En 1974, il succède à Willy Brandt commechancelier fédéral et occupe ce poste jusqu'au départ deslibéraux de sacoalition, en 1982. Avec plus de huit ans passés à la tête du gouvernement, il détient le record de longévité des chanceliers issus du SPD.
Helmut Schmidt naît àHambourg. Il est le fils de deux enseignants. Le père d'Helmut Schmidt est le fils naturel d'un homme d'affaires juif allemand. Cette information est tenue secrète dans la famille[1],[2] jusqu'à ce que cela soit confirmé publiquement par Helmut Schmidt en 1984, après que l'ancien président françaisValéry Giscard d'Estaing, apparemment avec l'accord de Schmidt, l'eût révélé à des journalistes. Schmidt est de religion luthérienne mais non pratiquant[réf. souhaitée].
Il étudie au lycée Lichtwark de cette ville et en sort bachelier en 1937. Il poursuit ensuite ses études à l'université de Hambourg, en économie et en sciences politiques. Il est appelé au service militaire et commence par servir sur une batterie anti-aérienne àVegesack, près deBrême, durant laSeconde Guerre mondiale. Après avoir brièvement combattu sur lefront de l'Est, il retourne en Allemagne en1942 où il est affecté auministère de l'Aviation du Reich comme conseiller.
Cette même année, le, il épouse son amour de jeunesse,Hannelore Glaser, surnommée « Loki » (1919-2010), avec qui il aura deux enfants : Helmut Walter (1944-1945), mort d'une méningite, et Suzanne (née en 1947). Vers la fin de la guerre, à partir dedécembre 1944, il sert, avec le grade d'Oberleutnant, dans l'artillerie sur lefront de l'Ouest. Il est fait prisonnier par les Britanniques enavril 1945 dans lalande de Lunebourg et reste prisonnier de guerre jusqu'en. Durant la guerre, il a été décoré de lacroix de fer[3].
Schmidt rejoint le Parti social démocrate (SPD) en 1946 et est, de 1947 à 1948, le chef de l'Union socialiste allemande des étudiants (SDS), syndicat étudiant proche du SPD.
Après l'université, il travaille pour le gouvernement de la ville-Etat deHambourg, au département de la Politique économique. Débutant en 1952, sousKarl Schiller, il devient l'un des responsables du département de l'Économie et des Transports.
Helmut Schmidt et Willy Brandt à un congrès du SPD (1973).
Élu député de Hambourg auBundestag en 1953, où il siège jusqu'en 1987, il est nommé en 1962 sénateur à l'Intérieur de la ville-État. En 1967, il est porté à la présidence du groupe parlementaire social-démocrate. De 1969 à 1972, il exerce les fonctions deministre fédéral de la Défense dans legouvernement de Willy Brandt et est ministre del'Économie etdes Finances de 1972 à 1974.
Le,Willy Brandt démissionne avec effet immédiat de la chancellerie après que les services secrets ont découvert que son très proche conseillerGünter Guillaume était un agent de laStasi. Le vice-chancelier libéralWalter Scheel exerce alors l'intérim de la direction du gouvernement fédéral. LeSPD, toujours présidé par Brandt, choisit Schmidt pour prendre la succession. Lors duvote au Bundestag le, Helmut Schmidt remporte 267 voix pour et 225 voix contre. Il est alors le cinquième chancelier fédéral à recevoir l'investiture du Bundestag depuis.
Il forme aussitôt sonpremier cabinet dans lequel le ministre fédéral de l'IntérieurHans-Dietrich Genscher prend la suite de Scheel, élu président fédéral, aux fonctions de vice-chancelier et ministre fédéral des Affaires étrangères. Au titre des sociaux-démocrates, Schmidt nomme cinq nouveaux ministres fédéraux et se sépare d'Egon Bahr,éminence grise de son prédécesseur. Il le rappellera moins de deux mois plus tard.
