaoul, le gendre de Robert qui fut sacré à Soissons.
En 923,Herbert II de Vermandois captura Charles le Simple et le retint prisonnier àChâteau-Thierry puis àPéronne jusqu'à sa mort en 929. Il s'en servit comme moyen de pression vis-à-vis du roiRaoulIer obtenant l’archevêché de Reims pour son fils Hugues.
À la mort du roi RaoulIer, Le fils de Charles le Simple,Louis IV d'Outremer, lui succéda, il ne possédait guère comme territoire que les comtés de Laon et de Soissons. Il put se maintenir sur le trône et le transmettre à son fils grâce au soutien de la puissantemaison de Vermandois.
Le 21 ou 22 mai 987, le dernier roi carolingien,Louis V trouva une mort accidentelle occasionnée par une chute de cheval au cours d'une partie de chasse, dans une forêt proche deSenlis.
La picardie est indépendante
Quelques jours après la mort de Louis V, une assemblée de barons élut roi, par acclamation,Hugues Capet qui fut sacré et couronné, soit à Reims, soit à Noyon, entre mi-juin et mi-juillet 987.
L'affaiblissement du pouvoir royal renforça le pouvoir politique local des comtes et des seigneurs, ce fut la naissance de laféodalité. DuIXe au XIe siècle, naquirent les puissantes familles nobiliaires de la région :maison de Vermandois,maison de Coucy,maison de Ham,maison de Mailly,maison de Rambures,maison de Soyécourt etc. auxquelles il convient d'ajouter les principautés ecclésiastiques : évêques-comtes de Beauvais, de Laon, de Noyon, abbés-comtes de Corbie etc.
De 1117 à 1130 date de sa mort,Thomas de Marle, sire deMarle et deCoucy tint tête au roi de FranceLouis VI le Gros mais fut finalement vaincu.

En 1066, l'expédition maritime deGuillaume le Conquérant, partie de Dives (aujourd'huiDives-sur-Mer) le 12 septembre, fut contrariée par des vents défavorables. Le duc de Normandie abrita deux semaines sa flotte dans le port deSaint-Valery-sur-Somme afin de réparer les dégâts subis. Les reliques deSaint Valery furent portées en procession dans la ville. Enfin les vents tournèrent et l'armada normande put s'embarquer, traverser la Manche le 28 septembre et faire la conquête de l'Angleterre.
C'est auXIIe siècle que la puissance féodale entama son déclin. Le pouvoir royal s’appuyant sur le mouvement communal tenta d’affaiblir les grands féodaux comme le roiPhilippe Auguste qui pritChauny en 1180 àPhilippe d'Alsace, comte de Flandre mais ce dernier parvint à reprendre la ville en 1182.
Par leDit d'Amiens du,saint Louis prononça, dans lacathédrale Notre-Dame d'Amiens encore en construction, un arbitrage dans un conflit opposant le roiHenri III d'Angleterre à ses barons révoltés autour deSimon V de Montfort; cet arbitrage fut rendu en faveur du roi d'Angleterre.
À partir de la fin duXIe siècle, l'essor urbain entraîna lemouvement communal par lequel les bourgeois des villes obtinrent, pacifiquement ou de manière conflictuelle, de leur seigneur une charte de commune, avec le plus souvent, l'appui du roi de France :
Les rois soutinrent le mouvement communal tant qu’il affaiblissait le pouvoir seigneurial. Louis VI le Gros octroya des institutions communales à la ville deCompiègne,Philippe Auguste octroya une charte communale àMontdidier en 1184, confirma, en 1209, les anciennes coutumes de la commune dePéronne et octroya une charte à la commune deBray-sur-Somme en 1210 (ces trois villes étant possession de la couronne).
La Picardie du Moyen Âge connaît une expansion économique importante, fondée sur une amélioration des pratiques agricoles. Trois facteurs clefs sont à l'origine de ce développement :
De plus, la croissance des villes est marquée par l'essor de l'industrie textile, les principales « villes drapantes » furent :
Elles faisaient partie deLa hanse des dix-sept villes, qui était en fait avant 1230, une ghilde de marchands drapiers de villes des Pays-Bas et de la France du Nord[Note 1], fréquentant lesfoires de Champagne. Cette association disparut avec le déclin de celles-ci[2].
L'art gothique est né, pour une large part, en Picardie. L'essor économique et la paix intérieure permirent l'éclosion et la diffusion de cette architecture nouvelle :
DuXIIIe au XVIe siècle, il y avait une « nation picarde » à l'université de Paris.
Édouard III d'Angleterre disputa à son cousinPhilippe VI de Valois le trône de France qu'il estimait lui revenir en tant que petit-fils dePhilippe IV le Bel et neveu du roiCharles IV le Bel. Une première campagne en 1339 le rendit maître du Ponthieu dont il était héritier par sa mère, fille de Philippe IV le Bel. Mais en 1342, les Abbevillois, se révoltèrent contre la lourdeur des impôts que les Anglais levaient sur eux et les chassèrent de la ville.
Laguerre de Cent Ans débuta en Picardie par lachevauchée d'Édouard III en 1346. Cette expédition dévaste une grande partie de la Normandie, duVexin, duBeauvaisis, duVimeu, duPonthieu, duBoulonnais et duCalaisis.

Après avoir franchi la Seine, l'avant-garde anglaise forte de 500 hommes d’armes et de 1 200 archers commandée parGeoffroy d’Harcourt, attaque près deBeauvais une délégation de bourgeois venue d'Amiens. Celle-ci composée outre des bourgeois, de quatre chevaliers et de gens d’armes, se défendit mais succomba sous le nombre. Les bourgeois furent tous pris ou tués et on dénombra 1 200 morts sur le champ de bataille. Comme en Normandie, Édouard III sème la terreur dans le Beauvaisis. Beauvais étant trop bien défendue, les soudards se jetèrent sur les abbayes Saint-Lucien et Saint-Quentin situées dans les faubourgs de Beauvais,Milly-sur-Thérain,Troissereux, l'abbaye de Beaupré àAchy,La Neuville-sur-Oudeuil… furent pillés, détruits et rasés. Édouard III attaqua et pillaSommereux etGrandvilliers tenue par le roi de Bohème JeanIer, dont les troupes furent poursuivies jusqu'à Amiens.Dargies, etPoix sont rançonnée brulées et pillées. Une escarmouche avec l'avant-garde française a lieu versCamps-en-Amiénois etMolliens-Dreuil. Ayant prisAiraines Édouard III cherchait à franchir la Somme dont les ponts étaient gardés par les troupes fidèles au roi de France.
Les Anglais ravagèrent le Vimeu et s'installent àOisemont. Les Anglais furent repoussés àSaint-Valery-sur-Somme. Ils firent toutefois beaucoup de prisonniers. Le roi d’Angleterre, leur demanda si l'un d'eux ne pourrait pas lui indiquer un passage sur la Somme et lui servir de guide. Un valet de ferme deMons-en-Vimeu, nommé Gobin Agache, séduit par l'appât de cent pièces d'or, l'offre de la liberté et pour lui-même et vingt de ses compagnons, tira le prince anglais du mauvais pas où il était. Ayant réuni son armée Édouard III partit avant minuit d'Oisemont, guidé Gobin Agache, et arriva vers cinq heures du matin augué de Blanquetaque. Ayant réussi à franchir laSomme, l'armée anglaise pillaNoyelles-sur-Mer,Le Crotoy etRue. Sachant que les troupes françaises le talonnaient, Édouard III établit son camp au nord-est deCrécy-en-Ponthieu. Le 26 août 1346 se déroula la bataille de Crécy.
Abbeville résista aux armées anglaises, et servit de port d'attache àJean Marant qui ravitaillait les Calaisiensassiégés par les Anglais.
Le roiJean II le Bon, fait prisonnier à Poitiers en 1356. Le roi de Navarre,Charles le Mauvais, prétendant au trône de France, était alors détenu au château d'Arleux.Jean de Picquigny se rendit à Arleux et délivra Charles le Mauvais qui arriva à Amiens le 9 novembre 1356 où il fut accueilli favorablement par le maïeur Firmin de Cocquerel et le capitaine de la ville, Jean de Saint-Fuscien et put ensuite regagner Paris. Après l'assassinat du prévôt des marchands,Étienne Marcel, le futur roiCharles V, régent du royaume pendant la captivité de son père, rétablit sa position à Amiens. Les partisans du roi de Navarre décidèrent de passer à l'action.Jean de Picquigny tenta de s'introduire dans la ville nuitamment le 16 septembre 1358, mais les partisans du dauphin renforcés par les troupes du connétableRobert de Fiennes le repoussèrent.
Le port de Saint-Valery, à l'embouchure de la Somme était aux mains des partisans du roi de Navarre. Forts de leur succès à Amiens,Robert de Fiennes etGuy V de Châtillon-Saint-Pol mirent lesiège devant Saint-Valery avec plus de 2 000 hommes d'armes venus de plusieurs villes de Picardie. Ils utilisèrent des pièces d'artillerie nous ditFroissart. La place tomba, le 29 avril 1359, après 8 mois de siège mais la ville était dévastée.
Jean le Bon libéré sur parole repartit pour Londres le 3 janvier 1364 pour renégocier letraité de Brétigny sa rançon n'étant toujours pas payée. Avant de partir, il réunit les états à Amiens fin décembre 1363 pour leur faire part de sa décision. Le Dauphin y reçut l'instruction d'attaquerCharles le Mauvais et obtint de pouvoir lever l'impôt nécessaire pour enrôler 6 000 hommes pour lutter contre lesgrandes compagnies.
En 1369, lePonthieu fut repris : le 29 avril,Abbeville ouvrit ses portes à Hue de Châtillon, maître des arbalétriers, et les jours suivants les localités voisines revinrent sous l'autorité du roi de France, qui confirma leurs privilèges.
Robert Knowles, à la tête d'une chevauchée de 2 500 archers et 1 600 hommes d'armes, partit de Calais fin juillet 1370 et pilla les campagnes contournant Amiens, Noyon, Reims et Troyes.

