La glyptique * | ||
![]() Sceau-cylindre de lapériode d'Uruk, représentant une « ronde » d'animaux mythologiques | ||
Domaine | Savoir-faire | |
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Lieu d'inventaire | Île-de-France Paris | |
*Descriptif officiel Ministère de la Culture (France) | ||
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Laglyptique (dugrec ancien γλυπτός / glyptós, « objet gravé ») est l'art de la gravure des pierres fines, comprenant la taille, et de la sculpture en creux (intaille) ou en relief (camée). Elle exprime le plus souvent des sujets tirés de la mythologie, des religions ou de thèmes culturels ou symboliques.
Ce terme est souvent employé pour désigner l'art de tailler lessceaux-cylindres enMésopotamie.
Le savoir-faire de la glyptique est reconnu en France par son inscription à l'Inventaire du patrimoine culturel immatériel[1].
La glyptique est un savoir-faire très ancien. Dessceaux cylindriques gravés datés de 5000 ans av. J-C. ont été retrouvés enbasse Mésopotamie dans la région deSumer[2]. Durant l'Antiquité, la glyptique se développe, en particulier enÉgypte, grâce aux traditionnelles amulettes gravées en pierres précieuses.
La fonction première de ces objets gravés est utilitaire (sceaux, etc.). Ils ne prennent la fonction d’œuvre d'art que beaucoup plus tard.
Après laconquête de la Grèce auIIe siècle av. J.-C., desintailles etcaméeshellénistiques arrivent à Rome et commencent à être collectionnés par de riches hellénophiles. AuIer siècle av. J.-C. apparaissent les premiers objets produits pour des Romains, sans doute ouvragés par des artistes grecs[3].
Lamaison julio-claudienne réalise de grands camées impériaux (Grand Camée de France,Gemma Augustea...) et de nombreux portraits d'une immense qualité pour développer une propagande et asseoir son hégémonie[3].
Au Ier siècle de notre ère, la production de petites intailles explose, surtout enagate, agate rubanée,améthyste,calcédoine,cornaline,cristal de roche,grenat,hématite,jaspe (rouge, jaune, sanguin...),lapis-lazuli, niccolo,onyx, plasma,prase, sardonyx. La cornaline est la plus fréquente et provenait duDeccan, ce qui explique la découverte d'intailles romaines sur la côte ouest de l'Inde (Arikamedu). Des intailles et camées en verre ont aussi été fabriqués, à moindre coût[4],[5].
Les intailles se répandent durant les premiers siècles de notre ère, souvent montées en bague, pouvant servir de matrice desceau, commeOctave-Auguste qui signe ses documents par l'anneau qu'il a hérité deCésar[6]. Objets précieux, les intailles et camées sont thésaurisés et ont pu être trouvés dans des dépôts avec desmonnaies[3]. Leur style se fait alors plus simple et les compositions moins ambitieuses (figure seule, animaux, objets ou symboles).
Du IIe au IVe siècle circulent de nombreuses intailles magico-religieuses, gravées de figures plus ou moinsgnostiques, empruntant à la religion gréco-romaine traditionnelle, à lareligion égyptienne, aux traditions juives et chrétiennes bibliques, à l'Orient, utilisées à des fins médicales ou prophylactiques[7],[8].
Les pierres sont taillées par abrasion. Une tige (ou « broche ») en fer recuit ou en cuivre use et creuse la surface par une rapide rotation entraînant une poudre abrasive (pierre deNaxos,grès voirepoudre de diamant). Le mouvement était obtenu par un archet ou unedrille à pompe. Le travail était très long et se terminait par un polissage qui faisait disparaître les traces de gravure pour un rendu plus « naturel », avec des broches douces, de plomb, d'étain, voire de buis, avec un abrasif doux. Des auteurs ont avancé une durée de 5 ans pour la réalisation du grand camée de Vienne, laGemma Augustea[3].
Des lentilles convexes en cristal de roche auraient pu être utilisées comme loupe, mais essentiellement pour contrôler le fini. Des globes de verre remplis d'eau pourraient avoir eu la même fonction[3].
Les graveurs étaient de statuts très différents : Dioskourides, qui a travaillé pour Auguste[9], ou Euodos ont pu signer leurs œuvres, ce qui est très rare dans l'Antiquité, mais Campanus, de Pompéi, était esclave[3].
