Kissinger reçoit leprix Nobel de la paix en 1973 pour son action dans la résolution de la guerre du Viêt Nam. Ce prix est notamment marqué par la démission de deux membres ducomité Nobel, en guise de protestation. Figure médiatique, souvent décrit comme brillant, il reste un personnage controversé, sa politique étrangère lui ayant créé de nombreuses inimitiés, aussi bien du côté de lagauchepacifiste et de certaines associations humanitaires que de ladroiteanticommuniste.
Henry Kissinger est né Heinz Alfred Kissinger le àFürth enBavière, dont il est plus tard devenu citoyen d'honneur, dans une famillejuive allemande[1]. Son père, Ludwig Kissinger (1887-1982), estinstituteur[2]. Sa mère, Paula Stern Kissinger (1901-1998), estfemme au foyer. Henry a un frère cadet, nommé Walter[3]. Le nom Kissinger est issu du choix fait en 1817 par l'arrière-arrière-grand-père d'Henry, Meyer Löb, de changer de patronyme. Il se serait pour cela inspiré du nom de la ville allemande deBad Kissingen[4]. En 1938, sa famille, fuyant lespersécutions nazies, part pourNew York et s'installe àWashington Heights àManhattan. Il est naturalisé américain le[5].
Écolier àManhattan, il ne perd pas son accent allemand, malgré une assimilation rapide de laculture américaine, du fait d'une certaine timidité enfantine qui l'empêche de prendre la parole en classe[6],[7]. Il suit les cours du soir dans son quartier à laGeorge Washington High School(en) pour travailler dans les usines le jour. Il entre ensuite dans le supérieur auCity College of New York, où il étudie lacomptabilité.
En 1943, il arrête temporairement ses études pour recevoir un entrainement militaire élémentaire à Camp Croft (Spartanburg,Caroline du Sud), à la suite de sa naturalisation la même année. Il est d'abord envoyé aucollège Lafayette enPennsylvanie pour étudier l'ingénierie mais le programme est annulé et Kissinger est réassigné à la84e division d'infanterie. Il y fait la connaissance de l'universitaireFritz G. A. Kraemer(en), comme lui immigré allemand. Ce dernier remarque l'aisance d'Henry avec l'allemand et son intellect peu commun. Il s'arrange alors pour qu'il soit envoyé à la section derenseignement militaire de la division. Kissinger part ensuite en Europe avec sa division alors que laSeconde Guerre mondiale bat son plein, et est volontaire pour assurer des missions de renseignement non sans risques, notamment durant labataille des Ardennes[8],[9].
À la suite de l'avancée de l'armée américaine sur leterritoire allemand, Kissinger est assigné à ladénazification de la ville deKrefeld du fait du manque de germanophones dans l'équipe de renseignement de la division[10]. Ses origines et sa connaissance de la société allemande lui sont utiles dans sa tâche d'administrateur militaire de cette cité ouvrière : il parvient à supprimer tous les symboles nazis et mettre en place une nouvelle administration civile en seulement huit jours[11]. Il est ensuite muté auCounter Intelligence Corps (CIC) avec le grade desergent. Il prend la tête d'une équipe àHanovre chargée de pourchasser notamment les officiers de laGestapo, mission pour laquelle il reçoit laBronze Star[12]. En juin 1945, Kissinger passe commandant d'un détachement du CIC dans l'arrondissement de la Bergstraße dans le Land deHesse. Alors qu'il possède l'autorité et les pouvoirs nécessaires pour procéder à des arrestations immédiates, il prend toujours soin de ne pas en abuser et de ménager la population locale[13].
En 1946, Kissinger est réassigné en tant que professeur à l'European Command Intelligence School àCamp King, où il continuera de travailler même après son départ de l'armée[14],[15].
