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Cet article traite de la guerre de 1808-1814, appelée égalementGuerre d’Espagne. Pour la guerre d’Espagne de 1936-1939, voir l’articleGuerre d'Espagne. Pour les autres homonymes, voirGuerre d'Espagne (homonymie).
Ce conflit porte différents noms, notamment : « guerre d’Espagne » ou encore « campagne d’Espagne » enFrance, « guerre d’indépendance » ou « guerre du Français » enEspagne, « guerre péninsulaire » auPortugal et dans lemonde anglo-saxon.
La guerre commença en 1808 lorsqueMadrid sesouleva contre l’armée française occupant la capitale espagnole. L’insurrection se généralisa à tout le pays après queNapoléon eut obtenu l’abdication duroi d’Espagne au profit du frère de l’empereur,Joseph. L’armée française se heurta à uneguérilla puis à l’armée britannique venue aider lePortugal, également occupé par les troupes de Napoléon. En 1813, les soldats de l’empereur durent refluer en deçà desPyrénées ; l’invasion de la France par les Espagnols, Britanniques et Portugais commandés parWellington, devenait imminente.
En revanche lePortugal est depuis des siècles un allié fidèle de l'Angleterre, qui reste en guerre contre la France. Il en résulte entre l'Espagne et le Portugal laguerre des Oranges qui se conclut le par letraité de Badajoz.
En 1805, les flottes conjointes française et espagnole subissent ladéfaite de Trafalgar face à la flotte britannique de l'amiral Nelson.
La France et l'Espagne se tournent alors contre le Portugal, l'Espagne cherchant des compensations territoriales alors que les communications avec l'empire colonial sont pratiquement coupées, tandis que Napoléon veut imposer à la monarchie portugaise de respecter leblocus continental et de fermer ses ports aux navires anglais.
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En 1807, Napoléon veut envoyer des troupes pour soumettre lePortugal, sans doute aussi pour s'emparer de la flotte portugaise[2],[3].
Par letraité de Fontainebleau (27 octobre 1807), le roi d'EspagneCharles IV autorise les troupes françaises à traverser son pays. Un corps expéditionnaire commandé par le généralJunot est envoyé pour la premièreinvasion du Portugal.
Le coup d'État de l'infant Ferdinand (mars 1808) et la conférence de Bayonne (avril-mai 1808)
Mais Napoléon commence aussi à intervenir dans les affaires espagnoles. Sous prétexte d’envoyer des renforts àJunot, il fait entrer une armée en Espagne à partir du mois de novembre 1807, en violation de la convention de Fontainebleau du 27 octobre. Le commandement de cette armée est confié àMurat le 20 février 1808.
Un coup d’État fomenté par l’infantFerdinand renverse alors Charles IV et Ferdinand prend le pouvoir sous le nom de Ferdinand VII (mars 1808). Charles IV en appelle à l’arbitrage de Napoléon, qui convoque le père et le fils àBayonne pour une conférence (avril–mai1808). Les troupes de Murat sont envoyées à Madrid.
Constatant la situation difficile de la monarchie espagnole, qui est aux mains d'une branche desBourbons, l’empereur envisage d'en profiter pour prendre le contrôle du pays. Il y est poussé par ses conseillers, comme le ministreChampagny qui écrit de l'Espagne :« il est nécessaire qu’une main ferme vienne rétablir l’ordre dans son administration et prévienne la ruine vers laquelle elle marche à grands pas »[4].
Le soulèvement de Madrid (2 et 3 mai 1808) et l'avènement de Joseph Bonaparte
Habitué à la docilité des Italiens duroyaume d'Italie (créé en 1805) et au soutien très large des Polonais duduché de Varsovie (créé en 1807), Napoléon pense à tort que les francophiles espagnols (afrancesados) sont en majorité dans le pays[5].
À Madrid, une rumeur court selon laquelle la famille royale espagnole est retenue en otage à Bayonne. Le, appréhendant l’enlèvement de l’infant par la France, la population de Madrid se soulève contre les troupes françaises. La rébellion est écrasée par Murat (voir le tableau deGoya,Tres de mayo).
Napoléon croit alors pouvoir atteindre son objectif : il oblige les deux rois en conflit à abdiquer puis offre la couronne à son frèreJoseph.
L’Empire français s’engage en fait dans une guerre qui va user ses forces pendant toute la fin du règne de Napoléon, jusqu'à ce qu'il soit vaincu en 1814 après ledésastre de Russie (1812), deuxième erreur majeure de Napoléon.