LaGrande Jacquerie éclata à la fin du mois de mai 1358, peut-être le 28, à la frontière de l'Île-de-France et du Clermontois et plus particulièrement dans le village deSaint-Leu-d'Esserent. Cette révolte s'inscrit dans le contexte difficile de la guerre de Cent Ans, assombri depuis 1348 par lagrande peste. La noblesse, après les défaites de Crécy en 1346 et de Poitiers en 1356, était déconsidérée. Lesgrandes compagnies rançonnaient le pays. La pression fiscale, due au versement de la rançon du roiJean II le Bon, la mévente des productions agricoles plaçaient les paysans dans une situation difficile. Le prévôt des marchands de Paris,Étienne Marcel, sut tirer parti de l'agitation paysanne. Le roi de Navarre,Charles le Mauvais, participa à la répression et, le 9 juin 1358, lors du carnage deMello, mit fin à la révolte à grand renfort d'atrocités. Le chef des révoltés,Guillaume Caillet qui avait reçu l'assurance d'une trêve et d'une rémission, fut entraîné par traîtrise dans le camp des nobles où il fut supplicié et décapité. D'aprèsFroissart, Guillaume Caillet aurait eu la tête tranchée sur la grand-place deClermont-en-Beauvaisis.
C'est pendant la Jacquerie du Beauvaisis, que se distingua leGrand Ferré, paysan doté d'une force prodigieuse. Il se distingua aux côtés du capitaine Guillaume aux Alouettes, en mai 1358. En 1359, il défendit le château deLongueil-Sainte-Marie, dont les Anglais deCreil avaient tenté de s'emparer. Le chroniqueurJean de Venette a raconté ses aventures. En 1359, lecaptal de Buch s'empara de Clermont-en-Beauvaisis.
Laguerre civile entre Armagnacs et Bourguignons pendant la folie du roiCharles VI eut des répercussions en Picardie. Les partisans du duc de BourgognePhilippe le Hardi, oncle de Charles VI et régent du royaume de 1380 à 1388 puis de son filsJean sans Peur s'opposèrent àLouis d'Orléans, frère du roi qu'ils firent assassiner le 14 novembre 1407 à Paris. Cet assassinat déclencha les hostilités entre les deux partis. Le fils du duc assassiné,Charles d'Orléans avait épouséBonne d'Armagnac fille du connétableBernard VII d'Armagnac.
En1414, l'armée du roiCharles VI vint mettre le siège devantSoissons qui était occupée par les troupes deJean sans Peur, duc de Bourgogne. Le 23 juillet, la ville fut prise, pillée et incendiée.
Jean sans Peur se rendit maître de Paris, fit assassiné Bernard d'Armagnac et se rapprocha des Anglais. Le Dauphin voulant éviter à tout prix une alliance anglo-bourguignonne se décida à négocier avec lui. Mais à l'entrevue deMontereau-Fault-Yonne, le 10 septembre 1419,Jean sans Peur fut assassiné. Cet assassinat scella l'alliance anglo-bourguignonne voulu par le nouveau ducPhilippe le Bon.
À la Bataille d'Azincourt, une grande partie de la noblesse picarde périt :Baudoin d'Ailly,David de Rambures et trois de ses fils,Charles de Soyécourt père et fils etc.
Le 21 mai 1420 fut signé letraité de Troyes qui faisait d'Henri V, roi d'Angleterre qui avait épousé la fille de Charles VI et d'Isabeau de Bavière, Catherine de Valois, l'héritier du trône de France, le Dauphin Charles, réfugié à Bourges se trouvait déshérité. Cependant, Henri V mourut en 1422 peu de temps avant Charles VI, son fils Henri VI âgé de 10 mois fut proclamé roi de France. Leduc de Bedford devint régent du royaume de France et mit en 1428 le siège devant Orléans pour s'ouvrir la route de Bourges.
Armagnacs et Bourguignons s'affrontèrent à la Bataille deMons-en-Vimeu de 1421, la victoire des Bourguignons fit passer la Picardie sous leur domination.
À l'issue de cette bataille, le Ponthieu et le Vimeu, libérés des partisans du Dauphin constituèrent un glacis protecteur au sud des domaines septentrionaux du duc de Bourgogne.
Leduc de Bedford, régent d'Angleterre et de France, fit venir à Amiens,Jean V de Bretagne et le ducPhilippe III de Bourgogne qui y signèrent, le 17 avril 1423, un traité de triple alliance entre les trois princes.

Jeanne d'Arc connut en Picardie, un basculement de son destin. Après ladélivrance d'Orléans, le 8 mai 1429, lachevauchée vers Reims et le sacre de Charles VII du 17 juillet 1429, auquel assistaGuillaume de Champeaux, évêque de Laon, Jeanne d'Arc échoua à délivrer Paris et y fut blessé le 8 septembre.
Elle répondit ensuite à l'appel desCompiégnois assiégés par les Bourguignons. Elle fut capturée parJean de Luxembourg-Ligny, lors d'une sortie aux portes de Compiègne le 23 mai 1430.
Commença alors, pour elle, une période de captivité qui la conduisit, en premier lieu, au château deBeaulieu-les-Fontaines. Elle y fut bien traitée et il lui fut laissé son propre intendant,Jean d'Aulon. Fin mai, elle réussit à déplacer deux solives du plancher et à se laisser glisser jusqu'au rez-de-chaussée. Elle parvint jusqu'à l'entrée du château mais une ronde de gardes la surprit. Ce fut la première des deux tentatives de fuite de Jeanne.
Elle fut ensuite emmenée au château deBeaurevoir et y fut accueillie par une tante de Jean de Luxembourg et par Jeanne de Béthune, son épouse. Jeanne y reçut des visites, notamment celle d'Aymon de Macy, et fut tenue au courant de la situation critique de Compiègne et des pourparlers pour la vendre aux Anglais. Elle prit la résolution de tenter une nouvelle évasion, malgré ses « voix » qui lui conseillèrent la prudence. Elle était détenue au dernier étage d'une tour d'angle, haute d'environ30 mètres ; Jeanne se glissa par la fenêtre étroite et, se recommanda à sainte Catherine. Elle tomba lourdement dans le fossé et perdit connaissance. Des gardes accoururent, elle reprit conscience. Elle fut incapable de boire et de manger durant trois jours. Jeanne fut ensuite conduite àArras en novembre 1430.
Entra alors en scène le personnage dePierre Cauchon,évêque de Beauvais, ancien recteur de l'université de Paris, devenu conseiller du roiHenri V d'Angleterre (4 juin 1422) puis protégé duduc de Bedford. Dans les tractations qui s'engagèrent pour récupérer la Pucelle d'Orléans, Cauchon joua un rôle de premier plan. L’université et les représentants de l'Inquisition à Paris réclamaient de la juger mais les Anglais mandatèrent l’évêque de Beauvais, diocèse sur le territoire duquel Jeanne a été capturée, pour négocier la rançon.
Les Bourguignons la vendirent aux Anglais contre le versement de10 000 livres, le 21 novembre 1430. D'Arras, Jeanne d'Arc gagnaRouen, en passant parLucheux,Saint-Riquier où elle passa une nuit en novembre 1430, au château deDrugy. AuCrotoy, elle fut remise par les Bourguignons aux Anglais ; elle fut détenue dans le château bordant la mer, du 21 novembre au 20 décembre. Elle franchit à pied labaie de Somme pour gagnerSaint-Valery-sur-Somme,Eu puisDieppe pour arriver à Rouen le 23 décembre 1430, vraisemblablement.
Le 3 janvier 1431, les Anglais abandonnèrent Jeanne à la justice ecclésiastique, plus précisément à Pierre Cauchon qui présida son procès.
En 1435, se déroula la bataille de Gerberoy qui se solda par une victoire française où s'illustrèrentJean Poton de Xaintrailles etLa Hire, anciens compagnons de Jeanne d'Arc.Gerberoy fut reprise par les Anglais en 1437 puis définitivement par les Français en 1449.

Letraité d'Arras, signé le 20 septembre 1435, mit fin à la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons. Par ce traité, le roi Charles VII cédait àPhilippe le Bon lesvilles de la Somme, lecomté de Mâcon et lecomté d'Auxerre. Il donnait surtout une indépendance de fait au duc de Bourgogne. Plus précisément, le duc de Bourgogne restait vassal du roi de France mais était dispensé de l'hommage. En échange, Charles VII obtenait la reconnaissance de son titre de roi de France. Le 11 décembre 1435, le roi Charles VII jura de respecter scrupuleusement toutes les clauses du traité d'Arras.
Les villes de la Somme furent rachetées parLouis XI, le 20 août 1463, à Philippe le Bon contre 400 000 écus, afin de protéger la frontière nord du royaume par une série de places fortes. Il s'agissait des villes de : Saint-Quentin, Corbie, Amiens, Doullens, Abbeville, Montreuil-sur-Mer, Rue, Saint-Valery, Le Crotoy, Saint-Riquier, Crèvecœur-en-Cambrésis et Mortagne ainsi que des châtellenies de Roye, Péronne et Montdidier.
LaLigue du Bien public réunit en 1465, les opposants à Louis XI sous la houlette deCharles le Téméraire héritier de Bourgogne. Par letraité de Conflans du 5 octobre 1465, le duc de Bourgogne récupérait les villes de la Somme, notamment Amiens, Abbeville, Guînes et Saint-Quentin, mais aussi le comté de Boulogne.
En octobre 1468, craignant une résurrection de la Ligue du Bien public et le débarquement d'une armée anglaise pour la soutenir, Louis XI vint à Péronne, quartier général bourguignon pour y discuter d'un accord de paix. En échange Charles le Téméraire souhaitait obtenir une confirmation de la ligne de la Somme et une juridiction souveraine sur ses fiefs français.
Alors que les négociations étaient sur le point d'aboutir, Charles apprit, avec colère, que Liège s'était à nouveau révoltée à l'instigation du roi de France, pensa-t-il. Louis XI, captif et craignant pour sa vie, fut contraint d'accepter de signer le traité de Péronne et d'accompagner Charles le Téméraire dans l'expédition punitive que celui-ci mena aussitôt contre la ville de Liège.
En 1470, leconnétable de Saint-Pol, chef des armées du roi de France, seigneur deHam, enleva Saint-Quentin à Charles le Téméraire. Cependant, il menait une politique de bascule entre le roi de France et le duc de Bourgogne en s'appuyant le cas échéant sur le roi d'Angleterre.
En 1472,Charles Le Téméraire, parti d'Arras le 14 juin, à la tête de 80 000 hommes, franchit la Somme àBray-sur-Somme, qu’il ruina, entra dans leSanterre et arriva, le 15 juin, devant la forteresse deNesle. La ville ne put résister aux assauts bourguignons, la population fut massacrée etla ville mise à sac. Le duc de Bourgogne s'empara ensuite deRoye et deMontdidier avant de marcher surBeauvais; les villages de Vers,Lœuilly etFrancastel furent pris d'assaut et la campagne alentour saccagée.