Cursus universitaire et débuts en tant que conseiller
Henry Kissinger obtient en 1950 unelicence enscience politique à l'université Harvard avec la mentionsumma cum laude après avoir suivi les cours de William Yandell Elliott[16]. Il obtient samaîtrise en 1952. La même année, il devient consultant auprès du directeur duPsychological Strategy Board(en) en marge de ses études[17]. En 1954, il devient docteur enscience politique à l'université Harvard, sa thèse sur ladiplomatie entre 1812 et 1822 (Peace, Legitimacy, and the Equilibrium — A Study of the Statesmanship of Castlereagh and Metternich —) étant réputée la plus longue de l'histoire de l'université[réf. souhaitée]. Il y devient alors professeur au département des études gouvernementales, dont il devient directeur adjoint en 1957.
Dans l'équipe de Richard Nixon, Henry Kissinger met au point la politique de ladétente avec l'Union soviétique. Il négocie ainsi le traitéSALT I limitant le nombre de bombes nucléaires des deux superpuissances.
En novembre 1970, le président chinoisMao Zedong, par l'intermédiaire de sonpremier ministreZhou Enlai, fait savoir confidentiellement à Nixon qu'il souhaite ouvrir desrelations avec les États-Unis. Nixon, selon les Mémoires de Kissinger, juge l'ouverture prématurée. En, après la participation d'une équipe chinoise aux championnats du monde detennis de table, Mao relance l'invitation. En, Kissinger est envoyé en secret à Pékin pour préparer lavisite officielle du président américain en Chine. Il fait savoir à Zhou Enlai que Nixon envisage de renoncer au soutien traditionnel des États-Unis àTaïwan et de reconnaître laChine communiste avant le si Nixon remporte l'élection présidentielle américaine de 1972. En échange, Kissinger ne demande aucune garantie pour la sécurité de Taïwan, se bornant à dire que« nous espérons beaucoup que la question de Taïwan pourra être résolue de façon pacifique ». Il promet de communiquer à Pékin les informations du renseignement américain sur l'arsenal nucléaire soviétique et les mouvements destroupes soviétiques à lafrontière de la Chine. Il annonce également le prochain retrait destroupes américaines du Vietnam du Sud et, en cas de réélection de Nixon,également celles de Corée du Sud. En échange, il ne demande au régime de Mao ni de cesser son soutien auVietnam du Nord, ni de modérer sa propagande anti-américaine. En, Kissinger fait une deuxième visite à Pékin et achève les préparatifs de la visite de Nixon ; quelques jours plus tard, l'Organisation des Nations unies vote pour retirer à Taïwan (« république de Chine ») son siège permanent auConseil de sécurité et l'attribuer à la Chine communiste, sans que les États-Unis s'y opposent[20]. Le a lieu la seule rencontre personnelle entre Mao et Nixon, en présence de Kissinger et Zhou Enlai : les deux Américains renchérissent de compliments envers Mao, qui leur répond en termes dédaigneux et écarte« tous ces problèmes difficiles » tels que Taïwan, la Corée et le Vietnam. À plusieurs reprises, Mao interrompt Nixon pour l'interroger sur les diplômes de Kissinger ou demander à ce dernier de« placer un mot » mais c'est pour se moquer de Kissinger en parlant des« jolies filles » qu'il invite dans ses voyages[21]. Par la suite, Kissinger tiendra toujours des propos favorables à Mao, affirmant en 1997 que sa vie était« une quête de la vertu égalitaire »[22].
Ayant promis, lors des élections de 1968, une issue rapide au problème de laguerre du Viêt Nam, l'administration américaine doit faire face à une escalade du conflit. Celle-ci est marquée par la décision américaine de bombarder illégalement des positions duViệt Cộng auLaos et auCambodge (opérationMenu). À la suite desaccords de Paris du, jetant les bases du retrait américain du Viêt Nam, il reçoit leprix Nobel de la paix, conjointement avec leVietnamienLê Đức Thọ qui le décline dans une lettre au Comité Nobel car selon lui« […] la paix n'a pas réellement été établie »[23].