Du keynésianisme au combat contre le choc pétrolier
Keynésien à l'origine, il adopte dès 1972, alors en tant que ministre des Finances, une politique économique plus libérale[4]. Elu Chancelier en mai 1974 à la faveur de la chute deWilly Brandt, il doit lutter contre la très forte inflation causée par lepremier choc pétrolier de la fin 1973, en lien avec l’allié du SPD depuis 1969 dans la coalition au pouvoir, leFDP, qui préconise une approchemonétariste. Face aux réticences de l'aile gauche du SPD et de laJusos[5], il lance un slogan qui sera plus tard appelé en France le « théorème de Schmidt »[6] au moment duplan Barre de la fin 1976 :« les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain ».
Helmut Schmidt et Valéry Giscard d'Estaing àBonn (1977).
Helmut Schmidt a une bonne entente personnelle avecValéry Giscard d'Estaing, leprésident français, de huit ans son cadet mais gouvernant à peu près durant la même période que lui (1974-1981). Il poursuit lapolitique d'apaisement à l'Est (Ostpolitik) de Brandt, s'opposant à lapolitique plus agressive poursuivie parReagan (en 1989, il critiquera dans son livreMen and powers: a political retrospective la politique des « discours télévisés, des grands gestes » et « des petits pas » par laquelle lesÉtats-Unis espéraient mettre fin à la partition de l'Europeentérinée à Yalta). Il signe ainsi lesaccords d'Helsinki en1975, et demeure au pouvoir après les élections législatives de 1976, s'appuyant sur une coalition avec leFDP.
En il obtient laconfiance du Parlement, mais le la coalition éclate : quatre ministres duParti libéral-démocrate (FDP), menés par le ministre des Affaires étrangèresHans-Dietrich Genscher et celui de l'EconomieOtto Graf Lambsdorff, quittent le gouvernement, choisissant un renversement d'alliance en apportant leur soutien auchrétien-démocrateHelmut Kohl. Schmidt cumule alors la fonction de chancelier et le portefeuille des Affaires étrangères, jusqu'à ce qu'unemotion le renverse le, Kohl devenant le nouveau chancelier : c'est la première fois qu'un chancelier est renversé de la sorte enRFA.
À partir des années 1980 : journaliste et écrivain
Après sa carrière politique, Helmut Schmidt travaille comme écrivain et journaliste. Il continue de s'intéresser à la vie sociale et politique de l'Allemagne[9]. Il est chroniqueur à partir de 1983 et un des responsables de l'hebdomadaire de centre-gaucheDie Zeit et écrit une trentaine d'ouvrages rencontrant souvent le succès[9], comme son dernier en 2011,Religion in der Verantwortung (« L'exercice responsable de la religion »), un essai sur la place de la religion dans une société mondialisée[9]. La même année, il publie un livre d'entretiens avecPeer Steinbrück, qu'il appuie comme candidat du SPD à la chancellerie[10]. En 2010, alors âgé de 91 ans, il était considéré par les trois quarts des Allemands comme une autorité morale, loin devant d'autres personnalités allemandes[9].
Sa femme Loki, qu'il avait épousée en 1942, décède en. Deux mille personnes, dont la chancelièreAngela Merkel, assistent à ses obsèques à Hambourg[9]. En, Helmut Schmidt déclare avoir une nouvelle compagne : Ruth Loah, 78 ans, une de ses plus anciennes collaboratrices[11].
Dans une interview à la chaîne publiqueARD, le, il déclare que si l'Allemagne veut jouer un rôle de leader européen, elle a un handicap majeur, son histoire.« Auschwitz et le meurtre de six millions de Juifs tout comme la guerre mondiale de Hitler sont des événements qui sont ancrés dans l'inconscient des peuples européens, si bien qu'un rôle de leader de l'Allemagne en Europe est exclu, et ce sera le cas encore pendant longtemps[12] ».
Il s'exprime à plusieurs reprises au sujet dumulticulturalisme. En 2004, il décrit la société multiculturelle comme« une illusion d'intellectuels[13] ». Il avance que le concept de multiculturalisme serait difficile à concilier avec une société démocratique. Pour cette raison, il considère comme une erreur que la République fédérale ait fait venir des travailleurs immigrés d'autres cultures au début des années 1960[14]. Dans un entretien commun avecGerhard Schröder dans le journalDer Spiegel en 2013, il exprime un fort scepticisme quant aux perspectives d'intégration des immigrésmusulmans dans la société allemande[15].