Sitôt arrivés devant Beauvais, au matin du 27 juin 1472, les Bourguignons donnèrent l'assaut à la porte du Limaçon puis à la porte de Bresle. C’est durant cette journée, et à l’assaut de la porte de Bresle, qu’une jeune fille du nom de Jeanne Laisné arracha des mains d’un Bourguignon l’étendard qu’il voulait planter sur la muraille et le renversa dans les fossés d’un coup de la hachette dont elle était armée. Elle y gagna le surnom deJeanne Hachette. Les Bourguignons firent lesiège de Beauvais. Le 22 juillet 1472, Charles le Téméraire comprenant qu’il ne pourrait pas prendre la ville, leva le camp pourRouge Maison en incendiant les villages dont Marissel, Bracheux, Wagicourt…
En 1475, letraité de Picquigny entreÉdouard IV d'Angleterre etLouis XI mit fin officiellement à la guerre de Cent Ans, la France versait 75 000 écus d'or à l'Angleterre et une rente annuelle de 50 000 écus. L'Angleterre renonçait à son alliance avec le duc de Bourgogne. Édouard IV donna à Louis XI des lettres prouvant le double-jeu duconnétable de Saint-Pol. Voyant Louis XI marcher sur Saint-Quentin où il s'était réfugié, le connétable s'enfuit auprès de Charles le Téméraire qui résolut de le livrer à Louis XI. Il fut jugé par leParlement de Paris qui le condamna à mort; le connétable de Saint-Pol fut décapité sur la place de Grève le 19 décembre 1475.
La mort de Charles le Téméraire en 1477 mit fin à la rivalité franco-bourguignonne, Louis XI récupérant leduché de Bourgogne et lesvilles de la Somme, la Picardie se trouva définitivement rattachée au royaume de France. Cette rivalité se ranima auXVIe siècle avec les descendants deMarie de Bourgogne, fille du Téméraire et deMaximilien de Habsbourg, les monarchies deHabsbourg d'Autriche etHabsbourg d'Espagne.
Depuis le dernier tiers duXIVe siècle, la concurrence de la draperie anglaise provoqua une crise de l'industrie textile en Picardie. La reprise fut amorcée par l'implantation d'une nouvelle industrie textile, lasayetterie. Les sayetteurs furent chassés d'Arras en 1480 sur ordre de Louis XI. Il s'installèrent à Amiens et l'industrie de la sayetterie se développa par la suite à Abbeville et à Beauvais. En outre, à Abbeville se développa l'industrie des « charpentiers de navires » à l'extrême fin du siècle, l'horlogerie et l'imprimerie. Abbeville fut la seule ville de Picardie à posséder un atelier d'imprimerie dès 1486. Dans les villes, la bourgeoisie commerçante étendit son emprise sur le monde rural par la possession de terres et son pouvoir politique par l'achat d'offices de justice ou de finances. Elle accéda ainsi aux plus hautes fonctions municipales et aux honneurs[2].
La Renaissance, en Picardie, est synonyme de guerre civile et d'invasion étrangère.
Pendant près de deux siècles, de la mort deCharles le Téméraire autraité des Pyrénées, soit entre1477 et1659, laPicardie a constitué unemarche frontière de laFrance. On distinguait alors la Basse-Picardie (Calaisis, Boulonnais, Ponthieu, Marquenterre, Vimeu) et la Haute-Picardie (Amiénois, Santerre, Vermandois, Thiérache).
Intervenant après labataille de Marignan, letraité de Noyon de 1516 reconnait les droits espagnols sur leroyaume de Naples.
En 1539, l'édit de Villers-Cotterêts fit du français la langue officielle du royaume au détriment du latin et institua les fondements de l'état civil avec l'obligation faite aux curés de tenir des registres de baptêmes, mariages et sépultures.
Après l'échec de l'entrevue ducamp du Drap d'Or, près deCalais, entreArdres etGuînes, en 1520,FrançoisIer dut affronter l'empereurCharles Quint et le roi d'AngleterreHenry VIII.
En 1536, Henri III de Nassau-Breda commandant l'armée de Charles Quint assiègea la ville dePéronne du 14 août au 11 septembre. Malgré d'incessants bombardements et plusieurs assauts, la ville tint bon.
En 1544, Charles Quint et FrançoisIer signent laPaix de Crépy-en-Laonnois, une paix séparée, laissant Henry VIII seul face à FrançoisIer.
En 1546, letraité d'Ardres, entre la France et l'Angleterre restitue Boulogne-sur-Mer à la France contre 10 000 écus. Mais ce traité restant lettre morte, Ce n'est qu'en 1550, après la prise dufort d'Ambleteuse, par letraité d'Outreau que Boulogne fut restituée à la France.
Le 10 août 1557, après 17 jours de résistance,Gaspard de Coligny dut capituler devant l'armée espagnoles dePhilippe II qui prit et pillaSaint-Quentin.

En 1559, lapaix du Cateau-Cambrésis entre la France, l'Espagne et l'Angleterre mis fin auxguerres d'Italie et aux conflits entre les trois puissances. La ville deCalais revint à la France, lesTrois-Évêchés de Metz, Toul et Verdun également. Les villes deSaint-Quentin,Ham et la place forte duCatelet furent restituées à la France.
La diffusion du protestantisme en France suscita une réaction de princes catholiques qui reçurent le soutien de l'Espagne. En 1568, le gouverneur de Péronne,Jacques d'Humières, refusa de remettre la ville aux protestants, fonda laLigue avec l'appui de seigneurs picards qui lancent àPéronne, en juin 1576, un appel aux princes et prélats du royaume, afin de rétablir la religion catholique et « l’obéissance de Sa Majesté ». Le mouvement s’étendit à toute la Picardie ralliant les villes d'Abbeville, Saint-Quentin, Beauvais, Corbie...
Le 31 mars 1585, la « proclamation de Péronne » relança l'action de la Ligue dont le chef étaitHenri de Guise dit « Le Balafré ». Elle déclarait vouloir rétablir la religion unique (le catholicisme), soustraire le roiHenri III à l'emprise de ses favoris, et l'obliger à faire appel régulièrement auxÉtats généraux.
Au cours de laseptième guerre de religion, leprince de Condé pritLa Fère, le 29 septembre 1579. Le 12 septembre 1580, la ville de La Fère se rendit aux troupes royales commandées par lemaréchal de Matignon après un long siège où s'illustrèrent les ducs deJoyeuse et d'Epernon. La ville est prise en 1589 par les ligueurs commandés parCharles de Hallwin. Leduc de Parme, gouverneur dePays-Bas espagnols vint au secours des ligueurs. Après plusieurs échec pour reprendre La Fère, Henri IV décida de faire le siège de la ville en 1595 après la prise de Laon, le 22 juillet 1594. La place capitula le 16 mai 1596 après presque deux ans de siège.
Pendant se temps, les Espagnols se rendaient maître deDoullens, le 31 juillet 1595, après quinze jours de siège.
Le 11 mars 1597, les Espagnols prirent par surprise la ville d'Amiens. Selon le récit des événements transmis par la tradition, avec trois chariots, les Espagnols avancèrent et pénétrèrent sous l’une des portes de la ville, renversèrent un chariot rempli de noix, pour créer un encombrement. Le chariot renversé les bourgeois accoururent, houspillant le paysan maladroit, tout en se jetant sur les noix. C’est alors que les soldats espagnols déguisés prirent leurs armes et tuèrent les sentinelles et firent rentrer les 500 soldats mis en embuscade et quatre compagnies de cavalerie qui pénétrèrent dans la ville.
Aussitôt la nouvelle de la prise d'Amiens connue, le roiHenri IV confia aumaréchal de Biron le soin de reprendre la ville en l'assiégeant. Henri IV lui-même et sa cour fit attaquer la ville par l'artillerie au début du mois d'avril. Après plusieurs sorties des assiégés, plusieurs attaques des assiégeants, l'échec de l'armée de secours espagnole, le gouverneur espagnol d'Amiens se rendit le 25 septembre 1597.
La frontière nord du royaume se trouvait dégagée pour un temps de la pression espagnole.
Par lapaix de Vervins signée le 2 mai 1598, l'Espagne restituait à la France leVermandois, la ville deCalais et Le Blavet (Port-Louis en Bretagne), la France rendait à l'Espagne leCharolais et diverses places fortes dont elle s'était emparée et renonçait à la suzeraineté sur laFlandre et l'Artois.
Henri IV décida la construction de lacitadelle d'Amiens et de lacitadelle de Doullens.
En 1635, cela faisait déjà dix-sept ans que l'Europe était en guerre. La guerre de Trente ans avait débuté en 1618. Au début, la France n'intervint, dans le conflit que par puissance interposée, le Danemark puis la Suède, c'est ce que Richelieu appelait la « guerre couverte ». En 1635, cette position n'était plus tenable, la France entra alors dans le conflit, c'était « la guerre ouverte » avec lamaison de Habsbourg c'est-à-dire l'Autriche et l'Espagne.
Le 2 juillet 1636, Les troupes espagnoles commandées par le princeThomas de Savoie-Carignan etJean de Werth franchirent la frontière nord du royaume et prirentLa Capelle le 8 juillet. Les Espagnols prirent ensuiteBohain-en-Vermandois,Vervins,Origny-Sainte-Benoite etRibemont. Le 25 juilletLe Catelet tomba à son tour tandis qu'Hirson résista du 25 juillet au 15 août (la ville fut reprise parTurenne en 1637).
Le comte de Soissons avec 10 000 hommes de troupe fut envoyé sur place pour empêcher les troupes espagnoles de franchir la Somme.Bray-sur-Somme résista mais fut détruit par les bombardements. Cependant, la Somme fut franchie par les Espagnols àCerisy. Les Espagnols pillèrent et incendièrentSaleux,Salouël etLongueau. Jean de Werth pritRoye,Ottavio Piccolomini et ses troupes ravagèrent les campagnes entre Somme et Oise. Ils firent des incursions jusquePontoise. SeuleMontdidier résistait.

En 1636, la place deCorbie était commandée parAntoine Maximilien de Belleforière, marquis de Soyécourt qui disposait d'une garnison de 1 600 hommes. Face à eux, l'armée espagnole comptait 30 000 hommes. Belleforière préféra négocier une reddition pour éviter le pillage de la ville. La capitulation eut lieu le 15 août. Les assiégés conservèrent leur vie et leurs biens, la garnison put sortir avec armes et bagages et rejoindre Amiens. Les Espagnols entrèrent dans Corbie à 10 heures du matin.
La Picardie, particulièrement la région deCorbie etAlbert, l'Amiénois, leSanterre entre Somme et Oise… était effroyablement ravagée.
La reprise de Corbie écartait la menace espagnole sur Paris.
Les exactions espagnoles dans la région se poursuivirent jusqu'à lapaix des Pyrénées de 1659. Par ce traité, l'Artois était donnée à la France, de ce fait, lesvilles de la Somme cessèrent de protéger la frontière nord du royaume.
Larévolte des Lustucru fut un mouvement populaire qui se déroula dans leBoulonnais, en 1662, au début du règne personnel deLouis XIV. En juin, dans la région deBoulogne-sur-Mer, les paysans se révoltèrent en attaquant les troupes de l'intendant de justice, police et finances de Picardie. Une véritable armée populaire contraignit les abbayes à fournir des vivres. Les maisons de riches propriétaires et de curés, comme celui deMarquise, furent pillées. Au mois de juillet, 3 000 manants mirent en fuite une compagnie entière de cavaliers entreOutreau etCondette.
Après larévocation de l'édit de Nantes, en 1685, le culte protestant fut interdit et les protestants pourchassés. Certains choisirent l'exil, d'autre continuèrent de pratiquer leur foi clandestinement. Ce fut le cas dans leVermandois, au nord-ouest de Saint-Quentin, au lieu-dit « La Boîte à Cailloux », une ancienne carrière de pierre où, à l'écart des agglomérations, à partir de 1691, le pasteurJean Gardien Givry[12] vint prêcher et célébrer le culte devant les habitants des villages environnants convertis au protestantisme. Ces assemblées du désert se tenaient clandestinement, de 21 h à minuit, à la lueur des torches et des chandelles. En 1695,Claude Brousson vint dans cette partie du Vermandois[13]. Le culte fut célébré en ce lieu jusqu’à laRévolution française.
De lapaix des Pyrénées (1659) à laRévolution française (1789), la Picardie connut une période de Paix qu'elle mit à profit pour se reconstruire.
La seconde moitié duXVIIe siècle fut pour la Picardie une période de prospérité. Sous l'impulsion deColbert, des manufactures furent créés comme laManufacture de tapisserie deBeauvais, fondée en 1664, laManufacture royale de glaces de miroirs deSaint-Gobain ou laManufacture des Rames àAbbeville qui fabriquait des draps de luxe, fondées en 1665...