Les réactions sont mitigées. Le journal italienLa Stampa écrit que l'attribution de ce prix à Kissinger constitue« un encouragement à ceux qui veulent déclarer la guerre pour mieux la stopper »[24].Françoise Giroud, dans l'hebdomadaireL'Express écrit qu'il s'agit d'un« prix Nobel de l'humour noir ». Plusieurs commentateurs ultérieurs dans le cadre de rétrospectives déclarent que Kissinger reste un récipiendaire très contestable du Nobel[25],[26],[27].
Pendant laguerre israélo-arabe de 1973, alors que Nixon est enlisé dans lescandale du Watergate et ne peut plus présider leConseil de sécurité nationale, Kissinger assure la direction militaire et diplomatique. Dans un premier temps, soucieux de réserver à Washington un rôle de médiateur dans ce conflit, il décide de n'apporter qu'un soutien limité aux Israéliens[28]. Il leur autorise l'achat de munitions américaines, tout en laissant à leur charge l'organisation de la logistique[28]. Mais lorsqueGolda Meir l'avertit qu'au bout de quatre jours, les forces israéliennes ont déjà perdu500 chars et que leur défaite n'est pas exclue, Kissinger décide, malgré l'opposition dusecrétaire à la DéfenseJames Schlesinger, d'envoyer un soutien matériel massif à Israël et organise unpont aérien[28]. Le, les Israéliens renversent la situation en leur faveur et, le 24, l'URSS menace d'intervenir militairement pour empêcher l'encerclement de l'armée égyptienne. Bien que ne souhaitant pas compromettre un rapprochement avec les Soviétiques, Kissinger fait mettre en alerte lesforces nucléaires américaines, pour amener les Soviétiques à négocier[28]. Ceux-ci acceptent, alors que Nixon« dormait d'un profond sommeil », la proposition d'uncessez-le-feu[28]. Alors qu'Israël, désormais en position favorable, souhaite poursuivre sa contre-offensive, Kissinger, soucieux à la fois d'assurer une victoire israélienne et de faciliter des négociations de paix entre ennemis, fait pression sur Golda Meir pour accepter le cessez-le-feu[28]. Ce faisant, en armant les forces israéliennes, puis en leur imposant, après leur avoir donné l'avantage, de stopper leur offensive, Kissinger retrouve une place de médiateur crédible pour les parties en conflits[28].
Richard Nixon et Henry Kissinger accueillant la Première ministre israélienneGolda Meir (à g.) à la Maison Blanche le.
Entre 1974 et 1975, Kissinger, fort de son rôle de négociateur, fait onze voyages au Moyen-Orient et organise quatre sessions de négociation entre Égypte, Syrie et Israël[28]. Il parvient à obtenir des accords de paix israélo-égyptien puis israélo-syrien, mettant dans la balance un retrait des forces israéliennes des territoires occupés d'une part, une reconnaissance arabe d'Israël d'autre part[28]. Ces ambitions se concrétisent pleinement entre l'Égypte et Israël lors desaccords diplomatiques de Camp David en 1978, mais restent inachevés avec la Syrie.
Parallèlement, alors que l'OPEP, solidaire de la coalition arabe, décide unembargo pétrolier contre les États-Unis, Kissinger fait étudier par James Schlesinger un projet d'occupation deschamps pétroliers saoudiens[29].
Henry Kissinger se montre très hostile au président socialiste chilienSalvador Allende. Dès le, lors d’une réunion duConseil de sécurité nationale, il déclare :« Je ne vois pas pourquoi nous devrions rester tranquilles quand un pays devient communiste à cause de l'irresponsabilité de son propre peuple[30]. » Dans son livreLes Crimes de M. Kissinger, le journalisteChristopher Hitchens accuse Kissinger d'avoir pris part aucoup d'État du au Chili dirigé par legénéral Pinochet contre le gouvernement deSalvador Allende. Des éléments déclassifiés montrent que laCIA a soutenu un projet de coup de force en 1970, ce que Kissinger détaille lui-même dans ses mémoires, mais celui-ci affirme que les États-Unis ne fomentaient plus de tels projets en 1973 et qu'ils n'ont joué aucun rôle dans leputsch de 1973. Lacommission Church duSénat des États-Unis, qui a enquêté sur les opérations au Chili, dit dans son rapport n'avoir trouvé aucune preuve d'implication directe des États-Unis[31].
