Lehammam (enarabe :حمّام soit « bain d'eau chaude »), appelébain maure (en référence à l'Espagne musulmane d'Al-Andalus) et prononcéammam par lesOccidentaux, est un bain de vapeur humide puisant ses origines dans lesthermes romains, il a par la suite été adapté aux us et coutumes des différents territoires au sein desquels il a été intégré[1]. Dans sa forme actuelle, le hammam s'est développé dans l'Empire ottoman, de l’Afrique du Nord jusqu'auMoyen-Orient (comme enSyrie) à la faveur de l'expansion de l'islam. Le hammam désigne aussi l'établissement, le bâtiment dans lequel s'organise ce bain. L'architecture des hammams varie selon l'aire géographique et les époques.
Aujourd'hui, s'ils ont disparu totalement de certains pays comme l'Égypte (jadis réputée pour ses 365 hammams,Le Caire n'en compte plus que six), avec le développement dessalles de bains privées, la pratique demeure encore vivace en de nombreux endroits et tend à se développer en Europe.
Tradition bien ancrée, la fréquentation du hammam est un fait avéré et constant en Algérie depuis plus de 2000 ans[2],[3],[4], tandis que son déclin est une donnée réelle dans des pays comme l’Égypte ou laSyrie.
Des observations et des enquêtes de terrain ont permis de mettre en évidence les espaces qui composent ce lieu de purification, d’hygiène, de liberté et d’échange de parole. Différentes catégories de la population sont attachées au bain.
Le rôlesocioculturel du hammam en Algérie se matérialise aussi bien via les possibilités d'échanges (amicaux, familiaux, professionnels ou culturels), qu'il offre qu'à travers le rôle de "tiers-lieu" qu'il joue.
ÀConstantine (Algérie), à travers un cas d’étude, les différents pratiques et rituels du hammam sont étudiés non sans prendre en charge les changements dans le rapport ou le lien qui rattache la société à ce lieu.
Il existe en Algérie un très grand nombre de stations thermales, parmi les plus emblématiques du pays (du fait de leur taille, ancienneté ou fréquentations) :
Hammam Essalihine par exemple (Aquae Flavianae à l'époque romaine ; Fontaine-Chaude à l'époque coloniale), est un bain romain qui existe depuis 2 000 ans. Il est situé dans la commune d'El Hamma, site touristique et thérapeutique, à 7 km deKhenchela (dans lawilaya de Khenchela). Son exploitation remonte à l'époque romaine[7],[8], les traces les plus anciennes le font remonter à 69EC[2].
Les hammams algériens sont riches de leur ancienneté, leur hétérogénéité (du fait des identités régionales algériennes très fortes mais également des apports culturelsromains,byzantins,amazigh etalgérien) et leur rôle social ancré dans la culture et les coutumes locales.
AuMaroc, le hammam est un phénomène social et toutes les catégories de la société fréquentent ce lieu public. Il se compose souvent de trois ou quatre chambres. Comme dans la plupart des hammams (au Maroc comme ailleurs), la première des chambes est à température ambiante, la deuxième un peu plus chaude, et ainsi de suite.
Les ruines du plus ancien hammam islamique connu au Maroc, datant de la fin duVIIIe siècle, se trouvent àVolubilis[10]. Les bains publics au Maroc sont ancrés dans une histoire socioculturelle qui a joué un rôle important dans les villes marocaines tant urbaines que rurales. Ces espaces publics de nettoyage se sont rapidement développés à mesure que les cultures islamiques se sont assimilées aux techniques de baignade largement utilisées pendant les périodes romaine et byzantine.
EnFrance, le hammam est introduit plus récemment en raison de l'immigration magrébine après la seconde guerre mondiale, il ne se compose généralement que d'une seule salle, et la température varie entre40°C et50°C[11],[12],[13].
La popularité du Hammam tire son origine des traditions romaines mais a gagné en popularité à la faveur du développement de l'Islam enAfrique du Nord et auMoyen-Orient via la tradition islamique des ablutions : la propreté est vectrice de rapprochement avec Dieu[21], de ce fait, il existe dans certains pays à majorité musulmane (notamment enAlgérie) une forte proximité (avérée et étudiée) urbaine entre mosquée et hammam[21]. Outre ce lien, la forte présence de hammams en Algérie est également liées à au plaisirs et impératifs médicaux qui poussaient algériens, byzantins et romains à s'y baigner[21].
Selon les différentsconsensus religieux, l'usage des hammams est toléré à condition de respecter certaines règles :
Comme les thermes romains, un hammam est constitué d'au moins quatre pièces : al-maslakh, l'entrée et le vestiaire ;bārid, la première pièce de baignade, non chauffée ;wastānī, la deuxième salle de baignade, modérément chauffée ; etḥarāra, la troisième pièce de baignade, complètement chauffée.
L'action principale du hammam est une importantevasodilatation (voir la page pour plus de détails sur les effets), induisant unerelaxation très efficace[25].
Le hammam est très recommandé après une activité musculaire. Il procure une relaxation intense qui va détendre les muscles, soulager (voire éviter) lescourbatures et douleurs ligamentaires. Le bénéfice en termes derécupération le rend recommandable à l'entraînement des sportifs de haut niveau[25].