Le guet-apens deBayonne déclencha l’embrasement de l’Espagne. Malgré sa rapide répression, lesoulèvement deMadrid inspira d’autres villes du pays :Carthagène,León,Santiago,Séville,Lérida etSaragosse. L’armée française était partout attaquée. Le, le généralPierre Dupont de l'Étang et ses 20 000 hommes furent vaincus près de la petite ville andalouse deBailén. Ce fut la première défaite retentissante de l’armée impériale en Europe continentale. En soi la défaite ne rendait pas la situation militaire des Français catastrophique, mais elle eut un énorme impact psychologique pour leurs ennemis : les soldats deNapoléon pouvaient être battus.
Joseph, roi d'Espagne.
Deux jours plus tard, malgré cet échec,Joseph Bonaparte, le nouveau roi d’Espagne, parvint à entrer àMadrid. Mais il ne put y rester longtemps. De son côté, le généralJunot dut évacuer le Portugal face à l’offensive des Britanniques du futurduc de Wellington. La dégradation de la situation inquiétaitNapoléon.L’empereur se rendit en personne en Espagne, à la tête de 80 000 soldats qu’il avait tirés d’Allemagne. Il ne resta que quelques mois ( –) en Espagne mais son intervention assura la reprise en main des villes par les Français.Madrid, menacé d’un assaut, ouvrit ses portes au conquérant. Le, dans une proclamation qu’il adressa aux habitants, il menaça de traiter l’Espagne en pays conquis, si elle persistait à ne pas reconnaître Joseph Napoléon pour roi[6]. À regret, les Madrilènes virent une nouvelle fois le frère de l’empereur s’installer au palais royal.
Malgré la brillante campagne napoléonienne et les réformes mises en place (abolition des droits féodaux et de l’Inquisition), le pays était loin d’être soumis. Le contrôle des campagnes restait difficile. Les prêtres espagnols appelaient leurs fidèles à la croisade contre les Français. Les difficultés de l’occupant résidaient surtout dans la particularité du combat : les Espagnols pratiquaient laguérilla[7]. Si les Français remportaient régulièrement des victoires contre l’armée régulière espagnole et prenaient d’assaut les villes, ils peinaient contre les petits groupes de résistants embusqués qui les harcelaient. C'est aussi à cette époque que débuta laseconde tentative d'invasion française au Portugal commandée par le maréchalSoult. Elle se traduit par un nouvel échec français (février à).
La guérilla réussit à provoquer l'enlisement du conflit. Les Français, qui avaient affaire à une hydre à mille têtes, ne manquaient pourtant pas de partisans, qu'on appelaitafrancesados. Pour beaucoup imprégnés des idées desLumières, ces derniers espéraient que l’occupation française mettrait à bas la féodalité et l’absolutisme espagnols. Cette guerre d’Espagne se doublait donc d’uneguerre civile. Des atrocités — saccages, viols, profanations, agressions sadiques — furent commises par tous les camps[8],[9].
Malgré les problèmes rencontrés en Espagne, Napoléon décide d'engager des moyens considérables pour venir à bout du Portugal (). Il confie au maréchalMasséna la conduite de latroisième invasion napoléonienne au Portugal, la coalition anglo-portugaise étant commandée parWellington. L'invasion française se heurte à unepolitique de la terre brûlée terriblement efficace et vient buter contre leslignes de Torres Vedras construites dans le plus grand secret. Après avoir chassé les Français du royaume portugais, Wellington poursuit son offensive en Espagne avec labataille de Fuentes de Oñoro () et lesiège de Ciudad Rodrigo (1812) qui permettent à Wellington d'avancer vers Madrid.
L’échec de Masséna devant Torres Vedras et les succès de Wellington ont aussi été expliqués par le manque de moyens accordés par Napoléon et la décentralisation du commandement des différentes armées françaises dans la péninsule dirigées de fait depuis Paris[10]. Selon certains, Napoléon se serait désintéressé de ce théâtre d'opérations[11]. Selon d’autres, l’Empereur y aurait consciemment cherché à immobiliser des forces britanniques, de peur qu’elles n'interviennent dans des débarquements britanniques visant à détruire les bases navales françaises en plein essor[12].
Allégorie de la constitution de 1812 par Francisco Goya.