D'origine allemande et toujoursgermanophone, Henry Kissinger garde néanmoins une certaine méfiance à l'égard de son pays et de son continent d'origine où il a souffert, dans son enfance, de la montée destotalitarismes[28].
Il juge avec un certain scepticisme la construction de l'Union européenne, qu'il voit comme une menace pour l'hégémonie américaine[28]. Mais dans le même temps, la facilité avec laquelle l'Europe de l'Ouest s'en remet à l'OTAN pour sa propre sécurité contre la menace soviétique, à une époque où les États-Unis comptent encore de nombreuses bases en Europe, lui inspire un certain mépris[28]. Il juge par conséquent avec admiration le volontarisme dugénéral de Gaulle à faire de la France une nation souveraine capable d'assurer sa propre sécurité[28].
Lorsque éclate lescandale du Watergate, Kissinger est interpellé comme possible complice du système d'espionnage intérieur mis en place par Nixon. Lors d'une conférence de presse àVienne le, il déclare qu'il ne lui sera plus possible de conduire la politique étrangère des États-Unis si sa personnalité et sa crédibilité sont mises en doute. Il reçoit de nombreux témoignages de confiance de sénateurs et représentants, aussi bien républicains que démocrates : les deux camps reconnaissent qu'il n'est pas exactement« Monsieur Propre » mais qu'il n'est pas impliqué dans les méfaits et violations de droits orchestrés par la Maison Blanche. Le, le Sénat rend un rapport déclarant que le rôle de Kissinger dans l'affaire des écoutes n'était pas de nature à l'exclure de la direction des Affaires étrangères[32]. Son adjoint, le diplomateRichard Holbrooke, écrit dansForeign Policy que Kissinger n'était ni« le seul homme propre dans une clique de putois » ni« un membre de la bande parmi d'autres », mais qu'il avait dû accepter un compromis pour pouvoir« jouer un rôle extraordinaire sur la scène mondiale »[33].
Henry Kissinger, Richard Nixon, Gerald Ford et Alexander Haig en réunion à laMaison-Blanche.
À la suite de la démission de Richard Nixon, Henry Kissinger reste à son poste de secrétaire d'État mais quitte celui de conseiller à la sécurité nationale, sous l'autorité du nouveau présidentGerald Ford en 1974.
Kissinger produit un mémorandum important concernant lacroissance démographique et ses effets géopolitiques. Achevé le et adopté en, il conseille des organisations mondiales comme laBanque Mondiale ainsi que les politiques américaines. Cela reste secret jusqu'à 1989[34],[35].
En, Gerald Ford et Henry Kissinger rencontrent le président de l'IndonésieSoeharto. Ils auraient approuvé, à la suite de la déclaration d'allégeance de quatre parties duTimor oriental à l'Indonésie, l'imminente annexion par celle-ci de ce territoire, en vue d'unifier l'île de Timor, dont seule la moitié occidentale est sous souveraineté indonésienne. Au cours des24 années d'occupation indonésienne qui ont pris fin en 1999, entre 102 800 et 183 000 personnes sont mortes. Kissinger a toujours affirmé son ignorance à l'égard de cette invasion, à l'encontre de documents soutenant le contraire[36].
En 1976, Kissinger revient sur la politique de détente avec les régimes « blancs » d'Afrique (établie en 1969). En échange d'un assouplissement des relations avec l’Afrique du Sud sur les questions relatives auSud-Ouest africain/Namibie (ou le gouvernement sud-africain a initié laconférence de la Turnhalle) et à l’apartheid, il se rend àPretoria où il demande àJohn Vorster, le Premier ministre sud-africain, de faire pression surIan Smith, le Premier ministre deRhodésie, afin d’obtenir de lui le retour à la légalité internationale et l’application du principe de majoritéOne man, one vote (« Un homme, un vote ») en Rhodésie. Il obtient gain de cause et, en, Ian Smith cède sur le principe du gouvernement dirigé par la majorité noire, ouvrant ainsi la voie à une solution politique dans le pays[réf. nécessaire].