À ces manufactures prestigieuses, il convient de rajouter les manufactures amiénoises d'Alexandre Bonvallet qui le premier en Picardie fabriqua des étoffes imprimées, de Morgan et Delahaye qui produisirent du velours de coton, employant en 1785, 318 ouvriers et ouvrières qui utilisaient des machines nouvelles lesmules-jennys. Saint-Quentin et sa région se spécialisèrent dans la production demulquinerie, degazes et demousselines tandis que Beauvais et le Beauvaisis se spécialisaient sous l'impulsion de Lucien Danse et Motte dans le blanchiment de toiles de luxe. La production picarde était exportée en Angleterre, en Espagne et en Amérique. Elle alimentait également les marchés régionaux de Soissons, Chauny et Saint-Quentin.
Dans les campagnes comme àCrèvecœur-le-Grand,Grandvilliers,Beaucamps-le-Vieux,Poix-de-Picardie,Tricot... se développa, auxXVIIe et XVIIIe siècles, l'industrie textile à domicile (proto-industrie) qui fournissait de laserge auxmarchands-fabricants de Beauvais, Amiens ou Abbeville.
LaManufacture de porcelaine de Chantilly fut fondée en 1725 par les princes de Condé en 1725, elle fonctionna jusqu'en 1792.

Dans le courant duXVIIIe siècle, la Picardie fut sensible auxLumières. Des académies se créèrent comme l'Académie des sciences, des lettres et des arts d'Amiens créée en 1746 parJean-Baptiste Gresset ou laSociété d'émulation d'Abbeville fondée en 1797.
L'intendant de lagénéralité d'Amiens,Bruno d'Agay en fut membre. Il y prit part à des discussions sur la vaccine, les paratonnerres ou les améliorations concernant l’agriculture et l’industrie. Il y prononça des discours sur l’utilité des sciences et des arts (1774) et sur Les avantages de la navigation intérieure (1782). En 1751, lejardin des plantes d'Amiens fut créé et des cours de botanique y furent dispensés.
Des loges maçonniques furent fondées à partir de 1744 àSaint-Quentin,Abbeville,Noyon,Montdidier,Doullens,Amiens, etc.
C'est en février 1766 qu'éclata, àAbbeville, l'affaire La Barre, dans le microcosme de la société locale, sur fond de réaction à l'esprit des Lumières et de querelles d'intérêts et de clans. La mutilation d'un crucifix offrit l'occasion aux notables locaux de s'en prendre à un jeune noble soupçonné d'impiété, le Chevalier de La Barre. On trouva chez lui un exemplaire duDictionnaire philosophique deVoltaire. Après avoir été soumis à la torture, La Barre fut condamné à mort par le Tribunal d'Abbeville puis, en appel, par leParlement de Paris. Il fut supplicié sur la grand-place d'Abbeville, le.

Après son passage triomphal à Amiens en 1767,Jean-Jacques Rousseau passa les six dernières semaines de sa vie, en 1778, àErmenonville (Oise). L'« ermitage de Jean-Jacques Rousseau », au site du « Désert », où le philosophe passait des journées entières à méditer et contempler la nature était la propriété deRené-Louis de Girardin. Rousseau fut inhumé dans l'Île des Peupliers dans un tombeau dessiné parHubert Robert, sa dépouille fut transférée auPanthéon pendant laRévolution française.
De 1781 à 1784,Roland de La Platière fut à Amiens, inspecteur des manufactures, il publia des ouvrages:L'Art du fabricant d’étoffes en laine,L’Art du fabricant de velours de coton etL'Art du tourbier, en 1782. Son épouseManon Roland, passionnée de botanique, herborisa le long des canaux aux abords de la ville. Elle constitua un herbier aquatique.
La Picardie fut auXVIIIe siècle une véritable pépinière de savants :Jean-Baptiste Delambre, natif d'Amiens etPierre Méchain natif deLaon,Jean-Baptiste Lamarck, natif deBazentin près d'Albert,Jean-Charles Peltier, natif deHam,Jean-Louis Baudelocque natif d'Heilly près deCorbie,Antoine Parmentier natif deMontdidier,Pierre-François Tingry etAntoine Quinquet, natifs deSoissons pour ne citer que les plus connus. Elle fut aussi une pépinière d'érudits, historiens, cartographes, linguistes, traducteurs, orientalistes etc. auxXVIIe et XVIIIe siècles :Charles du Cange,Antoine Galland,Dom Grenier, lePère Daire, plusieurs membres de la familleCapperonnier,Pierre Restaut,César-François Cassini etc.
Gabriel-Marie de Talleyrand-Périgord (1726-1795), oncle dudiable boiteux, fut le dernier gouverneur de Picardie de 1770 à 1789.
À la veille de laRévolution française, existait un service de diligences et de messageries avec départ deParis, les mardis et jeudis à11 h 30 et arrivée àAmiens, les mercredis et dimanches à8 h. Il desservaitChantilly,Creil,Laigneville,Clermont-en-Beauvaisis,Saint-Just-en-Chaussée,Breteuil-sur-Noye,Flers-sur-Noye etHébécourt. Les diligences pouvaient transporter dix personnes (dont deux au cabriolet) pour un montant de25 livres,15 sols par personne.
En Picardie, de nombreuses modifications territoriales ont lieu avant 1789 :
| Dates | Changements apportés | Constitution | Illustrations |
|---|---|---|---|
| 1477 | À la suite de la reconquête des villes de la Somme, le Gouvernement de Picardie est recréé. | ||
| 1483 | Beauvaisis,Senlisis et une partie duVermandois rejoignent l'Île-de-France[14]. | Amiénois, Laonnois, Ponthieu, Santerre, Soissonnais, Valois (en partie), Vermandois (en partie), Vimeu, Thiérache | |
| Vers 1545 | Perte duLaonnois, duSoissonnais, du Valois et de laThiérache pour la Picardie[15]. | Amiénois, Ponthieu, Santerre, Vermandois (en partie), Vimeu | |
| 1567 | Retour duBeauvaisis à la Picardie[15]. | Amiénois, Beauvaisis, Ponthieu, Santerre, Vermandois (en partie), Vimeu | |
| 1569 | Charles IX donne àLéonor d'Orléans-Longueville, gouverneur de Picardie, leBoulonnais et le pays Reconquis (Calaisis)[14]. | Amiénois, Beauvaisis, Boulonnais, Calaisis, Ponthieu, Santerre, Vermandois (en partie), Vimeu | |
| De 1585 à 1600 |
| Amiénois, Beauvaisis, Laonnois, Ponthieu, Santerre, Soissonnais, Thiérache, Valois (en partie), Vermandois, Vimeu | |
| Vers 1614 |
| Amiénois, Boulonnais, Boulonnais, Calaisis, Calaisis, Ponthieu,Rémois, Santerre, Thiérache, Vermandois (en partie), Vimeu | |
| Vers 1622-1624 | Amiénois, Boulonnais, Calaisis, Cambrésis, Ponthieu, Santerre, Thiérache, Vermandois, Vimeu | ||
| 1640 | À la suite de l'annexion de l'Artois à la France, celui-ci est annexé au Gouvernement de Picardie[15]. | Amiénois, Artois, Boulonnais, Calaisis, Cambrésis, Ponthieu, Santerre, Thiérache, Vermandois, Vimeu | |
| De 1668 à 1694 | En 1668, les communes de Gravelines en Calaisis, Landrecies et Le Quesnoy en Cambrésis, passent toutes les trois du Gouvernement de Picardie au Gouvernement de Flandre française[15]. | Amiénois, Artois, Boulonnais, Calaisis, Cambrésis, Ponthieu, Santerre, Thiérache, Vermandois, Vimeu | |
| Vers 1753 | Le Boulonnais semble devenir un Gouvernement autonome mais restera assimilé au Gouvernement de Picardie par bon nombre de cartographes. | Amiénois, Artois, Calaisis, Cambrésis, Ponthieu, Santerre, Thiérache, Vermandois, Vimeu | |
| Entre 1753 et 1765 | Le Cambrésis quitte le Gouvernement de Picardie pour être rattaché au Gouvernement de Flandre française, de même que le Hainaut français | Amiénois, Artois, Calaisis, Ponthieu, Santerre, Thiérache, Vermandois, Vimeu | |
| De 1765 jusque 1789 | L'Artois quitte le Gouvernement de Picardie et devient un gouvernement autonome[15]. | Amiénois, Calaisis, Ponthieu, Santerre, Thiérache, Vermandois, Vimeu |
La Picardie fut, en juillet 1789, le point de départ de laGrande Peur qui prit naissance dans les villages autour d'Estrées-Saint-Denis, sur le Plateau picard.
Lors de la création desdépartements, en1790, la majeure partie des régions de la Picardie forma le département de laSomme, le reste étant partagé entre les départements de l’Aisne (Thiérache et partie du Vermandois), de l’Oise (parties de l’Amiénois et du Santerre) et duPas-de-Calais (Boulonnais, Calaisis, parties du Ponthieu et du Marquenterre).
Le département de l'Aisne nouvellement crée se révéla être une pépinière d'acteurs de la Révolution :Condorcet,Camille Desmoulins,Saint-Just,Fouquier-Tinville etGracchus Babeuf furent parmi les acteurs les plus influents de cette période.
LesCarmélites de Compiègne, par contre furent victimes de laTerreur, tandis queAndré Dumont, député montagnard de laConvention nationale fut envoyé du 30 juin 1793 au 28 juillet 1794, en mission dans les départements de la Somme et de l'Oise où il mena une lutte constante contre le clergé et les aristocrates.

