Lagoule[1] (de l'arabeالغول,al-ghoûl ; fémininal-ghoûla ; « l'ogre ») est une créaturemonstrueuse du folklorearabe préislamique[2] qui apparaît dans les contes desMille et Une Nuits. Elle forme une classe dedjinns, comme leséfrits par exemple. Les goules changent de forme, prenant le plus souvent l'apparence d'unehyène ou celle d'une femme, mais elles sont reconnaissables à leurs pieds fourchus, seul élément constant de leur apparence[2].
Le mot « goule » vient de l'arabe « ghul », dérivé de « ghala » qui signifie « saisir »[3]. On retrouve ses homologues dans lamythologie hindoue (yogni etdakini),chaldéenne (utug etgigim, démons du désert) etslave (Baba Yaga)[4]. Le poète préislamiqueTa'abbata Charrane décrit dans l'un de ses poèmes sa rencontre et sa lutte contre une goule[2].
La goule affectionne les cimetières, où elle déterre les cadavres pour s'en nourrir. La goule hante aussi le désert sous les traits d'une jeune femme et elle dévore les voyageurs qui succombent à ses appels, non sans rappeler lessirènes du récit de l’Odyssée. Dans les pays d'Afrique du Nord, de nombreux récits terrifiants destinés aux enfants ont pour personnage principal une goule[2], qui y joue souvent un rôle équivalent à celui dugrand méchant loup.
Passage dans la mythologie et la fiction occidentale
Ce personnage a été repris dans la mythologie occidentale, avec une attraction probable du latin « gula », signifiant « gueule » et ses dérivés « goulu », « goulûment ».
Il est popularisé dans la littérature fantastique. Dans les œuvres d'Edgar Allan Poe, la goule se transforme en femme afin d'attirer ses victimes. Elle n'est cependant ni homme, ni femme, ni bête, ni humaine.
Le romancier populaire duXIXe sièclePaul Féval fait de la goule la femelle du vampire. Dans son livreLa Vampire (1856), un vampire femelle hante le Paris de 1804, où elle est mêlée au complot deGeorges Cadoudal contre lePremier Consul. Dans un épisode comique, le secrétaire général de la préfecture de la Seine étale sa science en précisant que la femelle du vampire n'est pas appelée une vampire, mais une « oupire » ou une « goule »[5]. Toujours en France, cette créature apparait en 1905 dansLes Goules, un drame en deux actes deJean Lorrain et Charles Esquier.
L'auteur de récits fantastiquesH. P. Lovecraft, probablement inspiré parE.T.A. Hoffmann et son récit « Der Vampyr »[6] (in Die Serapionsbrüder), en fait desnécrophages qu'on rencontre également dans les « contrées du Rêve ». Lejeu de rôle tiré de ses œuvres,L'Appel de Cthulhu, les montre comme capables d'absorber les souvenirs de leur « repas » et de prendre son aspect pour un temps limité. De surcroît, trop fréquenter les goules peut mener un humain à devenir goule lui-même. Un ouvrage fictif dumythe de Cthulhu tourne même autour des goules : leCulte des Goules, prétendument écrit en 1702 par le comte d'Erlette.
Les goules deviennent des morts-vivants dansThe Dead Don't Die de Jim Jarmush. Le terme est ainsi parfois utilisé pour désigner les zombies. Dans l'univers duMonde des Ténèbres, le mot caractérise les serviteurs des vampires[7].
Algol est uneétoile. L'origine de son nom est la même que celui du mot « goule ». Lesastronomes arabes ont vu que saluminosité changeait : elle diminuait, puis s'intensifiait de nouveau au bout de quelques jours. Étonnés, lessavants en ont déduit que, au centre de l'astre, se trouvait undémon. En 1783, un jeuneastronome, John Goodricke, découvrit que ces changements delumière étaient en fait le signe de la présence de 2étoiles : l'une, plus petite, passe tous les 4 jours devant la seconde, bloquant sesrayons. Quand la petite étoile part, la plus grosse redevient entièrement visible[8].
Stéphane Fantini,Loups-garous, goules et vampires : poétique de l'espace et des éléments chez trois croque-mitaines de la littérature fantastique du dix-neuvième siècle (thèse de doctorat en littérature comparée menée à l'Université Stendhal (Grenoble) sous la direction de Jacques Finné), Grenoble, Université Stendhal,(lire en ligne)
Pierre Larcher, « Ta’abbaṭa Šarran et la goule : un Persée arabe ? »,Quaderni di Studi Arabi, nuova serie 10, 2015, SupplementoLa poesia araba. Studi e prospettive di ricerca. Giornata di Studi (Napoli, 23 aprile 2015) a cura di Oriana Capezio,p. 7-20. Istituto per l’Oriente, C.A. Nallino, Roma, 2015 [année de tomaison].