Éviter d'y aller en phase dedigestion : il est recommandé d'attendre trois heures après un repas copieux avant de se rendre dans un hammam[25].
Éviter de s'être rasé le jour même[25]: la peau irritée par le rasage peut démanger, la plupart des hammams diffusant des vapeurs depin et d'eucalyptus aux propriétés urticantes.
Le hammam induisant une baisse de la tension artérielle est évidemment déconseillé aux personnes souffrant d'hypotension artérielle. (Pour les mêmes raisons, il est absolument déconseillé d'y aller sous l'empire de l'alcool).
Traditionnellement, les masseurs des hammams, appeléstellak en turc, aidaient les clients à se laver en les frottant et les savonnant[26],[27],[28].
Ils étaient recrutés parmi les rangs de non-musulmans de l'empire turc, à savoir les Grecs, Arméniens, Albanais, Bulgares, Roumains et autres.
Au milieu duXVIIIe siècle, les soldats haut gradés de l'armée ottomane avaient souvent untellak comme amant. Quand les hommes d'un autre régiment enlevaient ce dernier et le passaient au commandant, une bataille de plusieurs jours entre les deux régiments pouvait s'ensuivre, laquelle se terminait seulement quand le sultan ordonnait la pendaison dutellak[29][source insuffisante].
Après la défaite et le démembrement de l'Empire ottoman, lorsque la république de Turquie s'occidentalisa, les garçons tellak perdirent leur rôle sexuel. De nos jours, le rôle dutellak s'en tient à des formes plus prosaïques, telles que les massages.
Au Maroc, le masseur (personne aidante pour l'exfoliation, le remplissage des seaux, etc.) dans les hammams pour hommes est appelé "Kessal" et la masseuse dans les hammams pour femmes est appelée "Tiyaba".
Les hammams se divisent en plusieurs lieux distincts aux objectifs et utilités diverses, leur structure reste sensiblement identique d'un pays à l'autre[21] :
LaSkiffa : sorte depatio qui marque la séparation entre l'espace public et le hammam.
L'Ouest ed-dar ouDekkana ouMadjless : Espace d'accueil, de repos, qui peut faire office devestiaire.
Sedda : Espace intermédiaire où les convives peuvent dormir le soir sur des matelas et où, la journée, sont entreposés différents objets
Bit el Berda : La chambre tiède intermédiaire, où les usagers peuvent s'habituer à la chaleur.
Bit es-skhoun : La chambre chaude, le centre du hammam.
Sorra : Littéralementle nombril, les usagers peuvent s'y fairemasser.
Bit el-bnat : Littéralement :la chambre des jeunes filles, il s'agit d'un espace légèrement isolé du reste du hammam, où les jeunes filles et femmespubères se retrouvent à l'abri. Bien que les Hammams dans les pays musulmans ne soient pas mixtes, il existe au sein des hammams une relative division géographique : les filles et les mères lorsque les enfants atteignent un certain âge, ne fréquentent pas les mêmes lieux. Cette séparation est fruit du principe deNiya (terme intraduisible en français qui renvoi à l'intention demodestie, depudeur, dechasteté et d'humilité face aux ainées) et deHaya (pudeur)[21].
- Lieu desocialisation : certains Hammams (notamment de l'est Algérien), permettent également de se restaurer, dormir, discuter (dans des cadres divers : familiaux, professionnels, ou amicaux). Les hammams y sont également utilisés comme lieux d'échange informel (entre deux individus qui ne devraient supposément pas se voir). Certains Hammams (notamment chez les turcs), permettent de déguster des cafés ou des sorbets ainsi que de fumer le narguilé ou le tchubuk, une longue pipe[30].
- Liencommunautaire : Dans certains pays (notamment enAlgérie et enTunisie) les hammams sont également utilisés comme des points de rendez-vous pour les communautés en dehors de leur territoire d'origine : leschaouis se retrouvent dans certains hammams connus des membres de lacommunauté[21].
- Lieu decommerce : en Algérie, dans certains hammams, les femmes peuvent s'adonner à la vente d'objets (robes, bijoux, teintures, draps...) en différé (les mesures d'hygiène ne leur permettant pas d'apporter avec elles ces objets) à d'autres femmes[21].
- Lieu d'entremise : les femmes comme les hommes dans les hammams peuvent échanger avec des pères ou mères de familles (voire avec le ou la future promis(e)) afin de permettre le mariage de leurs enfants dans un contexte communautaire et local (à l'image d'unmariage, unmarché, unefête devillage ou dequartier...)[21],[31].
Avec l'apparition, le développement et démocratisation des douches individuelles dans la plupart des pays musulmans, l'utilisation régulière des hammams diminue significativement. Cependant, l'importance culturelle et sociale de ce type d'aménités semble les protéger de la disparition notamment en Algérie et - dans une moindre mesure - au Maroc[21].
↑"[Flaubert,] "Be informed, furthermore, that all of the bath-boys are bardashes [male homosexuals]." Ehud R.Toledano,State and Society in Mid-Nineteenth-Century Egypt, Cambridge University Press,, 336 p.(ISBN978-0-521-53453-6,lire en ligne),p. 242
↑Véronique Traverso et Fadoua Charif, « Points de vue divergents sur le hammam :étude d'une réunion de participation entre les experts et les habitants. »,Hal Sciences,(lire en ligne)