En 1802, fut signée lapaix d'Amiens entre la France et le Royaume-Uni. Ce traité ne rétablit la paix que pour une courte durée, en 1805, la guerre reprenait. Deux Picards se distinguèrent durant la périodeCaulaincourt, familier deNapoléon Ier et leGénéral Foy qui combattit en Espagne et àWaterloo.
La guerre réapparut en Picardie en 1814. Le 12 février, labataille de Château-Thierry fut une victoire française qui ne fut pas décisive. Les troupes russes assiégèrentSoissons une première fois, puis un mois plus tard, en mars 1814, les forces prussiennes de Blücher prirent la ville. La rapide capitulation dugénéral Moreau permit la jonction des Prussiens et Russes. Là, le général Woronsof se joignit à Blücher, formant une force de 100 000 hommes, qui partirent aussitôt au chemin des Dames et à la bataille de Craonne, puis à la bataille de Laon. Labataille de Craonne, du 7 mars 1814, se solda par une victoire de NapoléonIer contre les armées russes et prussienne commandées pargénéral Blücher. Labataille de Laon des 9 et 10 mars fut indécise. Cependant la victoire des puissances européennes coalisées et l'abdication de Napoléon entraîna une occupation militaire dans les trois départements.
Louis XVIII débarqua àCalais, le 24 avril 1814, grâce aux armées de la coalition et gagna Paris. Il octroya aux Français une Charte constitutionnelle et restaura la monarchie sans retour à l'Ancien Régime.
En 1815, les jésuites établirent à l'abbaye de Saint-Acheul d'Amiens, l'un de leurs six collèges qui fut l'un des moteurs de la renaissance de laCompagnie de Jésus en France.
Sous laRestauration fut achevée la construction ducanal de la Somme, commencée en 1786 et achevée en 1827. Il fut inauguré parCharles X.
Les élections des députés se faisaient au suffrage censitaire. Si dans les départements de la Somme et de l'Oise, les électeurs désignèrent des députés conservateurs, il n'en fut pas de même dans le département de l'Aisne où legénéral Foy fut élu avec deux autres députés libéraux.
La Révolution desTrois Glorieuses, les 27, 28, 29 juillet 1830 qui provoqua l'abdication deCharles X, fut accueilli favorablement dans les villes et provoquèrent quelques incidents à Amiens.
Sous lamonarchie de Juillet,Odilon Barrot, député du le2e collège de l'Aisne (Chauny) de 1834 à 1849, partisan deLouis-Philippe et d'une monarchie constitutionnelle mais déçu de la politique suivie par le régime, devint le chef de l'opposition dynastique[17].
La monarchie de Juillet fut pour la Picardie une période de construction des premières lignes de chemin de fer:
En 1840,Louis-Napoléon Bonaparte, neveu deNapoléon Ier, échoua dans sa tentative de soulèvement de la garnison deBoulogne-sur-Mer, condamné à la détention à perpétuité, il fut détenu auchâteau de Ham dont il s'enfuit en 1846.
La Révolution de février 1848 rencontra un certain écho en Picardie, on planta des arbres de la liberté dans les villes mais lors desjournées de Juin 1848, l'opinion s'inquiéta et de nombreuxPicards s'enrôlèrent dans la Garde nationale pour mater l'insurrection parisienne.
À l'élection du Président de la République des 10 et 11 décembre 1848,Louis-Napoléon Bonaparte rassembla, en Picardie, une très grande majorité de suffrages (plus de 80 %). À sa prise de fonction de président de la République, il nommaOdilon Barrot chef du gouvernement et ministre de la Justice, le 20 décembre 1848. Après les élections législatives de mai 1849, il le chargea de former un second gouvernement mais les convictions libérales du chef du gouvernement se heurtèrent au pouvoir de plus en plus autoritaire du prince-président. Odilon Barrot fut remercié le 30 octobre 1849[17].
Lecoup d’État du 2 décembre 1851 ne suscita guère d'opposition en Picardie.
Napoléon III organisa auchâteau de Compiègne à partir de 1856 des « séries », à l'automne, pendant lesquelles ils invitait des personnalités de son choix pour un séjour de détente.
LeSecond Empire fut pour la Picardie une période de prospérité avec le développement de l'industrie et le prolongement du réseau ferré : en 1855, mise en service de la ligne Paris-Creil-Jeumont ; en 1857 mise en service de la ligne Creil-Beauvais ; en 1867 mise en service de la ligne Amiens-Laon et de la ligne Amiens-Rouen; en 1869 mise en service de la ligne Paris-Soissons-Laon-Hirson...
Berck, sous leSecond Empire se tourna vers les activités thérapeutiques pour le traitement de la tuberculose, à l'initiative d'une veuve de marin, Marianne Brillard, surnommée « Marianne-toute-seule », qui eut l'idée de faire prendre des bains de mer aux enfants malades. La forte densité d'iode concentrée à Berck explique l'amélioration de l'état de santé des jeunes malades. L'Hôpital Impérial fut inauguré en 1869 par liImpératriceEugénie et leprince impérial. À cet effet, une avenue fut tracée qui porte toujours le nom de, Rue de l'Impératrice.
La défaite de Sedan du 2 septembre 1870, provoqua un soulèvement des Parisiens, la République fut proclamée le 4 septembre. Ungouvernement de la Défense nationale prend la direction du pays et organise la défense du territoire mais le 19 septembre, Paris est encerclé par l'armée prussienne.Léon Gambetta, ministre de l'Intérieur etEugène Spuller s’échappèrent de Paris en ballon et atterrir sur le territoire de la commune d'Épineuse dans le département de l'Oise. De là il gagnèrentAmiens puisTours d'où ils organisèrent les armées françaises.
Les débuts de laIIIe République sont marqués par une réaction de l'opinion qui après la défaite recherche la sécurité dans le vote conservateur. Après laCommune de Paris (1871), la répression conduisit près de 1 300 communardes à la Maison centrale (ancien donjon) deClermont de l'Oise.
Cependant les républicains progressèrent à chaque élection jusqu'à devenir majoritaires à la Chambre des députés et au Sénat en 1879. Dans la SommeJules Barni,René Goblet,Frédéric Petit furent les principaux chefs de file des républicains. René Goblet devint même ministre et Président du Conseil en 1886-1887, il fut un membre actif de la fondation du Parti radical et radical-socialiste en 1901. Lacrise boulangiste puis l'affaire Dreyfus ébranlèrent le régime, des députés antisémites furent élus comme à Montdidier mais le sursaut républicain provoqua la victoire de la gauche aux élections législatives de 1902.
En 1886, leduc d'Aumale légua son domaine deChantilly (Oise) et ses collections à l'Institut de France. Lemusée Condé fut ouvert au public, le 17 avril 1898.
À la fin duXIXe, de grands artistes peintres :Eugène Boudin,Édouard Manet,Albert Besnard etc. vinrent àBerck peindre ses ciels. Juste avant laPremière Guerre mondiale, la cour de Russie séjourna à Berck, accompagnant le Tsarévitch Alekseï sur lequel on essaya de nouveaux traitements pour soigner son hémophilie.
En 1872, l'écrivainJules Verne s'installa àAmiens, ville natale de son épouse. Dans une lettre à son ami Charles Wallut, il s'exprimait ainsi :
« Sur le désir de ma femme je me fixe à Amiens, ville sage, policée, d’humeur égale, la société y est cordiale et lettrée. On est près de Paris, assez pour en avoir le reflet, sans le bruit insupportable et l’agitation stérile. Et pour tout dire, monSaint-Michel reste amarré au Crotoy. »
En 1888, Jules Verne fut élu au conseil municipal d'Amiens sur la liste républicaine (gauche modérée) conduite parFrédéric Petit.
L'essor de l'industrie se manifesta en Picardie dans la seconde moitié duXIXe siècle jusqu'aux années 1970. Le textile fut la première industrie amiénoise avec la confection de velours de coton pour l'habillement et de velours d'ameublement. Dans lavallée de la Nièvre, la sociétéSaint Frères développa le tissage de la toile de jute. Le textile fit la prospérité de Saint-Quentin et de sa région, les « articles de Saint-Quentin » étaient commercialisés dans toute la France. La faïencerie puis la métallurgie se développèrent àCreil etMontataire avec l'arrivée du chemin de fer. La brosserie se développa au début duXXe siècle dans la vallée duThérain entre Beauvais et Creil, latableterie et l'industrie de lanacre se développaient àMéru... Tandis que le développement du réseau ferré provoquait l'essor de villes cheminotes commeLongueau ouTergnier.
La ville deGuise connut à cette époque une expérience sociale originale grâce à l'action deJean-Baptiste Godin, industriel créateur des poêles à charbon en fonte, qui y fonda, entre 1858 et 1883, le Familistère, inspiré duphalanstère deCharles Fourier.

La population quitta les campagnes pour les villes, à partir de la seconde moitié duXIXe siècle, avec le développement des chemins de fer et de l'industrie. Cette mutation sociale s'accompagna d'une évolution politique, le mouvement socialiste s'enracina progressivement, comme à Amiens, à la création de laSFIO, avec l'élection du typographeLucien Lecointe au conseil municipal, en 1900, au conseil général de la Somme, en 1904 et à la chambre des députés, en 1909, à Saint-Quentin, l'élection deLouis Ringuier, élu conseiller général en 1900 et député SFIO de 1910 à 1924 ou dans l'Oise oùAdéodat Compère-Morel par son activisme développa le mouvement socialiste. Il fut maire deBreteuil-sur-Noye jusqu'à son élection comme député duGard en 1909.
En 1906, laCGT tint congrès àAmiens et adopta une motion connue sous le nom deCharte d'Amiens qui affirmait l'indépendance du syndicalisme français vis-à-vis des partis politiques.
Lacolonisation ne fut pas sans influence en Picardie. En 1906, se déroula àAmiens une exposition internationale. Dans ce cadre, fut inauguré le 14 mai, « Le village noir », en présence de Mamdou Sek, chef de tribu, maître-bijoutier àGorée (Sénégal), recruté par des imprésarios français, entouré de sa femme et de ses enfants. Les visiteurs affluèrent. Le grand bal « noir et blanc » du 14 juillet fut un succès[18]. Ainsi le village sénégalais tentait-il de sensibiliser les Picards aux « bienfaits » de la colonisation[19].
LaGrande Guerre fut, pour la Picardie, un véritable cataclysme. La partie de la région comprise entre Amiens, Montdidier, Noyon et Saint-Quentin fut anéantie. Des centaines devillages furent détruits dont 200 lors de la seuleopération Alberich de février-mars 1917. Plusieurs batailles majeures de la guerre se déroulèrent en Picardie notamment en 1916, 1917 et 1918.