Le, àCadix, lesCortes adoptent lapremière Constitution espagnole. La Constitution a été appeléeLa Pepa, nommée ainsi pour avoir été promulguée le jour de la Saint-Joseph (Pepe étant un surnom de Joseph en espagnol). Cette constitution n'a pas toujours été appliquée. Elle fut abrogée et rétablie deux fois. Elle a cependant eu unrayonnement assez exceptionnel[réf. nécessaire]. Elle est en partie inspirée de laConstitution française de 1791 puisqu'elle opte pour un monocaméralisme et est aussi inspirée de laDéclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Elle consacre d'importants droits de l'homme et notamment un suffrage universel masculin.
Cette Constitution a été appliquée àNaples et àTurin et a influencé la Russie, dans la mesure où cette constitution s'appliquait aussi aux colonies espagnoles d'Amérique (Indes occidentales) et d'Asie. La Constitution de Cadix a eu une influence non négligeable puisque certaines de ses dispositions se retrouvent dans la Constitution espagnole actuelle.
Le 10 décembre 1809,NapoléonIer prend le contrôle direct de laCatalogne pour établir l'ordre, en créant le gouvernement de Catalogne sous la direction dumaréchal Augereau et en faisant du catalan une langue officielle. Annexée à l'Empire français par Napoléon du 26 janvier 1812 au 10 mars 1814 et divisée enquatre départements (Bouches-de-l'Èbre (prefecture: Lleida),Montserrat (Barcelone),Sègre (Puigcerdà), etTer(Gérone)).
La domination française de la Catalogne a duré jusqu'en 1814, lorsque le général BritanniqueWellington a signé l'armistice par lequel les Français évacuaient Barcelone et les autres places fortes qu'ils avaient réussi à garder jusqu'aux derniers instants.
En quelques semaines, de mai à,Joseph et l’armée française reculèrent jusqu’aux Pyrénées.Napoléon comprit sa défaite et accepta, par letraité de Valençay, le retour de l’ancien roi d’Espagne,Ferdinand VII, dans son royaume. Au début de 1814, laCatalogne était reconquise par les Espagnols. La guerre d’Espagne se transforma alors en front méridional de lacampagne de France pour les Hispano-Britanniques, qui iront jusqu'à Bordeaux et Toulouse dans un total retournement de la situation.
Dans le domaine socio-économique, le coût de la guerre en Espagne fut une perte nette de population, entre 215 000 et 375 000 personnes, directement causée par les violences et la famine de 1812, qui s'ajoutent à la crise des maladies et des épidémies de la famine de 1808, résultant en un solde de population qui déclina de 885 000 à 560 000 personnes, ce qui a particulièrement touché la Catalogne, l'Estrémadure et l'Andalousie. Une perturbation sociale et la destruction des infrastructures de l'industrie et de l'agriculture mirent en faillite l'État. Ce fut aussi la dévastation humaine et matérielle du pays, privé de sa puissance navale et exclu des principales questions qui furent discutées lors ducongrès de Vienne, où le paysage géopolitique ultérieur de l'Europe fut bouleversé.
Outre-Atlantique, les colonies américaines en profitèrent pour se soustraire à l'Empire espagnol, après plusieursguerres d'indépendance, depuiscelle du Venezuela qui commença dès 1810 jusqu'à la fin de laguerre hispano-américaine en 1898. Sur le front politique intérieur, le conflit forgea l'identité nationale espagnole et ouvrit les portes au constitutionnalisme, initié dans les premières constitutions du pays, le statut bonapartiste de Bayonne et la Constitution de Cadix. Cependant, il ouvrit également une ère de guerres civiles entre les partisans de l'absolutisme et du libéralisme, appeléesguerres carlistes, qui allaient s'étendre au long duXIXe siècle et qui marquèrent l'évolution du pays.
19 au :bataille de Bailén (capitulation française : le généralDupont est fait prisonnier avec environ 20 000 hommes, qui finissent sur les pontons deCadix)
En2023, dansL'Infographie de l'Empire napoléonien, les historiensVincent Haegele etFrédéric Bey, donnent un bilan de 650 000 Espagnols tués, dont 250 000 militaires et 400 000 civils, soit 5,5 % de la population de 1811, dus aux combats et aux épidémies, pour l'ensemble desguerres napoléoniennes[1].
Escena de guerra (Scène de guerre), parFrancisco de Goya entre 1808 et 1812.
La France perdit près de 217 000 hommes et l'Espagne environ 390 000 dans les rangs militaires et 650 000 pour les civils[réf. nécessaire]. Les réquisitions de nourriture, la dévastation des champs et les vols firent chuter la production agricole et le commerce alimentaire, occasionnant une hausse de la malnutrition et de la mortalité dans la population espagnole.