La victoire du démocrateJimmy Carter aux élections présidentielles de ne lui permet pas de poursuivre les pourparlers en vue d'un règlement négocié (elles seront reprises par son successeurCyrus Vance et déboucheront sur un échec)[réf. nécessaire].
Henry Kissinger quitte son poste de secrétaire d'État en[37],[38].
Henry Kissinger est l'un des hommes-clé de l'élection présidentielle de 1980. Il draine vers le candidat républicain,Ronald Reagan, une part importante de l'intelligentsia américaine au nom dunew leadership (« nouvelle hégémonie ») que les États-Unis doivent retrouver pour contrer l'Union soviétique. Pour cela, il utilise tout son réseau universitaire et celui deslaboratoires d'idées qu'il connait bien[39].
Par la suite, Henry Kissinger joue un rôle relativement mineur dans les gouvernements américains qui suivent (ayant de mauvaises relations avecGeorge H. W. Bush), participant à de nombreux groupes politiques, des commissions, etc. Il dirige la firme de consultantKissinger Associates depuis 1983 ; à ce sujet, il refuse de donner la liste de ses clients ou le montant de ses revenus :« tout ce que je peux vous dire, c'est que mes associés et moi-même refusons tout État étranger comme client et toute activité de lobbying auprès de l'administration américaine »[1]. Il est notamment embauché par la multinationaleWalt Disney pour la conseiller sur ses liens commerciaux avec la Chine[40].
Henry Kissinger exprime régulièrement son point de vue en tant que consultant ou lors de discours, d'articles ou de livres[41].
Il soutient en 1998 l'ancien dictateur chilienAugusto Pinochet à la suite de l'arrestation de celui-ci à Londres. De passage à Paris le, il reçoit la visite de labrigade criminelle, qui lui remet une convocation judiciaire. Alors qu'il devait se présenter au palais de justice comme témoin dans l’affaire de la disparition de cinq Français au Chili, Henry Kissinger, vraisemblablement impliqué dans la création duopérationCondor, quitte précipitamment la France le lendemain[42].
Lors desélections présidentielles américaines de 2008, il déclare queJohn McCain etBarack Obama feraient la même politique étrangère une fois au pouvoir car les États-Unis ont des intérêts que ces deux hommes ne peuvent ignorer[47]. Il conserve une influence sur la politique étrangère de l'administration Obama[48],[49].
En janvier 2023, un an après le début de l'invasion russe de l'Ukraine, Kissinger affiche, auForum économique mondial deDavos, son soutien à l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN[56]. Il déclare :« Avant cette guerre, j'étais opposé à ce que l'Ukraine devienne membre de l'Otan parce que je craignais que cela ne provoque exactement le processus qu'on voit maintenant. Mais maintenant que ce processus a atteint ce niveau, une Ukraine neutre dans ces conditions n'aurait plus de sens. »[56].
Henry Kissinger meurt le dans sa maison deKent (Connecticut) à l’âge de100 ans[66].
La cérémonie funéraire a été organisée et tenue en privé[67].
Lors d'une cérémonie funéraire publique le 26 janvier 2024 auTemple Emanu-El, des protestations de manifestants pro-palestiniens ou anti-israéliens ont eu lieu devant la synagogue et ont été dispersées par la police[68].
Figuremédiatique, influent au sein de l'élite américaine, souvent décrit comme brillant, Henry Kissinger reste un homme extrêmement controversé, accusé decrime de guerre. Sa politique étrangère lui a créé de nombreuses inimitiés, aussi bien du côté de lagauchepacifiste et d'associations humanitaires que de ladroiteanticommuniste[42].