Durant la période médiévale un grand nombre de camées et d’intailles de facture antique sont réutilisées dans lesArs Sacra. Dès l’époquecarolingienne des exemples apparaissent, le plus emblématique étant lastatue reliquaire de Sainte-Foy (comprenant trente-trois camées et trente-et-une intailles antiques). Une pratique étant courante par la suite et tout au long de la période. Au XIIe siècle plusieurs exemples apparaissent dans letrésor de l’abbaye de Saint-Denis[10]. À l’exemple de l’escrain de Charlemagne dont subsiste aujourd’hui le sommet figurant une intaille représentant Julia Titi enchâssée dans une monture en or de réalisation médiévale. Au XIIIe siècle le contexte des croisades ouvre la pratique de la taille sur pierre à de nouvelles perspectives. C’est en effet à cette époque que les artistes vont s’atteler à la gravure sur pierre semi-précieuse et précieuse, et ce au contact des camées et intailles antiques circulant en Europe de manière plus intensive[11]. Il s’agit d’un siècle très riche concernant l’art de la glyptique et ce dans une large partie des foyers artistiques européens. Nous retiendronsla chasse des Rois mages de la cathédrale de Cologne comme exemple emblématique. Réalisée entre 1180 et 1230 et attribuée à l’atelier deNicolas de Verdun (153x110x220cm, bois de chêne, argent, or, cuivre, émail, pierreries, Cologne, Allemagne). Puis auxXIVe et XVe siècles ce type d’objet apparaît de façon beaucoup plus importante dans les collections princières, notamment celle desDucs de Berry et d’Anjou[11].
Le Moyen Âge est également la période où lesintailles vont servir de matrice desceau. Grâce à leurs motifs gravés en creux, ces objets vont permettre d’imprimer la cire en relief. Ainsi tout au long de la période des pierres de facture antique sont réutilisées notamment comme anneau sigillaire. Elles sont appréciées en raison de la finesse de leurs tailles. À la fois pour le caractère esthétique de l’objet mais également du fait que cela rend l’empreinte de cire impossible à falsifier. C’est auxXIIe et XIVe siècles que les exemples sont le plus présents, et ce principalement dans les pratiques sigillaires de la noblesse, de la bourgeoisie marchande et des membres ecclésiastiques. Ce phénomène est visible dans toute l’Europe septentrionale et plus intensément en Normandie, en Flandres et en Grande Bretagne. Les pierres sont réutilisées comme telles en laissant intacte l’iconographie antique, ou alors sont ajoutés des détails venant compléter la gravure et ainsi transformer le motif. Il est également attesté des pierres gravées de facture médiévale utilisées comme matrice de sceau copiant les motifs antiques les plus répandus. Ainsi dans le cas de la Flandre, de nombreux exemples de ces pierres représentent des profils de têtes humaines, imitant les bustes de profils antiques.
Dans le monde musulman, lesFatimides d'Égypte entre 909 et 1171 se distinguèrent par leur maitrise de la taille ducristal de roche pour produire des objets, vases, etc. qui sont restés sans rivaux pendant de nombreux siècles. Un certain nombre de ces objets furent exportés vers les royaumes chrétiens d'Europe.
Si Venise fut le grand centre de la glyptique auXVe siècle, c’est Milan qui prit le relais auXVIe siècle avec en particulier lafamille Miseroni, jusqu’en 1633.
La guilde des orfèvres, à Milan auXVIe siècle au moins, incluait aussi les cristalliers, joailliers et médailleurs, les lapidaires (qui taillent et polissent les pierres) et les glyptoglyphes ou lithoglyphes chargés de graver les pierres fines en creux (intailles) ou en relief (camées). Certains artistes pratiquaient plusieurs de ces activités et nombre de pièces nécessitaient la collaboration de plusieurs métiers. Beaucoup de ces artistes sont également médailleurs : ils gravaient en creux des coins, poinçons, matrices pour réaliser des médailles,méreaux, jetons, et sceaux.
Leurs œuvres sont des objets d’art (vases, coupes, etc) utisant le cristal de roche, le jaspe, le lapis-lazuli et autres pierres fines, des camées et des intailles.
LesMiseroni étaient déjà des orfèvres milanais reconnus auXVe siècle. Leur atelier connut un grand essor avec Gasparo (1518-73) et son frère Girolamo (1522-1584) sans doute formés par leurs oncles, Bernardo et Andrea Longhi de Leucho, également issus d’une famille d’orfèvres. C’est Girolamo qui fit entrer à l’atelier un cristallier et joaillier, Camillo Vignoni.