L'entre-deux-guerres est une période de reconstruction pour la Picardie. Certains secteurs classésZone rouge ne devaient pas être reconstruits, mais, la détermination des habitants de retour dans leur village, obligea les autorités à engager des opérations de déminage puis de reconstruction.Saint-Quentin,Chauny,Noyon,Albert,Péronne,Ham,Roye,Montdidier,Moreuil, n'étaient plus qu'un amas de ruines. La reconstruction se déroula des années 1920 jusqu'au début des années 1930.
Sur le plan politique la période fut marquée en Picardie par une certaine stabilité politique jusqu'en 1936. Le radicalisme s'était implanté dans les campagnes et laSFIO conquérait plusieurs municipalité commeCreil, en 1919, avecJules Uhry qui fut maire de 1919 à 1936 et député de l'Oise de 1920 à 1932 et de 1933 à 1936 et Crépy-en-Valois avec Jean Vassal, élu et réélu député de l'Oise en 1928, 1932 et 1936. À partir de 1920, un acteur politique nouveau, leParti communiste français, fit son apparition après sa scission d'avec laSFIO aucongrès de Tours. En 1925, la cité cheminote deLongueau, élisait un maire communiste.
Avec la crise de 1929 et la montée du chômage des années 1930, la Picardie vécut des temps difficiles, les ligues d'extrême droite firent leur apparition telle lesChemises vertes d'Henri Dorgères, dans les campagnes de la Somme.
La victoire duFront populaire, en 1936, marqua un net glissement à gauche de l'électorat picard. Le département de la Somme élisait deux députés communistesJean Catelas etLouis Prot à Amiens, un député socialisteMax Lejeune à Abbeville et réélisait le député socialiste sortantAlfred Basquin dans la circonscription de Péronne; un député radical était lui aussi réélu, dans le Vimeu. Dans l'Oise,Jean Biondi devenait maire de Creil en 1935 et députéSFIO en 1936 ;Jean Vassal, SFIO, était réélu et quatre radicaux. Dans l'Aisne, retiennent l'attention les figures deGeorges Monnet, député SFIO de 1928 à 1940, ministre de l'agriculture du gouvernementLéon Blum (1936-1937), créateur de l'Office du blé et celleJean Pierre-Bloch, conseiller général de Marle et députéSFIO en 1936. L'Aisne envoya quatre autres députés socialistes et un radical à la Chambre en 1936.
Le 3 septembre 1939, débutait pour la France laSeconde Guerre mondiale. Après laDrôle de guerre, l'attaque allemande débuta le 10 mai 1940 ; le passage de la Meuse àSedan débuta le 14 mai, l'objectif des blindés allemands étaient d'atteindreAbbeville le plus vite possible.
Sur le sol de laPicardie se déroulèrent plusieurs batailles importantes de labataille de France. Le 17 mai 1940, débuta la Bataille deMontcornet (Aisne), pendant laquelle, la4e division cuirassée commandée par lecolonel de Gaulle mena une contre-attaque qui stoppa un moment l'avance allemande.
Le 10 mai 1940 à 5 h du matin, l'aviation allemande bombarda l'usine d'aviation deMéaulte, le 17, la ville d'Albert (Somme) et ses environs étaient évacués[20].
Les 18 et 19 mai 1940, la ville d'Amiens subit de très violents bombardements aériens et fut occupée dès le 20 mai par les Allemands. Du 20 mai au 8 juin 1940, de durs combats se déroulèrent autour d'Amiens, dans la vallée de la Somme et sur le plateau duSanterre pour tenter de dégager la ville et freiner la marche de laWehrmacht vers Paris[21].
La Bataille d'Abbeville où s'illustrèrent le colonel de Gaulle et la4e division cuirassée qui se déroula du 28 mai au 4 juin 1940. Elle avait pour but de couvrir les ports deDieppe,Le Havre etRouen et de repousser les Allemands pour ancrer une ligne défensive sur laSomme.
Les villes deLaon,Beauvais,Creil etCompiègne subirent des bombardements aériens qui occasionnèrent d'importantes destructions. Les populations civiles étaient sur les routes de l'exode et les armées en déroute.
Les troupes allemandes ayant atteint la Loire, le gouvernement français ayant à sa têtePétain décida de cesser le combat. Un armistice aux conditions draconiennes fut signé dans le Wagon de l'Armistice du 11 novembre 1918 àCompiègne, le 22 juin 1940.
Les rigueurs de l'Occupation se firent sentirent dès le mois de juillet 1940. LaSomme servait de limite entre deux zones d'occupation : au nord la zone interdite, au sud la zone occupée, il fallait unAusweis (document d'identité allemand servant de laissez-passer) pour aller d'une zone à l'autre. La ville d'Amiens fut ainsi coupée en deux
La population manquait de tout: produits alimentaires, carburant, charbon, gaz etc. Des tickets de rationnement furent distribués par les mairies. Les rations alimentaires, fin 1942, se limitaient dans la Somme à1 200 calories par jour pour un adulte. La ration de viande était fixée à 120 g de viande par semaine et par personne en avril 1943[22].
La presse locale était étroitement contrôlée par les Autorités d'Occupation qui supervisaient le contenu des articles et leur mise en page. Elle ne pouvait publier que des articles favorables à l'Allemagne ainsi le quotidienLe Progrès de la Somme de juin 1940 à août 1944[23].
Une loi de juillet 1940, créa des régions : le département de la Somme, celui de l'Aisne et celui des Ardennes formèrent la région de Laon dont la préfecture régionale fut fixée à Saint-Quentin.
Les bureaux de placement pour le travail en Allemagne firent appel aux chômeurs. Des permanences s'ouvrirent à Abbeville, Albert, Amiens, Friville-Escarbotin, Montdidier, Péronne et Roye, mais le succès ne fut pas au rendez-vous malgré des primes alléchantes[17]. La loi du 16 février 1943 institua leService du travail obligatoire (STO) qui frappait tous les jeunes gens du même classe d'âge ; 5 000 Picards du département de la Somme furent concernés.
LaCollaboration décidée à l'Entrevue de Montoire, entreHitler etPétain, le 24 octobre 1940 n'eut guère de succès en Picardie. Les partis politiques collaborationniste ne recrutèrent qu'une centaine de personnes chacun dans le département de la Somme. En 1943, leParti franciste créa une section féminine à Amiens qui offrait aux mères une garderie pour leurs enfants, sans grand succès là encore. Seul leParti populaire français (PPF) eut une certaine audience en organisant des séances de cinéma où furent projeter des films commeLe Péril juif,Les Forces occultes etc., à Amiens et à Albert, le PPF put imprimer ses propres tracts. Il milita pour que des Picards s'engagent dans laLégion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF) à partir de 1941. Les actions violentes des collaborationnistes se limitèrent à des bris de bustes de Marianne dans certaines mairies et le renommage de quelques rues de certaines villes.
Au printemps 1944, la Collaboration avec les Allemands entra dans une phase plus active. Elle se consacra à la recherche des réfractaires auSTO et des Résistants. LaMilice ne fut active dans la Somme qu'à partir de mai 1944 mais ledébarquement de Normandie, le 6 juin 1944 eut tôt fait de calmer les ardeurs des plus convaincus, beaucoup de collaborationnistes démissionnèrent, se cachèrent ou cherchèrent à entrer dans la Résistance[17].