Dans des transcriptions de propos dévoilés par la suite par ledépartement d'État des États-Unis, il déclare devant un responsable de laMaison-Blanche :« Y a-t-il une seule communauté dans le monde qui soit aussi égoïste que les Juifs ? »[69],[70].
Le, Kissinger déclare :« Soyons réalistes : l'émigration desJuifs d'Union soviétique n'est pas dans les objectifs de la politique étrangère américaine. Et s'ils envoient des Juifs dans des chambres à gaz en Union soviétique, ce n’est pas le problème des États-Unis. Peut-être un problème humanitaire »[71],[72],[73],[74]. Depuis le dévoilement de ces enregistrements secrets, il a présenté des excuses, tout en déclarant que son propos avait été sorti de son contexte[71].
Selon l'ancienambassadeur de France aux États-UnisGérard Araud, Henri Kissinger, soucieux de se donner une légitimité en tant que médiateur dans les conflits auMoyen-Orient, a longtemps voulu prouver que son judaïsme ne lui donnait aucun prisme pro-israélien[28]. Cette volonté d'afficher en public une distance entre ses origines juives et son activité de diplomate pourrait en partie expliquer ces déclarations provocantes sur Israël ou ladiaspora juive. À la suite de laguerre du Kippour, fatigué des intransigeances israéliennes et syriennes dans les négociations de paix, Kissinger, assurant la médiation entre ces deux parties, aurait déclaré :« Les Israéliens et les Syriens sont les deux seuls peuples qui se méritent mutuellement »[28].
À propos de l'opérationCondor, organisée par plusieurs dictatures sud-américaines pour éliminer physiquement et torturer leurs opposants politiques jugés« subversifs », la journalisteMarie-Monique Robin écrit :« Ainsi que le prouve l'enquête minutieuse de mon confrère John Dinges, le gouvernement américain, et en particulier son secrétaire d'État Henry Kissinger, est parfaitement informé des méthodes et objectifs de l'opérationCondor, quasiment dès sa création, mais ne bouge pas »[75].
Dirigeant d'une commission bipartisane sur l’Amérique centrale, tout en reconnaissant des massacres« moralement inacceptables » perpétrés par l’armée guatémaltèque, il recommande la reprise de l'aide militaire au Guatemala, ce qu'approuve l’administration Reagan[76].
De passage à Paris le, il reçoit la visite auRitz de labrigade criminelle, qui lui remet une convocation. Invité à comparaître au palais de justice comme témoin dans l’affaire de la disparition de cinq Français au Chili, Henry Kissinger quitte la France le lendemain[78],[42].
Kissinger n'est pas déféré au juge et l'ambassade américaine l'invite à s'adresser au département d’État des États-Unis[78].
Plusieurs essais lui reprochent la première phase dubombardement secret du Cambodge par les États-Unis, de 1969 à 1973, lors de laguerre du Viêt Nam. Selon l'historienBen Kiernan, 50 000 à 150 000 personnes ont été tuées dans ces bombardements[79]. Des convois nord-vietnamiens empruntaient la « piste Ho-Chi-Minh », à travers des forêts cambodgiennes peu peuplées, pour ravitailler le Viêt-Cong au sud Viêt Nam. Les Américains, en guerre contre le Viêt-Cong, bombardaient ces convois lors de leur passage illégal à travers le Cambodge.
Pour la seule année 1973, l’aviation américaine a largué davantage de bombes contre lesKhmers rouges qui assiègent Phnom Penh, sur le centre du Cambodge, que sur le Japon pendant toute la Seconde Guerre mondiale. D'après les services de renseignement américains, ces bombardements massifs et leurs conséquences sur la population cambodgienne ont permis aux Khmers rouges de recruter nombre de nouveaux combattants[80].
