Cet article traite des glossateurs médiévaux. Plus généralement, les glossateurs désignent les personnes qui font ou recueillent desgloses, tels les glossateurs bibliques.
Lesglossateurs sont des juristes du Moyen Âge dont la méthode d'enseignement consistait à analyser les textes juridiques sous la forme degloses, à l'origine interlinéaires ou marginales, élucidant le sens des mots. Certaines « gloses » s'étendirent ensuite jusqu'à devenir de véritables commentaires de passages. L'objet d'analyse était les textes dudroit romain et dudroit canon. L'École des glossateurs fut à l'origine de l'Université de Bologne.
La fondation de cette école de juristes enItalie est contemporaine de laréforme grégorienne de l'Église catholique (seconde moitié duXIe siècle). Ce mouvement conduisit les clercs à fouiller dans les bibliothèques pour en exhumer les vieux textes et à prôner le retour, en matière de droit, aux sources écrites romaines et chrétiennes (notamment contre les codes de lois germaniques comme l'Édit de Rothari enItalie). La méthode de l'analyse des textes par desgloses interlinéaires ou marginales est empruntée à l'époque à lathéologie. La démarche intellectuelle est également proche de celle de lathéologie médiévale : montrer en général que les contradictions du corpus ne sont qu'apparentes, que sur chaque point on peut harmoniser les textes (préciser lesdistinctiones entre les passages) et dégager des règles claires.
Un événement très important dans l'histoire du droit fut la redécouverte duDigeste (recueil de sentences et d'opinions de juristes romains), l'une des parties constitutives duCorpus juris civilis établi auVIe siècle à l'instigation de l'empereurJustinien. LeDigeste, cité pour la dernière fois (dans la documentation) par le papeGrégoire Ier en603, réapparaît ensuite en1076, dans un procès appelé leplaid de Marturi (actuelPoggibonsi), où officiait un juge représentant la marquiseBéatrice de Toscane, et où le juristePépon, « legis doctor », allégua une opinion d'Ulpien extraite duDigeste. Vers1085,Mathilde de Toscane sollicitaIrnerius,magister de logique et derhétorique àBologne, pour élucider et enseigner ces textes juridiques nouvellement exhumés. Ce fut historiquement la création de l'École de droit deBologne, dont le programme était l'exégèse minutieuse duCorpus juris civilis, notamment duDigeste.
L'œuvre d'Irnerius fut poursuivie par ses disciples, les « quatre docteurs » :Martinus Gosia,Bulgarus, Jacobus de Boragine et Hugo de Porta Ravennate. L'École des glossateurs deBologne atteignit son apogée dans la première moitié duXIIIe siècle, avecAzon et son discipleAccurse. Ce dernier, particulièrement, entreprit la tâche de rassembler et d'ordonner en un seul ensemble la masse énorme (environ 100 000) des annotations rédigées par ses prédécesseurs et lui-même : ce fut laGlossa ordinaria, ouGrande Glose, qui jouit pendant un siècle d'une autorité non moins importante que les textes originaux. Cependant, l'École des glossateurs avait essaimé à partir deBologne :Placentin, brillant héritier des « quatre docteurs », fonda son école àMontpellier vers1170.
Cependant l'approche des glossateurs fut renouvelée auXIIIe siècle par une école appelée les « postglossateurs » qui apparut àOrléans : ils proposaient de dépasser la méthode très « philologique » et pointilliste des maîtres bolonais pour présenter l'analyse dudroit romain de façon plus synthétique et plus adaptée aux situations concrètes du temps ; ainsi, ils se mirent à rédiger des exposés portant non plus sur des extraits des textes originaux, comme faisaient de manière très académique les glossateurs, mais sur des problèmes de droit, adoptant une approche thématique. Cette école despostglossateurs fut fondée notamment parJacques de Révigny (professeur àOrléans à partir de1263) et illustrée auXIVe siècle par l'ItalienBartole.