Le Picard, Philippe de Hautecloque, capitaine de l'armée française, parvint à s'échapper des griffes allemandes en juin 1940 et à gagner l'Angleterre via le Portugal pour rejoindre laFrance libre dugénéral de Gaulle. Il prit le nom deGénéral Leclerc et fut l'un des plus glorieux chefs militaires de laRésistance extérieure.
Hubert Amyot d'Inville originaire de Beauvais, fut un Français libre de même queFred Moore originaire d'Amiens.
LaRésistance intérieure dans la Somme, débuta dès 1940 par la collecte et la transmission de renseignements pour l'Angleterre et laFrance libre, la constitution de réseaux d'évasion pour les soldats des armées en déroute et des aviateurs alliés dont l'avion avait été abattu, la diffusion de tracts et de journaux clandestins, des actions de sabotage.
Jeanne Fourmentraux, professeure au lycée d'Amiens, entra en résistance dès octobre 1940, avec quelques jeunes gens, récupérant des armes abandonnées. Progressivement, elle entra en relation avec des salariés desPTT et de laSNCF et ce fut la fabrication de faux papiers. Ce groupe se rattacha auBataillon de la mort de Paris en mars 1941.
Le Parti communiste clandestin, bien implanté dans la Somme, distribuait des tracts depuis août 1940 àAmiens,Longueau etAlbert. LeFront national et lesFrancs-tireurs et partisans (FTP) en étaient l'émanation. Le 31 octobre 1941, une gerbe était déposée au monument aux morts d'Amiens par les résistants. Le 24 décembre 1944, à 21 h 30, une explosion retentit au « Royal », restaurant d'Amiens transformé enSoldatenheim (foyer du soldat allemand) : 37 soldats furent tués et une centaine furent blessés.
Léon Gontier était chef de service à la préfecture de la Somme, militant socialiste, syndicaliste et franc-maçon. Il était dans l'entre-deux-guerres président de la section d'Amiens de laLigue des droits de l'homme. Il fit partie du petit nombre de personnes avec Louis Sellier, Louis Saillant et Léon Tellier qui se réunirent dès août 1940 pour résister à l'occupant. Il entreprit de reconstituer clandestinement la FédérationSFIO de la Somme et en devint le secrétaire fédéra. En 1941, il fut l'un des cofondateurs du groupe de résistanceLibération-Nord à Amiens. Il fut également membre duréseau Brutus chargé du renseignement, fournit des faux papiers aux réfractaires, fit circuler tracts et journaux clandestins. Ce fut un véritable chef qui guida de nombreuses actions contre l'armée d'occupation allemande.
Le « Groupe Michel », dirigé parAlfred Dizy, était un groupe de résistants affilié au Front national et aux FTP. Il réalisa une série de coups de main audacieux de février à avril 1943 : déraillements de trains par déboulonnage des voies ferrées à Montières,Thézy-Glimont,Remiencourt,Aveluy,Guillaucourt,Fontaine-sur-Somme,Hangest-sur-Somme (ce dernier déraillement faisant 25 tués et 50 blessés parmi les soldats allemands), dynamitage de l'écluse deSailly-Laurette etc.
Madeleine Michelis, professeure de lettres au lycée de jeunes filles d'Amiens, resta aujourd'hui encore une figure de la Résistance. Elle hébergea alors une jeune juive, Claude Bloch - dont le père, l'architecte Jean-André Bloch, avait été déporté - avant de réussir à lui faire passer la ligne de démarcation. Elle était membre du réseauLibération-Nord et aussi membre duréseau Shelburn, branche duSpecial Operations Executive des services secrets britanniques. Elle avait pour mission de mettre à l'abri et de d'assurer le rapatriement en Angleterre des parachutistes et des aviateurs alliés. Son action dans la Résistance avait commencé en Normandie avant son arrivée à Amiens[24],[25].
D'autre réseaux comme l'Organisation civile et militaire (OCM), leréseau Zéro France, se consacrèrent au renseignement et aux filières d'évasion. L'Organisation de résistance de l'armée (ORA), non-gaulliste, était également implantée à Amiens,Conty,Hornoy-le-Bourg etWarloy-Baillon[23].
Jean Biondi, député-maire SFIO de Creil, est le seul parlementaire picard à avoir voté contre les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, le 10 juillet 1940[26]. Démis de ses fonctions électives, Jean Biondi entre en résistance dans le mouvement Libération-Nord.
Cinq mouvements de résistance ont eu une activité intense dans le département de l'Oise :
Les réseaux, organisations créées en vue d'un travail militaire précis (renseignement, sabotage, évasion de prisonniers de guerre et des pilotes...) ont été une quinzaine à intervenir dans l'Oise :
Il y eut dans l'Oise plusieurs maquis. Après le 6 juin 1944 certains groupesFFI se sont installés dans des bois et des forêts, espérant ainsi harceler l'ennemi. Ces groupes ont reçu le titre de maquis.
Ledétachement Valmy fut un réseau de Résistance actif de 1941 à 1944, affilié auxFrancs-Tireurs et partisans (FTP), particulièrement actif dans le secteur deCreil,Montataire,Nogent-sur-Oise, dont le chef était le colonel Théo (Maurice Mignon) qui devint responsable des FTP pour les départements de l'Oise, de la Somme et de la Seine Maritime en septembre 1943[27].
Dès novembre 1940, àCompiègne, le champion olympique d'escrimeGeorges Tainturier s'engagea dans la Résistance dans le mouvementLa Vérité française. En 1942, il faisant partie du mouvementCombat, il devint membre du comité directeur deCombat Zone Nord. Arrêté le 3 mars 1942[28], il est emprisonné àFresnes, puis déporté à la prison deSarrebruck. Le 19 octobre 1943, il est condamné à mort (affaire Continent) par le2e sénat duVolksgerichtshof. AvecMichel Edvire,Gualbert Flandrin,Alexandre Gandouin,Gabriel Clara,Christian Héraude,Robert Héraude,Abel Laville etAlbert Vandendriessche, il estdécapité à la hache à la prison de Cologne, le 7 décembre 1943.
Les réseaux de Résistance s'organisent peu à peu dans le département de l'Aisne : l'Organisation civile et militaire (OCM) avec Pierre Dromas ;Libération-Nord dans le sud du département avec les députésElie Bloncourt etPaul Lambin ; lesFrancs-Tireurs et partisans (FTP) et leFront national d'obédience communiste avec Maurice Liez ou André Baudin ;Ceux de la Résistance etc.
Des actions de guérilla s'intensifient contre les Allemands grâce aux armes parachutées, les sabotages contre les voies ferrées, les lignes téléphoniques et les lignes électriques, les écluses, les attaques à main armée, permettent de soumettre les Allemands à une pression permanente et de leur infliger de lourdes pertes comme le sabotage deCroix-Fonsomme.
Le 12 novembre 1940, furent fusillés dans les fossés de la citadelle d'Amiens, deux hommes originaires deSaint-Valery-sur-Somme :Lucien Brusque, marin-pêcheur, et Émile Masson, batelier, âgé de 18 ans, pour avoir coupé des câbles téléphoniques de l'armée allemande. L'exécution fut prise en photo par un soldat allemand qui fit développer sa pellicule par un photographe amiénois qui transmit un double du cliché à la Résistance. La photo fut publiée dans la presse anglo-saxonne.
Jean Catelas, député d'Amiens fut une victime durégime de Vichy. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il défendit lepacte germano-soviétique en 1939 et entra dans la clandestinité, après l'interdiction du Parti communiste. Il participa à la réorganisation clandestine des syndicats de cheminots d'obédience communiste. Après l'entrée des Allemands dans Paris le 14 juin 1940, il participa, aux côtés deMaurice Tréand, aux négociations visant à faire reparaître L'Humanité, sans succès. Membre de la direction du Parti communiste clandestin, il fut arrêté, à Paris, par la police française, le 14 mai 1941 et incarcéré à laprison de la Santé avecGabriel Péri. Le 9 septembre 1941 le gouvernement de Vichy créait le « Tribunal d'État », juridiction d'exception comme lesSections spéciales, pour juger les opposants politiques sous la pression des Allemands qui, à la suite de l'attentat du 21 août 1941 contre l'aspirant Moser, exigèrent de l'État français l'exécution de six communistes. Jean Catelas fut condamné à mort, le 21 septembre 1941 et guillotiné le 24 à la prison de la Santé[29].
Paul Baroux était instituteur àLongueau, militant duParti communiste français, interné aucamp de Châteaubriant, il fut fusillé par les Allemands le 15 décembre 1941.
Madeleine Michelis, résistante amiénoise, fut arrêtée par la Gestapo à son domicile, le 12 février 1944, elle fut transférée à Paris, au Lycée Montaigne. Le mercredi 16 février, elle fut amenée vers 13 h 00, à l'Hôtel des États-Unis, boulevard du Montparnasse pour un interrogatoire. Le 21 février 1944, sa famille était officiellement informée de sa mort[24],[25].
Léon Gontier, résistant amiénois, fut arrêté à Paris, à la gare du Nord, le 13 janvier 1944 et fut incarcéré à Amiens, à la prison de la route d'Albert. Le 18 février 1944, lors de l'opération Jéricho, Léon Gontier se distingua par son courage en aidant les personnes blessées à gagner la sortie, malgré les pressions de son entourage qui s'incitait à fuir. Il resta, de ce fait, prisonnier des Allemands. Transféré aucamp de Royallieu à Compiègne dans l'Oise, il fut ensuite déporté, le 28 juillet 1944 au camp de concentration deNeuengamme, en Allemagne, où il mourut le 31 décembre 1944.
Raymond Gourdain, cheminot et résistant amiénois, fut arrêté puis fusillé auMont-Valérien, le 21 mars 1944.
Le camp de Royallieu (Frontstalag 122) àCompiègne était un camp de transit et d'internement nazi, ouvert en juin 1941 et qui fonctionna jusqu'en août 1944. Y furent détenus plus de 54 000 résistants, militants syndicaux et politiques, otages civils et Juifs. 50 000 d'entre eux furent déportés dans les camps de concentration et d'extermination d'Auschwitz,Buchenwald,Dachau,Mauthausen,Neuengamme,Ravensbrück,Sachsenhausen.
Lecamp d'internement de Doullens (Somme) fut créé dans la citadelle en 1941 pour interner des opposants politiques, des trafiquants du marché noir et des Juifs. En juin 1942, 455 personnes y étaient détenues : communistes, responsables d'organisations de gauche, mais aussi ouvriers et fonctionnaires. La durée de leur captivité s'échelonna de 6 à 18 mois. Décrété insalubre, le camp de Doullens fut fermé en 1943[30].
Lacitadelle d'Amiens fut un lieu de détention, de torture et d'exécution pour les résistants tombés dans les griffes de la police française ou de laGestapo.