En octobre 2023, à la suite de l'attaque du Hamas contre Israël et des réactions de soutien à laPalestine que cela a suscitées enAllemagne, il s'exprime sur la chaîne de télévision allemande Welt TV. Il affirme, concernant la politique migratoire du pays, que« c’était une grave erreur de laisser entrer autant de personnes de culture, de religion et de concepts totalement différents, car cela crée un groupe de pression à l’intérieur de chaque pays[82] ». Ces déclarations sont récupérées par l'extrême droite, notamment enFrance.
Henry Kissinger est d'abord marié à Ann Fleischer, avec qui il a eu deux enfants, Elizabeth et David[83]. Sa fille devient médecin[83] et son fils est cadre supérieur àNBC Universal avant d'être nommé à la tête de Conaco,société de production deConan O'Brien. Henry divorce en 1964. Dix ans plus tard, il se remarie avecNancy Maginnes[84], avec qui il finit ses jours. La communauté juive réagit mal et lui reproche d'avoir épousé unecatholique et surtout de s'être marié un samedi[85], le 30 mars 1974. Ils partageaient leur temps entreNew York etKent dans leConnecticut.
Lettre à Kissinger est une chanson deJulos Beaucarne centrée autour de l'exécution du chanteurVíctor Jara lors ducoup d'État du 11 septembre 1973 au Chili que Kissinger a, selon le chanteur, soutenu[86],[87]. Elle apparaît dans les albumsChanteur indignés,Chandeleur Septante Cinq etAu « théâtre de la ville » janvier septante sept.
Il est l'un des personnages de l'opéraNixon en Chine de John Adams (1985-1987).
1999 :Kissinger Transcripts: The Top Secret Talks With Beijing and Moscow (Henry Kissinger, William Burr)(ISBN1-56584-480-7).
2001 :Does America Need a Foreign Policy?: Toward a Diplomacy for the 21st century(ISBN0-684-85567-4).
2002 :Vietnam: A Personal History of America's Involvement in and Extrication from the Vietnam War(ISBN0-7432-1916-3).
2003 :Crisis: The Anatomy of Two Major Foreign Policy Crises: Based on the Record of Henry Kissinger's Hitherto Secret Telephone Conversations(ISBN0-7432-4910-0).
Les années de renouveau : Le dernier volume des mémoires [« Years of Renewal »],Fayard,, 1047 p.(ISBN978-2-213-60752-8).
La Nouvelle Puissance américaine [« Does America Need a Foreign Policy?: Toward a Diplomacy for the 21st century »],Fayard,, 386 p.(ISBN978-2-213-61546-2).
Sortie de crise : Kippour 1973, Vietnam 1975 [« Crisis: The Anatomy of Two Major Foreign Policy Crises »],Fayard,, 547 p.(ISBN978-2-213-62407-5).
(it)Amedeo Benedetti,Lezioni di politica di Henry Kissinger. Linguaggio, pensiero ed aforismi del più abile politico di fine Novecento, Gênes, Erga, 2005(ISBN88-8163-391-4).
Prix de l'« Homme d’État de l’année » en 2008 : « honore les dirigeants qui soutiennent la paix et la liberté, par la promotion de la tolérance, la dignité humaine et les droits de l’homme ». Prix remis par la fondationAppeal of Conscience ;
↑Charles-Philippe David,Au sein de la Maison-Blanche. De Truman à Obama : la formulation (imprévisible) de la politique étrangère des États-Unis, Presses de Sciences Po, « Académique », 2015, p. 303[1]
↑« Baie des Cochons ou « Opération Mangouste » ? »,Medelu,(lire en ligne)
↑« Was the United States DIRECTLY involved, covertly, in the 1973 coup in Chile? The Committee has found no evidence that it was. » selon le rapport Church.
↑Maurice Lemoine,Les enfants cachés du général Pinochet. Précis de coups d’État modernes et autres tentatives de déstabilisation, Don Quichotte,,p. 116.
(en)Biographie sur le site de lafondation Nobel (le bandeau sur la page comprend plusieurs liens relatifs à la remise du prix, dont un document rédigé par la personne lauréate — leNobel Lecture — qui détaille ses apports)