Les Miseroni furent les fournisseurs, à partir de la seconde moitié duXVIe siècle, de Maximilien II de Habsbourg, de Cosme I de Médicis et de la Maison de Gonzague (Vincenzo I, Ferdinando et Guglielmo, en particulier), puis de Rodolphe II, qui fit venir un fils de Girolamo, Ottavio (1567-1624) vers 1576. Trois de ses frères le rejoignirent : Giovanni Ambrogio, Aurelio et Alessandro (1573 ? -1648) et ils furent tous les quatre anoblis en 1608. Un autel domestique en jaspe dû à Ottavio Miseroni (Prague, vers 1620) fait partie du Trésor impérial (Kaiserliche Schatzkammer, dans le palais de la Hofburg, Vienne).
À la tête de la branche praguoise de la famille succédèrent à Ottavio son fils, Dionisio/Dyonisio, puis son petit-fils, Ferdinando Eusebio (1639-1684). Avec la mort de ce dernier arriva la fin de cette grande dynastie, la branche milanaise, qui avait perdu de son lustre au début du XVIIe, ayant disparu des archives après 1633 (après l’Épidémie de peste en Italie de 1629-1631 et, d’autre part, laGuerre de Succession de Mantoue (1628-1631) avec le sac de la ville en juillet 1630).
D’autres artistes ou familles d’artistes s’illustrèrent : les Scala (Michele Scala travailla une année à Mantoue au service des Gonzague) et, vers 1670 les frères Saracchi (Giovanni, Ambrogio, Stefano et Simone), cristalliers célèbres, fournisseurs des cours européennes et en particulier de celle d’Albert II de Bavière, et qui bénéficièrent du concours d’Annibale Fontana (Milano, 1540 – Milano, 1587).
La première œuvre connue d’Annibale Fontana est un coffret en cristal de roche fabriqué pour le duc Albert V de Bavière, vers 1560-70 (Trésor du Palais de la Résidence, à Munich). Il comporte des plaquettes de cristal sur lesquelles sont gravées des scènes de l'Ancien Testament et qui sont ornées de pierres précieuses (lapis-lazuli, rubis, émeraudes), ainsi que d’émaux d'or. De la même époque datent quelques coins (pour frapper des médailles). En 1570-1572,Fontana vivait à Palerme, travaillant pour le vice-roi de Sicile, Francesco Ferdinando d'Ávalos, dont il exécuta un portrait sur une médaille commémorative. Rentré à Milan, il épousa Ippolita Saracchi, sœur des célèbres cristalliers. On lui doit notamment des pièces en cristal et pierres semi-précieuses telles le Vase en forme de poisson du Walters Art Museum (Baltimore).
D’autres artistes participèrent au rayonnement européen de la glyptique milanaise :Valerio Belli (Vicenza, 1468-Vicenza, 1546) aussi connu sous le nom deValerio Vicentino. Il réalisa dans les années 1520-1530 un coffre dit coffre Medici comportant 25 planches de cristal de roche gravées de scènes du Nouveau Testament, montées sur argent, que le pape Clément VII offrit à François Ier avec une aiguière en cristal de roche du même artiste (Tesoro dei Granduchi, Palais Pitti, Florence). D’autres œuvres se trouvent à Londres, Vienne et Paris.
Matteo del Nassaro (Verone, 1485–Paris, 1547 environ) orfèvre, musicien et sculpteur, médailleur et graveur (camées). Il fit pour Isabelle d'Este une déposition de croix sur jaspe sanguin où les taches rouges figuraient le sang. François Ier le pensionna comme artiste et musicien.
Jacopo Nizzola aussi connu sous les noms de Jacomo Trezzo ou Jacopo da Trezzo (Trezzo sull'Adda, 1515 – Madrid, 1589) médailleur, graveur (camées) et sculpteur. Il commença sa carrière à Milan au début des années 1530 ; dans les années 1550, il partit pour Madrid auprès dePhilippe II d’Espagne. Il fut envoyé en Angleterre en 1554 (mariage de Philippe II etMarie Tudor) et séjourna plusieurs fois en Flandres. En Espagne, il fut sculpteur du roi et conseiller artistique auprès de Philippe II sur le chantier de l'Escurial où il eut pour collaborateursPompeo Leoni (Milan, 1533 - Madrid, 1608 – son père était Leone Leoni, 1509-90 sculpteur, graveur, médailleur et glyptoglyphe installé à Milan) et Bautista Comane.
Nizzola laisse des médailles représentant Philippe II d’Espagne ; Jeanne d’Autriche (sa sœur) et Marie Tudor, etc). Il réalisa aussi des œuvres d’orfèvrerie et de joaillerie, et fut tailleur de coins. On lui doit encore des camées (peut-être Le camée « La Fontaine des Sciences » du Cabinet des médailles), intailles, vases à boire, sculptures.
LesSaracchi firent de courts séjours à Munich.
