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| Domicile | Château du Chêne Vert(d) |
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| Conjoint | Maria Louise Eloy(d) |
| Parentèle | Joseph Kowalski (cousin au deuxième degré) |
| Mouvement | |
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Henri Kowalski, né le àParis et mort le àBordeaux, est unpianistevirtuose etcompositeur français[1].
Henri Kowalski est le fils d’un officier polonais, émigré àDinan enBretagne après l’échec de l'Insurrection polonaise de 1830, et de Zenaïde de Wogan[2]. Cette dernière descend par son père d’une lignée irlandaise, installée àDinan depuis leXVIIe siècle, et par sa mère d'une vieille famille bretonne, les Querhoënt. Montrant des dons précoces pour le piano, il est présenté, à l'âge de six ans, àChopin qui le confia à deux de ses élèves, la princesseMarcelina Czartoryska etThomas Tellefsen. Henri Kowalski n'est donc pas un élève de Chopin, comme il est trop souvent écrit, mais l'élève d'élèves de Chopin[2]. On comprend mieux qu'il ait développé, dès sa jeunesse, un véritable culte pour Chopin. Il était aussi fasciné par la virtuosité deLiszt[2].

En1860, à la sortie duconservatoire de Paris où il a été l'élève d'Adolphe Laurent et de Marmontel, il se lance dans une carrière deconcertiste, d'abord en France puis enEurope[2]. En 1869, il franchit, avec le violonistePablo de Sarasate, pour la première fois l'Atlantique pour unetournée auxÉtats-Unis et auCanada où il est acclamé. Il y reviendra à quatre reprises : en 1876, comme soliste de la saison d'été dirigée àNew York parOffenbach, en 1880 alors qu'il fait route vers l'Australie, en 1903 et en 1907-1909. De son premier voyage (1869-1870) en Amérique, il a laissé un livre de souvenirs mais aussi de remarques critiques,À travers l’Amérique, impressions d’un musicien, qui fourmille d’indications sur la vie culturelle, les paysages, les mœurs locales et ses propres concerts[2]. En 1880, il gagne l'Australie où il siège en tant que représentant de la France au jury de la commission Beaux-Arts de l'Exposition internationale de Melbourne. Pendant ce séjour àMelbourne (1880-1881), il donne de nombreux récitals qui soulèvent l'enthousiasme et lui valent d'emblée une réputation de virtuose mais aussi de musicien généreux qui lui attire la sympathie de nombreux artistes. Il se lie même d'amitié avec le grand écrivainMarcus Clarke avec qui il entreprend d'écrire unopéra-comique,Queen Venus, connu finalement sous le titre deMoustique[2]. En mars 1881, il gagneSydney pour une série de récitals et réussit à faire représenter (version partielle) l'opéra qu'il vient d'achever,Vercingétorix, sans réussir à convaincre. La véritable création de cet ouvrage, en version de concert, aura lieu le 24 septembre 1881 à Melbourne, après une préparation soignée, à la satisfaction générale. Son second séjour en Australie, cette fois à Sydney, sera beaucoup plus long (1885-1896) et lui permettra aussi de faire des tournées enNouvelle-Zélande et enTasmanie. Henri Kowalski a joué un rôle important dans le développement de la vie musicale à Sydney : concerts symphoniques (il prend la direction de la Société Philharmonique dès 1885), séances de musique de chambre, enseignement du piano (il a formé de nombreux pianistes australiens), diffusion de la musique française, conférences[2]. Il noue avec les peintres des relations privilégiées, notamment avec l'impressionnisteTom Roberts[3].
Entre ses voyages, il revient àParis et donne de nombreux concerts de bienfaisance et leçons de piano, mais son véritable ancrage reste, sur les bords de laRance, le château de Vaux-Carheil (connu sous le nom de château du Chêne-vert), àPlouër-sur-Rance, près de Dinan[2]. Cette propriété appartenait à son épouse, Maria Louise Eloy dite La Ferraris (1844-1922), une comédienne qui fit les beaux soirs des théâtres parisiens (Variétés,Palais-Royal,Odéon) dans les années 1860 et était dotée d'une jolie voix. Elle avait reçu ce château, en cadeau, du prince diplomate russeAlexandre Basilewsky (it) dont elle avait été la maîtresse, en1866, soit trois ans avant son mariage avec Henri Kowalski[1].