Le gouvernement deVichy promulgua lepremier statut des Juifs le 3 octobre 1940. Les Allemands avaient promulgué, le 27 septembre 1940, une ordonnance définissant le premier statut allemand des Juifs pour les zones occupées et les dispositions concernant leurs biens : recensement des Juifs dans chaque département, interdiction d'un retour en zone occupée pour les Juifs qui l'avaient quittée...
Dans ledépartement de l'Oise, le recensement de 1940, fait état de 240 Juifs présents dont 69 âgés de moins de 20 ans. Ces Juifs pour la plupart citadins travaillaient dans le commerce ou exerçaient une profession médicale. Lerégime de Vichy distinguait les Juifs français (121 dans l'Oise), les Juifs naturalisés (25) et les Juifs étrangers (74). Les Juifs étrangers furent sur décision préfectorale internés au camp dePlainville ou dans les camps du Loiret. L'ordonnance du 29 mai 1942 imposa le port de l'étoile jaune aux Juifs de la zone occupée. En 1942, il n'y avait plus que 159 Juifs dans l'Oise. La politique d'aryanisation des entreprises juives conduisit à la spoliation de leurs propriétaires. Des administrateurs provisoires furent nommés qui avaient le droit de liquider les actifs ou de céder le capital des entreprises.
Le 12 décembre 1941, 743 Juifs avaient été arrêtés à Paris et internés aucamp de Royallieu àCompiègne. Dans l'Oise, il y eut deux grandes vagues d'arrestations. En 1942, des rafles furent organisées à partir de la seconde quinzaine de juillet soit par la police et la gendarmerie françaises soit par laFeldgendarmerie allemande, une trentaine de personnes sont arrêtées et internées àDrancy pour la plupart et déportés àAuschwitz. Les 4 et 5 janvier 1944 eurent lieu les dernières grandes rafles, une quarantaine de Juifs du département furent arrêtés puis déportés[31].
Dans ledépartement de la Somme, 93 Juifs furent recensés en 1940 mais ce chiffre sous-estime vraisemblablement le nombre réel de Juifs du département car certains noms, absents de cette première liste, apparaissent dans des documents postérieurs. Un certain nombre de Juifs étrangers furent dirigés en décembre 1940 dans les camps du département de l'Yonne, on en retrouva également dans les Pyrénées-Orientales etc.
Le 18 juillet 1942, sur ordre du Sicherheitspolizei Kommando (S.P.K.) deSaint-Quentin, la gendarmerie française procédait à l'arrestation de Juifs étrangers ou apatrides à Amiens,Pierrepont-sur-Avre etAult. Ils furent dirigés vers lecamp de Drancy et de là vers les camps de la mort[32].
La plus importante rafle de Juifs eut lieu le 4 janvier 1944[33], certains furent arrêtés le 5. La plupart d'entre eux habitaientAmiens, d'autres étaient originaires deMers-les-Bains,Ault,Bouquemaison etRosières-en-Santerre. Les Juifs arrêtés tôt le matin par les Allemands furent amenés à la gendarmerie d'Amiens et y restèrent jusqu'au soir où ils furent acheminés à la gare du Nord d'Amiens pour prendre le train à destination de Drancy, dans la nuit du 4 au 5 janvier. Ils furent, pour la plupart, déportés àAuschwitz-Birkenau, le 20 janvier, par le convoino 66 et exterminés le 23. Une seule Amiénoise issue de ce convoi a survécu[33]. Trois enfants juifs de la Somme furent déportés par ce convoi aucun d'eux n'est revenu[34],[35].
La population juive dudépartement de l'Aisne, fut arrêtée en deux temps. Une rafle eu lieu le 17 juillet 1942, le même jour que la rafle du Vél' d'hiv', organisée par la Préfecture de la région de Laon et exécutée par la police ou la gendarmerie françaises. Les Juifs arrêtés furent pour la plupart déportés àAuschwitz-Birkenau.
Début janvier 1944, une seconde rafle fut organisée par les Allemands, les Juifs de l'Aisne furent internés à Drancy puis déportés àAuschwitz-Birkenau par les convoisno 66 et 67. Entre 88 et 115 Juifs du département de l'Aisne auraient été déportés[36], parmi eux, 31 habitaient leSoissonnais, 4 seulement sont revenus[37].
À partir 1942, les bombardements alliés sur la Picardie commencèrent, visant des objectifs militaires allemands, des nœuds ferroviaires etc.
L'opération Jéricho est le nom donné à un raid aérien de laRoyal Air Force qui se déroula le 18 février 1944. Il avait pour but de libérer des Résistants incarcérés dans la prison d'Amiens. Cette opération, qui fit 98 morts, fut une action préparatoire à la Libération[38].
En mars 1944,Longueau, important nœud ferroviaire voisin d'Amiens, subit des bombardements d'une violence telle que la ville fut évacuée par ordre des autorités d'occupation. Vingt et un bombardements en trois jours. 1 132 immeubles furent partiellement ou totalement détruits. Toutes les installations ferroviaires furent détruites (sauf la gare de voyageurs).
La ville d'Amiens subit d'importants bombardements comme celui de la Pentecôte du 27 mai 1944 qui fit près de 400 tués parmi la population civile[2].
Le 30 août 1944, la ville deBeauvais était libérée par les Britanniques. Le lendemain 31 août, ce fut la ville d'Amiens qui fut libéré après plusieurs combats notamment pour le contrôle des ponts sur la Somme, lesFFI réussirent à garder intact le pont Beauvillé, principal point de passage sur la Somme en allant vers le nord[39]. Le 31 août en milieu de journée, àAlbert, les résistants harcelèrent un détachement deSS qui avait pris position dans le centre-ville afin de protéger le repli de la10e division de Panzer SS. La police et la gendarmerie se joignirent auxFFI de l'abbé Dumoulin. L'armée britannique arriva et libéra la ville vers 22 h.
Abbeville fut libérée le 3 septembre 1944 par lesFFI et la1re division blindée polonaise commandée par legénéral Maczek.
Dans les environs deVadencourt (Aisne), près deGuise, la nuit du 13 au 14 juin 1944, des parachutistes allemands, des troupes SS d’Hirson et des policiers de laGestapo de Saint-Quentin, réduisirent trois compagnies deFrancs-tireurs et partisans (FTP), environ 400 hommes, venus à pied du Pas-de-Calais pour rejoindre les maquis des Ardennes[40].
Le 30 août 1944,Laon était libérée. Le même jour, entreMarle etMontcornet, dans le village deTavaux se déroulait une tragédie: vingt civils étaient massacrés par des SS. Après le Débarquement de Normandie du 6 juin 1944, la Résistance accroche les troupes allemandes en retraite. Une opération de représailles est aussitôt lancée par des éléments des divisions SS « Adolf Hitler » et « Hitlerjugend ». Vingt civils, pour la plupart des vieillards ainsi que deux enfants, sont massacrés dans la partie est du village de Tavaux. Un résistant est tué, le village est presque entièrement détruit. II ne fut libéré que le lendemain, 31 août, par des résistants de la région deSaint-Erme etSissonne, alors que l’armée américaine était à proximité.
Le drame de Tavaux mit fin aux activités d'un des groupes de résistants les plus actifs, du département de l'Aisne, sous les ordres du lieutenantFFI, Pierre Maujean[41].
En septembre 1944, plusieurs charniers furent mis au jour dans les environs d'Amiens : celui de l'hôpital Philippe Pinel àDury, celui deBertangles, celui d'Acheux-en-Amiénois et celui duBois de Gentelles àBoves.
Du au, sévit àAlbert, dans les environs et jusqu'enSeine-Maritime, le « Gang d'Albert » formé d'une quinzaine d'anciensRésistants – dont certains avec un passé digne d'éloges – commit une série de vols à main armée, en argent et en nature, chez des agriculteurs et des commerçants qu'il soupçonnait demarché noir ou decollaboration avec l'ennemi pendant la guerre, allant jusqu'à tuer un marchand de bestiaux àVauchelles-lès-Authie. Il s'attaqua également à la coopérative laitière d'Albert et aux bureaux de poste deMillencourt etEpehy. Enfin arrêtés, les malfaiteurs furent jugés par lacour d'assises de la Somme qui prononça trois condamnations à mort et des peines de prison de 2 à 15 ans de détention. Les trois condamnés à mort s'étant pourvu en cassation, l'affaire fut rejugée par lacour d'assises de l'Aisne en décembre1951, une seule condamnation à mort fut cette fois prononcée et exécutée. Les deux autres comparses furent condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité[42].
La plupart des villes de Picardie furent touchées par les destructions entre 1940 et 1944. Des plans de reconstruction élaborés pendant la guerre furent mis en œuvre dès la fin des hostilités. ce fut le cas pourAbbeville,Amiens,Beauvais,Creil,Compiègne,Laon comme pour des agglomérations de moindre importance commeBreteuil-sur-Noye,Grandvilliers,Formerie,Ham,Péronne,Roye,Airaines etc.
Département de la Somme : la vie politique du département de la Somme fut dominée pendant toute laIVe République et jusqu'au années 1980 par la personnalité deMax Lejeune, député-maireSFIO d'Abbeville et ministre ou secrétaire d’État à douze reprises de décembre 1946 à janvier 1959. LePCF bien implanté depuis leFront populaire avait vu son influence croitre pendant laRésistance. De 1945 à 1958, les habitants de la Somme élurent deux députés communistesRené Lamps etLouis Prot. En 1956, un député poujadiste,Émile Luciani fut élu.
Département de l'Oise : la vie politique de ce département fut marquée par une nette progression duPCF qui obtint deux députés de 1945 à 1956. Jusque 1950, la personnalité deJean Biondi, député-maireSFIO de Creil et secrétaire d’État à deux reprises marqua le vie politique du département.
Département de l'Aisne :
La Guerre d'Algérie ne suscita guère de mouvement de protestation,Max Lejeune député-maireSFIO d'Abbeville et ministre étant farouchement pour l'Algérie française. Cependant, à Amiens, une manifestation de conscrits rappelés se déroula, le 24 mai 1956. Un grand meeting fut organisé au cirque d'Amiens, le 31 mai 1956, « Pour la paix en Algérie », par laLigue des droits de l'homme. Des parents de soldats ou de rappelés se réunirent àAlbert et distribuèrent des tracts[43]. En 1962, despieds noirs et desharkis furent rapatriés d'Algérie dans les trois départements picards. 600 Harkis furent hébergés à lacitadelle de Doullens.
Le retour au pouvoir du général de Gaulle marqua une évolution de l'électorat qui glissa vers la droite. Dans la Somme, aux législatives de 1958,René Lamps député communiste d'Amiens fut battu dans une triangulaire au profit du gaullisteFred Moore. Deux autres députés gaullistes furent élus dans les circonscriptions de Montdidier et de Péronne. Dans l'Oise, trois députés gaullistes furent élus dont l'avionneurMarcel Dassault. Le département de l'Aisne quant à lui élisait deux députés gaullistes en 1958 puis quatre en 1962.
Sur le plan économique, la période desTrente Glorieuses fut marquée en Picardie par un développement de l'activité industrielle par le développement ou l'implantation de sites de productions agro-alimentaires comme àFlaucourt etEstrées-MonsPéronne,Rosières-en-Santerre,Faverolles près deMontdidier,Vic-sur-Aisne,Noyon,Beauvais... des unités de production dans le secteur de l'équipement automobile àAmiens,Beauvais,Creil... la production de tracteurs àBeauvais ou de véhicules deux roues à moteur àSaint-Quentin. La Picardie était donc une région où l'activité industrielle dominait. Les grèves de mai-juin 1968 révélèrent les limites du modèle fordiste de production et les aspirations nouvelles des salariés en Picardie comme dans le reste de la France.
Les conséquences de ce vaste et profond mouvement de contestation allaient provoquer l'alternance politique de 1981.François Mitterrand arriva largement en tête dans les trois départements picards, à l'élection présidentielle de 1981 et aux élections législatives qui suivirent, la gauche remportait la plupart des sièges : 4 sur 5 dans l'Oise, 4 (dont 2 communistes) sur 5 dans la Somme, 5 (dont 2 communistes) sur 5 dans l'Aisne.
Depuis le milieu des années 1970, la Picardie subit inexorablement un processus de désindustrialisation ; des secteurs entiers de la production industrielle ont presque totalement disparu : l'industrie de la machine-outil qui constituait le fleuron de l'activité économique de la ville d'Albert. La bonneterie duSanterre a pratiquement disparu des villes deVillers-Bretonneux,Moreuil,Rosières-en-Santerre ; l'industrie du velours a désertéAmiens. Dans la vallée duThérain et àBeauvais, brosserie et textile n'existent quasiment plus. Le secteur de la métallurgie et de la construction mécanique est lui aussi sinistré surtout dans le bassin deCreil. Les régions deChauny et deSaint-Quentin ainsi que laThiérache ont vu quasiment disparaître l'activité textile, la construction mécanique et la fonderie. Il ne s'agit là que d'exemples les plus marquants, tout le tissu industriel de la région, jusque-là pourvoyeur d'emplois, est touché. Les industries d'équipements automobiles connaissent dans les années 2000 et 2010 d'importantes difficultés des usines ferment à Amiens et àClairoix, les réductions d'emplois dans celles qui restent en activité sont fréquentes. Enfin, le secteur agro-industriel lui aussi connaît certaines difficultés, l'industrie sucrière a réduit ses sites de production dans les trois départements, tout comme l'industrie laitière quand ce n'est pas les usines qui sont démantelées clandestinement en un weekend comme àPéronne. Il s'ensuit un chômage de masse de travailleurs peu qualifiés qui provoque un profond malaise social.
L'aggravation du chômage provoqua aux élections de 1986, un net virage à droite de l'électorat, un députéFront national fut élu dans l'Oise au scrutin proportionnel. Depuis lors, les majorités de droite et de gauche alternent à la tête de la région et de chacun des trois départements qui envoient selon les scrutins une majorité de députés de l'un ou l'autre camp. Les électeurs sont de plus en plus nombreux à s'abstenir et leFront national recueille en % de plus en plus de suffrages.
En vertu de laloino 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, le conseil régional de Picardie a fusionné avec celui du Nord-Pas-de-Calais, au, pour former la régionHauts-de-France (Nord-Pas-de-Calais-Picardie). De ce fait, la Picardie n'est plus une entité administrative autonome.