La collection d’art des Médicis est aujourd’hui présentée au Tesoro dei Granduchi[12] (Trésor des grands-ducs, anciennement Museo degli Argenti) à Florence. On peut y admirer les pièces suivantes :
Toujours au Palais Pitti, mais dans la Galleria Palatina :
Au Museo di storia naturale, sezione di mineralogia e litologia :
Le Musée Capodimonte de Naples abrite lacollection Farnèse. Beaucoup d’oeuvres, dont :
Le Prado possède depuis 1839 leTrésor du dauphin (es) (fils de Louis XIV) qu’a hérité Philip V en 1711. Œuvres essentiellement milanaises, en cristal de roche et différentes variétés de quartz des Miseroni, de Saracchi, Fontana et non attribuées.
Matteo del Nassaro (Vérone, en France dès 1515) : intaille représentant François Ier, 1515, calcédoine ; camée "Portrait de François Ier en buste" (agate, onyx) créé à Paris vers 1540.Ottavio Miseroni, camée « Portrait de Rodolphe II de Habsbourg », (Prague, fin 16e siècle)
Graveurs italiens (?) : camées (en sardonyx pour l’un, cristal de roche et or pour l’autre) et bracelets avec camées sur coquille de Diane de Poitiers.
Nizzola (Jacopo da Trezzo) : intaille "Philippe II d'Espagne et son fils Don Carlos", topaze et or émaillé
On y trouve notamment ce qu’il reste de la collection de Louis XIV. Cette liste est à compléter.- Denon 1er étage (Galerie d'Apollon, salle 66) : neuf œuvres des Miseroni, essentiellement d’Ottavio, en jaspe (comme la nef portant le chiffre de Rodolphe II, 1608) ou agate, or émaillé et émeraudes. S’y ajoutent une aiguière et une nef, toutes deux en cristal de roche (finXVIe siècle, atelier Miseroni de Milan). Plusieurs oeuvres des Saracchi. Beaucoup d’œuvres de Giovanni Battista METELLINO (Milan finXVIIe siècle).- Richelieu 1er étage (Salle Adolphe de Rothschild, salle 25), œuvres de Valerio Belli, Tempesta, œuvres italiennes maniéristes non attribuées); Salle 13 « Della Torre » : Valerio Belli (plaquettes de cristal de roche gravées de scènes mythologiques et historiques. Médailles avec portraits).
LeKunstkammer (Cabinet d'Art), duMusée d'histoire de l'art de Vienne regroupe des oeuvres issues des collections de Rodolphe II : 152 œuvres dues à différents membres de la famille Miseroni surtout de la branche praguoise, mais aussi venues de Milan pour certaines. S’y ajoutent quinze œuvres de Saracchi et quatre d’Annibale Fontana. De Domenico Dei Cammei (actif à partir de 1500 environ), un camée[13] enonyx représentant Ludovico Maria Sforza, 1495-97. Enfin, de Valerio Belli, une série de camées représentant des scènes de gigantomachie.
A Munich, au Trésor de laRésidence : de Fontana, pièce en cristal avec des scènes de la vie de Jason ; de Saracchi : nef sculptée (scènes bibliques et autres). De Gasparo Miseroni, une coupe en lapis-lazuli de 1566.AuLandesmuseum Württemberg de Stuttgart, conque de jade de l’atelier de Girolamo Miseroni, Milan, 1590-1600.
Une (ou plusieurs) oeuvres, semble-t-il, au Museum Schnütgen de Cologne.
Le Walters Art Museum présente des pieces dues à Annibale Fontana (Plaquette avec Hercule attaquant l’hydre de Lerne ; autre plaquette avec Hercule et Achéloüs. A Giovanni Bernardi (Bataille de Pavie, et La chute de Phaéthon, cristal de roche, commandées par le cardinal Hippolyte de Médicis, datée d’environ 1531-35 ; Le Christ présenté à Pilate, plaquette en cristal de roche destine au cardinal Alexandre Farnèse, 1547.
Série de médailles dues à Leone Leoni
Metropolitan Museum of art
Oeuvres d'Alessandro Masnago; Ottavio Miseroni; Leone Leoni et autres œuvres italiennes de la même époque (et postérieures).
EnFrance, l'un des glypticiens les plus célèbres est Jacques Guay, sculpteur favori deMadame de Pompadour[2].
Aujourd’hui en France, il n’existe plus de formation spécifique en glyptique. L’atelier de gravure sur pierres fines de l’Ecole nationale supérieure des Beaux-arts de Paris (ENSBA), qui décernait un diplôme supérieur d’art plastique dans cette discipline, a fermé ses portes en 1995. Depuis cette date, aucun enseignement national n’est dispensé[14].