Lorsqu’il rentre enFrance en 1896 après avoir séjourné douze ans en Australie, il reprend son activité de concertiste tant en France qu'en Europe (Belgique,Suisse,Angleterre) et fréquente les salons parisiens.Marcel Proust qui le connut par l'éditeurJulien Hamelle et dans les dîners de laComtesse de Loynes, s'en inspira pour créer le personnage de Viradobetski, un sculpteur polonais, ami deMadame Verdurin, dansÀ la recherche du temps perdu[4]. Paris prépare déjà activement l'Exposition universelle de 1900 etHugo d'Alesi qui a choisi le voyage en mer comme sujet de sonMaréorama, sur le Champ de Mars, commande à Henri Kowalski, le grand voyageur par excellence, une musique spécifique :Illusion d'un voyage en mer, symphonie descriptive en quatre parties (En vue de Sousse,Naples,Venise,En vue de Constantinople)[2]. Suggestive voire descriptive, cette musique installe des atmosphères en concordance avec les effets spéciaux prévus par Hugo d'Alesi : l'ensemble remporte un vif succès. Parallèlement, Henri Kowalski multiplie les initiatives pour répondre aux différentes sollicitations dont il est l'objet à Dinan (récitals, parfois avec conférence préalable sur Chopin ou la musique française, directions de concerts) et sur laCôte d'Émeraude (casinos deSaint-Malo,Paramé etDinard). Il entretient aussi une relation privilégiée avec le collège des Cordeliers de Dinan. Pour autant, Henri Kowalski n'a pas renoncé aux voyages outre-Atlantique : Il est invité à New York en 1903 puis de 1907 à 1909 il fait une tournée aux États-Unis et au Canada où il prolonge son séjour[2]. Il est en partance pourNew York, début juillet1916, pour une série de concerts organisée parIgnacy Paderewski en soutien à l'armée polonaise, lorsqu'il faut le débarquer d'urgence àPauillac et le transporter à Bordeaux où il meurt le[2]. Il est enterré aucimetière Montmartre (25e division, avenue Montmorency, ligne 6 tombe 35)[5].

Henri Kowalski a accordé, dans sesrécitals, une place privilégiée à Chopin à qui il voue une admiration sans borne. À son répertoire une vingtaine de ses œuvres : deuxscherzos (nos 1 et 2), laBerceuse (op. 57), quatrevalses (mi bémol majeurop. 18,la mineurop. 34no 2,ut dièse mineur op. 64/2,ré bémol majeurop. 70no 3), troisballades (sol mineurop. 23,la bémol majeurop. 47,fa dièse majeurop. 60), quatrenocturnes (mi bémol majeurop. 9no 2,fa dièse majeurop. 15no 2,fa dièse mineurop. 48no 2,fa mineurop. 55no 1),Impromptu enla bémol majeurop. 29,Fantaisie-Impromptu endo dièse mineurop. 66,Marche funèbre (Sonateop. 35),Mazurkano 1, trois polonaises (Polonaise enmi bémol majeurop. 22 diteGrande Polonaise, couplée ou non avec l'Andante Spianato,Polonaise enla majeurop. 40no 1,Polonaise enla bémol majeurop. 53 diteHéroïque). Ses interprétations de Chopin soulèvent, quel que soit le pays, des applaudissements enthousiastes. Les critiques parlent de révélation, d'incarnation du vrai style de Chopin. On vante son art de faire chanter le piano qui lui permet d'être à l'aise pour interpréter lecantabile de Chopin qui doit tant aubel canto.
Henri Kowalski inscrit aussi régulièrement dans ses programmesBeethoven, Liszt,Mendelssohn,Weber,Schubert,Schumann,Brahms,Gounod,Grieg, Rubinstein, Wienawski,Tchaïkovski, parfoisMozart,Haydn et mêmeRameau. Des choix pertinents qui mettent l'accent sur l'évolution des formes et du langage. On admire bien sûr sa maîtrise technique, sa virtuosité mais c'est la fougue et l'éclat de son jeu ou encore la manière dont il fait parler son piano qui déchaînent l'enthousiasme. Henri Kowalski déborde de charisme sur la scène comme dans la vie.