Napoléon l’avoua à Sainte-Hélène : « cette malheureuse guerre d’Espagne a été une véritable plaie, la cause première des malheurs de la France ». On estime que le conflit retint 300 000 soldats français. L’Espagne fut un piège et un boulet pour la politique expansionniste de l’empereur. Les Espagnols gardent un fier souvenir de cette guerre. Unis malgré leur divergences, ils ont réussi à repousser l'armée française. Grande animatrice de la résistance, l’Église catholique retrouva une nouvelle vigueur. Toutefois, à la sortie de la guerre, le pays était dévasté. Il rata d’ailleurs le virage de la modernisation agricole et industrielle au xixe siècle.[réf. souhaitée]
Lescolonies d’Amérique profitèrent de la guerre pour s’émanciper de la métropole etproclamer leur indépendance.Enfin, alors que le retour de Ferdinand VII en 1813 nourrissait beaucoup d’espoirs chez ses sujets, son règne ne permit pas de résoudre la crise politique. Le front commun né de la lutte contre Napoléon se brisa. L’Espagne retrouva ses divisions entre libéraux et ultra-conservateurs. Les Espagnols, qui luttaient dans l’espoir de rétablir leur roi sur le trône, finirent par se révolter contre ce même roi en 1820.[réf. souhaitée].
↑Nicola Todorov,La Grande Armée à la conquête de l'Angleterre. Le plan secret de Napoléon, Paris, éditions Vendémiaire,, 295 p.(ISBN978-2-36358-247-8),p. 29-32.
↑« Il faut qu’un prince ami de la France règne en Espagne ; c’est l’ouvrage de Louis XIV qu‘il faut recommencer. Ce que la politique conseille, la justice l’autorise ! »
↑Mullié affirme que« cette nation fière, qui était comme assoupie depuis assez longtemps, indignée de ce que des étrangers se permettaient de régler ses destinées, de changer la dynastie de ses rois sans la consulter, oubliant l’extrême faiblesse de ses moyens, jura l’extermination de tous les Français ; toutes les classes, tous les sexes, les prêtres, les moines, les religieuses, les mendiants feront tout ce qui dépendra d’eux pour repousser les armées du conquérant usurpateur de leurs droits. Les Espagnols se battent rarement en bataille rangée, mais ils parviendront à lasser, à détruire leurs ennemis par une guerre d’embuscade, de partisans, d’assassins. Pour atteindre ce but, le poignard, le poison, tous les genres de destruction, de vengeance, leur sembleront légitimes ; le sol de la péninsule deviendra pour les Français un véritable cimetière, où ils trouveront la mort sans profit et sans gloire. »
↑« Je mettrai alors la couronne d’Espagne sur ma tête, et je saurai la faire respecter des méchants : car Dieu m’a donné la force et le caractère pour surmonter tous les obstacles. »
↑L’historien Jean-René Aymes considère d’ailleurs cette guerre d’Espagne comme la première guerre de guérilla de l’histoire. Une thèse tout à fait contestable dans la mesure où la guérilla est la conséquence logique d'une guerre asymétrique. La première guérilla recensée est celle menée par de Dictateur romain Fabius contre Hannibal, en Italie après la bataille de Cannes en 211 av. J.-C., pour éviter de l'affronter en direct. Sans porter officiellement le nom de « guérilla », le harcèlement des troupes britanniques par celles de Du Guesclin durant la guerre de Cent Ans en ont, par exemple, toutes les caractéristiques.
↑Laurence Montroussier, « Français et Britanniques dans la Péninsule, 1808-1814 : étude de mémoires français et britanniques »,Annales historiques de la Révolution française,,p. 131-145(lire en ligne).
↑Jean-Marc Lafon,Les Européens dans les guerres napoléoniennes : [actes du colloque international, Carcassonne, 4-5 juin 2010], Toulouse, Privat,, 286 p.(ISBN978-2-7089-0537-5), Des violeurs et meurtriers ordinaires ? Les officiers et soldats napoléoniens en Espagne : analyse du sac de Castro Urdiales (Cantabrie, 11 mai 1813), p. 149-168.
↑Nicola Todorov,La Grande Armée à la conquête de l'Angleterre. Le plan secret de Napoléon, Paris, Vendémiaire,, 295 p.(ISBN978-2-36358-247-8),p. 173-178.
W.F.P. Napier,Histoire de la Guerre de la Péninsule 1807-1814, Volume 1, relié, carte en couleur hors texte,Champ libre, Paris, 1983. Traduit de l'anglais par le général Mathieu Dumas.