Henri Kowalski ne cesse d'écrire sa vie durant : l'ensemble de son corpus s'élève à environ 300 œuvres[2]. C'est un pianiste-compositeur dans la plus puretradition romantique qui écrit avant tout pour son instrument (173 œuvres connues). Ses pièces reflètent, pour partie, une double influence : celle de Chopin notamment dans les troisNocturnes (op. 8, 27, 89 bis), laPolonaise de concert (op. 10), lesTrois Mazurkas caractéristiques (op. 11) ou laParaphrase de Don Juan (op. 15), celle de Liszt dans laDanse des dryades (op. 16), laTzigane-polka (op. 16), laMagyar-March (op. 86) ou laMarche hongroise (op. 13), généralement placée en fin de concert en raison de son éclatante virtuosité et des tonnerres d'applaudissements qu'elle déclenchait. Henri Kowalski excelle dans la pièce de genre, parfois descriptive, car il est à l'aise dans le petit format et a le sens de la mélodie, ce qui peut aller de pair avec une grande délicatesse (Barcarolle, op. 20). Il aime faire chanter son piano et camper, avec une musique en trompe-l'oreille, des atmosphères particulières. Certaines pages sont une évocation de ses voyages (quelquefois rêvés), tellesLe Niagara, souvenir (op. 29)La Cubaine (op. 30),Souvenir de Calcutta (op. 80),Sérénade indienne (op. 38),Sous les tropiques, berceuse (op. 47),The Belles of Melbourne, valse datant de son premier séjour enAustralie (1880-1882),Nuit australienne (op. 76) ou encorePrès du Nil (op. 98). Il est particulièrement à l'aise pour écrire des valses (Les Roses de Bohème, op. 14), et autres danses de salon. Les deuxFantaisies pour piano (op. 52 et op. 103) ont été créées en Australie sous le titreConcerto n°1 etn°2 : il en existe deux versions, l'une pour piano avec orchestre, l'autre pour piano seul. Il a encore composé, selon le goût de l'époque, de nombreuses fantaisies et paraphrases pour piano. Autant de pages qui lui ont assuré un vrai succès populaire et d'édition puisque plusieurs de ses œuvres ont été vendues à plus d'un million d'exemplaires.

Henri Kowalski n'a composé, pour les autres instruments, que quelques rares pages parmi lesquelles il faut distinguer l'Élégie pour violoncelle et piano (1902) sans oublierTristesse, transcription d'une mélodie du même nom : leur écriture est, jusque dans sa simplicité, d'une rare élégance très touchante. Il a, par contre, écrit de nombreuses (71)mélodies pour chant et piano, tant en français qu'en anglais, pour partie inédites, un genre qu'il affectionne particulièrement, en lien, peut-être, avec l'intérêt qu'il porte à Gounod et plus largement au théâtre lyrique.
Entre 1877 et 1913, il compose huit ouvrages lyriques : deux grandsopéras,Gilles de Bretagne (1877) etVercingétorix (1880), quatreopéras-comiques,Moustique,livret de Marcus Clarke (1881-1882),Le Chevalier Cupid,Pétrarque etLes Suffragettes (Londres, 1911, partition perdue) et deux petits ouvrages sur le thème de la Bretagne, l'un intituléNuits d'Armor et l'autre, sans titre, reprenant le sujet dePêcheur d'Islande.
Henri Kowalski laisse aussi des œuvres pour voix et ensemble instrumental ou orchestre comme en témoignent laCantate de Duguesclin (1902),Le Triomphe de la mer, poème lyrique (1910) etLa Leçon de vivre pour solistes, chœur et orchestre (1913). Une vingtaine decompositions religieuses font partie de son catalogue dont deux messes, unPie Jesu, unHymne à Saint Yves (1898), leCantique à Notre-Dame Guesclin (1902), l'oratorioFuture Life (1890) et les sixHymnes Magloriennes (1899).
La Bibliothèque municipale de Dinan conserve le Fonds Henri-Kowalski, un ensemble unique qui fait référence car il est constitué de la quasi intégralité des œuvres (partitions et manuscrits) du compositeur[7]. Ce fonds, propriété de l'artiste jusqu'à sa mort, a été acquis par la Société des amis du musée et de la bibliothèque de Dinan. Cette association,Le Pays de Dinan, a édité un livre (2014[7]) et un CD (2016[8]) consacrés à ce pianiste et compositeur.
Depuis2023, un concours international de piano qui oppose de jeunes virtuoses porte son nomHenri Kowalski. Il est organisé à Dinan par la société des amis du musée et de la bibliothèque (Samb)[9].